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21/03/2024 | FRANCE | N°23TL00318

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 21 mars 2024, 23TL00318


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le maire de Nîmes a délivré un permis de construire à la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée pour la réalisation d'un bâtiment de quarante-trois logements, ainsi que la décision implicite par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux présenté le 24 novembre 2021 contre cet arrêté.



Par un jugement n° 2200957 du 6

décembre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B... ainsi que les conclusions...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2021 par lequel le maire de Nîmes a délivré un permis de construire à la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée pour la réalisation d'un bâtiment de quarante-trois logements, ainsi que la décision implicite par laquelle le maire a rejeté son recours gracieux présenté le 24 novembre 2021 contre cet arrêté.

Par un jugement n° 2200957 du 6 décembre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B... ainsi que les conclusions présentées par la société pétitionnaire sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 6 février 2023, le 24 avril 2023 et le 10 mai 2023, M. A... B..., représenté par la SCP VPNG, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Nîmes du 30 septembre 2021 et la décision implicite rejetant son recours gracieux présenté contre cet arrêté ;

3°) de désigner un expert écologue aux fins de constater la présence d'espèces animales protégées sur le terrain d'assiette du projet, de situer les arbres et abris concernés par cette présence et d'apprécier les impacts du projet sur la préservation de ces animaux ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Nîmes et de la société Vinci Immobilier Méditerranée le versement d'une somme de 3 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie de sa qualité et de son intérêt pour agir contre le permis de construire en litige en tant que propriétaire d'une parcelle limitrophe supportant une habitation ;

- les premiers juges ne peuvent être regardés comme ayant répondu à son moyen tiré du non-respect de l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes puisqu'ils n'ont pas précisé la hauteur de l'immeuble sur certaines de ses façades ;

- le projet méconnaît les règles fixées par cet article V UB 10 s'agissant de la hauteur de la construction ; le dossier de demande de permis est en outre insuffisant sur ce point ;

- le projet méconnaît l'article 9.2.1.2 du préambule du même règlement s'agissant de la capacité de stockage des bassins de rétention et de l'évacuation des eaux pluviales ;

- il méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et l'article V UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à l'aspect extérieur de la construction ;

- il méconnaît les articles 3 et 5 de la Charte de l'environnement, ainsi que l'article L. 411-1 du code de l'environnement et l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme en raison de la présence de spécimens d'espèces animales protégées sur la parcelle ;

- le projet en litige est, en outre, incompatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 du plan local d'urbanisme relative à la " nature en ville ".

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 mars 2023, le 13 avril 2023 et le 15 mai 2023, la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée, représentée par Me Boillot, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application des dispositions des articles L. 600-5 ou L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le requérant ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre le permis en litige ;

- les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 et 26 avril 2023, la commune de Nîmes, représentée par Me Merland, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le requérant ne justifie pas d'un intérêt pour agir contre le permis en litige ;

- les moyens invoqués par l'appelant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 15 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 30 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bézard, représentant M. B..., de Me Lenoir, représentant la commune de Nîmes, et de Me Boillot, représentant la société intimée.

Une note en délibéré produite par la société Vinci Immobilier Méditerranée, représentée par Me Boillot, a été enregistrée le 8 mars 2024.

Une note en délibéré produite par la commune de Nîmes, représentée par Me Merland, a été enregistrée le 11 mars 2024.

Considérant ce qui suit :

1. La société Vinci Immobilier Méditerranée a déposé le 10 mars 2021 une demande de permis de construire pour la réalisation d'un immeuble de niveau R + 3 et de quarante-trois logements, sur la parcelle cadastrée section EC n° 12, d'une superficie de 1 878 m2, située au n° 741 du chemin de Pissevin, sur le territoire de la commune de Nîmes (Gard). Par un arrêté du 30 septembre 2021, le maire de cette commune lui a délivré ce permis. Le recours gracieux présenté par M. B... contre cet arrêté le 24 novembre 2021 a été implicitement rejeté par le maire. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 6 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2021 ainsi que de la décision implicite portant rejet de son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Nîmes a répondu, au point 6, au moyen soulevé par M. B... tiré de ce que le projet en litige méconnaissait la règle de hauteur maximale prévue par l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes. Les premiers juges ont suffisamment exposé les raisons pour lesquelles ils ont écarté le moyen ainsi soulevé et la seule circonstance qu'ils n'ont pas précisé la hauteur de l'immeuble à l'aplomb des points hauts de certaines de ses façades n'est pas de nature à caractériser par elle-même l'irrégularité invoquée par l'appelant.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense :

3. L'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire (...) ". Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge administratif d'éléments relatifs à la nature, l'importance ou la localisation du projet.

4. En outre, l'article L. 600-1-3 du même code prévoit que : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que, sauf circonstances particulières, l'intérêt à agir d'un requérant contre un permis de construire s'apprécie au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, sans qu'il y ait lieu de tenir compte de circonstances postérieures, qu'elles aient pour effet de créer, d'augmenter, de réduire ou de supprimer les incidences du projet autorisé sur les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance visées à l'article L. 600-1-2.

5. Il ressort des pièces du dossier que l'appelant est propriétaire de la parcelle cadastrée ... laquelle est limitrophe du terrain d'assiette du projet sur une longueur de l'ordre de 30 mètres et supporte une maison d'habitation. Il a donc la qualité de voisin immédiat par rapport à ce terrain. L'opération en litige prévoit l'implantation d'un immeuble de niveau R + 3 et de plus de 60 mètres de longueur, à la place d'une maison individuelle, à moins de 5 mètres de la limite séparative. Eu égard à la nature et à l'importance du bâtiment projeté, à sa proximité de la propriété de M. B... et aux inconvénients susceptibles de résulter de son voisinage, alors même que le projet serait implanté en contrebas et partiellement masqué par la végétation, le requérant justifie d'un intérêt suffisant pour contester le permis litigieux. Si la société pétitionnaire fait valoir qu'une demande de certificat d'urbanisme a été enregistrée par les services de la commune de Nïmes le 16 mars 2023 pour l'édification d'un immeuble sur le terrain de l'appelant, la circonstance ainsi invoquée est postérieure à l'affichage en mairie de la demande de permis de construire et ne saurait donc priver le requérant de l'intérêt dont il justifiait à cette date pour contester l'autorisation en litige. Par suite, la fin de non-recevoir soulevée par la commune et la société pétitionnaire sur ce point ne peut qu'être écartée.

En ce qui concerne la légalité du permis de construire :

S'agissant de l'application de la règle relative à la hauteur maximale :

6. L'article R. 431-10 du code de l'urbanisme dispose que : " Le projet architectural comprend également : / (...) / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / (...) ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporte pas l'ensemble des documents exigés par le code de l'urbanisme ou que les documents produits soient insuffisants, imprécis ou inexacts, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou insuffisances ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. L'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes, applicable en zone V UB dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet de construction en litige, mentionne que : " Hauteur des constructions : / Pour l'ensemble de la zone V UB à l'exception des secteurs V UBa, V UBb et V UBc : / La hauteur maximale des constructions doit être égale, à l'égout des couvertures, à : / - 12 m (douze mètres) soit R + 3 maximum avec obligation du dernier niveau en retrait de 3 m (trois mètres) sur les façades des parcelles situées en bordure des voies de largeur supérieure à 6 m (six mètres) ; / - 9 m (neuf mètres) soit R + 2 maximum sur les parcelles situées en bordure des voies de largeur égale ou inférieure à 6 m (six mètres). / (...) / Règles particulières pour l'ensemble de la zone V UB : / (...) / 3) Pour l'ensemble des hauteurs : / - Parkings semi-enterrés, compris dans le volume de la construction, il sera admis une tolérance supplémentaire au maximum égale à la hauteur du sous-sol située au-dessus du terrain naturel. / Cette tolérance ne pourra excéder 1,50 m (un mètre cinquante). / Pour être considéré comme parking semi-enterré, le plancher fini du niveau semi-enterré devra se situer à au moins 1 m (un mètre) sous le niveau du terrain naturel. / (...) ". L'article 6.2 du préambule du même règlement, relatif aux règles en matière de hauteur, précise que : " (...) / 2) Pour toutes les constructions : / Sauf mention spécifique à la zone, les hauteurs maximales définies aux articles 10 des différents chapitres du présent règlement correspondent aux distances comprises entre le terrain naturel et l'égout de la toiture à l'aplomb du bâtiment. Le toit, les ouvrages techniques, les cheminées et autres superstructures en étant exclus. ".

8. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, si la société Vinci Immobilier Méditerranée a produit deux plans de coupe à l'appui de sa demande de permis de construire, les deux plans en cause se bornent à mentionner les cotes du terrain naturel aux extrémités de la parcelle et, pour l'un d'entre eux, à représenter une ligne droite ne correspondant pas au profil réel du sol naturel avant travaux, ce qui n'était suffisant ni pour apprécier la modification du terrain induite par le projet, ni pour vérifier le respect de la règle de hauteur maximale prévue par le règlement du plan local d'urbanisme. Il ressort toutefois de ces mêmes pièces que le dossier présenté par la société pétitionnaire contenait également en annexe de la notice hydraulique et de l'étude géotechnique un plan topographique précis de la parcelle mentionnant les cotes du terrain naturel en de nombreux points, lequel permettait de compenser l'imprécision des plans de coupe pour apprécier en connaissance de cause la hauteur de l'immeuble projeté. Dans ces conditions, le moyen tenant à l'insuffisance du dossier de demande de permis doit être écarté.

9. D'autre part, il est constant que la situation du terrain d'assiette du projet en litige a normalement pour effet de le soumettre à la règle de hauteur maximale de 12 mètres prévue par l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme cité au point 7 du présent arrêt. Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article 6.2 du préambule de ce règlement, rappelées au même point 7, que la hauteur maximale des constructions s'entend de la distance comprise entre le terrain naturel et l'égout de la toiture à l'aplomb du bâtiment s'agissant des constructions présentant un tel égout. Il résulte en outre de l'économie générale de ce règlement, éclairée par les indications du lexique qui y est annexé, que, s'agissant des bâtiments présentant comme en l'espèce une couverture plate dépourvue de tout égout de toiture, la hauteur maximale doit être mesurée entre le terrain naturel et le point haut constitué par le sommet de l'acrotère.

10. Il ressort des pièces du dossier et notamment du plan de masse et des plans de coupe joints par la société pétitionnaire à la demande de permis de construire que le niveau R + 3 de l'immeuble projeté présente une toiture terrasse pourvue d'un acrotère dont le sommet se situe à la cote de 79,48 mètres du nivellement général de la France (NGF). Il ressort par ailleurs du rapprochement du plan de masse et du plan topographique évoqué au point 8 ci-dessus que seule la façade sud et une partie de la façade ouest du niveau R+ 3 se trouvent à l'aplomb de points où le terrain naturel se trouve à une cote supérieure ou égale à 67,48 mètres NGF, correspondant à la différence d'altitude maximale de 12 mètres normalement autorisée. Dès lors que le lexique du règlement du plan local d'urbanisme impose de mesurer la hauteur sur la plus haute façade dans l'hypothèse d'un terrain en pente, le projet ne peut être regardé comme respectant la hauteur maximale de 12 mètres normalement applicable en vertu de l'article V UB 10 précité.

11. La commune de Nîmes fait valoir en défense que le projet litigieux présente un parking semi-enterré et qu'il peut donc bénéficier de la tolérance supplémentaire prévue par le point 3) des " règles particulières " énoncées par le même article V UB 10. Il ressort en effet du rapprochement des plans du projet et du plan topographique que le parc de stationnement prévu sous le bâtiment possède un plancher bas situé en tous points à au moins 1 mètre au-dessous du niveau du terrain naturel, ce qui permet de le regarder comme un parking semi-enterré au sens et pour l'application du point 3) précité. En prenant en compte le plancher du rez-de-chaussée de l'immeuble, lequel se trouve à la cote 67,20 mètres NGF, pour mesurer la hauteur du sous-sol située au-dessus du terrain naturel ainsi que le prévoit la formule de calcul mentionnée audit point 3), la construction projetée pourrait dès lors bénéficier d'une tolérance supplémentaire lui permettant d'atteindre la cote maximale de 79,20 mètres NGF. Dès lors que, comme il a été dit précédemment, le niveau R + 3 du bâtiment culmine à la cote 79,48 mètres NGF, le permis en litige n'est pas conforme à l'article V UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme.

S'agissant des mesures prévues pour la gestion des eaux pluviales :

12. Selon l'article 9.2.1.2 du préambule du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatif aux projets imperméabilisant le sol : " Modalités de réalisation des ouvrages de compensation de l'imperméabilisation : / Dimensionnement du dispositif de rétention : / 1) Pour ne pas aggraver le ruissellement, un système de compensation doit être réalisé pour chaque projet. / 2) La capacité de stockage pour compenser l'imperméabilisation sera égale à 100 litres par m² de surface imperméabilisée dès lors que le réseau pluvial aval est en capacité de transiter jusqu'au cadereau, aérien ou enterré. Dans le cas contraire, le volume de compensation pourra être augmenté. / La surface imperméabilisée prise en compte dans le calcul du volume de rétention à mettre en œuvre correspond à la somme de toutes les surfaces imperméabilisées de la parcelle : bâtiment, terrasse, abri de jardin, annexes, parking, voies d'accès. / (...) / Débit de fuite de l'ouvrage de rétention : / Le débit de fuite de l'ouvrage de rétention sera de préférence infiltré dans la parcelle. En cas d'impossibilité avérée d'infiltration sur la parcelle, il pourra être évacué vers le domaine public, réseau pluvial ou caniveau en l'absence d'une canalisation ou d'une impossibilité technique de raccordement. / (...) ".

13. D'une part, il est vrai que la pièce cotée PC 17 et la notice hydraulique annexées à la demande de permis de construire comportent des indications non concordantes s'agissant de la superficie imperméabilisée par le projet. Néanmoins, à supposer même que l'emprise au sol de 1 342 m2 mentionnée dans le tableau de la pièce PC 17 soit inférieure à la réalité ainsi que le soutient le requérant, l'intéressé ne conteste pas que la superficie imperméabilisée par l'opération ne dépasse pas le total de 1 463 m2 indiqué dans la notice hydraulique, lequel n'est par ailleurs pas contredit par les autres pièces du dossier. La même notice hydraulique précise en outre que la société pétitionnaire a prévu de mettre en place pour la gestion des eaux pluviales un système de rétention en toiture terrasse présentant un volume de stockage de 64 m3 ainsi que deux bassins de rétention au sol correspondant à un volume de stockage total de 82 m3. Le projet en litige prévoit par conséquent une capacité de rétention totale des eaux pluviales de 146 m3, laquelle permet de respecter le ratio de 100 litres par mètre carré de surface imperméabilisée tel qu'imposé par l'article 9.2.1.2 précité du préambule du règlement du plan local d'urbanisme. Il en résulte que le moyen tiré de l'insuffisance du volume de stockage des eaux pluviales doit être écarté.

14. D'autre part et en revanche, il ressort de la notice hydraulique complémentaire produite par la société pétitionnaire le 3 septembre 2021 que, si les deux bassins de rétention se vidangeront par infiltration dans le sol de la parcelle, les eaux des surverses de ces bassins et, surtout, le débit de fuite du système de rétention en toiture seront quant à eux évacués vers le réseau public situé sur le chemin de Pissevin, pour rejoindre l'ouvrage de rétention existant sur le stade de sport situé en contrebas. S'il est vrai que l'article 9.2.1.2 du préambule du règlement du plan local d'urbanisme n'exclut pas la possibilité d'évacuer le débit de fuite des ouvrages de rétention des eaux pluviales vers le domaine public, le recours à un tel procédé n'est toutefois permis, à titre dérogatoire, qu'en cas d'impossibilité avérée d'infiltrer les eaux concernées sur la parcelle. En l'espèce, alors que le porteur du projet indique préserver plus de 500 m2 d'espaces libres sur l'unité foncière, dont seulement 64 m2 sont occupés par les bassins de rétention au sol, ni le dossier de demande de permis, ni les intimées dans leurs écritures, n'expliquent les raisons pour lesquelles il serait impossible de privilégier une infiltration sur la parcelle pour le débit de fuite des ouvrages de rétention prévus. La prescription assortissant le permis de construire en page 5 de l'arrêté n'est pas de nature à remédier à cette insuffisance dès lors qu'elle n'exclut pas le rejet du débit de fuite vers le domaine public. Il en résulte que le permis en litige méconnaît, sur ce point, l'article 9.2.1.2 du préambule du règlement du plan local d'urbanisme.

S'agissant de l'aspect extérieur de la construction projetée :

15. L'article R. 111-27 du code de l'urbanisme dispose que : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Selon l'article V UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif à l'aspect extérieur des constructions : " Dispositions générales : / Les constructions à édifier ou à modifier ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. Elles doivent présenter une simplicité de volume, une unité d'aspect et de matériaux compatible avec la bonne économie de la construction. Le permis de construire peut être refusé si les travaux projetés sont de nature à rompre l'harmonie de l'ensemble. / (...) / Les constructions et aménagements extérieurs (clôtures, murs de soutènement, rampe d'accès...) doivent être conçus de manière à épouser au mieux le terrain naturel. / Aspect des façades et revêtements : / Toutes les façades des constructions doivent présenter une unité de traitement. Toutes les façades principales, latérales et postérieures des constructions doivent être traitées en harmonie entre elles, avec le même soin et en lien avec les constructions avoisinantes. / Les constructions d'aspect architectural contemporain sont autorisées, dans la mesure où elles participent à la mise en valeur du lieu dans lequel elles s'inscrivent. (...) / Couvertures et toitures : / Les toitures à pente et les toitures terrasses sont autorisées. / (...) ".

16. Les dispositions de l'article V UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme invoquées par le requérant ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et prévoient des exigences qui ne sont pas moindres. Par suite, c'est par rapport aux prescriptions de l'article V UB 11 que doit être appréciée la légalité du permis de construire. Il ressort à cet égard des pièces du dossier que, si les parcelles limitrophes du terrain d'assiette du projet supportent actuellement pour l'essentiel des maisons individuelles, ledit terrain se situe au sein d'un secteur urbanisé présentant une certaine densité et ne revêtant ni un caractère ou un intérêt particulier ni une réelle homogénéité architecturale. Le secteur accueille en particulier, à proximité de la parcelle litigieuse, un collège et des équipements sportifs, ainsi que plusieurs immeubles collectifs déjà bâtis ou en cours de réalisation. Les choix architecturaux retenus par la société Vinci Immobilier Méditerranée en termes de volumes, de matériaux et de couleurs ne sont par ailleurs pas contraires aux prescriptions susmentionnées du plan local d'urbanisme et, nonobstant son aspect contemporain, la construction projetée n'est pas de nature à porter atteinte au paysage urbain environnant. En délivrant le permis de construire contesté, le maire de Nîmes n'a donc commis aucune erreur d'appréciation au regard de l'article V UB 11 précité.

S'agissant de la prise en compte des préoccupations environnementales :

17. Selon l'article 3 de la Charte de l'environnement : " Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences. ". Selon l'article 5 de la même Charte : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ".

18. L'article L. 411-1 du code de l'environnement dispose que : " I. - Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits : / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; / (...) / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces ; / (...) ".

19. L'article R. 111-26 du code de l'urbanisme prévoit que : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. / (...) ". Les dispositions précitées du code de l'urbanisme ne permettent pas à l'autorité administrative de refuser un permis de construire, mais seulement de l'accorder sous réserve du respect de prescriptions spéciales relevant de la police de l'urbanisme, telles que celles relatives à l'implantation ou aux caractéristiques des bâtiments et de leurs abords, lorsque le projet de construction est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement.

20. D'une part, les dispositions de l'article 3 précité de la Charte de l'environnement ne sont pas directement opposables à un permis de construire, dont la légalité doit s'apprécier au regard des dispositions législatives prises pour assurer la mise en œuvre des principes énoncés par ledit article. En outre, les dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'environnement ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'un permis de construire, lequel est délivré sur le fondement d'une législation distincte de l'autorisation prévue par ces dispositions.

21. D'autre part, le terrain d'assiette du projet s'inscrit dans un secteur urbain ne faisant l'objet d'aucune protection particulière sur le plan environnemental. Si le requérant y a constaté la présence de spécimens d'écureuils roux et de chiroptères, notamment dans les arbres situés au sud de la parcelle, la simple observation ponctuelle de ces animaux ne suffit pas à établir que le site leur servirait de lieu de repos ou de reproduction et que la suppression de plusieurs arbres prévue par le projet porterait ainsi atteinte à l'habitat de ces espèces animales. Si l'appelant se prévaut par ailleurs de l'existence d'une zone naturelle d'inventaire écologique, faunistique et floristique au sud de la partie agglomérée de la commune, il ressort des pièces du dossier que la zone en cause se situe à près de 4 kilomètres du terrain d'assiette du projet, avec lequel elle ne présente aucune continuité écologique ou végétale. Il en est d'ailleurs de même s'agissant des lieux d'observation d'écureuils et de chiroptères identifiés par l'inventaire national du patrimoine naturel à plusieurs centaines de mètres au nord de la parcelle. Il n'est ainsi pas démontré que le projet de construction en litige serait de nature à entraîner des conséquences dommageables pour l'environnement. Par suite et sans qu'il soit besoin de procéder à une expertise écologique, le permis contesté n'est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ni au regard de l'article 5 de la Charte de l'environnement, ni au regard de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme.

S'agissant de la compatibilité du projet en litige avec l'orientation d'aménagement et de programmation n° 1 relative à la " nature en ville " :

22. Selon l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation. ". Une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux projetés sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs.

23. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes comprend une orientation d'aménagement et de programmation n° 1 intitulée " nature en ville ", laquelle vise à renforcer l'armature paysagère et écologique de la commune et à établir en particulier " une continuité essentiellement paysagère et potentiellement écologique " entre les secteurs de garrigue, le milieu urbain et la plaine agricole. Si, à travers ladite orientation n° 1, la commune de Nîmes a notamment entendu favoriser le maintien et le déplacement des espèces animales, préserver les espaces contribuant à la biodiversité et renforcer la densité des arbres au sein des espaces minéralisés, il apparaît néanmoins que le terrain d'assiette du projet n'est pas situé dans l'un des espaces identifiés comme présentant des enjeux à ce titre. En outre, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été mentionnés au point 21 ci-dessus, il n'est pas établi que le projet de la société intimée porterait atteinte aux continuités écologiques ou à la biodiversité et notamment aux espèces animales invoquées par le requérant. Enfin, alors que l'orientation n° 1 renvoie au règlement le soin de fixer des ratios concourant aux objectifs énoncés, l'appelant ne soutient ni que les ratios prescrits par l'article V UB 13 du règlement seraient insuffisants au regard des enjeux, ni qu'ils seraient méconnus par le projet. Dès lors, le permis de construire n'est pas incompatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation en cause.

Sur la possibilité d'une régularisation :

24. L'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (...). ". Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation est susceptible d'être régularisé en application de ces dispositions, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

25. Il résulte de ce qui précède que seuls sont fondés les moyens de la requête tirés de la méconnaissance, par le permis de construire en litige, des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatives à la hauteur maximale des bâtiments et à l'évacuation des eaux pluviales. Les illégalités ainsi relevées aux points 11 et 14 du présent arrêt sont susceptibles d'être régularisées par un permis modificatif, sans bouleverser le projet au point que sa nature même en serait changée. Il y a donc lieu de surseoir à statuer sur la présente requête, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant une durée de trois mois suivant la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation de ces vices.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. B..., sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, pendant une durée de trois mois suivant la notification du présent arrêt, pour permettre la régularisation des vices entachant le permis en litige tirés de la méconnaissance des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nîmes relatives, d'une part, à la hauteur maximale des constructions et, d'autre part, à l'évacuation des eaux pluviales.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Nîmes et à la société en nom collectif Vinci Immobilier Méditerranée.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL00318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00318
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Florian JAZERON
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP N. BEDEL DE BUZAREINGUES G. BOILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;23tl00318 ?
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