Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par deux requêtes enregistrées sous les n°s 2003388 et 2100821, d'une part, d'annuler la décision du 25 septembre 2020 par laquelle le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a confirmé l'interdiction prise à son encontre d'accéder au site nucléaire d'Orano situé à Bagnols-sur-Cèze et, d'autre part, de condamner l'État à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de cette décision.
Par deux autres requêtes, enregistrées sous les n°s 2100921 et 2102228, M. A... a également demandé à ce même tribunal d'annuler la décision du 18 février 2021 par laquelle le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a confirmé l'interdiction prise à son encontre d'accéder au site nucléaire d'Orano situé à Bagnols-sur-Cèze et de condamner l'État à lui verser la somme de 40 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision.
Par un jugement n°s 2003388 - 2100821 - 2100921 - 2102228 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nîmes doit être regardé comme ayant jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision précitée du 25 septembre 2020 et comme ayant rejeté le surplus des demandes de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 9 août 2022, les 17 juillet et le 4 septembre 2023, M. A..., représenté par Me Belazzoug, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du 14 juin 2022 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler les décisions du 25 septembre 2020 et du 18 février 2021 par lesquelles le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a confirmé l'interdiction prise à son encontre d'accéder au site nucléaire d'Orano situé à Bagnols-sur-Cèze, à titre principal, en se fondant sur un moyen de légalité interne et, à titre subsidiaire, en se fondant sur un moyen de légalité externe ;
3°) de condamner l'État à lui verser la somme globale de 90 000 euros, à parfaire, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité fautive de ces décisions ;
4°) d'enjoindre au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires de rétablir son autorisation d'accès au site nucléaire d'Orano situé à Bagnols-sur-Cèze dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dès la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :
- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré du défaut de motivation des décisions en litige ;
- c'est à tort que le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision du 25 septembre 2020 refusant son accès au site nucléaire sur lequel il est employé ;
- les décisions des 25 septembre 2020 et 18 février 2021 sont insuffisamment motivées ;
- elles ont été prises à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que, d'une part, il n'a pas été destinataire d'une information préalable relative à la mise en œuvre d'une enquête administrative et, d'autre part, il n'est pas démontré que l'agent ayant procédé à la consultation du traitement des antécédents judiciaires disposait d'une habilitation régulièrement délivrée ;
- elles méconnaissent les articles L. 242-1 et L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration et l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure dès lors qu'elles procèdent au retrait de son autorisation d'accès au-delà du délai de retrait de quatre mois sans caractériser la survenance d'un changement de comportement de sa part ;
- elles sont entachées d'inexactitude matérielle des faits quant à l'incompatibilité de sa présence sur un site nucléaire ;
- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation ;
- il est fondé à obtenir l'indemnisation de ses préjudices moral, réputationnel et financier et des troubles dans ses conditions d'existence en raison des illégalités fautives entachant les décisions en litige.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2023, la ministre de la transition énergétique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient, en se référant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 3 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 7 novembre 2023, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la défense ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme El Gani-Laclautre ;
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ;
- les observations de Me Lalubie, substituant Me Belazzoug, représentant M. A... et celles de M. A....
Une note en délibéré a été produite par M. A... le 27 septembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été recruté par la société Areva, devenu depuis lors Orano, sur le site nucléaire de Bagnols-sur-Cèze (Gard), par un contrat à durée déterminée, le 7 novembre 2016, puis par contrat à durée indéterminée à compter du 18 décembre 2018, en qualité de technicien de production. Par une décision du 30 juillet 2020, l'opérateur de ce site lui en a refusé l'accès permanent. Saisi d'un recours administratif préalable obligatoire contre cette décision formé le 5 août 2020, le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a, par une décision du 25 septembre 2020, confirmé l'interdiction d'accès. Par une ordonnance n° 2003373 du 8 décembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu l'exécution de cette décision du 25 septembre 2020 et enjoint au ministre de la transition écologique de procéder au réexamen de la situation de l'intéressé. Par une nouvelle décision du 18 février 2021, le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a confirmé l'interdiction d'accès au site nucléaire précité. M. A... relève appel du jugement n°s 2003388 - 2100821 - 2100921 - 2102228 du 14 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 25 septembre 2020, et a rejeté celles dirigées contre la décision du 18 février 2021 ainsi que celles tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des illégalités fautives entachant ces deux décisions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, si M. A... soutient que le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision du 18 février 2021 par laquelle le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique a confirmé l'interdiction d'accès au site nucléaire sur lequel il était employé, il ne ressort toutefois pas des pièces de la procédure suivie devant le tribunal que ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, aurait été soulevé devant les premiers juges, ce moyen n'ayant été soulevé, en première instance, qu'à l'encontre de la décision distincte du 25 septembre 2020 prise par la même autorité. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier sur ce point.
3. En second lieu, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins, conformément au principe rappelé à l'article L. 11 du code de justice administrative, exécutoires et, en vertu de l'autorité qui s'attache aux décisions de justice, obligatoires. Il en résulte que lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision administrative de refus, il incombe à l'administration, sur injonction du juge des référés ou lorsqu'elle est saisie par le demandeur en ce sens, de procéder au réexamen de la demande ayant donné lieu à ce refus. Toutefois, une décision intervenue pour l'exécution de l'ordonnance par laquelle le juge des référés d'un tribunal administratif a suspendu l'exécution d'un acte administratif revêt, par sa nature même, un caractère provisoire jusqu'à ce qu'il soit statué sur le recours en annulation présenté parallèlement à la demande en référé. Eu égard à son caractère provisoire, une telle décision peut être remise en cause par l'autorité administrative et ne saurait, ainsi, être regardée comme ayant procédé au retrait ou à l'abrogation de la décision de refus initial faisant l'objet d'une contestation au fond devant le juge de l'excès de pouvoir.
4. Au cas d'espèce, la décision du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique du 18 février 2021 n'a été prise qu'en exécution de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes n° 2003373 du 8 décembre 2020 suspendant l'exécution la décision de refus d'accès prise par la même autorité le 25 septembre 2020, au motif que le moyen tiré de son insuffisante motivation était de nature à faire naître un doute sérieux sur sa légalité, et enjoignant au ministre de la transition écologique de procéder au réexamen de la situation de M. A... jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision. Compte tenu du caractère provisoire s'attachant à la décision du 18 février 2021, elle ne saurait avoir pour effet de priver d'objet les conclusions tendant à l'annulation du refus initial d'accès du 25 septembre 2020, dont le tribunal demeurait saisi au fond et qui a produit des effets dans l'ordonnancement juridique. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la demande dont ils étaient saisis contre la décision du 25 septembre 2020 était devenue sans objet et ont constaté qu'il n'y avait plus lieu d'y statuer. Le jugement attaqué est, par suite, irrégulier en tant qu'il prononce un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision ministérielle du 25 septembre 2020 présentées dans le cadre de la demande n° 2003388. Dès lors, il doit être annulé dans cette mesure.
5. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de la demande de M. A... dirigées contre la décision du 25 septembre 2020 et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions présentées en première instance par M. A... devant le tribunal administratif de Nîmes.
Sur le cadre juridique applicable au litige :
6. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Il en va également ainsi lorsque des conclusions à fin d'injonction sont présentées à titre principal sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 911-2. De même, lorsque le requérant choisit de hiérarchiser, avant l'expiration du délai de recours, les prétentions qu'il soumet au juge de l'excès de pouvoir en fonction de la cause juridique sur laquelle reposent, à titre principal, ses conclusions à fin d'annulation, il incombe au juge de l'excès de pouvoir de statuer en respectant cette hiérarchisation, c'est-à-dire en examinant prioritairement les moyens qui se rattachent à la cause juridique correspondant à la demande principale du requérant. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée : statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale.
Sur la légalité de la décision du 25 septembre 2020 :
7. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 211-6 de ce code : " Les dispositions du présent chapitre ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret ". Enfin, l'article L. 311-5 du même code auquel renvoie le 7° de l'article L. 211-2 précise que " Ne sont pas communicables : / (...) / 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / a) Au secret des délibérations du Gouvernement et des autorités responsables relevant du pouvoir exécutif ; / b) Au secret de la défense nationale ; / c) À la conduite de la politique extérieure de la France ; / d) A la sûreté de l'État, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la sécurité des systèmes d'information des administrations ; / e) A la monnaie et au crédit public ; / f) Au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions, combinées à celles de l'article L. 1332-2-1 du code de la défense, que la décision par laquelle le ministre compétent, saisi sur le fondement de l'article R. 1332-33 du code de la défense, refuse d'autoriser l'accès à un centre nucléaire de production d'électricité, constitue un refus d'autorisation au sens du 7° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et le rejet d'un recours administratif préalable obligatoire. Par suite, sauf à ce que la communication des motifs de cette décision soit de nature à divulguer des faits couverts par un secret protégé par la loi, et notamment, à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a) au f) du 2° de l'article L. 311-5 du même code, une telle décision doit être motivée.
9. Pour édicter la décision du 25 septembre 2020 en litige, le haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique s'est borné, en se référant aux éléments transmis par le service enquêteur, en particulier sur les conclusions de l'enquête administrative diligentée par le commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (COSSEN), à relever que le comportement de M. A... est incompatible avec sa présence sur un site nucléaire et avec le travail qu'il est censé y effectuer.
10. Il ressort des pièces du dossier que l'enquête administrative précitée repose sur les mentions contenues dans le fichier relatif au traitement des antécédents judiciaires (TAJ) sur la période comprise entre 2009 et 2019 et selon lesquelles M. A... était connu pour des faits d'infraction à la législation sur les stupéfiants commis entre le 30 mai 2016 et le 21 janvier 2019, des faits de conduite de véhicule à moteur en dépit d'une suspension du permis de conduire et de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance commis le 17 mars 2016, un refus de se soumettre à un prélèvement biologique destiné à l'identification de son empreinte génétique datant 20 février 2013, des faits de violences suivies d'une incapacité supérieure à huit jours commis le 20 février 2013, des faits de violences suivies d'une incapacité supérieure à huit jours commis par une personne ayant la qualité de conjoint ou de concubin survenus le 8 février 2013, des faits de vol commis le 11 avril 2011 et, enfin, d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique et de rébellion commis le 3 septembre 2009.
11. Eu égard à la nature du fichier relatif au traitement des antécédents judiciaires et à celle des comportements reprochés à M. A..., la communication des éléments de faits sur lesquels l'autorité administrative s'est fondée pour refuser l'autorisation d'accès sur le site nucléaire de Bagnols-sur-Cèze ne saurait, contrairement à ce que soutient la ministre, être regardée comme pouvant être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions précitées du d) du 2° de l'article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration. La décision en litige devait donc être motivée en application des dispositions du 7° et 8° de l'article L. 211-2 du même code. En se bornant à indiquer que " les éléments fournis à votre égard par le service enquêteur sont incompatibles avec votre présence sur un site nucléaire et avec le travail que vous êtes censé y effectuer ", ainsi qu'il a été rappelé au point 9, le haut-fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique n'a pas suffisamment motivé la décision du 25 septembre 2020 rejetant le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... à l'encontre de la décision lui interdisant l'accès au site nucléaire qui l'emploie. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de légalité externe soulevés à son encontre, la décision du 25 septembre 2020 doit être annulée en raison de son insuffisante motivation, aucun moyen tiré de la légalité interne n'étant susceptible d'être retenu.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du 18 février 2021 :
12. Ainsi qu'il a été dit aux points 7 à 11, la décision par laquelle le ministre chargé de l'écologie, saisi d'un recours administratif préalable, refuse l'accès à un site nucléaire doit être motivée. La décision du 18 février 2021, après avoir rappelé le recours administratif préalable obligatoire exercé par M. A... à l'encontre de la décision de l'exploitant lui refusant l'accès au site nucléaire en litige, se borne à mentionner que l'intéressé a, à plusieurs reprises, " récemment entre 2016 et 2019 ", défavorablement attiré l'attention des services de police en faisant référence à l'existence de mentions contenues dans le traitement des antécédents judiciaires datées des 17 mars 2016, et du 30 mars 2016 au 21 janvier 2019, ainsi qu'à celles figurant au casier judiciaire numéro 2 de l'intéressé en date du 20 novembre 2009. La décision en litige, qui ne précise aucunement la nature de ces inscriptions et des comportements reprochés à M. A..., ne permet pas de connaître les faits permettant de considérer que ce dernier présenterait un comportement dangereux incompatible avec l'exercice de fonctions dans une installation nucléaire. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la communication des motifs de fait se rapportant au comportement de M. A... serait de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par la loi, ce qui permettrait de soustraire la décision du 18 février 2021 à l'obligation de motivation. Cette décision, qui ne comporte pas l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement est, par suite, insuffisamment motivée.
13. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin pour la cour de se prononcer sur les autres moyens de légalité externe, M. A... est seulement fondé à soutenir que la décision du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique du 18 février 2021 doit être annulée en raison de son insuffisante motivation, aucun moyen de légalité interne n'étant susceptible d'être retenu.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
14. En raison du motif qui la fonde et seul susceptible de l'être, l'annulation des décisions du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique des 25 septembre 2020 et 18 février 2021 implique seulement, en l'espèce, qu'il soit procédé au réexamen de la situation de M. A.... Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de la transition écologique de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation :
15. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'État, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.
16. Il résulte de l'instruction que les décisions des 25 septembre 2020 et 18 février 2021 refusant l'accès permanent de M. A... au site nucléaire qui l'emploie sont fondées sur l'incompatibilité de son comportement avec un accès à un point d'importance vitale. Il ne résulte pas de l'instruction que ce motif reposerait sur des faits matériellement inexacts ou serait entaché d'erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation dès lors que les faits mentionnés au point 10 commis par M. A... entre 2016 et 2019, soit les plus récents à la date de la décision attaquée, sont avérés et révèlent un comportement incompatible avec les exigences requises pour l'accès à un site sensible Les préjudices dont se prévaut l'appelant du fait de l'illégalité des décisions du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique en litige ne pouvant être regardés comme la conséquence directe du vice de forme retenu aux points 11 et 12, les conclusions à fin d'indemnisation présentées au titre de l'illégalité entachant ces décisions doivent, par suite, être rejetées.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que les décisions du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique en litige confirmant le refus d'accès permanent au site nucléaire de Bagnols-sur-Cèze doivent être annulées en raison de leur insuffisante motivation.
Sur les frais liés au litige :
18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État, partie perdante à l'instance, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE:
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 14 juin 2022 est annulé en tant qu'il a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande n° 2003388 tendant à l'annulation de la décision du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la transition écologique du 25 septembre 2020.
Article 2 : Les décisions du haut fonctionnaire de défense et de sécurité adjoint du ministère de la ministre de la transition écologique des 25 septembre 2020 et 18 février 2021 sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de la transition écologique de l'énergie, du climat et de la prévention des risques de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'État versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er octobre 2024.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
F. Faïck
Le greffier,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21781