Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... et Mme C... D..., épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'avis des sommes à payer émis le 13 décembre 2019 par la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens pour un montant de 55 113,82 euros ainsi que la décision du 27 mars 2020 rejetant leur recours gracieux et de les décharger de l'obligation de payer cette somme.
Par un jugement n° 2003665 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'avis des sommes à payer émis par la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens le 13 décembre 2019 pour un montant de 55 113,82 euros ainsi que la décision du 27 mars 2020 rejetant le recours gracieux de M. et Mme A... et les a déchargés de l'obligation de payer cette somme.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 avril 2022, la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens, représentée par Me Maillot, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 24 février 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de l'avis des sommes à payer émis le 13 décembre 2019 pour un montant de 55 113,82 euros et de la décision du 27 mars 2020 rejetant leur recours gracieux et à ce qu'ils soient déchargés de l'obligation de payer cette somme ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a regardé la demande de M. et Mme A... comme étant recevable alors qu'elle était tardive ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que l'avis des sommes à payer en litige était dépourvu de base légale alors, d'une part, qu'un arrêté de péril a été édicté le 10 octobre 2014 pour prescrire, notamment, l'intervention d'un bureau d'études techniques structure chargé de vérifier la solidité et l'état du mur de soutènement dans sa totalité, d'autre part, que le rapport technique établi par les sociétés Bureau d'études techniques structures et Solea BTP, remis aux époux A..., détaille les travaux à réaliser au sein de leur propriété et, enfin, que ces derniers ont signé la convention de travaux pour compte de tiers de sorte qu'ils avaient parfaitement conscience que des travaux devaient être réalisés sur leur parcelle afin de faire cesser le péril grave et imminent ;
- à la suite de l'aggravation du péril grave et imminent affectant leur parcelle, et face à l'inaction des intéressés, elle a pu légalement faire procéder aux travaux nécessaires eu égard à l'accord donné dans le cadre de la convention de travaux pour compte de tiers ;
- les autres moyens soulevés par M. et Mme A... devant le tribunal ne sont pas fondés ; l'avis des sommes à payer en litige indique les bases de sa liquidation, il n'est entaché d'aucune erreur de fait, la créance est fondée en son principe, l'état de péril grave et imminent est établi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Dhérot, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur demande devant le tribunal est recevable dès lors qu'ils ont reçu la notification de l'avis des sommes à payer le 31 décembre 2019, que leur recours gracieux a été formé dans le délai de deux mois et que le délai de recours contentieux a été suspendu par les règles mises en œuvre dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ;
- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la somme mise à leur charge par le titre exécutoire en litige était privée de base légale en l'absence d'arrêté de péril grave et imminent prescrivant la nature et l'étendue des travaux à réaliser afin d'assurer la sécurité des personnes et des biens ;
- ils ont refusé de signer la nouvelle convention de travaux pour compte de tiers établie le 11 mars 2019 pour un montant de 55 811,33 euros et n'ont jamais donné leur accord à la réalisation de travaux pour ce montant ;
- l'arrêté de péril grave et imminent du 10 octobre 2014, qui ne peut plus faire l'objet de recours contentieux ni par voie d'action ni par voie d'exception, est illégal dès lors que le danger menaçant la sécurité publique émane d'une cause extérieure à leur immeuble, les dispositions de l'article L. 511-6 du code de la construction et de l'habitation étaient inapplicables et le maire ne pouvait agir que dans le cadre des pouvoirs de police qu'il tire des articles L. 2212-2 et L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales ;
- l'avis des sommes à payer en litige est privé de base légale dès lors qu'il n'appartient pas aux sociétés et bureaux d'études techniques mandatés par la commune de conclure à l'existence d'un péril grave et imminent sur leurs parcelles en l'absence d'arrêté du maire en ce sens ;
- il repose sur des faits matériellement inexacts dès lors qu'ils ont consenti à prendre en charge les travaux, au moyen de leur indemnité d'assurance, destinés à lever le péril et qu'il n'y a eu aucune aggravation de l'état du rempart entre les mois de janvier 2018 et janvier 2019 de nature à justifier la somme mise à leur charge sur la base de la seconde convention de travaux ;
- certains propriétaires ont été dispensés de régler les travaux concernant leurs parcelles en raison de leur indigence, ce qui caractérise une rupture d'égalité de traitement ;
- à titre subsidiaire, l'avis des sommes à payer est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne comporte pas l'indication des bases de sa liquidation ;
- la décision rejetant leur recours gracieux sera annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'avis des sommes à payer en litige.
Par une ordonnance du 7 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 mai 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme El Gani-Laclautre ;
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ;
- les observations de Me Bard, représentant la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... étaient propriétaires d'une maison d'habitation située au 1, rue du Portalet à Saint-Pons-de-Mauchiens (Hérault) sur les parcelles cadastrées ..., acquise en 2011. À la suite de fortes intempéries survenues les 29 et 30 septembre 2014, le rempart de la partie haute du village, construit sur un talus et longeant plusieurs parcelles dont certaines appartenant à la commune, menaçait de s'effondrer. Saisi par la maire de cette commune sur le fondement de l'article R. 556-1 du code de justice administrative et de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, par une ordonnance n° 1404529 du 30 septembre 2014, désigné un expert chargé d'examiner les murs de soutènement du vieux village situés sur les parcelles cadastrées section ... dont l'état est susceptible de faire courir un péril imminent. Dans son rapport remis le 4 octobre 2014, l'expert désigné par le tribunal, après avoir estimé que l'état du mur de soutènement, constitué d'un ancien rempart, présentait un péril grave et imminent pour la sécurité publique, a préconisé de revoir le système d'évacuation des eaux pluviales sur la partie haute de la parcelle cadastrée section ... afin d'éviter toute stagnation d'eau pluviale, de mandater rapidement un bureau d'études pour vérifier la solidité du mur de soutènement dans son ensemble et purger les éléments à risque et, enfin, à titre préventif, de faire réaliser un contrôle des murs de soutènement situés en partie haute de la commune.
2. Par un arrêté interministériel du 8 octobre 2014, la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens a bénéficié de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre des inondations et coulées de boues survenues les 29 et 30 septembre 2014. Par un arrêté du 10 octobre 2014, la maire de Saint-Pons-de-Mauchiens a édicté les mesures provisoires à prendre consistant, notamment, à désigner un bureau d'études techniques structures chargé de vérifier la solidité et l'état du mur de soutènement dans sa totalité. Sur la base de l'étude de sol et de l'étude structure réalisée conjointement par deux bureaux d'études techniques mandatés par la commune au mois de juillet 2016, M. et Mme A... ont accepté de signer, le 7 décembre 2018 une convention de travaux, pour compte de tiers, pour un montant de 11 865,57 euros, portant sur la réalisation de travaux de confortement du rempart sur une portion d'un 1,4 mètre linéaire le long de la parcelle cadastrée section .... Ces travaux ont été exécutés sous la maîtrise d'ouvrage de la commune. Des travaux complémentaires ayant été préconisés par la société de travaux mandatée par la commune, M. et Mme A... ont été informés, par une lettre du 11 janvier 2019 de la commune de ces nouveaux travaux chiffrés à la somme de 55 811,33 euros mais ont refusé de signer une nouvelle convention de travaux pour compte de tiers. Par un jugement du 24 février 2022, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'avis des sommes à payer émis par la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens le 13 décembre 2019 pour un montant de 55 113,82 euros ainsi que la décision du 27 mars 2020 rejetant le recours de M. et Mme A... et déchargé ces derniers de l'obligation de payer cette somme. La commune de Saint-Pons-de-Mauchiens relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
3. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". L'article R. 421-2 du même code dispose que : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet (...) ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
4. Aux termes de l'article L. 110-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sont considérées comme des demandes au sens du présent code les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées à l'administration ". L'article L. 112-3 du même code dispose que : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception (...) ". Aux termes de l'article L. 112-6 du même code : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation (...) ".
5. D'autre part, il résulte des dispositions des articles 4 et 6 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques que, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires excluant l'application d'un tel principe dans les cas particuliers qu'elles déterminent, les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant les administrations publiques sans avoir à justifier du mandat qu'ils sont réputés avoir reçu de ces derniers dès lors qu'ils déclarent agir pour leur compte. Si ces dispositions autorisent également les personnes publiques à se faire représenter par des avocats dans leurs relations avec les autres personnes publiques ou avec les personnes privées, aucune décision administrative ne saurait toutefois résulter des seules correspondances de ces derniers, en l'absence de transmission, à l'appui de ces correspondances, de la décision prise par la personne publique qu'ils représentent.
6. Il résulte de l'instruction, en particulier du justificatif émanant des services postaux, que le pli contenant l'avis des sommes à payer en litige a été présenté au domicile des intimés la première fois le 23 décembre 2019 mais n'a été retiré que le 31 décembre 2019, soit dans le délai d'instance. Il ressort également des pièces du dossier que M. et Mme A... ont, le 24 février 2020, soit dans le délai de recours contentieux de deux mois, saisi la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens d'un recours gracieux, reçu le 27 février suivant, l'exercice de ce recours étant de nature à proroger le délai de recours contentieux. Si le conseil de la commune a, par un courrier du 27 mars 2020, fait part aux époux A... du rejet de leur recours gracieux, ce courrier ne saurait être regardé comme une décision administrative et n'était accompagné d'aucune décision émanant de la commune. Par suite, le silence gardé par la commune appelante sur cette demande doit être regardé comme ayant fait naître une décision implicite de rejet, le 27 avril 2020, que les époux A... pouvaient, en principe, contester dans un délai de deux mois.
7. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens aurait transmis aux intimés un accusé de réception de leur recours gracieux reçu le 27 février 2020. Par suite, les délais de recours contre la décision implicite de rejet ne leur sont pas opposables. Dans ces conditions, la demande des époux A..., enregistrée au greffe du tribunal le 17 août 2020, n'était, en tout état de cause et indépendamment de la prorogation des délais de recours contentieux dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire lié à l'épidémie de Covid-19, pas tardive. Par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a écarté la fin de non-recevoir qu'elle avait opposée en défense.
En ce qui concerne le cadre juridique applicable au litige :
8. D'une part, l'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions à fin de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge.
9. D'autre part, lorsqu'une commune entend affirmer l'existence d'une créance à l'égard d'un tiers, il lui appartient, dans le cas d'espèce, d'émettre un titre de recettes. Le fondement de la créance ainsi constatée doit cependant se trouver dans les dispositions d'une loi, d'un règlement ou d'une décision de justice, ou dans les obligations contractuelles ou quasi-délictuelles du débiteur.
10. Enfin, aux termes de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige : " Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique, dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. Toutefois, si leur état fait courir un péril imminent, le maire ordonne préalablement les mesures provisoires indispensables pour écarter ce péril, dans les conditions prévues à l'article L. 511-3. (...) ".
11. Aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2 ".
12. Selon l'article L. 511-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. ' Le maire, à l'issue d'une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'État, met le propriétaire de l'immeuble menaçant ruine, et le cas échéant les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article L. 511-1-1, en demeure de faire dans un délai déterminé, selon le cas, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au péril ou les travaux de démolition, ainsi que, s'il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les bâtiments contigus (...). / III. ' Sur le rapport d'un homme de l'art, le maire constate la réalisation des travaux prescrits ainsi que leur date d'achèvement et prononce la mainlevée de l'arrêté de péril et, le cas échéant, de l'interdiction d'habiter et d'utiliser les lieux. (...) / IV. ' Lorsque l'arrêté de péril n'a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure le propriétaire d'y procéder dans un délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. (...) / Lorsque le bâtiment menaçant ruine est à usage principal d'habitation, le maire peut, sans attendre l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, appliquer une astreinte (...) / V. ' À défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, le maire, par décision motivée, fait procéder d'office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande. (...) / Lorsque la commune se substitue au propriétaire défaillant et fait usage des pouvoirs d'exécution d'office qui lui sont reconnus, elle agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais ".
13. Aux termes de l'article L. 511-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les frais de toute nature, avancés par la commune lorsqu'elle s'est substituée aux propriétaires ou copropriétaires défaillants, en application des dispositions des articles L. 511-2 et L. 511-3, sont recouvrés comme en matière de contributions directes. (...) ". Aux termes de l'article R. 511-5 de ce code , dans sa rédaction applicable au litige : " La créance de la commune sur les propriétaires ou exploitants née de l'exécution d'office des travaux prescrits en application des articles L. 511-2 et L. 511-3 comprend le coût de l'ensemble des mesures que cette exécution a rendu nécessaires, notamment celui des travaux destinés à assurer la sécurité de l'ouvrage ou celle des bâtiments mitoyens, les frais exposés par la commune agissant en qualité de maître d'ouvrage public et, le cas échéant, la rémunération de l'expert nommé par le juge administratif ".
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal :
14. Pour annuler l'avis des sommes à payer en litige et la décision rejetant le recours gracieux des époux A..., le tribunal s'est fondé sur la circonstance que la créance mise à leur charge était dépourvue de base légale.
15. En premier lieu, il est constant que la maire de Saint-Pons-de-Mauchiens a, par un arrêté du 10 octobre 2014 intitulé " arrêté de péril grave et imminent - prescription de mesures provisoires " et mentionnant en son article 1er que " ceci constitue uniquement les mesures provisoires à prendre ", prescrit des mesures provisoires consistant à faire intervenir un bureau d'études techniques structures chargé de vérifier la solidité et l'état du mur de soutènement dans sa totalité (parties hautes et parties basses) et à interdire aux occupants de se rendre dans les courettes situées à l'arrière des maisons implantées en partie basse du rempart. Il est également constant que, par la suite, cette commune a conclu avec les intimés, le 25 octobre 2018, un contrat intitulé " convention de travaux pour compte de tiers ", aux termes duquel les époux A... se sont engagés à prendre en charge une somme de 11 865,57 euros toutes taxes comprises portant sur des travaux de confortement du talus sur 1,4 mètre linéaire, cette somme correspondant, dans les faits, à l'indemnité d'assurance servie par leur assureur. Par cette même convention, les parties ont convenu que toute modification de la convention donnera lieu à la conclusion d'avenants.
16. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction qu'à la suite de ce premier arrêté du 10 octobre 2014 prescrivant des mesures provisoires sur le fondement des dispositions alors en vigueur de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, la maire de la commune appelante aurait poursuivi la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2 du même code en prescrivant des travaux destinés à mettre durablement fin au péril grave et imminent menaçant l'immeuble de M. et Mme A.... Sur ce point, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux réalisés par la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens fondant l'avis des sommes à payer en litige étaient au nombre de ceux prévus par l'arrêté prescrivant des mesures provisoires du 10 octobre 2014, ce dernier prévoyant seulement la réalisation d'une étude de structure ni qu'ils correspondraient aux travaux pour lesquels M. et Mme A... ont conclu une convention de travaux pour compte de tiers.
17. À l'inverse, il résulte de l'instruction, en particulier des mentions portées sur l'avis des sommes à payer, du courrier de la commune du 11 janvier 2019 et de l'ordre de service produit devant le tribunal, que les travaux en litige ont le caractère de travaux supplémentaires commandés par la commune, agissant en qualité de maître d'ouvrage, dans le cadre d'un marché public de travaux conclu avec la société Cofex Méditerranée, dans le cadre d'un ordre de service n° 3 signé par la maire le 4 mars 2019, prescrivant la réfection complémentaire de six mètres linéaires de mur de soutènement longeant la parcelle cadastrée section B n° 334 soit, à une date antérieure au projet de seconde convention proposé par la commune daté du 11 mars 2019. Ces travaux, diligentés à l'initiative de la seule commune, ne trouvent leur origine ni dans l'arrêté du 10 octobre 2014 précité, prescrivant de simples mesures provisoires, ni dans un arrêté de péril grave et imminent prescrivant des mesures propres à lever durablement le péril ni dans les obligations contractuelles liant M. et Mme A... à la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens. Sur ce point, ces nouveaux travaux n'étaient pas prévus par la première convention de travaux pour compte de tiers conclue entre les parties le 25 octobre 2018 et les époux A... ont expressément refusé de signer la seconde convention de travaux pour compte de tiers portant sur la réfection de six mètres linéaires de rempart pour un montant de 55 811,33 euros toutes taxes comprises. Par suite, la créance mise à la charge des intimés ne trouve son fondement ni dans les dispositions d'une loi, d'un règlement ou d'une décision de justice, ni dans les obligations contractuelles ou quasi-délictuelles des débiteurs et se trouve alors, dépourvue de fondement juridique ainsi que l'a jugé le tribunal.
18. Au demeurant, il résulte de l'instruction que le péril grave et imminent dont se prévaut la commune ne trouve pas sa cause dans l'état intrinsèque de l'immeuble des époux A... mais provient de la dégradation, à la suite d'un épisode cévenol survenu les 29 et 30 septembre 2014, ayant donné à la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, d'un rempart construit sur un talus surplombant leur propriété menaçant de s'effondrer sur les parcelles situées en contrebas. Il ne résulte pas de l'instruction, en particulier du titre de propriété des intimés, que ces derniers seraient propriétaires de ce rempart construit sur un talus dont la fonction consiste, au moins pour partie, à soutenir le tréfonds des parcelles situés à l'aplomb. Par suite, à supposer que l'avis des sommes en litige soit fondé sur des travaux réalisés aux frais de la commune sur le fondement d'un arrêté prescrivant des mesures provisoires suivi d'un arrêté de péril grave et imminent prescrivant des mesures durables dûment édicté sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 511-2 ou L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, la maire de Saint-Pons-de-Mauchiens ne pouvait légalement faire usage des pouvoirs qu'elle tire des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du même code pour mettre à leur charge les frais liés aux mesures provisoires ou aux travaux indispensables à la levée du péril grave et imminent.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'avis des sommes à payer émis le 13 décembre 2019 pour un montant de 55 113,82 euros ainsi que la décision du 27 mars 2020 rejetant le recours gracieux de M. et Mme A... et les a déchargés de l'obligation de payer cette somme.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE:
Article 1 : La requête de la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens est rejetée.
Article 2 : La commune de Saint-Pons-de-Mauchiens versera à M. et à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme C... A... et à la commune de Saint-Pons-de-Mauchiens.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juin 2024.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL21025