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30/05/2024 | FRANCE | N°22TL22430

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 30 mai 2024, 22TL22430


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée à associé unique Envol Développement Urbain a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 mai 2020 par lequel le maire de Palavas-les-Flots a refusé de lui délivrer un permis de construire huit logements collectifs sur un terrain situé 71 avenue de l'Etang du Grec ainsi que la décision du 25 septembre 2020 rejetant son recours gracieux.

Cette même société a également demandé au tribunal administratif

de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2020 par lequel le maire de Palavas-les-Flo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée à associé unique Envol Développement Urbain a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 mai 2020 par lequel le maire de Palavas-les-Flots a refusé de lui délivrer un permis de construire huit logements collectifs sur un terrain situé 71 avenue de l'Etang du Grec ainsi que la décision du 25 septembre 2020 rejetant son recours gracieux.

Cette même société a également demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2020 par lequel le maire de Palavas-les-Flots a refusé de lui délivrer un permis de construire pour un projet de huit logements collectifs sur le même terrain.

Par un jugement nos 2005397, 21000527 du 6 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé l'annulation de l'arrêté portant refus de permis de construire du 10 décembre 2020 et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédures devant la cour :

I. Sous le n° 22TL22430, par une requête enregistrée le 1er décembre 2022, la commune de Palavas-les-Flots représentée par la SELARL AMMA Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2022 en tant seulement qu'il a annulé l'arrêté du maire de Palavas-les-Flots du 10 décembre 2020 ;

2°) de mettre à la charge de société Envol Développement Urbain la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet de la société Envol Développement Urbain refusé par l'arrêté municipal du 10 décembre 2020 ne respecte pas les dispositions de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que le projet doit s'implanter sur une parcelle enclavée et dotée d'une voie sans issue ;

- alors que le motif du refus de l'arrêté annulé ne fait pas mention des dispositions relatives aux pistes cyclables, la voie d'une largeur de 3,57 mètres sur une longueur de 50 mètres ne permet pas le croisement de plusieurs véhicules ;

- la création d'un parc de stationnement attenant à l'immeuble projeté va contribuer à densifier le passage en accentuant le risque de gêne à la circulation ;

- l'accès au projet se trouve à l'extérieur d'un virage avec peu de visibilité ;

- la voie en impasse ne présente pas les garanties suffisantes pour assurer la sécurité des piétons et des automobilistes présents sur l'avenue de l'Etang du Grec ;

- le projet en litige porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants et méconnaît les dispositions de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme ainsi que l'a estimé la commission d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2023, la société Envol Développement Urbain, représentée par Me Bonnet, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune de Palavas-les-Flots la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet refusé à tort par l'arrêté du 10 décembre 2020 ne méconnaît pas les exigences posées par l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne porte pas atteinte à l'intérêt et au caractère des lieux environnants et ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 11 du même règlement.

II. Sous le n° 22TL22454, par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 décembre 2022 et le 14 avril 2023, la société Envol Développement Urbain, représentée par Me Bonnet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2022 en tant seulement qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer le permis de construire sollicité après avoir annulé le refus de permis de construire du 10 décembre 2020 ;

2°) d'enjoindre au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Palavas-les-Flots la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

- c'est à bon droit que le tribunal a censuré chacun des motifs de refus de permis de construire opposé par le maire de Palavas-les-Flots par son arrêté du 10 décembre 2020 ;

- alors qu'aucun changement de circonstances de fait ou de droit ne faisait obstacle à la délivrance du permis de construire, le jugement se trouve entaché de contradiction dans les motifs en refusant d'enjoindre au maire de délivrer le permis de construire sollicité après avoir censuré les motifs de refus opposé à la demande ;

- en ne précisant pas quelles sont les raisons pouvant faire obstacle à la délivrance du permis de construire, le jugement n'est pas suffisamment motivé ;

- le motif qui a pu justifier le rejet de la demande d'injonction n'a nullement été débattu devant le tribunal en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- l'annulation du refus de permis de construire du 10 décembre 2020 implique nécessairement qu'il soit enjoint au maire de délivrer le permis sollicité sur le fondement des dispositions applicable à la date du refus illégalement opposé.

- en outre, la modification n° 2 du plan local d'urbanisme de la commune de Palavas-les-Flots ne constitue pas une circonstance de droit nouvelle pouvant faire obstacle à la délivrance du permis de construire dès lors que seules sont concernées les dispositions en vigueur à la date de la décision attaquée ; cette modification est postérieure au jugement attaqué et ne concerne pas le secteur UDe dans lequel se situe le terrain d'assiette du projet.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2023, la commune de Palavas-les-Flots, représentée par la SELARL AMMA Avocats, conclut au rejet de la requête, à l'annulation du jugement du 6 octobre 2022 en tant qu'il annule le refus de permis de construire du 10 décembre 2020 et à ce que soit mise à la charge de la société Envol Développement Promotion une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le projet de la société pétitionnaire refusé par l'arrêté du 10 décembre 2020 ne respecte ni l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme ni l'article UD 11 du même règlement ;

- c'est à tort que les premiers juges ont prononcé l'annulation de ce refus de permis de construire ;

- les circonstances de droit et de fait à la date du jugement faisaient en tout état de cause obstacle à la délivrance du permis de construire sollicité en raison de la 2ème modification du plan local d'urbanisme prescrite par un arrêté du 1er juin 2022, laquelle modification concerne notamment la zone dans laquelle se situe le projet en litige ;

- la commune ayant fait appel du jugement prononçant l'annulation du refus de permis de construire du 10 décembre 2020, l'illégalité de ce refus fait obstacle à ce qu'il soit enjoint au maire de délivrer le permis de construire sollicité.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chabert, président,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Moufadil, représentant la commune de Palavas-les-Flots,

- et les observations de Me Bonnet, représentant la société Envol Développement Urbain.

Considérant ce qui suit :

1. La société Envol Développement Urbain a déposé le 4 octobre 2019 une première demande de permis de construire auprès des services de la commune de Palavas-les-Flots (Hérault) pour la réalisation d'un immeuble collectif de huit logements sur un terrain situé 71 avenue de l'Etang du Grec. Par un arrêté n° PC 034 192 19 A0021 du 29 mai 2020, un refus a été opposé à cette demande. La société pétitionnaire a ensuite déposé une seconde demande le 27 juillet 2020 pour un projet similaire mais modifié afin de tenir compte des motifs du refus initialement opposé. Par un arrêté n° PC 034 192 19 A0013 du 10 décembre 2020, le maire a refusé à nouveau de délivrer le permis sollicité. Saisi par la société Envol Développement Urbain de deux demandes tendant à l'annulation des refus de permis de construire qui lui ont été opposés, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir joint les deux demandes, a rejeté les conclusions à fin d'annulation du refus opposé le 29 mai 2020 mais a annulé le second refus de permis de construire du 10 décembre 2020. Par la requête n° 22TL22430, la commune de Palavas-les-Flots relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé le refus de permis de construire du 10 décembre 2020. Par la requête n° 22TL22454, la société Envol Développement Urbain relève appel de ce jugement en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer le permis de construire sollicité le 27 juillet 2020. Ces deux requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur l'appel de la commune de Palavas-les-Flots enregistré sous le n° 22TL22430 :

En ce qui concerne les motifs d'annulation retenus par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptible de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". Il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur les différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges en application de ces dispositions, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui.

3. Pour annuler le refus de permis de construire opposé le 10 décembre 2020 à la seconde demande déposée par la société Envol Développement Urbain, le tribunal administratif de Montpellier a relevé que le projet ne méconnaissait ni l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Palavas-les-Flots relatif aux accès ni l'article UD 11 du même règlement s'agissant de l'insertion du projet dans les lieux avoisinants.

4. En premier lieu, aux termes de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Palavas-les-Flots, applicable à la zone UD dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet en litige : " I - Accès : / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur une ou plusieurs de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque pour la circulation, peut être interdit. / Aucune opération ne peut prendre accès sur les pistes cyclables, la servitude de passage le long du littoral, et sur la voie de liaison PALAVAS - CARNON (RD 62 e2). / Les accès doivent permettre de satisfaire aux règles minimales de desserte : défense contre l'incendie, protection civile, brancardage, etc... / Ils doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique et à garantir un bon état de visibilité. Toute opération doit prendre le minimum d'accès sur les voies publiques. (...) / II - Voirie : Les voies en impasse ne doivent pas desservir plus de cinquante logements et leur longueur peut être limitée pour des raisons de sécurité. Elles doivent être aménagées dans leur partie terminale afin de permettre aux véhicules privés et ceux des services publics (lutte contre l'incendie, enlèvement des ordures ménagères) de faire demi tour aisément et être conçues de manière à désenclaver éventuellement les parcelles arrières. ".

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée BL n° 352 formant le terrain d'assiette du projet se situe en façade de l'avenue de l'Etang du Grec et ne saurait, contrairement à ce que soutient en appel la commune de Palavas-les-Flots, être regardée comme une parcelle enclavée dotée d'une voie sans issue. S'il est vrai que cette parcelle supporte déjà une construction implantée à proximité de l'alignement, le projet d'immeuble collectif est prévu en fond de parcelle et bénéficie d'un accès direct à partir de l'avenue de l'Etang du Grec en empruntant un passage entre la construction existante et la limite séparative. Il ressort également des pièces du dossier que le profil en courbe de cette avenue en approche de cet accès n'est pas de nature à gêner la visibilité tant des usagers de cette voie que des futurs occupants du projet souhaitant s'engager sur ladite voie depuis le passage évoqué précédemment. Alors que la vitesse de circulation est limitée dans cette portion de voie à 30 kilomètres/heure et qu'il existe des dispositifs de ralentissement des véhicules ainsi que des passages protégés pour la traversée des piétons, les caractéristiques de l'accès au projet en litige depuis l'avenue de l'Etang du Grec ne sont pas de nature, compte tenu de la nature et de l'importance limitée de ce projet, à apporter une gêne à la circulation publique pouvant justifier un refus de permis de construire. D'autre part, les dispositions précitées de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme relatives aux caractéristiques de la voirie ne sont pas applicables au passage aménagé sur la parcelle du projet en litige. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que passage présente une largeur d'environ 3,50 mètres sur une longueur d'environ 20 mètres et permettra aux véhicules d'entrer et de sortir du terrain d'assiette en disposant d'une bonne visibilité du trafic sur l'avenue de l'Etang du Grec. Dans ces conditions, le maire de Palavas-les-Flots ne pouvait légalement se fonder sur la méconnaissance par le projet de la société Envol Développement Urbain des dispositions précitées de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme.

6. En second lieu, aux termes de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " L'autorisation d'utilisation du sol peut être refusée ou n'être accordée que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou l'ouvrage à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ".

7. La commune de Palavas-les-Flots soutient en appel que le projet de construire un immeuble collectif de huit logements en R+3 dans ce secteur de la commune porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants caractérisés par des immeubles principalement en R+1 qui seront seuls en covisibilité avec le projet en litige. Toutefois, la commune appelante ne critique pas utilement la réponse apportée sur ce point par les premiers juges qui ont conclu à l'illégalité du motif opposé par le maire fondé sur la méconnaissance par le projet de l'article UD 11 précité. Par suite, il y a lieu, par adoptions des motifs retenus aux points 13 et 14 du jugement attaqué, de considérer que le maire de Palavas-les-Flots ne pouvait légalement fonder le refus de permis de construire sur la méconnaissance de ces dispositions.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Palavas-les-Flots n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 10 décembre 2020 par lequel son maire a refusé de délivrer un permis de construire à la société Envol Développement Urbain.

Sur l'appel de la société Envol Développement Urbain enregistré sous le n° 22TL22454 :

9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut prescrire d'office cette mesure. ". Lorsque l'exécution d'un jugement ou d'un arrêt implique normalement, eu égard aux motifs de ce jugement ou de cet arrêt, une mesure dans un sens déterminé, il appartient au juge administratif, saisi de conclusions sur le fondement des dispositions précitées, de statuer sur ces conclusions en tenant compte, le cas échéant après une mesure d'instruction, de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision. Si, au vu de cette situation de droit et de fait, il apparaît toujours que l'exécution du jugement ou de l'arrêt implique nécessairement une mesure d'exécution, il incombe au juge de la prescrire à l'autorité compétente.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol ou l'opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation ou la déclaration confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire. ". Lorsqu'une juridiction, à la suite de l'annulation d'un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol, fait droit à des conclusions aux fins d'injonction sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, ces conclusions du requérant doivent être regardées comme confirmant sa demande initiale. Par suite, la condition posée par l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme imposant que la demande ou la déclaration soit confirmée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire doit être regardée comme remplie lorsque la juridiction enjoint à l'autorité administrative de délivrer l'autorisation d'urbanisme sollicitée.

11. Enfin, en troisième lieu, aux termes l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. (...) ". Aux termes de l'article L. 424-3 du même code : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ". Par ailleurs, aux termes de l'article de l'article L. 600-4-1 de ce code : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ".

12. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme visent à imposer à l'autorité compétente de faire connaitre tous les motifs susceptibles de fonder le rejet de la demande d'autorisation d'urbanisme ou de l'opposition à la déclaration préalable. Combinées avec les dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, elles mettent le juge administratif en mesure de se prononcer sur tous les motifs susceptibles de fonder une telle décision.

13. Il résulte de ce qui précède que, lorsque le juge annule un refus d'autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l'ensemble des motifs que l'autorité compétente a énoncé dans sa décision conformément aux prescriptions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu'elle a pu invoquer en cours d'instance, il doit, s'il est saisi de conclusions à fin d'injonction, ordonner à l'autorité compétente de délivrer l'autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction soit que les dispositions en vigueur à la date de la décision annulée, qui eu égard aux dispositions de l'article L. 600-2 citées au point 10 demeurent applicables à la demande, interdisent de l'accueillir pour un motif que l'administration n'a pas relevé, ou que, par suite d'un changement de circonstances, la situation de fait existant à la date du jugement y fait obstacle. L'autorisation d'occuper ou utiliser le sol délivrée dans ces conditions peut être contestée par les tiers sans qu'ils puissent se voir opposer les termes du jugement ou de l'arrêt.

14. Il résulte de l'instruction que les motifs sur lesquels le maire de Palavas-les-Flots s'est fondé pour refuser de délivrer le permis de construire sollicité par la société Envol Développement Urbain dans sa demande enregistrée sous le n° PC 034 192 19 A0013, tirés de la méconnaissance par le projet en litige des dispositions des articles UD 3 et UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, ont été censurés par les motifs exposés aux points 9 à 14 du jugement attaqué. Les premiers juges, qui n'étaient saisis d'aucune demande de substitution de motifs de la part de la commune, ont également indiqué au point 15 qu'en application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'était susceptible d'entraîner l'annulation du refus de permis de construire opposé le 10 décembre 2020 par le maire de Palavas-les-Flots.

15. Il résulte également de l'instruction que la société Envol Développement Urbain a présenté devant le tribunal administratif des conclusions accessoires à fin d'injonction sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de délivrer, dans un délai de deux mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, le permis de construire sollicité dans la demande enregistrée sous le n° PC 034 192 19 A0013. La société pétitionnaire pouvant ainsi solliciter le bénéfice des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme et voir ainsi sa demande être instruite sur le fondement des dispositions d'urbanisme applicables à la date du 10 décembre 2020, la commune de Palavas-les-Flots ne peut utilement soutenir que la modification n° 2 de son plan local d'urbanisme prescrite par arrêté municipal du 1er juin 2022 et approuvé par délibération du conseil municipal du 23 novembre 2022 faisait obstacle à la délivrance du permis de construire sollicité. Par ailleurs, contrairement à qu'ont estimé les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement de circonstances de fait ou de droit aurait fait obstacle à ce que le permis sollicité par la société appelante lui soit délivré. Dans ces conditions, en refusant d'accueillir les conclusions à fin d'injonction de la société Envol Développement Urbain, les premiers juges ont fait une inexacte application des dispositions et principes rappelés aux points 9 à 13 du présent arrêt.

16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement et sur les autres moyens de la requête d'appel, que la société Envol Développement Urbain est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer le permis de construire sollicité.

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par la société Envol Développement Urbain :

17. Compte tenu des motifs exposés ci-dessus, alors que le présent arrêt rejette l'appel formé par la commune de Palavas-les-Flots contre le jugement ayant annulé le refus de permis de construire du 10 décembre 2020, cet arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au maire de Palavas-les-Flots de délivrer le permis de construire sollicité par la société Envol Développement Urbain dans sa demande n° n° PC 034 192 19 A0013 dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette mesure d'injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés aux litiges :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Envol Développement Urbain, qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par la commune de Palavas-les-Flots et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Palavas-les-Flots une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Envol Développement Urbain et non compris dans les dépens sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 octobre 2022 est annulé en tant seulement qu'il a rejeté les conclusions à fin d'injonction présentées par la société Envol Développement Urbain tendant à ce qu'il soit ordonné au maire de Palavas-les-Flots de lui délivrer dans un délai de trois mois le permis de construire sollicité dans sa demande enregistrée sous le n° n° PC 034 192 19 A0013.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Palavas-les-Flots de délivrer le permis de construire sollicité par la société Envol Développement Urbain dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : La requête n° 22TL22430 de la commune de Palavas-les-Flots et les conclusions de la commune de Palavas-les-Flots présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'instance n° 22TL22454 sont rejetées.

Article 4 : La commune de Palavas-les-Flots versera à la société Envol Développement Urbain une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par la société Envol Développement Urbain dans les instances nos 22TL222430 et 22TL22454 est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Palavas-les-Flots et à la société par actions simplifiée à associé unique Envol Développement Urbain.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2024, où siégeaient :

- M. Chabert, président de chambre,

- M. Haïli, président assesseur,

- M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

Le président assesseur,

X. Haïli La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

Nos 22TL22430, 22TL22454


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22430
Date de la décision : 30/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Denis Chabert
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : MARC

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-05-30;22tl22430 ?
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