Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la désaffectation du temple protestant Théodore Monod situé place Rigaud à Perpignan, ensemble sa décision du 7 mai 2020 rejetant leur recours gracieux.
Par un jugement n° 2002774 du 30 novembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 22MA00347 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL00347, et un mémoire enregistré le 24 novembre 2023, Mmes D..., représentées par Me Bras, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 janvier 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la désaffectation du temple protestant Théodore Monod situé place Rigaud à Perpignan, ensemble sa décision du 7 mai 2020 rejetant leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le tribunal administratif a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle et le droit au procès équitable protégé par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de faire droit, après le décès de leur premier avocat en cours d'instance, à la demande de leur nouvel avocat tendant à obtenir la communication du premier mémoire en défense de la commune de Perpignan ;
- ce jugement est également irrégulier dès lors qu'il a omis de statuer sur le moyen, contenu dans leur mémoire du 8 novembre 2021, tiré de l'irrecevabilité du mémoire en défense du préfet des Pyrénées-Orientales, signé par une autorité incompétente ;
- ce jugement est également irrégulier dès lors qu'il a rejeté comme irrecevable leur demande, pour défaut d'intérêt à agir ;
- le mémoire en défense produit par le préfet des Pyrénées-Orientales devant le tribunal administratif était irrecevable dès lors qu'il a été signé par une autorité incompétente ;
- elles avaient intérêt à agir contre l'arrêté préfectoral critiqué, qui leur fait grief ;
- cet arrêté préfectoral est privé de base légale par voie de conséquence de l'illégalité du décret n° 70-220 du 17 mars 1970 ;
- le consentement écrit de la personne ayant qualité pour représenter le culte affectataire requis par l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 est inexistant ;
- la délibération du 15 décembre 2018 par laquelle l'assemblée générale de l'Eglise protestante unie de France de Perpignan Pyrénées-Orientales a consenti à la désaffectation du temple Théodore Monod a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- le consentement de l'assemblée générale extraordinaire du 15 décembre 2018 était vicié ;
- l'arrêté préfectoral critiqué est entaché d'un détournement de procédure ;
- la désaffectation du temple Théodore Monod porte atteinte à l'ordre public dès lors qu'elle a été provoquée par la commune de Perpignan et a pour contrepartie l'allocation par la commune de Perpignan d'une somme de 150 000 euros constitutive d'une subvention contraire au principe de séparation des Eglises et de l'Etat ;
- cette désaffection porte atteinte au libre exercice du culte ;
- l'affectation au culte d'un autre édifice dont la commune de Perpignan deviendra propriétaire à l'issue d'un bail emphytéotique résulte d'une opération irrégulière.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2023, la commune de Perpignan, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'une somme de 2 500 euros soit la mise à la charge de Mmes D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de Mmes D... devant le tribunal administratif n'était pas recevable, faute d'intérêt à agir ;
- les moyens soulevés par Mmes D... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la demande de Mmes D... devant le tribunal administratif n'était pas recevable, faute d'intérêt à agir ;
- les moyens soulevés par Mmes D... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 24 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 34 ;
- le code civil ;
- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;
- la loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes ;
- le décret n° 70-220 du 17 mars 1970 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Virginie Restino,
- les conclusions de M. Clen, rapporteur public,
- les observations de Me Bras, représentant Mmes D... et celles de Me Oum, substituant Me Boissy, représentant la commune de Perpignan.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Perpignan est propriétaire d'un édifice, situé place Rigaud à Perpignan (Pyrénées-Orientales), dont une partie est occupée par le temple Théodore Monod, affecté depuis 1876 à l'exercice du culte protestant. Par un procès-verbal administratif du 7 août 1907, la commune de Perpignan a attribué la jouissance gratuite de ce temple à l'association cultuelle dite " Eglise réformée évangélique ", aux droits de laquelle vient l'association cultuelle de l'Eglise Réformée de Perpignan et des Pyrénées-Orientales, membre de l'Eglise Protestante Unie de France Communion luthérienne et réformée. Dans le cadre d'un projet de réimplantation de l'université en centre-ville, la commune de Perpignan a souhaité récupérer la jouissance de l'édifice pour le transformer en bibliothèque universitaire. Par une délibération adoptée le 1er juillet 2018 en assemblée générale extraordinaire, l'association cultuelle a donné mandat à son conseil presbytéral pour négocier avec la commune de Perpignan les conditions d'un abandon de la jouissance légale du temple Théodore Monod. Le 4 septembre 2018, le conseil municipal de Perpignan a approuvé une convention de partenariat avec l'association cultuelle prévoyant le versement au profit de cette dernière d'une aide financière de 150 000 euros afin de financer des travaux dans un temple situé avenue Robert Emmanuel Brousse à Perpignan et faisant l'objet d'un bail emphytéotique, et autorisé le maire à signer cette convention. Le 8 décembre 2018, le conseil régional de l'Eglise protestante unie en Cévennes-Languedoc-Roussillon a émis un avis favorable à la demande de désaffectation du temple Théodore Monod. Le 15 décembre 2018, l'association cultuelle s'est prononcée en faveur de la désaffectation de ce temple. Par une lettre du 17 juin 2019 adressée au préfet des Pyrénées-Orientales, le conseil presbytéral de l'association cultuelle s'est engagé à ne plus y assurer le culte à compter du 1er juillet 2019. Mmes D... relèvent appel du jugement du 30 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 janvier 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a, à la demande du maire de Perpignan, prononcé la désaffection du temple protestant Théodore Monod, ensemble la décision du 7 mai 2020 rejetant leur recours gracieux contre cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Le tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevable la demande présentée par Mmes D... au motif que leur seule qualité de membre de l'Eglise protestante unie de France de Perpignan, qui ne serait pas établie, ne saurait suffire à leur donner un intérêt à agir contre un arrêté prononçant la désaffection d'un des temples de la commune de Perpignan alors même que cette association s'est engagée à ne plus assurer le culte dans le temple Théodore Monod et a voté en faveur de sa désaffection. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les requérantes sont membres de l'association cultuelle de l'Eglise Réformée de Perpignan et des Pyrénées-Orientales, membre de l'Eglise Protestante Unie de France Communion luthérienne et réformée, et fidèles du culte célébré dans le temple Théodore Monod. Ainsi, les appelantes justifient de leur intérêt à agir contre un acte affectant la pratique de leur culte et ainsi leur intérêt moral en tant que fidèles, peu important que l'une d'elles réside à Montpellier. Dès lors, les appelantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande comme irrecevable pour défaut d'intérêt à agir. Par suite, le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2021 est entaché d'irrégularité et doit être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de son irrégularité.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mmes D... devant le tribunal administratif de Montpellier.
Sur la recevabilité du mémoire en défense produit par le préfet des Pyrénées-Orientales devant le tribunal administratif :
4. Le mémoire en défense présenté par le préfet des Pyrénées-Orientales devant le tribunal administratif de Montpellier le 13 octobre 2020 a été signé par M. Kevin Mazoyer, secrétaire général de la préfecture. M. C... disposait, par arrêté n° PREF/SCPPAT/2020237-0001 du 24 août 2020 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial de l'Etat dans le département, d'une délégation de signature du préfet des Pyrénées-Orientales pour " tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, mémoires, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département des Pyrénées-Orientales, à l'exception : / - des réquisitions de la force armée ; / - des arrêtés portant élévation de conflit ". Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'incompétence du signataire des mémoires de l'Etat devant le tribunal administratif doit être écartée.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 2 janvier 2020 prononçant la désaffection du temple Théodore Monod :
5. Aux termes de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " Les édifices servant à l'exercice public du culte, ainsi que les objets mobiliers les garnissant, seront laissés gratuitement à la disposition des établissements publics du culte, puis des associations appelées à les remplacer auxquelles les biens de ces établissements auront été attribués par application des dispositions du titre II. / La cessation de cette jouissance, et, s'il y a lieu, son transfert seront prononcés par arrêté préfectoral, sauf recours au Conseil d'Etat statuant au contentieux : / (...) / 2° Si, en dehors des cas de force majeure, le culte cesse d'être célébré pendant plus de six mois consécutifs / (...) / Dans les cinq cas ci-dessus prévus, la désaffectation des édifices cultuels communaux ainsi que des objets mobiliers les garnissant pourra être prononcée par décret en Conseil d'Etat. Toutefois cette désaffectation pourra être prononcée par arrêté préfectoral, à la demande du conseil municipal, lorsque la personne physique ou morale ayant qualité pour représenter le culte affectataire aura donné par écrit son consentement à la désaffectation (...) ", aux termes de l'article 5 de la loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes : " A défaut d'associations cultuelles, les édifices affectés à l'exercice du culte, ainsi que les meubles les garnissant, continueront, sauf désaffectation dans les cas prévus par la loi du 9 décembre 1905, à être laissés à la disposition des fidèles et des ministres du culte pour la pratique de leur religion (...) " et aux termes de l'article 1er du décret du 17 mars 1970 portant déconcentration en matière de désaffection des édifices cultuels : " Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, la désaffectation des édifices cultuels communaux (...) est prononcée par arrêté préfectoral à la demande du conseil municipal, lorsque la personne physique ou morale ayant qualité pour représenter le culte affectataire aura donné par écrit son consentement à la désaffectation ".
6. En premier lieu, les requérantes soutiennent que les dispositions susmentionnées de l'article 1er du décret du 17 mars 1970 sont illégales comme prises par une autorité incompétente dès lors qu'elles ajoutent à l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905 en fixant les conditions du consentement, alors que l'article 34 de la Constitution a confié à la loi de fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques. Toutefois, les dispositions de l'article 1er du décret du 17 mars 1970 se bornent à reprendre, s'agissant du cas de désaffectation visé au 2° de l'article 13 de la loi du 9 décembre 1905, c'est-à-dire l'absence de célébration du culte pendant plus de six mois consécutifs sauf cas de force majeure, les modalités de désaffectation prévues par le huitième alinéa de cet article 13. Par suite, le moyen doit être écarté.
7. En deuxième lieu, l'article 7 des statuts de l'association cultuelle de l'Eglise Réformée de Perpignan et des Pyrénées-Orientales membre de l'Eglise Protestante Unie de France Communion luthérienne et réformée stipule : " Le conseil presbytéral a les pouvoirs les plus étendus pour gérer les affaires de l'association et la représenter à l'égard des tiers. Il ne peut toutefois que sur un vote favorable de l'assemblée générale, et avec l'approbation préalable du conseil régional, (...) prendre toute décision : (...) de transfert administratif de la jouissance ou de l'attribution d'immeubles dont les établissements publics du culte avaient, antérieurement à la loi du 9 décembre 1905, la jouissance ou la propriété (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que, par la délibération adoptée le 15 décembre 2018 en assemblée générale extraordinaire, l'association cultuelle a voté en faveur de la désaffectation administrative du temple Théodore Monod. Préalablement, par une délibération du 8 décembre 2018, le conseil régional de l'Eglise protestante unie en Cévennes-Languedoc-Roussillon avait émis un avis favorable à la demande de désaffectation de ce temple. En outre, par une lettre du 17 juin 2019 adressée au préfet des Pyrénées-Orientales, le conseil presbytéral de l'association cultuelle, qui avait qualité pour la représenter, s'est engagé à ne plus assurer de culte dans le temple à compter du 1er juillet 2019. Ainsi, compte tenu de la délibération du 15 décembre 2018 et de l'avis du 8 décembre 2018 qui remplissent les conditions auxquelles les stipulations précitées de l'article 7 des statuts de l'association cultuelle subordonnent le pouvoir de décision du conseil presbytéral s'agissant du transfert administratif de la jouissance d'un immeuble dont l'association cultuelle avait la jouissance antérieurement à la loi du 9 décembre 1905, l'engagement écrit du conseil presbytéral de ne plus assurer le culte dans le temple Théodore Monod doit être regardé comme le consentement à la désaffectation de cet édifice. Par suite, le moyen tiré du défaut de consentement écrit à la désaffectation du temple Théodore Monod doit être écarté.
9. En troisième lieu, les requérantes soutiennent que les délibérations adoptées par l'association cultuelle en assemblée générale extraordinaire les 1er juillet 2018 et 15 décembre 2018 sont entachées de vices du consentement entraînant leur nullité, dont elles se prévalent par la voie de l'exception.
10. Aux termes de l'article 1130 du code civil : " L'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné ".
11. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'une assemblée générale extraordinaire de l'association cultuelle a été convoquée le 1er juillet 2018 afin d'évoquer la demande de la commune de Perpignan tendant à la " cession " du temple Théodore Monod par l'association cultuelle. L'ordre du jour annoncé dans la convocation de cette assemblée générale prévoyait un exposé de la demande de la commune, un dialogue avec le conseil presbytéral et un vote. Deux bulletins de vote étaient joints à la convocation : " Oui, je souhaite céder l'affectation du vieux temple Théodore Monod à la Mairie " ; " Non, je ne souhaite pas céder l'affectation du vieux temple Théodore Monod à la Mairie ". L'assemblée générale a, par 48 voix sur 67, voté en faveur d'un " mandat au conseil presbytéral pour négocier avec la municipalité de Perpignan les conditions d'un abandon de la jouissance légale du Temple communal de la place Rigaud ". Contrairement à ce qui est soutenu, l'objet du vote, à savoir la demande de désaffectation du temple Théodore Monod, était annoncé dans l'ordre du jour. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l'assemblée générale, qu'à l'issue du dialogue avec le conseil presbytéral, certains membres de l'association cultuelle ont souhaité être davantage informés sur les propositions de la commune avant de se déterminer, de sorte qu'il a finalement été proposé aux membres de l'association cultuelle de voter : " Oui pour donner mandat au CP pour négocier à la municipalité de Perpignan les conditions d'un abandon de la jouissance légale du Temple communal de la Place Rigaud / Non pour accepter de céder l'affectation du vieux Temple Théodore Monod ". La modification de la question soumise au vote s'inscrit dans les limites du droit d'amendement.
12. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que tout ou partie des 48 membres de l'association cultuelle ayant voté, comme exposé au point 11, en faveur d'un mandat donné au conseil presbytéral pour négocier avec la municipalité de Perpignan les conditions d'un abandon de la jouissance légale du temple communal de la place Rigaud, dont Mmes D... ne soutiennent pas faire partie, auraient eu une présentation inexacte de la résolution soumise à leur approbation, de sorte que leur consentement aurait été obtenu par erreur.
13. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment de la convocation à l'assemblée générale extraordinaire de l'association cultuelle du 15 décembre 2018 que cette réunion avait l'ordre du jour suivant : " Exposé des négociations suite à la demande émanant du maire de Perpignan de cession de notre vieux temple, salle Théodore Monod, place Rigaud à Perpignan. / Dialogue avec le conseil presbytéral / Questions diverses / Vote ". Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, le vote portant sur la désaffectation du temple était bien annoncé.
14. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 2018, que le consentement de tout ou partie des 56 membres de l'association cultuelle, sur un total de 93, ayant voté en faveur de la désaffectation administrative du temple, dont Mmes D... ne soutiennent pas faire partie, aurait été obtenu par erreur, dol ou violence. La circonstance que la question soumise aux électeurs portait à la fois sur la désaffectation administrative du temple et sur la signature de la convention, mentionnée au point 1, proposée par la commune de Perpignan, est sans incidence à cet égard.
15. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés, par la voie de l'exception, de la nullité des délibérations adoptées par l'association cultuelle le 1er juillet 2018 et le 15 décembre 2018 ne peuvent qu'être écartés.
16. En quatrième lieu, la circonstance que la cessation du culte dans le temple Théodore Monod à compter du 1er juillet 2019 procède d'une décision de l'association cultuelle prise après un accord avec la commune de Perpignan, et non pas de la disparition de la pratique des fidèles, n'a pas pour effet d'entacher de détournement de procédure l'arrêté par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la désaffectation de ce temple. Il en va de même de la circonstance que le maire de Perpignan lui ait adressé sa demande de désaffectation du temple le 12 décembre 2019 alors que le culte n'avait pas encore cessé depuis plus de six mois. Le moyen tiré du détournement de procédure doit donc être écarté.
17. En cinquième lieu, il n'appartient pas au préfet, lorsqu'il prononce la désaffectation d'un édifice cultuel, d'apprécier les motivations qui ont conduit l'affectataire à cesser l'exercice du culte et à consentir à la désaffectation. De même, il n'appartenait pas au préfet des Pyrénées-Orientales de vérifier la régularité des délibérations adoptées par l'association cultuelle en assemblée générale le 1er juillet 2018 et le 15 décembre 2018. Par suite, le moyen tiré de ce que la désaffectation du temple Théodore Monod a été initiée par une demande de la commune de Perpignan est et aurait eu pour contrepartie le versement d'une somme constitutive d'une subvention contraire au principe de séparation des Eglises et de l'Etat doit être écarté.
18. En sixième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la désaffectation du temple Théodore Monod porterait atteinte à la liberté de culte dès lors que le culte se poursuit dans un autre temple situé à Perpignan.
19. En septième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à l'avis du 8 décembre 2018 et à la délibération du 15 décembre 2018, que le préfet des Pyrénées-Orientales aurait commis une erreur d'appréciation en prononçant la désaffectation du temple Théodore Monod.
20. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que l'affectation au culte d'un autre édifice, situé avenue Brousse à Perpignan, dont la commune de Perpignan deviendra propriétaire à l'issue d'un bail emphytéotique résulterait d'une opération irrégulière est inopérant dans la présente instance.
21. Il résulte de ce qui précède que Mmes D... ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté du 2 janvier 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la désaffection du temple protestant Théodore Monod situé place Rigaud à Perpignan, ensemble la décision du 7 mai 2020 rejetant leur recours gracieux contre cet arrêté.
Sur les frais liés au litige :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque à verser à Mmes D... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mmes D... le versement d'une somme à la commune de Perpignan au titre de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2002774 du 30 novembre 2021 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : La demande de Mmes D... devant le tribunal administratif de Montpellier ainsi que leurs conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Perpignan présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à Mme A... D..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la commune de Perpignan.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
Mme Restino, première conseillère,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2024.
La rapporteure,
V. Restino
Le président,
A. Barthez Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22TL00347