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21/03/2024 | FRANCE | N°22TL21067

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 21 mars 2024, 22TL21067


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... C... et Mme B... E... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2019 par lequel le maire de Noé n'a pas fait opposition à la déclaration préalable déposée par les époux A... pour la division d'un lot sur un terrain cadastrée C 1163 sis à 135 route de Longages, ensemble la décision rejetant leur recours gracieux.



Par un jugement n° 2000711 du 25 février 2022, le tribunal administratif de

Toulouse a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme B... E... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2019 par lequel le maire de Noé n'a pas fait opposition à la déclaration préalable déposée par les époux A... pour la division d'un lot sur un terrain cadastrée C 1163 sis à 135 route de Longages, ensemble la décision rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2000711 du 25 février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 avril 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 23 février 2023, M. et Mme C..., représentés par la SELARL Montazeau et Cara, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Noé du 5 septembre 2019, ensemble la décision rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Noé une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt à agir en leur qualité de voisins immédiats ;

- leur requête d'appel est recevable au regard du délai d'appel et des exigences de notification en vertu de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- le projet autorisé méconnaît l'article U2-3-1 du règlement du plan local d'urbanisme quant à la largeur minimale des voies et à l'exigence d'une aire de retournement alors que les pétitionnaires ne fournissent aucune servitude de passage permettant de desservir leur parcelle dans les largeurs qu'ils annoncent ;

- le projet est illégal dans la mesure où ils n'ont pas donné leur accord pour l'aggravation de la servitude de passage qu'engendre le projet ;

- les plans sont présentés de manière erronée, voire frauduleuse au vu du plan de géomètre annexé à l'acte notarié du 19 décembre 1981 et de la servitude au profit de la ... propriété A... ;

- alors que l'article U2-3-2 renvoie expressément aux règles minimales de desserte, notamment celles tenant à la défense contre l'incendie, rappelées dans le guide accessibilité du service départemental d'incendie et de secours de Haute-Garonne, la constructibilité ne saurait être acquise car le présent passage, qui se termine en impasse, n'est pas aménagé pour permettre aux véhicules de faire demi-tour et ni pour l'approche des engins de lutte contre l'incendie ;

- il manque une bande réservée de 1,5 mètre pour les " modes doux " de circulation, soit une piste cyclable en vertu du dernier alinéa de l'article U 2-3-2 du règlement du plan local d'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistré le 16 septembre 2022 et le 6 octobre 2022, la commune de Noé, représentée par Me Faure-Tronche, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de première instance est tardive :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U2-3-2 du règlement du plan local d'urbanisme s'agissant de l'absence d'une bande d'au moins 1,5 mètre de largeur réservée aux modes doux de circulation est inopérant dans la mesure où ces dispositions ne s'appliquent qu'aux voies de circulation nouvellement créées en sens unique et à double sens et que ladite bande est décomptée de la largeur minimale totale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2022, M. G... A... et Mme B... H... C... épouse A..., représentés par Me Canadas, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- la requête de première instance est tardive :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 1er mars 2023 par une ordonnance du 14 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique ;

- les observations de Me Montazeau, représentant les appelants ;

- et les observations de Me Faure-Tronche, représentant la commune de Noé.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 5 septembre 2019, le maire de Noé (Haute-Garonne) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de division foncière déposée par les époux A... pour la division d'un lot sur un terrain ... sis à 135 route de Longages. Par courrier du 26 octobre 2019, M. et Mme C..., propriétaires voisins du projet, ont exercé un recours gracieux contre cette décision auprès du maire. Par la présente requête, M. et Mme C... interjettent appel du jugement du 25 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande d'annulation de cette autorisation d'urbanisme et de la décision implicite rejetant leur recours gracieux

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée en défense :

2. Aux termes de l'article R.* 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R.* 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) ". L'article A. 424-17 de ce code dispose que : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : / " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme). / " Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme). " ".

3. L'exercice par un tiers d'un recours administratif ou contentieux contre un permis de construire montre qu'il a connaissance de cette décision et a, en conséquence, pour effet de faire courir à son égard le délai de recours contentieux, alors même que la publicité concernant ce permis n'aurait pas satisfait aux dispositions prévues en la matière par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme.

4. D'une part, il incombe à la partie défenderesse qui entend opposer une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête de démontrer cette tardiveté. En l'espèce, les parties défenderesses ne justifient pas que l'affichage de l'arrêté en litige comportait les mentions prévues par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme, notamment la mention relative au droit de recours. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... ont formé le 26 octobre 2019 un recours gracieux à l'encontre de la décision de non-opposition à déclaration préalable du 5 septembre 2019, révélant leur connaissance de cette décision et déclenchant à compter de cette date le délai de recours contentieux à leur égard. Toutefois, en l'absence de réponse du maire à leur recours gracieux, alors que l'existence alléguée par les défendeurs d'une décision de rejet de leur recours obtenue lors d'une réunion tenue le 27 novembre 2019 ne résulte pas des pièces du dossier, une décision implicite de rejet est née au plus tôt le 26 décembre 2019, de sorte que le délai de recours contentieux expirait le 27 février 2020 à minuit. Par suite, la requête de M. et Mme C... dirigée contre l'arrêté en litige ayant été enregistrée devant le tribunal administratif le 6 février 2020, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance ne peut être qu'être écartée.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté attaqué :

5. Selon l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique ". Il résulte de ces dispositions que les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

6. En premier lieu, aux termes de l'article U2-3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Noé, applicable à la zone U2 dans laquelle se situe le projet de division foncière en litige : " 1 - Accès / Pour être constructible, tout terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée ouverte à la circulation soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fond voisin (avec une largeur minimum de 3,50 m pour un lot et 4,50 m à partir du deuxième lot). Dans ce cas, le propriétaire devra produire une servitude de passage instituée par acte authentique ou par voie judiciaire en application de l'Art. 682 du Code Civil permettant notamment l'approche du matériel de lutte contre l'incendie(...) / ".

7. Le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, si l'administration et, en cas de recours, le juge administratif doivent s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique.

8. Il ressort des pièces du dossier que par un acte notarié du 19 décembre 1981, une servitude de passage a été consentie sur la parcelle cadastrée section C n° 1164 appartenant à M. et Mme F... au profit de la parcelle cadastrée section C n° 1163 appartenant à M. et Mme A..., en vue de permettre à cette dernière parcelle de bénéficier d'un accès au chemin départemental n° 28. Il ressort également des pièces du dossier que la demande préalable déposée par M. et Mme A... porte sur le détachement, à partir de l'unité foncière leur appartenant sur laquelle se situe leur habitation, d'un lot à bâtir d'une superficie de 1094 m². Aussi, par l'effet de cette division foncière, nonobstant son caractère échelonné, l'accès créé au moyen d'une servitude de passage conduit à desservir deux lots, soit le lot créé destiné à être bâti et la partie de la parcelle d'origine sur laquelle est implantée la maison de M. et Mme A.... Par conséquent, et dans ces conditions, le passage aménagé sur le fonds voisin destiné à desservir ces deux lots doit présenter une largeur minimale de 4,50 mètres en application des dispositions de l'article U2-3 précité du règlement du plan local d'urbanisme.

9. Il ressort des pièces du dossier que si le plan de masse figurant dans le dossier de déclaration préalable fait apparaître une largeur de cette voie d'accès de 4,50 mètres, le même plan comporte une mention d'un passage à 4 mètres, renvoyant à l'acte notarié précité du 19 décembre 1981, lequel indique une largeur d'environ 4 mètres et auquel est annexé un plan de bornage précisant que la largeur au droit de l'accès au chemin départemental est de seulement 4,18 mètres. Par suite, compte tenu de ces indications contradictoires et en l'absence de tout autre élément probant versé par la commune et les pétitionnaires, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce passage aménagé sur fonds voisin présenterait une largeur d'au moins 4,50 mètres comme imposé par la règle d'urbanisme applicable. Par ailleurs, M. et Mme A... ne peuvent utilement faire valoir qu'un élargissement à 4,5 mètres est prévu par un empiètement sur leur propre propriété alors que leur habitation est construite sur limite parcellaire donnant sur la servitude de passage. A cet égard, les conditions d'exécution de cet élargissement ne peuvent être regardées comme relevant de la réserve du droit des tiers dès lors que les dispositions susmentionnées de l'article U2-3 du règlement, relatives à la constructibilité de tout terrain, prescrivent la production d'une servitude de passage permettant notamment l'approche du matériel de lutte contre l'incendie.

10. Il résulte de ce qui précède que les appelants sont fondés à soutenir que la décision de non-opposition à la déclaration préalable de division foncière déposée par M. et Mme A... a été prise par le maire en méconnaissance des dispositions de l'article U2-3 du règlement du plan local d'urbanisme relatives au caractère constructible d'un terrain.

11. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen de la requête n'est de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté en litige.

12. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 septembre 2019 en litige et de la décision implicite du maire rejetant leur recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des appelants qui ne sont pas les parties perdantes à la présente instance, la somme que les parties défenderesses demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Noé une somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2000711 du 25 février 2022 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 5 septembre 2019 par lequel le maire de Noé n'a pas fait opposition à la déclaration préalable de division foncière déposée par M. et Mme A... et la décision rejetant le recours gracieux de M. et Mme C... sont annulés.

Article 3 : La commune de Noé versera une somme de 1 500 euros à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Les conclusions présentées par la commune de Noé et celles présentées par M. et Mme A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et Mme B... E... épouse C..., à la commune de Noé et à M. G... A... et Mme B... I... C... épouse A....

Délibéré après l'audience du 7 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL21067 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21067
Date de la décision : 21/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : FAURE-TRONCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-21;22tl21067 ?
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