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04/04/2024 | FRANCE | N°22TL20250

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 04 avril 2024, 22TL20250


Vu les procédures suivantes :



Procédures contentieuses antérieures :



L'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté complémentaire n° E-2018-48 du 26 février 2018 par lequel le préfet du Lot a donné acte à la communauté de commune du Grand Figeac de la modification de sa déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement et la décision de rejet de son recours gracieux du 5 juin 2018.


> Par un jugement n° 1805274 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rej...

Vu les procédures suivantes :

Procédures contentieuses antérieures :

L'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté complémentaire n° E-2018-48 du 26 février 2018 par lequel le préfet du Lot a donné acte à la communauté de commune du Grand Figeac de la modification de sa déclaration au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement et la décision de rejet de son recours gracieux du 5 juin 2018.

Par un jugement n° 1805274 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

La même association a également demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision par laquelle le préfet du Lot a implicitement rejeté sa demande du 12 novembre 2018 visant à soumettre le projet de zone d'activités d'Herbemols sur le territoire de la commune de Figeac à la procédure d'autorisation environnementale unique et à régulariser le projet.

Par un jugement n° 1902487 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour :

I.- Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, sous le n° 22BX00250 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL20250 le 23 janvier 2022, et des mémoires enregistrés les 26 octobre 2022 et 18 janvier 2023, l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols, représentée par Me Le Borgne, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1805274 du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté complémentaire n° E-2018-48 du 26 février 2018 du préfet du Lot et la décision de rejet de son recours gracieux du 5 juin 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Lot de mettre en demeure la communauté de communes du Grand Figeac de déposer un dossier de demande d'autorisation environnementale, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la communauté de communes du Grand Figeac une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est suffisamment motivée ;

- compte tenu des modifications qu'il autorise et des effets que ces travaux modificatifs sont susceptibles d'avoir sur l'environnement, l'acte contesté a un caractère décisoire et est susceptible de contestation ;

- le projet aurait dû faire l'objet d'une autorisation environnementale en application des dispositions combinées de l'alinéa 4 de l'article L. 181-1 du code de l'environnement et de l'alinéa 2 du II de l'article L. 122-1-1 du même code dès lors qu'il était soumis à évaluation environnementale, quand bien même il ne dépassait pas le seuil des 20 hectares pour la rubrique 2.1.5.0 ;

- en refusant de déposer une demande d'examen au cas par cas et en choisissant délibérément de se soumettre à évaluation environnementale, la communauté de communes du Grand Figeac s'est obligée à respecter l'ensemble des textes régissant les procédures liées à l'évaluation environnementale.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 septembre 2022, 23 décembre 2022 et 31 janvier 2023, la communauté de communes du Grand Figeac, représentée par Me Sire, conclut, à titre principal, au rejet de la requête comme irrecevable, à titre subsidiaire, à son rejet au fond et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols une somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est insuffisamment motivée ;

- la décision attaquée ne fait pas grief et n'est donc pas susceptible de recours ;

- l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols n'a pas intérêt pour agir ;

- le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut, à titre principal, au rejet de la requête comme irrecevable et, à titre subsidiaire, à son rejet au fond.

Il fait valoir que :

- la requête est insuffisamment motivée ;

- le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.

Par ordonnance du 1er février 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 16 février 2023.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols a été rejetée par décision du 17 mars 2022.

II. Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, sous le n° 22BX00251 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL20251 le 23 janvier 2022, et des mémoires enregistrés les 3 novembre 2022, 15 mars 2023 et 11 avril 2023, l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols, représentée par Me Le Borgne, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1902487 du 23 novembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision implicite du préfet du Lot du 13 janvier 2019 en tant qu'elle refuse de mettre en demeure la communauté de communes du Grand-Figeac de déposer un dossier de demande d'autorisation environnementale tenant notamment lieu de dérogation à l'interdiction de destruction d'habitats, d'individus et de perturbation d'espèces protégées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Lot de mettre en demeure la communauté de communes du Grand Figeac de déposer un dossier de demande d'autorisation environnementale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la communauté de communes du Grand Figeac une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est suffisamment motivée ;

- l'acte contesté a un caractère décisoire et est susceptible de contestation ;

- le projet aurait dû faire l'objet d'une autorisation environnementale en application des dispositions combinées de l'alinéa 4 de l'article L. 181-1 du code de l'environnement et de l'alinéa 2 du II de l'article L. 122-1-1 du même code dès lors qu'il était soumis à évaluation environnementale, quand bien même il ne dépassait pas le seuil des 20 hectares pour la rubrique 2.1.5.0 ;

- en refusant de déposer une demande d'examen au cas par cas et en choisissant délibérément de se soumettre à évaluation environnementale, la communauté de communes du Grand Figeac s'est obligée à respecter l'ensemble des textes régissant les procédures liées à l'évaluation environnementale ;

- une dérogation " espèces et habitats protégés " aurait dû être intégrée à l'autorisation environnementale que la communauté de communes du Grand Figeac aurait dû solliciter ;

- en tout état de cause, quelle que soit la réponse à la question de savoir si une autorisation environnementale supplétive était requise pour le projet, la communauté de communes du Grand Figeac aurait dû demander une dérogation " espèces et habitats protégés " en raison de la destruction d'habitat d'espèces protégées.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 septembre 2022, 22 février 2023 et 18 avril 2023, la communauté de communes du Grand Figeac, représentée par Me Sire, conclut, à titre principal, au rejet de la requête comme irrecevable, à titre subsidiaire, à son rejet au fond et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols une somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est insuffisamment motivée ;

- en demandant au préfet du Lot de soumettre un projet ayant fait l'objet d'un permis d'aménager devenu définitif à autorisation environnementale et donc de mettre en œuvre un pouvoir dont il ne dispose pas, l'association requérante n'a pu que susciter une décision ne faisant pas grief et n'étant donc pas susceptible de recours ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.

Par ordonnance du 18 avril 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2023.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols a été refusée par une décision du 17 mars 2022.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement des requêtes de l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Le Borgne, représentant l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols, et de Me Bonnel, représentant la communauté de communes du Grand Figeac.

Des notes en délibéré, présentées par l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols, représentée par Me Le Borgne, ont été enregistrées le 21 mars 2024 dans les instances n° 22TL20250 et n°22TL200251.

Considérant ce qui suit :

1. La communauté de communes du Grand Figeac (Lot) a déposé le 31 mars 2017 auprès de la préfecture du Lot une déclaration portant sur l'aménagement de la zone d'activités d'Herbemols, située sur le territoire de la commune de Figeac au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement relatif à l'installation d'un ouvrage de stockage des eaux pluviales et d'une canalisation de transfert vers le ruisseau d'Herbemols. Par un arrêté du 25 septembre 2017, le préfet du Lot a donné acte à la communauté de communes du Grand Figeac de sa déclaration sous réserve de prescriptions spécifiques. Le 9 février 2018, la communauté de communes a déposé une demande de modification de sa déclaration pour prendre en compte le déplacement de la canalisation d'évacuation des eaux pluviales et le raccordement du débit de fuite du site du supermarché-drive et du pôle de loisirs situés sur des parcelles jouxtant la zone d'activités. Par arrêté complémentaire du 26 février 2018, le préfet du Lot a donné acte à la communauté de communes du Grand Figeac de sa demande de modification de sa déclaration. Par décision du 5 juin 2018, le préfet du Lot a rejeté le recours gracieux formé contre cet arrêté complémentaire du 26 février 2018 par l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols le 26 avril 2018. Par courrier réceptionné le 13 novembre 2018, la même association a demandé au préfet du Lot de soumettre ce projet à la procédure d'autorisation environnementale unique sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet le 13 janvier 2019. Par la requête n° 22TL20251, l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols demande à la cour d'annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite de rejet et d'enjoindre au préfet du Lot de mettre en demeure la communauté de communes du Grand Figeac de déposer une demande d'autorisation environnementale dite supplétive. Par la requête n° 22TL20250, la même association demande à la cour d'annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté complémentaire du 26 février 2018 et de la décision de rejet de son recours gracieux du 5 juin 2018. Ces requêtes présentant à juger des questions semblables et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision implicite de rejet du 13 janvier 2019 :

2. Aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, " I.- Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. ". L'article L. 214-3 du même code dispose que : " I.- Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, notamment aux peuplements piscicoles. / Cette autorisation est l'autorisation environnementale régie par les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier, sans préjudice de l'application des dispositions du présent titre. / II.- Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 181-1 du même code : " L'autorisation environnementale, dont le régime est organisé par les dispositions du présent livre ainsi que par les autres dispositions législatives dans les conditions fixées par le présent titre, est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : (...) / Elle est également applicable aux projets mentionnés au deuxième alinéa du II de l'article L. 122-1-1 lorsque l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation est le préfet, ainsi qu'aux projets mentionnés au troisième alinéa de ce II (...) ". L'article L. 122-1-1 du même code prévoit que : " (...) / II.- Lorsqu'un projet soumis à évaluation environnementale relève d'un régime d'autorisation préalable qui ne répond pas aux conditions fixées au I, l'autorité compétente complète l'autorisation afin qu'elle y soit conforme. / Lorsqu'un projet soumis à évaluation environnementale relève d'un régime déclaratif, il est autorisé par une décision de l'autorité compétente pour délivrer le récépissé de déclaration, qui contient les éléments mentionnés au I (...) ".

4. Aux termes de l'article L. 122-1 de ce code : " (...) II.- Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas. " Aux termes de l'article R. 122-2 du même code, " I- Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l'article L. 122-1, en fonction des critères et des seuils précisés dans ce tableau. (...) ". L'annexe de l'article R. 122-2 du code de l'environnement prévoit, dans sa rédaction applicable à l'espèce, à la rubrique 39 qui concerne les travaux, constructions et opérations d'aménagement y compris ceux donnant lieu à un permis d'aménager, un permis de construire, ou à une procédure de zone d'aménagement concerté, de soumettre à examen au cas par cas, les " travaux, constructions et opérations d'aménagement constitués ou en création qui soit créent une surface de plancher supérieure ou égale à 10 000 m 2 et inférieure à 40 000 m 2 et dont le terrain d'assiette ne couvre pas une superficie supérieure ou égale à 10 hectares, soit couvre un terrain d'assiette d'une superficie supérieure ou égale à 5 ha et inférieure à 10 ha et dont la surface de plancher créée est inférieure à 40 000 m ² " et précise que " les composantes d'un projet donnant lieu à un permis d'aménager, un permis de construire, ou à une procédure de zone d'aménagement concerté ne sont pas concernées par la présente rubrique si le projet dont elles font partie fait l'objet d'une étude d'impact ou en a été dispensé à l'issue d'un examen au cas par cas. ". Elle prévoit, par ailleurs, à la rubrique 22 qui concerne l'installation d'aqueducs sur de longues distances, de soumettre à un examen au cas par cas, les " canalisations d'eau dont le produit du diamètre extérieur avant revêtement par la longueur est supérieur ou égal à 2 000 m² ".

5. En premier lieu, d'une part, il est constant que le projet d'aménagement de la zone d'activités Herbemols est soumis à déclaration au titre des dispositions combinées de l'article L. 214-3 du code de l'environnement et des rubriques 2.1.5.0 relative au " rejet des eaux pluviales dans les eaux douces superficielles ou sur le sol ou dans le sous-sol, la surface totale du projet, augmentée de la surface correspondant à la partie du bassin naturel dont les écoulements sont interceptés par le projet étant (...) supérieure à 1 ha mais inférieure à 20 ha " et 3.2.3.0 relative aux " plans d'eau permanents ou non (...) dont la superficie est supérieure à 0,1 ha mais inférieure à 3 ha " du tableau annexé à l'article R. 214-1 du même code en raison de l'aménagement d'un ouvrage de stockage des eaux pluviales et d'une canalisation de transfert vers le ruisseau d'Herbemols. De plus, il est également constant que ce projet a fait l'objet d'une telle déclaration par la communauté de communes du Grand Figeac dont le préfet du Lot a donné acte par arrêté du 25 septembre 2017 portant prescriptions particulières.

6. D'autre part, il résulte de l'instruction que ce projet a fait l'objet d'un permis d'aménager du 25 septembre 2017 délivré par le maire de Figeac à la communauté de communes du Grand Figeac à la suite de la réalisation d'une étude d'impact déposée en mars 2017 et d'une enquête publique réalisée du 19 juin au 21 juillet 2017 dans le cadre d'une déclaration de projet valant mise en compatibilité du plan local d'urbanisme de la commune de Figeac prise sur le fondement de l'article L. 126-1 du code de l'environnement. Dans ces conditions, les travaux en litige, qui portent sur l'aménagement de l'ouvrage de stockage des eaux pluviales et la réalisation de la canalisation de transfert vers le ruisseau d'Herbemols, constituent une composante d'un projet donnant lieu à un permis d'aménager ayant fait l'objet d'une étude d'impact. Ces travaux ne sont dès lors pas soumis à évaluation environnementale conformément aux dispositions rappelées au point 4 ci-dessus de la rubrique 39 de l'annexe à l'article R. 122-22 du code de l'environnement. De même, il est constant que ces travaux portent en particulier sur une canalisation dont le produit du diamètre extérieur avant revêtement par la longueur est de 616 m² et ne sont donc pas soumis à évaluation environnementale au titre de la rubrique 22 de la même annexe. S'il est vrai que la communauté de communes du Grand Figeac a, de sa propre initiative, réalisé pour ce projet une évaluation environnementale, cette circonstance n'a pas pour conséquence de faire entrer le projet d'aménagement de la zone d'activités d'Herbemols dans le champ d'application des dispositions du deuxième alinéa du II de l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement pour le soumettre à un régime d'autorisation. Par suite, le préfet a pu légalement refuser de mettre en demeure la communauté de communes du Grand Figeac de déposer une telle demande d'autorisation environnementale dite supplétive sur le fondement des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement.

7. En deuxième lieu, ainsi qu'il vient d'être ci-dessus, le projet d'aménagement de la zone d'activités d'Herbemols ne peut pas être regardé comme soumis à évaluation environnementale et la communauté de communes du Grand Figeac n'avait pas à déposer de demande d'autorisation environnementale. Par suite, le moyen tiré de ce qu'une dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées aurait dû être intégrée à cette autorisation environnementale ne peut qu'être écarté comme inopérant.

8. En dernier lieu, dans le dernier état de ses écritures, l'association appelante ne demande que l'annulation de la décision implicite du préfet du Lot du 13 janvier 2019 en tant qu'elle refuse de mettre en demeure la communauté de communes du Grand-Figeac de déposer un dossier de demande d'autorisation environnementale tenant notamment lieu de dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées et d'enjoindre au préfet du Lot de mettre en demeure la communauté de communes du Grand Figeac de déposer un dossier de demande d'autorisation environnementale. Par suite, et tout état de cause, le moyen tiré de ce que la communauté de communes du Grand Figeac aurait dû demander une telle dérogation même en l'absence de demande d'autorisation environnementale ne peut qu'être écarté comme inopérant au regard de telles conclusions.

En ce qui concerne l'arrêté complémentaire du préfet du Lot du 26 février 2018 :

9. Aux termes de l'article R. 122-2 du code de l'environnement : " (...) II. - Les modifications ou extensions de projets déjà autorisés, qui font entrer ces derniers, dans leur totalité, dans les seuils éventuels fixés dans le tableau annexé ou qui atteignent en elles-mêmes ces seuils font l'objet d'une évaluation environnementale ou d'un examen au cas par cas ".

10. Il résulte de l'instruction que la communauté de communes du Grand Figeac a déposé, le 9 février 2018, une demande de modification de sa déclaration initiale dont le préfet du Lot a donné acte par arrêté du 25 septembre 2018. Les modifications ainsi déclarées par la communauté de communes consistent à déplacer la canalisation d'évacuation des eaux pluviales et à raccorder le débit de fuite du site du supermarché-drive et du pôle de loisirs situés sur des parcelles jouxtant la zone d'activités. Ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6 du présent arrêt, le projet d'aménagement de la zone d'activités d'Herbemols n'était pas, par lui-même, soumis à évaluation environnementale ni à un régime d'autorisation environnementale. En outre, ces modifications n'entrent pas dans le champ d'application de la rubrique 39 de l'annexe à l'article R. 122-2 du code de l'environnement et, dès lors qu'elles se bornent à porter le produit du diamètre extérieur avant revêtement par la longueur à 880 m², elles n'entrent pas non plus dans la rubrique 22 de cette même annexe et ne font pas entrer le projet d'aménagement de la zone d'activités d'Herbemols au-delà des seuils fixés par cette annexe. Dans ces conditions, elles n'avaient pas à faire l'objet d'une évaluation environnementale. Par suite, et alors qu'il est constant que ces modifications sont soumises à déclaration au titre des dispositions de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que les modifications apportées au projet d'aménagement de la zone d'activités Herbemols auraient dû faire l'objet d'une autorisation environnementale supplétive sur le fondement des dispositions combinées du II de l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement et de l'article L. 181-1 du même code. Par suite, le préfet a pu légalement donner acte, par son arrêté du 26 février 2018, de ces modifications et rejeter le recours gracieux formé par l'association appelante à son encontre.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués n° 1805274 et n° 19002487 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de la communauté de communes du Grand Figeac qui ne sont pas les parties perdantes à la présente instance, la somme que l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols la somme que la communauté de communes du Grand Figeac demande au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes n° 22TL20250 et n° 22TL20251 de l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes du Grand Figeac en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association de défense des eaux et des zones agricoles et naturelles de l'Aiguille et d'Herbemols, à la communauté de communes du Grand Figeac et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet du Lot.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. ChabertLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 22TL20250, 22TL20251


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20250
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

27-02-01 Eaux. - Ouvrages. - Établissement des ouvrages.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;22tl20250 ?
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