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05/03/2024 | FRANCE | N°22TL21420

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 05 mars 2024, 22TL21420


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée unipersonnelle Relais de la Fabrègue a saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande devant être regardée comme tendant, d'une part, à contester la validité de la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le maire de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille a prononcé la résiliation de la convention d'occupation du domaine public conclue le 6 mars 2018, et d'autre part, à ordonner la reprise des relations contractuelles. La société Rela

is de la Fabrègue a également demandé à ce tribunal de prononcer la résiliation de la conve...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle Relais de la Fabrègue a saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande devant être regardée comme tendant, d'une part, à contester la validité de la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le maire de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille a prononcé la résiliation de la convention d'occupation du domaine public conclue le 6 mars 2018, et d'autre part, à ordonner la reprise des relations contractuelles. La société Relais de la Fabrègue a également demandé à ce tribunal de prononcer la résiliation de la convention d'occupation du domaine public aux torts exclusifs de la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille.

Par un jugement n° 2000773 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2022, et un mémoire, enregistré le 7 février 2024, la société Relais de la Fabrègue, représentée par Me Vrignaud, doit être regardée comme demandant à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 19 avril 2022 ;

2°) à titre principal, d'écarter la validité de la décision du 20 décembre 2019 du maire portant résiliation de la convention d'occupation du domaine public conclue le 6 mars 2018 et d'ordonner la reprise des relations contractuelles ;

3°) de prononcer la résiliation de la convention d'occupation du domaine public aux torts exclusifs de la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner cette commune à lui verser une somme de 70 400 euros en réparation de la résiliation fautive de la convention d'occupation du domaine public ;

5°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de résiliation de la convention d'occupation du domaine public en litige est insuffisamment motivée ;

- cette mesure de résiliation n'est pas fondée dès lors qu'aucune faute suffisamment grave ne peut lui être reprochée ; la majorité des motifs retenus par la décision de résiliation de la convention en litige n'est pas matériellement établie ; pour les motifs restants, ils ne sont pas d'une gravité suffisante ;

- cette mesure est entachée d'un détournement de procédure ;

- par la voie de l'exception d'illégalité, la délibération du conseil municipal ayant approuvé la résiliation de la convention en litige, est insuffisamment motivée ;

- la résiliation fautive de la convention d'occupation du domaine public lui cause un manque à gagner qu'elle évalue à 70 400 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2024, la commune de Saint-Sébastien d'Aigrefeuille, représentée par Me d'Albenas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la société appelante n'a pas intérêt lui donnant qualité pour agir dès lors qu'à la date de la convention en litige, la société n'existait pas ;

- la décision portant résiliation et la délibération du conseil municipal du 19 décembre 2019 sont suffisamment motivées ;

- la décision de résilier la convention en litige ne procède d'aucun détournement de pouvoir ;

- le non-respect des clauses contractuelles motivant la résiliation de la convention en litige est matériellement établi.

En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettre du 7 février 2024, que la cour est susceptible de soulever d'office l'existence d'un non-lieu à statuer sur la demande de la société appelante tendant à la contestation de la validité de la décision portant résiliation de la convention d'occupation du domaine public conclue le 6 mars 2018 et tendant à la reprise des relations contractuelles dès lors qu'en application de l'article 3 de la convention en litige celle-ci a pris fin de plein droit le 31 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Beltrami,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Chatron, représentant la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention du 6 mars 2018, la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille (Gard) a mis à disposition de la société Relais de la Fabrègue un espace commercial en vue de l'exploitation d'une épicerie de dépannage, un dépôt de pain et viennoiseries, un espace de petite restauration avec équipement cuisine et un débit de boissons avec licence IV, pour une durée de cinq ans. Par une décision du 20 décembre 2019, le maire de la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille a prononcé la résiliation de la convention sur le fondement de son article 14.1. La société Relais de la Fabrègue relève appel du jugement du 19 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes devant être regardées comme tendant, d'une part, à contester la validité de la décision de résiliation de la convention en litige du 20 décembre 2019 et, d'autre part, à ordonner la reprise des relations contractuelles.

Sur les conclusions en contestation de la validité de la décision de résiliation de la convention d'occupation et tendant à la reprise des relations contractuelles :

2. D'une part, le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions " aux fins d'annulation " d'une mesure de résiliation, de les regarder comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.

3. D'autre part, il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité. Dans l'hypothèse où il fait droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il peut décider, si des conclusions sont formulées en ce sens, que le requérant a droit à l'indemnisation du préjudice que lui a, le cas échéant, causé la résiliation, notamment du fait de la non-exécution du contrat entre la date de sa résiliation et la date fixée pour la reprise des relations contractuelles.

4. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés, d'une part, de l'insuffisance de motivation de la décision de résiliation de la convention d'occupation du domaine public et de la délibération du conseil municipal ayant approuvé la résiliation de la convention en litige et d'autre part, du détournement de pouvoir par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au points 2, 3, 5 et 7 de son jugement.

5. En second lieu, la convention conclue le 6 mars 2018 par la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille, commune rurale de 500 habitants, indique, dans l'exposé de ses motifs, qu'elle a entendu mettre en place un espace commercial offrant à la population locale plusieurs services dont, en particulier, une épicerie, un dépôt de pain et viennoiserie et de journaux, un bar avec licence IV, un espace de petite restauration. Même si ce dernier avait vocation à attirer, outre les habitants de la commune, la population de passage et touristique afin de le rendre attractif et donc rentable, l'espace commercial précité était destiné, en priorité, à pallier le manque de commerces offerts aux habitants de la commune. Il résulte toutefois de l'instruction que la société appelante a axé son activité sur la restauration à destination d'une clientèle de passage et des touristes disposant d'un pouvoir d'achat plus élevé que celui des habitants de la commune, au détriment des autres services, estimés moins rentables, tels que l'épicerie et le dépôt de pain. À cet égard, il est matériellement établi que le service de bar n'était pas disponible durant les horaires des repas. De même, le service de dépôt de pain et viennoiserie n'était pas réellement assuré puisqu'il ne fonctionnait que sur commande. En outre, l'épicerie était insuffisamment achalandée. Il résulte ainsi de l'instruction que l'espace commercial mis à disposition de la société appelante a été principalement affecté à une activité de restaurant qui ne correspondait pas au point multiservices contractuellement prévu par la convention en litige. Ce manquement contractuel, matériellement établi, était suffisamment grave pour justifier, à lui seul, la résiliation de la convention d'occupation litigieuse.

6. Il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes en contestation de la validité de la décision de résiliation de la convention d'occupation et tendant à la reprise des relations contractuelles.

7. Par voie de conséquence, ses conclusions indemnitaires, présentées pour la première fois en appel, fondées sur la résiliation fautive de la convention d'occupation en litige, doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme réclamée par la société appelante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société appelante une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de la société Relais de la Fabrègue est rejetée.

Article 2 : La société Relais de la Fabrègue versera à la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée unipersonnelle Relais de la Fabrègue et à la commune de Saint-Sébastien-d'Aigrefeuille.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2024.

La rapporteure,

K. Beltrami

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL21420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21420
Date de la décision : 05/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02-04 Marchés et contrats administratifs. - Fin des contrats. - Résiliation. - Pouvoirs du juge.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: Mme Karine BELTRAMI
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : ELEOM NIMES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-05;22tl21420 ?
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