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16/07/2024 | FRANCE | N°22TL21435

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 16 juillet 2024, 22TL21435


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Clarensac à lui verser la somme de 51 302,80 euros à parfaire, assortie des intérêts légaux à compter du 10 juillet 2020 et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis et de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2002715 du 24 avril 2

022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.



Procédure devant la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Clarensac à lui verser la somme de 51 302,80 euros à parfaire, assortie des intérêts légaux à compter du 10 juillet 2020 et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices qu'elle a subis et de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2002715 du 24 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 juin 2022, et un mémoire en réplique enregistré le 16 novembre 2023 qui n'a pas été communiqué, Mme B... A..., représentée par la Selarl Blanc-Tardivel-Bocognano, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2002715 du 24 avril 2022 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune de Clarensac à lui verser la somme de 49 944,80 euros à parfaire, assortie des intérêts légaux à compter du 10 juillet 2020 et de la capitalisation des intérêts en réparation des préjudices qu'elle a subis ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Clarensac la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de statuer sur sa demande sollicitant la réparation des préjudices relatifs à ses conditions de travail ;

- la commune n'a pas respecté le délai de prévenance d'un mois fixé par les dispositions de l'article 38-1 du décret n°88-145 du 15 février 1988 pour le renouvellement de son contrat de travail à durée déterminée, faute qui est à l'origine de troubles dans les conditions d'existence ;

- la commune a abandonné la procédure de recrutement par voie de mutation la concernant, alors qu'elle s'y était engagée auprès d'elle et de son employeur d'origine, à l'origine d'une perte de salaire et des troubles dans ses conditions d'existence ;

- la commune n'a pris aucune mesure pour faire cesser l'exclusion dont elle a été victime de la part de ses collègues de travail et dégradant ses conditions de travail, ce qui lui a un causé un préjudice moral ;

- la commune aurait dû lui verser la prime de fin d'année créé par délibération du 1er décembre 2016 au prorata de son exécution contractuelle sur 2020 dont le versement n'était pas limité à l'année 2016 ;

- elle remplissait les conditions pour bénéficier de la prime Covid instituée par une délibération du 5 octobre 2020 ;

- elle a droit à la réparation du préjudice résultant de l'absence de versement des primes complémentaires et Covid à l'issue de son contrat de travail à durée déterminée.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 avril 2023, la commune de Clarensac, représentée par la Selarl Maillot et Associés, conclut à la confirmation du jugement et, à titre subsidiaire, à la confirmation de son dispositif, au rejet de toutes les demandes formulées par Mme A... au terme de sa requête d'appel et de sa requête de première instance et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'appelante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 novembre 2023 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n°2020-473 du 25 avril 2020 ;

- le décret n°88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n°2020-570 du 14 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Soulier représentant Mme A... et celles de Me Castaglino représentant la commune de Clarensac.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., adjointe administrative principale de 2ème classe qui exerçait ses fonctions au sein de la commune de Rennes (Ille-et-Vilaine) a été placée à sa demande en disponibilité pour convenances personnelles à compter du 9 mai 2016, position renouvelée en dernier lieu par arrêté du 28 février 2019 jusqu'au 8 mai 2020. A compter du 9 décembre 2019, l'intéressée a été recrutée par la commune de Clarensac (Gard) par contrat à durée déterminée d'une durée de six mois pour assurer les fonctions d'adjointe administrative. La commune de Clarensac a proposé, le 8 juin 2022, à Mme A... le renouvellement de son contrat pour une nouvelle durée de six mois, ce que l'intéressée a refusé par lettre du 9 juin 2020. Par réclamation du 9 juillet 2020, Mme A... a demandé la réparation des préjudices qui résulteraient des fautes commises par la collectivité dans la gestion de son contrat. Par un jugement du 24 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes. Mme A... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient l'appelante, le tribunal a répondu au point 5 du jugement à sa demande sollicitant l'indemnisation du préjudice qu'elle invoquait du fait de ses conditions de travail. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer sur de telles conclusions doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article 38-1 du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Lorsqu'un agent contractuel a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être renouvelée en application des dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables, l'autorité territoriale lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : / (...) un mois avant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans ; (...) / Pour la détermination de la durée du délai de prévenance, les durées d'engagement mentionnées aux deuxième, troisième, quatrième et cinquième alinéas sont décomptées compte tenu de l'ensemble des contrats conclus avec l'agent, y compris ceux conclus avant une interruption de fonctions, sous réserve que cette interruption n'excède pas quatre mois et qu'elle ne soit pas due à une démission de l'agent. / (...) ". La méconnaissance du délai institué par ces disposition est susceptible d'engager la responsabilité de l'administration mais n'entraîne pas l'illégalité de la décision de non renouvellement du contrat.

4. La commune de Clarensac a informé Mme A..., le 8 juin 2020, dernier jour de son contrat de de travail, de son intention de renouveler son contrat à durée déterminée de 6 mois, en méconnaissance du délai de prévenance prévu par les dispositions citées au point 2. Toutefois, cette faute n'est pas à l'origine des troubles dans les conditions d'existence invoqués par l'intéressée tenant à une impossibilité de saisir le juge de la contestation du renouvellement de son contrat, dès lors que Mme A... n'a été pas été empêchée d'engager une telle procédure dans les délais de recours. Alors que la collectivité proposait de prolonger son contrat dans des conditions identiques à celui dont elle bénéficiait les six mois précédents, cette faute n'est pas non plus directement à l'origine de troubles dans les conditions d'existence liés à une proposition qui serait en contradiction avec les engagements de la commune de procéder à son intégration par voie de mutation, et n'impliquait pas que Mme A... prenne une décision hâtive sans bénéficier d'un temps suffisant de réflexion, comme elle l'indique.

5. Il résulte de l'instruction que le maire de Clarensac a formulé, lors de la procédure de recrutement initial de Mme A... au mois de novembre 2019, son intention de l'intégrer par mutation à l'issue de son contrat à durée déterminée. Cette possibilité, envisagée dans l'hypothèse où cette période s'avérerait concluante, ne peut être regardée comme un engagement pris d'y procéder. Mme A... a d'ailleurs sollicité au mois d'avril 2020, auprès des services des ressources humaines de la commune de Rennes, le renouvellement de sa disponibilité pour convenances personnelles pour une durée d'un an à compter du 9 mai 2020. De plus, si le maire de Clarensac alors en fonction a engagé, le 14 mai 2020, une démarche auprès de la commune de Rennes dans la perspective d'un éventuel recrutement de Mme A... à l'issue de son contrat, cette circonstance n'est pas non plus de nature à établir qu'un engagement ferme de recrutement par intégration ait alors été pris à l'égard de l'intéressée, alors qu'au demeurant, la nouvelle équipe municipale est entrée en fonction le 27 mai 2020. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de la commune serait engagée en raison de promesses non tenues.

6. Par délibération du 19 décembre 2019, la commune de Clarensac a instauré une prime de fin d'année au bénéfice des agents titulaires, stagiaires et contractuels de droit public de la collectivité, sur la base de 6% du traitement indiciaire majoré des points de nouvelle bonification indiciaire calculée de novembre de l'année n-1 à octobre de l'année n, au prorata des indices actualisés par agent, par rapport aux heures effectuées. Cette délibération a nécessairement abrogé et remplacé celle du 1er décembre 2016 en ce qu'elle instaurait une prime de fin d'année au personnel contractuel de la commune avec une enveloppe globale de 1 200 euros inscrite au budget de l'exercice. Mme A... a perçu une somme de 598,2 euros au titre de la prime de fin d'année prévue par la délibération du 19 décembre 2019 dont elle ne conteste pas le quantum. Par, suite, le moyen tiré de ce que la délibération du 1er décembre 2016 a créé une prime de fin d'année qui n'était pas limitée à cet exercice doit être écarté. Il résulte de ce qui précède que l'intéressée n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait droit à l'indemnisation du préjudice résultant de l'absence de versement de la prime de fin d'année instaurée en 2016.

7. Aux termes du I de l'article 11 de la loi susvisée du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020 : " Les bénéficiaires, les conditions d'attribution et de versement de la prime exceptionnelle mentionnée au présent article ainsi que son montant sont déterminés dans des conditions fixées par décret, en fonction des contraintes supportées par les agents à raison du contexte d'état d'urgence sanitaire déclaré en application du chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique ". L'article 1 du décret du 14 mai 2020 visé ci-dessus dispose que : " le présent décret détermine les conditions dans lesquelles (..) les collectivités territoriales (...), peuvent verser une prime exceptionnelle à ceux de leurs agents particulièrement mobilisés pendant l'état d'urgence sanitaire déclaré en application de l'article 4 de la du 23 mars 2020 susvisée afin de tenir compte d'un surcroît de travail significatif durant cette période ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " peuvent bénéficier de la prime exceptionnelle 1° (...), les fonctionnaires et agents contractuels de droit public de l'Etat, (...), des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et groupements d'intérêt public ". L'article 3 du même décret dispose : " sont considérés comme particulièrement mobilisés au sens de l'article 1er les personnels pour lesquels l'exercice des fonctions a, en raison des sujétions exceptionnelles auxquelles ils ont été soumis pour assurer la continuité du fonctionnement des services, conduit à un surcroît significatif de travail, en présentiel ou en télétravail ou assimilé ". L'article 4 de ce décret prévoit : " pour les agents relevant de la loi du 26 janvier 1984 (...), les modalités d'attribution de la prime exceptionnelle sont définies par délibération de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou de son établissement public dans la limite du plafond fixé à l'article 4. Les bénéficiaires de la prime, le montant alloué et les modalités de versements sont déterminés par l'autorité territoriale ". En application de ces dispositions, la commune de Clarensac a instauré par délibération du 5 octobre 2020 une prime exceptionnelle de 180 et 500 euros pour les agents mobilisés pendant la période de l'état d'urgence sanitaire, attribuée aux agents ayant été confrontés à un surcroît significatif de travail durant la période de crise sanitaire du 17 mars au 10 juillet 2020.

8. Mme A..., en arrêt maladie du 18 mars au 3 avril 2020, a bénéficié d'une autorisation spéciale d'absence du 3 avril au 28 avril 2020 et a donc été en activité du 28 avril au 8 juin 2020 sur une partie de la période couverte par la délibération précitée. S'il résulte de l'instruction et notamment des attestations du maire alors en fonction que l'intéressée a assuré une permanence en mairie avec la réalisation de missions spécifiques, parfois même en dehors de ses heures de travail, qu'elle s'est investie pour venir en aide aux élus délégués en charge de la gestion de la crise sanitaire, et qu'elle a pu prendre en charge les appels téléphoniques destinés à la mairie alors fermée, ainsi que les commandes alimentaires ou de masques pour les personnes isolées en complément des actions réalisées par les élus, il n'est pas établi qu'elle ait été soumise à des sujétions exceptionnelles pour assurer la continuité du fonctionnement des services conduisant à un surcroît significatif de travail en présentiel ou télétravail de nature à justifier qu'elle ait été particulièrement mobilisée au sens des dispositions citées au point précédent.

9. Mme A... n'apporte aucun élément de fait de nature à justifier ses affirmations selon lesquelles elle aurait été victime d'exclusion de la part de ses collègues ni ne donne aucune indication sur les propos déplacés ou inappropriés qui auraient été tenus par l'une d'elle. Si l'intéressée soutient également que son poste était occupé par cette même collègue à son retour de congé maladie le 28 avril 2020 durant la période de crise sanitaire, l'intéressée précise elle-même que le maire est intervenu le 5 mai 2020 pour rétablir la situation. Elle n'est par suite pas fondée à solliciter l'indemnisation des préjudices résultant d'une abstention fautive à faire cesser la dégradation de ses conditions de travail.

10. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Clarensac, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune de Clarensac en application de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Clarensac tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Clarensac.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

M. Teulière, premier conseiller,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

No 22TL21435


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21435
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Céline Arquié
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : MAILLOT - AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;22tl21435 ?
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