Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.
Par un jugement n° 2201145 du 2 juin 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative de Marseille le 18 avril 2023, puis réenregistrée au greffe de la cour administrative de Toulouse le 20 avril 2023, M. A..., représenté par Me Cissé, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la décision à intervenir, à titre subsidiaire, dans le même délai, de réexaminer sa situation, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours de la notification de l'arrêt de la cour ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1200 euros à verser à son conseil, en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers compte tenu des liens anciens entretenus avec la France notamment du fait de son activité de professeur de français au Maroc et de sa participation à la vie culturelle en France ; il dispose, de plus, de revenus suffisants ; il est, par ailleurs, en situation de vulnérabilité compte tenu de son état de santé ;
- le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que qu'il ne peut mener de vie familiale qu'en France.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2024, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 26 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu, au 16 avril 2024.
Par une décision du 22 mars 2023, le bureau d'aide juridictionnelle auprès du tribunal juridictionnelle de Toulouse a accordé à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bentolila a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité marocaine, né le 12 décembre 1944, est entré en France le 6 juillet 2021 sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités italiennes valable pour des entrées multiples du 5 novembre 2018 au 4 novembre 2021. Il a sollicité, le 16 novembre 2021, la délivrance d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par arrêté du 3 décembre 2021, le préfet de l'Hérault a refusé de faire droit à cette demande et a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
2. M. A... relève appel du jugement du 2 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2021 précité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 de ce code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
4. En premier lieu, si M. A... fait valoir que l'arrêté du 3 décembre 2021 du préfet de l'Hérault portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours serait entaché d'une erreur de droit, le moyen n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier la portée.
5. En deuxième lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. A... était, à la date de l'arrêté attaqué, entré très récemment en France, à l'âge de 76 ans. S'il se prévaut de la présence en France de sa fille, qui indique l'héberger, il n'établit pas, par la seule production d'un certificat médical postérieur à la décision attaquée, émanant d'un médecin généraliste et faisant état sans plus de précisions de ce que son état de santé ne lui permet pas de vivre seul, de la nécessité d'une prise en charge au titre de la tierce-personne. En tout état de cause, si l'appelant justifie, par des attestations de ses deux filles habitant au Maroc, qu'elles ne peuvent pas, compte tenu du handicap dont elles se trouvent atteintes, pouvoir prendre en charge leur père, tel n'est pas le cas, pour l'attestation de son fils mentionnant, sans plus de précision, que son activité professionnelle ne lui permet pas une telle prise en charge. Au demeurant, l'intéressé n'explique pas comment sa prise en charge a été assurée au Maroc avant son entrée en France le 6 juillet 2021. Par conséquent, l'arrêté litigieux ne peut être regardé comme entaché d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni d'erreur manifeste d'appréciation au regard de celles de l'article L. 435-1 de ce même code .
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il résulte de ce qui a été dit au point 5, et de ce que M. A... dispose au Maroc, où il a vécu jusqu'à l'âge de 76 ans, d'attaches familiales majeures en les personnes de ses trois enfants, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 30 avril 2024, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2024.
Le rapporteur,
P. Bentolila
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°23TL00918 2