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21/03/2024 | FRANCE | N°23TL02079

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 21 mars 2024, 23TL02079


Vu les procédures suivantes :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme F... C... et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés du 7 juin 2023 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de les transférer aux autorités italiennes pour l'examen de leurs demandes d'asile.



Par un jugement nos 2303296 et 230397 du 21 juin 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 7 juin 2023 du préfet de la Haute-Garonn

e, a enjoint au préfet de réexaminer leur situation dans un délai de deux mois et a mis à la charge d...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... C... et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés du 7 juin 2023 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a décidé de les transférer aux autorités italiennes pour l'examen de leurs demandes d'asile.

Par un jugement nos 2303296 et 230397 du 21 juin 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 7 juin 2023 du préfet de la Haute-Garonne, a enjoint au préfet de réexaminer leur situation dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et rejeté le surplus des conclusions.

Procédures devant la cour :

I - Par une requête enregistrée 11 août 2023 sous le n° 23TL02079, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement du 21 juin 2023 et de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que c'est à tort que le premier juge a estimé que l'arrêté portant transfert de M. A... aux autorités italiennes était entaché d'un vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Mercier, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) à titre principal, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne comme irrecevable ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ;

4°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 7 juin 2023 ;

5°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus d'admission à l'aide juridictionnelle totale, à lui verser en personne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête du préfet de la Haute-Garonne est irrecevable dès lors qu'elle n'est pas signée par le préfet de la Haute-Garonne et qu'aucune délégation de signature à l'effet de former appel à l'encontre du jugement n'est établie ;

- le moyen invoqué par le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé ;

- il maintient l'ensemble de ses moyens de première instance ;

- l'arrêté de transfert est entaché d'une erreur de droit dès lors que les autorités italiennes ont fait connaître leur accord de reprise en charge sur le fondement de l'article 18.1 b) du règlement n° 604/2013 alors qu'il n'a jamais présenté de demande d'asile en Italie ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 7.2, 11. b) ainsi que les points 16 et 17 du préambule du règlement n° 604/2013 dès lors que l'Allemagne devait être l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'en conséquence le préfet devait faire application de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement susvisé ;

- les autorités italiennes ne pouvaient être considérées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile suite à l'écoulement des délais prévus à la date de la décision de rejet de l'Allemagne ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'aucun fondement relatif à l'accord des autorités italiennes pour la prise en charge de sa demande d'asile n'est mentionné contrairement à sa compagne et qu'il ne peut faire l'objet d'une reprise en charge en l'absence de demande d'asile formulée en Italie ;

Par une décision du 9 février 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. A... le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.

II - Par une requête enregistrée le 11 août 2023 sous le n° 23TL02080, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 21 juin 2023 sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le premier juge a estimé que l'arrêté portant transfert de M. A... aux autorités italiennes était entaché d'un vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et que ce moyen, sérieux, est de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ;

- l'exécution de ce même jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour la mise en œuvre de la procédure de transfert engagée à l'encontre de l'intéressé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Mercier, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) à titre principal, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne comme irrecevable ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus d'admission à l'aide juridictionnelle totale, à lui verser en personne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le moyen invoqué par le préfet ne revêt pas un caractère sérieux de nature à justifier outre l'annulation du jugement attaqué, ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 7 juin 2023.

Par une décision du 9 février 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. A... le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.

III - Par une requête enregistrée 11 août 2023 sous le n° 23TL02081, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler ce jugement du 21 juin 2023 et de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Toulouse.

Il soutient que c'est à tort que le premier juge a estimé que l'arrêté portant transfert de Mme C... aux autorités italiennes était entaché d'un vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2023, Mme C..., représentée par Me Mercier, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) à titre principal, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne comme irrecevable ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ;

4°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 7 juin 2023 ;

5°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne d'enregistrer sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus d'admission à l'aide juridictionnelle totale, à lui verser en personne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête du préfet de la Haute-Garonne est irrecevable dès lors qu'elle n'est pas signée par le préfet de la Haute-Garonne et qu'aucune délégation de signature à l'effet de former appel à l'encontre du jugement n'est établie ;

- le moyen invoqué par le préfet de la Haute-Garonne n'est pas fondé ;

- elle maintient l'ensemble de ses moyens de première instance ;

- l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes est entaché d'une erreur de droit dès lors que son concubin, M. A..., n'a jamais présenté de demande d'asile en Italie et que les autorités italiennes ne pouvaient en conséquence faire connaître leur accord de reprise en charge sur le fondement de l'article 18.1 b) du règlement n° 604/2013 ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article 7.2, 11. b) ainsi que les points 16 et 17 du préambule du règlement n° 604/2013 dès lors que l'Allemagne devait être l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile de son concubin et qu'en conséquence le préfet devait faire application de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement susvisé en tenant compte également de son état de santé ;

- les autorités italiennes ne pouvaient être considérées comme responsables de l'examen de sa demande d'asile suite à l'écoulement des délais prévus à la date de la décision de rejet de l'Allemagne ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'aucun fondement relatif à l'accord des autorités italiennes pour la prise en charge de sa demande d'asile n'est mentionné contrairement à sa compagne et qu'il ne peut faire l'objet d'une reprise en charge en l'absence de demande d'asile formulée en Italie ;

Par une décision du 9 février 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme C... le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.

IV - Par une requête enregistrée le 11 août 2023 sous le n° 23TL02082, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 21 juin 2023 sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le premier juge a estimé que l'arrêté portant transfert de Mme C... aux autorités italiennes était entaché d'un vice de procédure au regard de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et que ce moyen, sérieux, est de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué ;

- l'exécution de ce même jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour la mise en œuvre de la procédure de transfert engagée à l'encontre de l'intéressée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2023, Mme C..., représentée par Me Mercier, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

2°) à titre principal, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne comme irrecevable ;

3°) à titre subsidiaire, de rejeter la requête du préfet de la Haute-Garonne ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus d'admission à l'aide juridictionnelle totale, à lui verser en personne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le moyen invoqué par le préfet ne revêt pas un caractère sérieux de nature à justifier outre l'annulation du jugement attaqué, ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 7 juin 2023.

Par une décision du 9 février 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme C... le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chabert, président.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... et M. A..., ressortissants guinéens, nés respectivement le 3 janvier 1997 et le 5 février 1995, sont entrés selon leurs déclarations en France le 19 mars 2023 et se sont présentés le 23 mars 2023 à la préfecture de la Haute-Garonne pour y déposer une demande d'asile. Par deux arrêtés du 7 juin 2023, le préfet de la Haute-Garonne a décidé du transfert de Mme C... et de M. A... aux autorités italiennes. Par les requêtes enregistrées sous les nos 23TL02079 et 23TL02081, le préfet de la Haute-Garonne fait appel du jugement du 21 juin 2023 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé chacun de ces arrêtés, a enjoint au préfet de réexaminer dans le délai de deux mois la situation de Mme C... et M. A... ainsi que de les munir dans l'attente d'une attestation de demande d'asile et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Mercier en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991. Par les requêtes nos 23TL02080 et 23TL02082, le préfet demande à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement. Les requêtes susvisées nos 23TL02079, 23TL02080, 23TL02081 et 23TL02082 étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt.

Sur l'admission de Mme C... et M. A... à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Par quatre décisions du 9 février 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme C... et M. A... le maintien du bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'octroi d'une aide juridictionnelle provisoire.

Sur les requêtes nos 23TL02079 et 23TL02081 :

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées en défense par Mme C... et M. A... :

3. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de justice administrative : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir. " Aux termes de l'article R. 431-13 de ce code : " Sont en outre applicables devant les cours administratives d'appel les dispositions des articles (...) R. 431-4 (...) applicables devant les tribunaux administratifs. ".

4. Les requêtes d'appel du préfet de la Haute-Garonne sont signées par Mme B... E..., adjointe au chef de bureau de l'asile à la préfecture de la Haute-Garonne. Mme E... a été régulièrement habilitée par le préfet de la Haute-Garonne, en vertu d'un arrêté du 13 mars 2023, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial du 15 mars 2023, pour signer en matière de transfert des ressortissants étrangers vers les Etats membres de l'Union européenne " l'ensemble des pièces, mémoires en défense et requête en appel, relatives au contentieux de toutes décisions prises en matière de droit des étrangers, devant les juridictions administratives et judiciaires (...) ". Par suite, les fins de non-recevoir tirées de l'incompétence du signataire des écritures du préfet en appel doivent être écartées.

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le premier juge :

5. L'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et les mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride dispose que : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée, / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères, / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations, / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert, / e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement, / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. (...). ".

6. Il résulte des dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application de ce règlement doit se voir remettre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, lequel doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par le paragraphe 2 de l'article 4 du règlement constitue une garantie pour le demandeur d'asile.

7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que Mme C... et M. A... ont chacun bénéficié d'un entretien individuel dans les locaux de la préfecture de la Haute-Garonne le 23 mars 2023, conduit par un agent des services de la préfecture, avec le concours d'un interprète de la société ISM interprétariat en langue soussou, langue que les intéressés ont déclaré comprendre. Les intimés se sont vu remettre, lors de ces deux entretiens, d'une part, le " Guide du demandeur d'asile en France " et la brochure intitulée " Les empreintes digitales et Eurodac " et, d'autre part, les deux fascicules constituant la brochure commune mentionnée au paragraphe 2 de l'article 4 du règlement précité, à savoir le fascicule A intitulé " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et le fascicule B intitulé " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ", dans lesquels se trouvent l'ensemble des informations énumérées au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Si Mme C... et M. A... soutiennent que le préfet n'a pas accompli les formalités prescrites par les dispositions de l'article 4 précité, il ressort d'une part des pièces du dossier que les pages de garde de ces brochures ont été signées par les intéressés ainsi que par l'interprète en langue soussou. D'autre part, les résumés des entretiens, produits par l'administration précisent par ailleurs que les intimés ont été informés de la procédure engagée à leur encontre et ne fait apparaître aucune difficulté de compréhension ou de communication entre les intéressés et l'agent de la préfecture ayant conduit ces entretiens. Il en ressort au contraire que Mme C... et M. A... ont présenté des observations circonstanciées sur leurs situations personnelles, leurs itinéraires, en lien notamment avec leur passage en Italie ou en Allemagne. En outre, à supposer même que l'interprète n'ait pu lire en soussou lesdites brochures, le paragraphe 2 de l'article 4 du règlement imposait seulement de communiquer à Mme C... et M. A... par oral les informations nécessaires à leur bonne compréhension et n'exigeait pas qu'il soit procédé à une lecture intégrale de la vingtaine de pages que représentent les brochures A et B, seules visées par l'article 4. Enfin, si les intimés soutiennent que les entretiens auraient duré " au maximum quinze minutes ", il n'apparaît pas que cette durée aurait été insuffisante pour leur fournir les éléments requis sur la procédure de détermination de l'Etat membre responsable de leurs demandes d'asiles. Il s'ensuit que Mme C... et M. A... n'ont pas été privés des garanties prévues par l'article 4 du règlement précité. Dès lors, le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler les arrêtés litigieux, le premier juge a accueilli les moyens tirés de ce que les mesures de transfert aux autorités italiennes étaient entachées d'un vice de procédure au regard des dispositions de cet article.

8. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... et M. A... en première instance et en appel au soutien de leurs demandes d'annulation des deux arrêtés préfectoraux du 7 juin 2023.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par Mme C... et M. A... :

9. En premier lieu, les arrêtés de transfert en litige mentionnent, de façon suffisamment circonstanciée pour permettre à Mme C... et M. A... de les discuter, les motifs de droit et les circonstances de fait qui en constituent les fondements. Ils précisent notamment que Mme C... et M. A..., déclarant être entrés irrégulièrement sur le territoire français le 19 mars 2023, se sont présentés à la préfecture de la Haute-Garonne, le 23mars 2023, pour y formuler une demande d'asile. Les arrêtés mentionnent également que les autorités italiennes, saisies le 13 avril 2023 d'une demande de reprise en charge de Mme C... et de prise en charge de M. A..., ont fait connaître leur accord le 24 avril 2023. Les décisions font également état du rejet des demandes de reprises en charge par les autorités allemandes auprès desquelles les intéressés avaient présenté des demandes d'asile et mentionnent les principaux éléments de leurs situations personnelles. Ils précisent en outre que lors de leurs entretiens individuels du 23 mars 2023, Mme C... et M. A... ont pu formuler des observations quant à un éventuel transfert vers les autorités italiennes, qu'ils ne peuvent se prévaloir d'une vie privée et familiale en France et qu'il ne ressort pas des éléments versés au dossier que les intéressés souffriraient d'une pathologie d'une particulière gravité et que l'exécution leur transfert emporterait une aggravation significative et irrémédiable de leur état de santé et que l'impossibilité d'accéder à des soins adaptés en Italie n'est pas établie. Ces éléments permettent aux intéressés de comprendre les motifs sur lesquels s'est fondé le préfet de la Haute-Garonne pour déterminer que l'Italie était responsable de l'examen de leurs demandes d'asile et prendre les décisions de transfert. Par suite, ces arrêtés, qui comportent l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement, sont suffisamment motivés.

10. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la motivation des arrêtés contestés, telle qu'elle vient d'être exposée au point 9, que le préfet a procédé à un examen sérieux des situations personnelles de Mme C... et de M. A... avant d'édicter les décisions de transfert. Dès lors, les moyens tirés du défaut d'examen doivent être rejetés.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel (...) est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. (...) L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".

12. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt, que Mme C... et M. A... ont bénéficié de l'entretien individuel prévu par l'article 5 du règlement du 26 juin 2013. Il ressort des résumés produits par l'administration que cet entretien a été mené dans les locaux de la préfecture de la Haute-Garonne le 23 mars 2023 par un agent qualifié dans les conditions prévues par ces dispositions et en étant assisté par un interprète de la société ISM interprétariat en langue soussou. Il en ressort également que Mme C... et M. A... ont pu s'exprimer sur leur situation personnelle et leur parcours migratoire et qu'ils ont notamment été mis à même de présenter toutes observations utiles sur la perspective d'un transfert aux autorités italiennes. Les intimés n'apportent pas plus en appel qu'en première instance d'élément précis de nature à laisser penser que les deux entretiens ne se seraient pas tenus selon les modalités prévues par l'article 5 du règlement. Par suite, les moyens tirés de ce que les procédures suivies seraient irrégulières au regard des dispositions de cet article doivent être écartés.

13. En quatrième lieu, il ne ressort ni de la motivation des arrêtés en litige, ni des autres pièces du dossier que le préfet se serait estimé lié par la circonstance que les demandes d'asile des intéressés semblaient relever de la responsabilité des autorités italiennes ou qu'il n'aurait pas apprécié la possibilité de lui faire application de la clause dérogatoire prévue à l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013.

14. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable ".

15. L'Italie étant membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il doit alors être présumé que le traitement réservé aux demandeurs d'asile dans cet État membre est conforme aux exigences de la convention de Genève ainsi qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Cette présomption n'est toutefois pas irréfragable lorsqu'il y a lieu de craindre qu'il existe des défaillances systémiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile dans l'État membre responsable, impliquant un traitement inhumain ou dégradant. Dans cette hypothèse, il appartient à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités italiennes répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile.

16. Mme C... et M. A... soutiennent que leurs demandes d'asile ne pourront être traitées convenablement en Italie du fait des défaillances de cet État dans ce domaine. Leurs arguments de portée générale sur les difficultés d'accueil des migrants fondées sur des rapports d'organisations non gouvernementales, des articles de presse et des décisions de justice nationales et internationales ne sont pas suffisants pour considérer qu'ils ne pourraient être accueillis dans les conditions prévues pour un demandeur d'asile d'un État partie à la convention de Genève. Par ailleurs, la circulaire du ministre de l'intérieur italien du 5 décembre 2022 dont les intéressés se prévalent précise que l'obstacle à l'exécution du transfert de tels demandeurs vers l'Italie est limité dans le temps et uniquement motivé par des raisons techniques liées au fait que les structures d'accueil sont sous pression. Ces éléments, ne permettent donc pas d'établir que les demandes d'asile des intéressés ne seraient pas examinées dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et à caractériser des défaillances systémiques dans les conditions d'accueil et d'examen des demandes d'asile alors que les autorités italiennes ont explicitement accepté le transfert des intéressés le 24 avril 2023, postérieurement à cette circulaire. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 précité ne peuvent en conséquence être accueillis.

17. En sixième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (...) ". La faculté laissée à chaque Etat de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement (UE) n° 604/2013, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit pour les demandeurs.

18. Mme C... et M. A..., soutiennent qu'au regard des conditions d'accueil des demandeurs d'asile transférés en Italie, le préfet de la Haute-Garonne a, d'une part, commis une erreur manifeste d'appréciation en ne mettant pas en œuvre la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement n° 604/2013 précité et, d'autre part, méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé aux points 15 et 16, l'Italie présente les garanties exigées pour l'examen des demandes d'asile de Mme C... et M. A.... Si les intimés, levant le secret médical, font valoir leur état de grande vulnérabilité compte tenu de l'état de santé de Mme C... qui est atteinte du virus de l'hépatite B et de leur isolement, les seuls documents médicaux produits, composés d'un compte-rendu de consultation de prévention du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 11 avril 2023, d'un compte-rendu d'analyses médicales du 13 avril 2023, d'une convocation établie le même jour à hôpital de Toulouse et d'une fiche de circulation au sein de l'hôpital, alors que l'intéressée a au demeurant déclaré s'opposer à la transmission de ses informations médicales aux autorités italiennes, ne permet pas d'établir qu'elle ne pourra pas bénéficier de soins appropriés en cas de transfert vers l'Italie ou que son état de santé s'opposerait à l'exécution de ce transfert. Dans ces conditions, Mme C... et M. A... ne sont pas fondés à soutenir qu'en ne leur permettant pas de bénéficier de la clause discrétionnaire instituée par l'article 17 du règlement du 26 juin 2013, le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation ni que les de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été en conséquence méconnues.

19. En septième lieu, aux termes de l'article 7 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " (...) / 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre / (...) ". L'article 11 de ce règlement dispose que : " Lorsque plusieurs membres d'une famille et/ou des frères ou sœurs mineurs non mariés introduisent une demande de protection internationale dans un même État membre simultanément, ou à des dates suffisamment rapprochées pour que les procédures de détermination de l'État membre responsable puissent être conduites conjointement, et que l'application des critères énoncés dans le présent règlement conduirait à les séparer, la détermination de l'État membre responsable se fonde sur les dispositions suivantes : (...) b) à défaut, est responsable l'État membre que les critères désignent comme responsable de l'examen de la demande du plus âgé d'entre eux. ". L'article 2 de ce règlement précise que pour son application, on entend, sous réserve de la situation particulière des mineurs, par " membres de la famille ", " dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des États membres : / - le conjoint du demandeur, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque le droit ou la pratique de l'État membre concerné réserve aux couples non mariés un traitement comparable à celui réservé aux couples mariés, en vertu de sa législation relative aux ressortissants de pays tiers, / (...) ". Aux termes de l'article 13 dudit règlement : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un Etat membre dans lequel il est entré en venant d'un Etat tiers, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. ". L'article 18 du même règlement dispose que : " 1. L'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : / a) prendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 21, 22 et 29, le demandeur qui a introduit une demande dans un autre État membre ; / b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre Etat membre ; (...) ". Le préambule du règlement prévoit que : " (16) Afin de garantir le plein respect du principe de l'unité de la famille et dans l'intérêt supérieur de l'enfant, l'existence d'un lien de dépendance entre un demandeur et son enfant, son frère ou sa sœur ou son père ou sa mère, du fait de la grossesse ou de la maternité, de l'état de santé ou du grand âge du demandeur, devrait devenir un critère obligatoire de responsabilité. De même, lorsque le demandeur est un mineur non accompagné, la présence sur le territoire d'un autre État membre d'un membre de sa famille ou d'un autre proche pouvant s'occuper de lui devrait également constituer un critère obligatoire de responsabilité. / (17) Il importe que tout État membre puisse déroger aux critères de responsabilité, notamment pour des motifs humanitaires et de compassion, afin de permettre le rapprochement de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent et examiner une demande de protection internationale introduite sur son territoire ou sur le territoire d'un autre État membre, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères obligatoires fixés dans le présent règlement. (...) ".

20. Il ressort des pièces du dossier que les empreintes décadactylaires de M. A... ont été relevées en Italie le 28 décembre 2022 et que celles de Mme C... y ont également été enregistrées le 20 décembre 2022, antérieurement à l'enregistrement de leurs demandes de protection internationale sollicitées en Allemagne le 7 janvier 2023. Par ailleurs, les autorités françaises ont saisi le 13 avril 2023 les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de M. A... sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement du 26 avril 2013 et d'une demande de reprise en charge de Mme C... sur le fondement du b) du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement du 26 avril 2013. Si les autorités italiennes ont explicitement donné leur accord le 24 avril 2023 sur ces deux demandes, non sur le fondement des dispositions du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement du 26 avril 2013 concernant M. A..., mais sur le fondement des dispositions précitées de l'article 18-1 b), elles ont reconnu être l'Etat membre responsable de l'examen des demandes d'asile des intéressés. En outre, si les autorités françaises ont saisi le 13 avril 2023 les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge des intéressés sur le fondement de l'article 18-1 b) du même règlement, ces dernières ont expressément rejeté ces demandes le 17 avril 2023 au motif que l'Italie, saisie en ce sens le 15 février 2023 par les autorités allemandes, était l'Etat responsable de l'examen de leurs demandes d'asile. Alors que le préfet de la Haute-Garonne s'est référé à ces décisions et qu'il n'appartient pas, en tout état de cause, aux juridictions françaises de statuer sur la légalité des décisions prises par les autorités italiennes, le représentant de l'Etat pouvait prendre les décisions en litige au regard des accords transmis par les autorités italiennes sans entacher ses décisions d'erreurs de droit au regard des dispositions précitées.

21. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a annulé les arrêtés du 7 juin 2023 portant transfert de Mme C... et M. A... aux autorités italiennes. Il en résulte que c'est également à tort que le premier juge a enjoint à l'autorité préfectorale de réexaminer la situation des intéressés et qu'il a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

En ce qui concerne les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par les intimés :

22. Le présent arrêt, qui rejette les demandes présentées par Mme C... et M. A... tendant à l'annulation des arrêtés pris à leur encontre par le préfet de la Haute-Garonne après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Toulouse n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions présentées par les intimés aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les requêtes nos 23TL02080 et 23TL02082 :

23. Dès lors qu'il est statué au fond par le présent arrêt sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du jugement du 21 juin 2023 du magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse, les conclusions du préfet de la Haute-Garonne tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense par Mme C... et M. A... à cette demande de sursis à exécution, il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les frais liés aux litiges :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 s'opposent à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, les sommes réclamées par les intimés au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de Mme C... et M. A... tendant à leur admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Les articles 2, 3 et 4 du jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse du 21 juin 2023 sont annulés.

Article 3 : Les demandes présentées par Mme C... et M. A... devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que les conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de sursis à exécution présentées par le préfet de la Haute-Garonne dans les requêtes n° 23TL02080 et 23TL02082.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Mme F... C..., à M. D... A... et à Me Juliette Mercier.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

Le président-rapporteur,

D. ChabertLe président assesseur,

X. Haïli

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL02079...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02079
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Denis CHABERT
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : MERCIER

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;23tl02079 ?
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