Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.
Par un jugement n° 2006598 du 15 février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2023, Mme A..., représentée par Me Brel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 février 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2020, par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.
Elle soutient que :
- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible d'entraîner sur sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'erreurs de fait dans la mesure où elle n'a pas vécu la majeure partie de sa vie en République centrafricaine mais au Sénégal, et que ses parents sont décédés ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale car fondée sur un refus de titre lui-même illégal ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale car fondée sur un refus de titre et une obligation de quitter le territoire français eux-mêmes illégaux ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dans la mesure où elle a passé dix-huit ans au Sénégal et ne dispose plus d'attaches en République centrafricaine.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 mars 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance en date du 27 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mai 2023.
Par une décision du 16 décembre 2022, le bureau de l'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Fougères, rapporteure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante centrafricaine entrée en France le 31 janvier 2018 à l'aide d'un visa long séjour valant titre de séjour d'un an en qualité de conjoint de Français, à l'âge de 38 ans, a présenté une demande de renouvellement de son titre de séjour à la suite de laquelle le préfet de la Haute-Garonne, par arrêté du 1er juillet 2020, a refusé de renouveler ce titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office. Par la présente requête, Mme A... relève appel du jugement du 15 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 1er juillet 2020 :
2. En premier lieu, Mme A... ne conteste pas avoir entamé une procédure de divorce après moins de deux ans de vie commune avec son conjoint de nationalité française, et ne pas disposer d'autres attaches sur le territoire français, où elle vivait depuis seulement deux ans et demi à la date de l'arrêté attaqué. Elle expose cependant qu'elle s'est montrée honnête avec les services préfectoraux sur la dégradation de ses relations avec son conjoint, qu'elle a démontré sa bonne intégration en présentant des bulletins de paie en qualité d'employée de maison portant sur la période allant du mois de septembre 2019 à juin 2020 et qu'elle serait totalement isolée en cas de retour dans son pays d'origine qu'elle avait quitté plus de dix-huit ans auparavant. Ces circonstances ne sont cependant pas suffisantes, à elles seules, pour révéler une erreur manifeste d'appréciation dans les conséquences que l'arrêté attaqué est susceptible d'entraîner sur sa situation personnelle.
3. En deuxième lieu, Mme A... fait grief à l'arrêté attaqué de mentionner qu'elle aurait vécu " la majeure partie de sa vie " en République centrafricaine et que ses parents y seraient toujours présents, alors qu'elle aurait en réalité vécu durant les années 2002 à 2017 au Sénégal et que ses parents seraient décédés. Toutefois, à supposer que ces erreurs de fait soient constituées, ce qu'aucune pièce du dossier ne vient corroborer, ces seules erreurs seraient en tout état de cause sans incidence sur la légalité de l'arrêté, fondé avant tout sur la rupture de la communauté de vie avec son conjoint et sur l'absence d'attaches en France de l'appelante.
4. En troisième lieu, l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à Mme A... n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ce refus, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée.
5. En quatrième lieu, l'illégalité des décisions refusant à Mme A... la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ces décisions, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays à destination duquel Mme A... pourra être éloigné, ne peut qu'être écartée.
6. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
7. Pour justifier qu'elle serait exposée à des risques de peines ou traitements inhumains, Mme A... se borne à énoncer des éléments généraux sur la situation en République centrafricaine et notamment sur celle d'un quartier de Bangui, en proie à la fin de l'année 2019 et jusqu'en 2021 à des heurts entre bandes armées et milices. Ces seuls éléments sont toutefois insuffisants pour démontrer qu'elle serait personnellement exposée en cas de retour, ni que l'ensemble du pays serait en proie à une situation de violence aveugle rendant impossible un tel retour. Mme A... n'allègue d'ailleurs pas avoir présenté une demande d'asile ou fait part de ses craintes lors de l'examen de son dossier par la préfecture. Dans ces conditions, c'est sans méconnaître les stipulations précitées que le préfet de la Haute-Garonne a pu fixer la République centrafricaine comme pays de renvoi.
8. En sixième et dernier lieu, si l'appelante soutient qu'elle serait isolée en République centrafricaine qu'elle avait quittée en 2002 pour le Sénégal et que ses attaches se trouvent dans ce pays, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations. En tout état de cause, la décision attaquée, qui prévoit un retour vers " le pays dont elle possède la nationalité ou tout autre pays non-membre de l'Union européenne (...) où elle est légalement admissible ", ne fait pas obstacle à un retour au Sénégal si l'intéressée y est légalement admissible.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".
11. Le présent jugement, qui rejette l'ensemble des conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A... doivent, dès lors, être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Nicolas Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024.
La rapporteure,
A. Fougères
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL00141