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12/03/2024 | FRANCE | N°22TL00223

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 12 mars 2024, 22TL00223


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes :

1°) d'annuler la décision du 24 avril 2019 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard l'a placé en congé de maladie ordinaire du 1er octobre 2018 au 29 mai 2019 et a mis à sa charge les frais et soins en relation avec son accident de service, ainsi que la décision du 26 septembre 2019 rejetant son recours gracieux ;

2°)

d'enjoindre à l'autorité territoriale de prendre en charge, à compter du 1er octobre 2018, ses ar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes :

1°) d'annuler la décision du 24 avril 2019 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard l'a placé en congé de maladie ordinaire du 1er octobre 2018 au 29 mai 2019 et a mis à sa charge les frais et soins en relation avec son accident de service, ainsi que la décision du 26 septembre 2019 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre à l'autorité territoriale de prendre en charge, à compter du 1er octobre 2018, ses arrêts de travail et les soins induits au titre de la rechute de son accident imputable au service du 7 novembre 1999 et, en conséquence, de régulariser sa rémunération pour les périodes du 15 novembre 2018 au 13 mars 2019 et du 5 au 29 mai 2019, et de lui rembourser le jour de carence du 1er octobre 2019 ;

3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1904161 du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a :

- annulé les décisions des 24 avril 2019 et 26 septembre 2019,

- enjoint au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision plaçant M. D... en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur la rémunération de M. D... et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement,

- mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative,

- et rejeté le surplus de la demande de M. D....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°22MA00223, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°22TL00223, et un mémoire enregistré le 5 juin 2023, M. F... D..., représenté par Me Coudurier de la SCP Coudurier et Chamski, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer ce jugement du 18 novembre 2021 en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail sur la totalité de la période allant jusqu'au 30 septembre 2019 ;

2°) de rejeter l'appel incident du service départemental d'incendie et de secours du Gard ;

3°) d'enjoindre au président du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019, avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur sa rémunération ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- la mise en congé maladie imputable au service ne pouvait être limitée du 1er au 29 octobre 2018 au regard de la nécessité de traitements longs et prolongés ;

- la décision du 26 septembre 2019 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et a été prise en violation de l'article 57 alinéa 2 de la loi du 26 janvier 1984 dès lors que les arrêts de travail depuis le 1er octobre 2018 sont la conséquence directe et certaine de l'accident de service du 7 novembre 1999, s'agissant d'une rechute ; il en est de même de la prise en charge des soins relatifs aux acouphènes ;

- sa demande devant le tribunal administratif n'était pas tardive ;

- il a présenté une demande d'annulation des décisions contestées et non une demande indemnitaire.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 janvier 2023 et 23 octobre 2023, le service départemental d'incendie et de secours du Gard, représenté par Me Journault, conclut au rejet de la requête et demande, par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 18 novembre 2021 et de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir que :

- le lien direct et certain entre les arrêts de travail de M. D... et le service n'est pas établi, en l'absence d'aggravation de son état ou d'une nouvelle lésion ;

- d'une part, ces arrêts concernent la période courant jusqu'au 29 mai 2019 et non jusqu'au 30 septembre 2019 et, d'autre part, son état a été déclaré consolidé en janvier 2003 ;

- seule la période du 1er au 5 octobre 2018 peut être considérée comme présentant un lien direct avec l'accident de service, celle du 16 au 29 octobre 2018 étant dépourvue de lien direct avec celui-ci ;

- les conséquences financières dont il demande la prise en charge sont patrimoniales et se confondent avec celles réparées par l'allocation temporaire d'invalidité ;

- les soins relatifs aux acouphènes, dont le montant n'a jamais été communiqué au service et dont la matérialité n'est pas établie, ne peuvent être pris en charge en l'absence de nécessité.

Par ordonnance du 25 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Journault, représentant le service départemental d'incendie et de secours du Gard.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., qui exerçait en qualité d'adjudant de sapeur-pompier professionnel, a été victime d'un accident reconnu imputable au service le 7 novembre 1999 alors qu'il était affecté au centre de secours d'Uzès. Son état de santé a été déclaré consolidé le 13 janvier 2003 et son taux d'incapacité a été fixé à 38 % avec effet au 13 janvier 2003, puis porté à 54 % à compter du 13 janvier 2008. L'intéressé a obtenu à ce titre l'attribution de l'allocation temporaire d'invalidité pour un montant de près de 600 euros par mois. M. D... a été placé en arrêt de travail à compter du 1er octobre 2018. Il a transmis à son employeur des certificats médicaux d'accident de travail pour la période et demandé la prise en charge de ses arrêts courant jusqu'au 29 mai 2019 au titre d'une rechute de son accident de service du 7 novembre 1999, ainsi que les soins reçus pendant cette période. Par une décision du 24 avril 2019, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard a rejeté sa demande, l'a placé en congé de maladie ordinaire du 1er octobre 2018 au 29 mai 2019 et a mis à sa charge les frais et soins en relation avec son accident. Son recours gracieux a été rejeté le 26 septembre 2019. M. D... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation des décisions prises les 24 avril et 26 septembre 2019. Par un jugement du 18 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé ces décisions et a enjoint au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision plaçant M. D... en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur la rémunération de l'intéressé, et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019. M. D... relève appel de ce jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de reconnaissance de l'imputabilité au service de ses arrêts de travail sur la totalité de la période allant jusqu'au 30 septembre 2019 et demande d'enjoindre au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service jusqu'à cette date, avec toutes les conséquences financières qu'une telle décision implique sur sa rémunération. Le service départemental d'incendie et de secours du Gard demande, par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 18 novembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans leur rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 58. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

3. Lorsque l'état d'un fonctionnaire est consolidé postérieurement à un accident imputable au service, le bénéfice de ces dispositions est subordonné, non pas à l'existence d'une rechute ou d'une aggravation de sa pathologie, mais à l'existence de troubles présentant un lien direct et certain avec l'accident de service.

4. Pour refuser de prendre en charge les arrêts de travail de M. D... à compter du 1er octobre 2018 au titre de l'accident de service dont il a été victime le 7 novembre 1999, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard s'est fondé sur l'absence de rechute de l'accident initial et sur la circonstance que ces arrêts ne peuvent être considérés ni comme justifiés ni comme nécessaires, alors même que le lien entre les troubles et l'accident initial n'est pas contesté. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui a été victime d'un traumatisme crânien avec vertiges et surdité à la suite de l'accident de service du 7 novembre 1999, présente une surdité nécessitant le port de prothèses auditives, ainsi que des acouphènes invalidants. Il a été hospitalisé du 1er au 5 octobre 2018 à la clinique du docteur A... C... pour y subir un traitement destiné à diminuer la gêne des acouphènes, puis du 16 au 29 octobre 2018 en centre de soins de suite à la clinique les Oliviers afin de reprendre une thérapie permettant également de réduire ces acouphènes. Selon le certificat médical de son médecin traitant du 20 novembre 2018 et celui du médecin de la clinique du docteur A... C... du 22 novembre 2018, un traitement par appareillage masqueur d'acouphènes d'une durée de douze mois était prévu à la suite de la première hospitalisation. Si ces soins présentent un lien direct et certain avec l'accident de service du 7 novembre 1999, ainsi qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le service départemental d'incendie et de secours, il ne ressort cependant d'aucune pièce médicale produite que la poursuite du traitement à l'issue de la seconde hospitalisation, limitée au port de cet appareillage pendant une durée maximale de six heures par jour, faisait obstacle à la poursuite de l'activité professionnelle de M. D..., laquelle ne comporte que des tâches administratives, à l'exclusion de toute intervention sur le terrain. Ainsi, selon le docteur E..., les acouphènes invalidants dont souffre M. D... nécessitent des périodes régulières de mise en place d'un masqueur d'acouphènes d'une durée d'un à deux mois. En outre, selon l'expert B..., la thérapie sonore suivie à compter d'octobre 2018, qui ne nécessite que 2 heures par jour et non 8 heures, est compatible avec une activité professionnelle à temps plein. Si cet expert a estimé que ces soins ne présentaient pas un caractère de nécessité, il ressort cependant des pièces médicales produites que cette thérapie a été prescrite à M. D... dans un contexte de recrudescence des acouphènes dont il souffrait depuis le printemps 2018. Par suite, elle présentait un caractère d'utilité directe pour M. D..., alors même que son état ne se serait pas aggravé de manière sensible comme l'a constaté le dernier expert mandaté. Dans ces conditions, en dépit de la circonstance que la commission de réforme a émis, le 10 septembre 2019, un avis favorable à l'imputabilité à l'accident de service des arrêts de travail de M. D... du 1er octobre 2018 au 31 mars 2019, seule la prise en charge des arrêts de travail au titre de la période du 1er au 29 octobre 2018, date de sortie de M. D... de la clinique les Oliviers, est justifiée en raison du lien direct et certain avec l'accident de service initial.

5. S'agissant ensuite de la prise en charge des soins relatifs aux acouphènes, il résulte de ce qui vient d'être exposé que, contrairement à ce que persiste à faire valoir le service départemental d'incendie et de secours du Gard, la thérapie suivie par M. D... présentait un caractère d'utilité directe. Alors que l'allocation temporaire d'invalidité n'a pas vocation à réparer les conséquences financières d'un accident de service portant sur les frais de santé, M. D... était fondé à solliciter la prise en charge de ces frais au titre de la totalité de la période des soins, soit jusqu'au 30 septembre 2019.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a seulement fait droit de manière partielle à sa demande en enjoignant au service départemental d'incendie et de secours du Gard de prendre une nouvelle décision le plaçant en congé de maladie imputable au service du 1er au 29 octobre 2018 avec toutes les conséquences qu'une telle décision implique sur sa rémunération, et de prendre en charge au titre du régime des accidents de service les soins relatifs aux acouphènes entre le 1er octobre 2018 et le 30 septembre 2019. Il y a lieu par voie de conséquence de rejeter les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par le service départemental d'incendie et de secours du Gard tendant à l'annulation du jugement.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... une somme au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours du Gard et non compris dans les dépens.

9. En l'absence de dépens au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions des parties tendant à l'attribution de leur charge sont sans objet et doivent donc être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le service départemental d'incendie et de secours du Gard au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative et à fin d'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au service départemental d'incendie et de secours du Gard.

Délibéré après l'audience du 27 février 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22TL00223 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00223
Date de la décision : 12/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-04 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : JOURNAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-12;22tl00223 ?
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