Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2023 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2300953 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 juin 2023, M. B..., représenté par Me d'Alimonte, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 mai 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2023 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il dispose d'une intégration socio-professionnelle et d'une promesse d'embauche en qualité de tailleur de pierre de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédé d'un examen exhaustif de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient, en se référant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 20 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 avril 2024, à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien, né le 14 janvier 1996, déclare être entré en France le 6 mars 2020. Le 25 juin 2022, il a contracté mariage avec une ressortissante française. Le 12 janvier 2023, l'intéressé a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien au titre de la vie privée et familiale en qualité de conjoint d'une ressortissante française et en qualité de salarié. M. B... relève appel du jugement du 12 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 janvier 2023 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision en litige vise les dispositions applicables à la situation de M. B..., en particulier le 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 sur le fondement duquel a été examinée sa demande de titre de séjour ainsi que les articles R. 5221-14 et R. 5221-15 du code du travail. Elle mentionne l'ensemble des éléments relatifs à la situation administrative, familiale et personnelle de l'intéressé en rappelant les conditions de son entrée sur le territoire français, son mariage avec une ressortissante française et les raisons de fait et de droit pour lesquelles sa demande de certificat de résidence algérien doit être rejetée en précisant, ensuite, qu'il n'est pas dans l'impossibilité de regagner temporairement son pays d'origine en vue d'y solliciter un visa de long séjour. La décision en litige, qui contient l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement est, dès lors, suffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la motivation exhaustive de l'arrêté en litige, que l'autorité préfectorale se serait abstenue de procéder à un examen particulier de la situation de M. B....
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".
5. L'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France en qualité de conjoint de Français. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ces conditions sont régies de manière exclusive par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En tout état de cause, aux termes du 2) de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". À supposer que M. B... ait entendu se prévaloir de la méconnaissance de ces stipulations, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne justifie pas de son entrée régulière sur le territoire français. L'autorité préfectorale pouvant légalement lui refuser la délivrance d'un certificat de résidence algérien en qualité de conjoint d'une ressortissante française en se fondant sur la seule circonstance qu'il ne justifiait pas d'un visa de long séjour, le préfet de l'Hérault n'a, dès lors, pas fait une inexacte application des stipulations du 2) de l'article 6 de l'accord franco-algérien en édictant la décision en litige.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État ". L'article L. 110-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que ce code régit l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers en France, sous réserve du droit de l'Union européenne et des conventions internationales.
8. Ainsi qu'il a été dit, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
9. La possession d'une simple promesse d'embauche en qualité de tailleur de pierre ne constitue pas, dans les circonstances de l'espèce, un motif exceptionnel de nature à justifier une mesure de régularisation. Par suite, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser la situation de M. B....
10. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
11. M. B... a contracté mariage sous contrat avec une ressortissante française le 25 juin 2022. Il indique, sans toutefois l'établir, que la relation de couple a débuté au mois de juin 2020. Il se prévaut, en outre, des liens tissés avec la fille de sa conjointe, qui a été délaissée par son père, et de son insertion socio-professionnelle, à travers le suivi de cours de français et la possession d'une promesse d'embauche en qualité de tailleur de pierre, métier qu'il exerçait en Algérie. Il indique avoir rompu ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et vouloir vivre en France auprès de sa femme, qui travaille et subvient aux besoins du ménage, et de sa belle-fille, dont il est très proche. Il soutient, enfin, que son comportement ne représente pas une menace pour l'ordre public. Toutefois, eu égard au caractère récent de sa relation de couple et de son mariage, il n'existe aucun obstacle à ce que M. B... regagne temporairement l'Algérie, pays dans lequel il dispose d'attaches familiales, notamment ses parents et son frère, en vue d'y solliciter la délivrance d'un visa afin de régulariser les conditions de son entrée en France. Dès lors, en refusant à l'intéressé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, le préfet de l'Hérault n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. En premier lieu, dès lors que la décision obligeant l'appelant à quitter le territoire sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été prise sur le fondement d'un refus de titre de séjour lui-même motivé, ainsi qu'il a été dit au point 2, elle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte, conformément aux dispositions de l'article L. 613-1 du même code.
13. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige n'aurait pas été précédée d'un examen particulier de la situation personnelle de l'appelant.
14. En troisième et dernier lieu, les moyens tirés de ce que la décision en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de M. B... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 11.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 janvier 2023. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 30 avril 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01353