La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2024 | FRANCE | N°22TL22335

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 23 mai 2024, 22TL22335


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2021 par lequel la préfète du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination, d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au bénéfice de son conse

il sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2021 par lequel la préfète du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination, d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au bénéfice de son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2104198 du 31 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2022, et un dépôt de pièces, enregistré le 16 mai 2023, qui n'a pas été communiqué, Mme A... C... épouse B..., représentée par Me Debureau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 31 mars 2022, ensemble l'arrêté du 6 septembre 2021 par lequel la préfète du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Gard de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la préfète du Gard a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'elle ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- la mesure d'éloignement est privée de base légale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2023, la préfète du Gard conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mai 2023.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 2 mai 1965 en Algérie, déclare être entrée en France le 30 juillet 2017 munie d'un visa de court séjour valable du 16 mai 2017 au 16 août 2017. Elle a épousé M. D..., ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable du 20 septembre 2019 au 19 septembre 2029, le 3 mars 2020. Le 16 août 2021, Mme C... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 6 septembre 2021, la préfète du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 31 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui excluent de leur champ d'application un étranger qui entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial, sans exiger en outre que soit établi que les conditions d'un tel regroupement sont effectivement réunies, qu'un préfet peut légalement fonder le rejet d'une demande de certificat de résidence présentée sur le fondement du 5) de l'article 6, sur le motif tiré de ce que l'étranger demandeur entre dans les catégories d'étrangers susceptibles de bénéficier du regroupement familial, en application de l'article 4 du même accord.

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser le séjour à un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier, conformément à ces stipulations, si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise. La circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé. Cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., qui déclare être entrée sur le territoire français pour la dernière fois le 30 juillet 2017, s'est mariée avec un compatriote titulaire d'un certificat de résidence depuis le 3 mars 2020. Si la requérante se prévaut de son intégration sur le territoire français en faisant valoir qu'elle a suivi des cours d'apprentissage de la langue française à compter du mois de novembre 2017 et exercé une activité bénévole à compter du mois de juin 2021, soutient que ses parents sont décédés, qu'une sœur séjourne régulièrement en France et présente une promesse d'embauche, elle s'est cependant maintenue en situation irrégulière sur le territoire français à l'expiration du visa de court séjour qui lui a été délivré et n'établit pas être dépourvue d'attaches et isolée dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 52 ans. A la date de la décision contestée, son mariage célébré le 3 mars 2020 présentait un caractère récent. De même, la communauté de vie avec M. B..., à la supposer établie depuis le mois d'octobre 2019, présentait également un caractère encore récent à la date de la décision attaquée. Si la requérante invoque le fait que son époux poursuit en France une activité annexe dans le domaine agricole, elle ne justifie que d'un travail salarié ponctuel de celui-ci du 14 mai au 30 juin 2021, en qualité de cueilleur de cerises et d'abricots. Dans ces conditions, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, la préfète du Gard aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et qu'elle aurait ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces mêmes stipulations, doivent être également écartés.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

6. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de la préfète du Gard du 6 septembre 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles relatives aux frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... épouse B..., à Me Debureau et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Gard.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.

Le rapporteur,

T. Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22TL22335 2


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22335
Date de la décision : 23/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: M. Thierry Teulière
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : DEBUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-05-23;22tl22335 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award