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30/05/2024 | FRANCE | N°22TL20846

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 30 mai 2024, 22TL20846


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2019 par lequel le maire de Valréas a délivré un permis de construire modificatif à la société civile immobilière Fanfinette pour la réalisation de travaux sur la parcelle cadastrée section AW n° 151, ainsi que la décision implicite par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux formé le 18 novembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.



Par un

jugement n° 2000982 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. C... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2019 par lequel le maire de Valréas a délivré un permis de construire modificatif à la société civile immobilière Fanfinette pour la réalisation de travaux sur la parcelle cadastrée section AW n° 151, ainsi que la décision implicite par laquelle la même autorité a rejeté son recours gracieux formé le 18 novembre 2019 à l'encontre de cet arrêté.

Par un jugement n° 2000982 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. C... et a mis à sa charge le versement d'une somme de 600 euros à la commune de Valréas et d'une somme du même montant à la société civile immobilière Fanfinette au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 mars 2022 sous le n° 22MA00836 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 22TL20846 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire en réplique enregistré le 28 novembre 2023, M. B... C..., représenté par la SELARL Cabinet Champauzac, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Valréas du 20 septembre 2019 ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux présenté contre cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Valréas et de la société Fanfinette une somme globale de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt suffisant pour contester le permis modificatif en litige et il a procédé aux formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- le permis modificatif en litige est entaché d'incompétence dès lors qu'il a été signé pour le maire au nom de la commune alors qu'il devait l'être au nom de l'Etat ;

- le dossier de demande de permis modificatif était insuffisant s'agissant, d'une part, des matériaux et des couleurs du mur de clôture et de la haie vive prévus en limite nord et, d'autre part, de la hauteur de la surélévation du bâtiment par rapport au terrain naturel ;

- le permis modificatif est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dès lors que le mur de clôture de 2 mètres prévu en limite nord est de nature à provoquer des risques d'inondation et d'effondrement.

Par des mémoires en défense enregistrés le 11 mai 2022, le 10 novembre 2023 et le 4 décembre 2023, la société civile immobilière Fanfinette, représentée par Me Héquet, conclut au rejet de la requête à titre principal, à l'application des dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme à titre subsidiaire et à ce soit mise à la charge de M. C... la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le requérant ne justifie pas d'un intérêt suffisant pour agir contre l'arrêté en litige et n'a pas procédé aux formalités prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée le 11 avril 2022 à la commune de Valréas, laquelle n'a produit aucun mémoire en défense.

Par une ordonnance du 29 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique ;

- les observations de Me Brahimi, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière Fanfinette est propriétaire d'une parcelle cadastrée section AW n° 151, située n° 57 chemin de Fanfinette, sur le territoire de la commune de Valréas (Vaucluse). Elle a présenté, le 4 août 2017, une demande de permis de construire en vue de la réalisation d'une maison individuelle avec garage, piscine et pool-house sur cette parcelle. Par un arrêté du 29 novembre 2017, le maire de Valréas lui a accordé ce permis de construire. La société pétitionnaire a déposé le 18 juin 2019 une demande de permis de construire modificatif portant notamment sur la surélévation du bâti, la réalisation d'une cave et la modification de plusieurs ouvertures et du type de menuiseries. Par un arrêté du 20 septembre 2019, le maire de Valréas lui a délivré ce permis de construire modificatif. M. C..., propriétaire d'une parcelle limitrophe cadastrée ..., a introduit un recours gracieux contre ce dernier arrêté le 18 novembre 2019, lequel n'a pas fait l'objet d'une réponse expresse. Par la présente requête, l'intéressé relève appel du jugement du 30 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2019 ainsi que de la décision par laquelle le maire de Valréas a implicitement rejeté son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme dispose que : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir (...) est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ainsi que dans les communes qui se sont dotées d'une carte communale après la date de publication de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 (...). / Lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, il est définitif ; / b) Le préfet ou le maire au nom de l'Etat dans les autres communes. / (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement des visas de l'arrêté du 29 novembre 2017 accordant le permis de construire initial à la société civile immobilière Fanfinette que le territoire de la commune de Valréas a été couvert par un plan d'occupation des sols approuvé le 31 janvier 1980 et devenu caduc le 26 mars 2017. L'existence de ce plan a eu pour effet de transférer de l'Etat vers la commune la compétence relative à la délivrance des autorisations d'urbanisme. En application de l'article L. 422-1 précité du code de l'urbanisme, le transfert de compétence ainsi intervenu revêt un caractère définitif. En conséquence et alors même que le territoire communal se trouve soumis aux règles nationales d'urbanisme depuis que le plan d'occupation des sols est devenu caduc, le maire de Valréas était compétent pour délivrer le permis de construire modificatif sollicité par la société intimée. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier de première instance que Mme A... D..., adjointe au maire en charge de l'urbanisme et signataire de l'arrêté du 20 septembre 2019 en litige, bénéficiait d'une délégation régulièrement consentie par le maire à cet effet en vertu d'un arrêté du 18 novembre 2015 transmis à la préfecture de Vaucluse le 23 novembre 2015 et publié le 26 novembre suivant, modifié par un arrêté du 19 juin 2017 transmis en préfecture le jour même et publié le 21 juin suivant. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / (...) / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ".

5. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis accordé que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou insuffisances ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. En outre, lorsqu'un permis a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire initial.

6. D'une part, il ressort des documents graphiques produits par la société intimée au soutien de sa demande de permis de construire initial le 4 août 2017 que le projet en litige prévoyait la réalisation d'un mur de clôture, présentant une hauteur de l'ordre de 2 mètres par rapport au niveau du sol naturel, sur la limite nord du terrain d'assiette du projet marquant la séparation avec la parcelle appartenant au requérant. Si le permis de construire initial délivré le 29 novembre 2017 a ainsi autorisé la création d'un tel mur sur cette limite séparative, il ressort toutefois des pièces graphiques jointes à la demande de permis de construire modificatif le 18 juin 2019 que la société pétitionnaire a désormais prévu de réaliser, à la fois, un muret de 30 centimètres de hauteur implanté sur la limite séparative nord et un mur de soutènement de 2 mètres de hauteur situé en léger retrait par rapport à cette même limite, avec une haie vive plantée entre ces deux ouvrages. Dès lors et contrairement à ce que fait valoir la société intimée, le permis modificatif délivré le 20 septembre 2019 doit être regardé comme ayant autorisé une modification du projet sur ce point. Si l'appelant relève à cet égard que ni la notice, ni les autres pièces jointes à la demande de permis de construire modificatif le 18 juin 2019, ne précisaient les matériaux et couleurs du mur de 2 mètres ainsi que la composition de la haie vive à planter, il ressort cependant des pièces du dossier que la société pétitionnaire a sollicité un nouveau permis modificatif le 26 octobre 2021, lequel lui a été accordé par le maire de Valréas par un arrêté du 16 décembre suivant. La notice accompagnant cette nouvelle demande mentionne que le mur de 2 mètres de hauteur, à nouveau prévu sur la limite séparative nord de la parcelle, sera revêtu du même enduit de ton " pierre " que la maison et le garage et qu'il sera doublé d'une haie épaisse prioritairement composée d'essences locales à feuilles persistantes. Par conséquent et à supposer même que l'insuffisance du dossier initial sur ces points ait pu fausser l'appréciation du service instructeur, le vice en cause s'est trouvé régularisé par l'arrêté du 16 décembre 2021.

7. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la notice annexée à la demande de permis modificatif le 18 juin 2019 indique notamment que la cote du sol fini après travaux sera plus haute d'1,06 mètre par rapport à celle prévue par le permis initial, renvoyant sur ce point à l'attestation de mesurage établie par un géomètre le 17 mai précédent, laquelle était également jointe à cette demande. Les plans de masse, de coupes et de façades précisent le profil du sol naturel avant réalisation des travaux, ainsi que l'altitude des planchers et des points hauts des bâtiments projetés, tant à l'égout qu'au faîtage, par rapport au niveau du sol naturel. Le requérant ne démontre pas que les cotes mentionnées par la société pétitionnaire seraient inexactes et le rapprochement des cotes indiquées sur les plans des permis initial et modificatif permettait au service instructeur d'appréhender en connaissance de cause les incidences de la surélévation des bâtiments prévue par la société intimée, laquelle avait produit en outre un plan topographique précisant les cotes du sol naturel en de nombreux points de la parcelle. Dans ces conditions, le dossier de demande de permis modificatif n'était entaché d'aucune insuffisance s'agissant de la hauteur des constructions, après surélévation, par rapport au niveau du sol naturel.

8. En troisième lieu, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme prévoit que : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Il appartient à l'autorité administrative et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire ou l'édiction de prescriptions spéciales, de tenir compte de la probabilité de réalisation de ces risques ainsi que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

9. L'appelant soutient que, compte tenu de la pente présentée par le terrain d'assiette du projet du sud vers le nord, le mur de 2 mètres de hauteur envisagé par la société pétitionnaire sur la limite séparative nord aura pour effet de bloquer l'écoulement normal des eaux pluviales provenant de ce terrain, lesquelles seront alors renvoyées sur les deux voies situées à l'est et à l'ouest de la parcelle, au risque de provoquer une inondation sur ces deux voies. Il ajoute qu'en l'absence d'étude technique garantissant la solidité de ce mur, il risque de s'effondrer sous la pression des eaux stockées. L'intéressé n'apporte toutefois pas plus en appel qu'en première instance d'élément concret de nature à établir la réalité des risques ainsi allégués pour la sécurité publique, alors que la parcelle n'est pas classée en zone d'aléa par le plan de prévention des risques inondation du bassin versant du Lez, que la société intimée a prévu d'évacuer les eaux pluviales via une noue existante et que le permis de construire initial comporte des prescriptions spéciales sur ce point en interdisant que les remblais contribuent à imperméabiliser le terrain ou provoquent un ruissellement sur les parcelles limitrophes et la voirie communale. En délivrant le permis de construire modificatif en litige, le maire de Valréas n'a donc commis aucune erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 précité du code de l'urbanisme.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par la société civile immobilière Fanfinette, que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis modificatif délivré par le maire de Valréas le 20 septembre 2019 ainsi que de la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Valréas et de la société Fanfinette, lesquelles n'ont pas la qualité de parties perdantes dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme réclamée par la société Fanfinette sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Fanfinette sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à la commune de Valréas et à la société civile immobilière Fanfinette.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL20846


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20846
Date de la décision : 30/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-05-30;22tl20846 ?
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