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29/02/2024 | FRANCE | N°22TL21293

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 29 février 2024, 22TL21293


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Montauban a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre exécutoire n° 013537 d'un montant de 152 449 euros émis à son encontre le 31 décembre 2018 par le département de Tarn-et-Garonne au titre de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire de Montauban pour l'année 2017 et de prononcer la décharge de cette somme.



Par un jugement n° 1901436 du 7 avril 2022, le tribunal administratif

de Toulouse a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Montauban a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre exécutoire n° 013537 d'un montant de 152 449 euros émis à son encontre le 31 décembre 2018 par le département de Tarn-et-Garonne au titre de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire de Montauban pour l'année 2017 et de prononcer la décharge de cette somme.

Par un jugement n° 1901436 du 7 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2022 la commune de Montauban, représentée par Me Pélissier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler le titre exécutoire n° 013537 d'un montant de 152 449 euros émis à son encontre le 31 décembre 2018 par le département de Tarn-et-Garonne au titre de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire de Montauban pour l'année 2017 ;

3°) de prononcer la décharge de la somme de 152 449 euros ;

4°) de mettre à la charge du département de Tarn-et-Garonne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges n'ont pas examiné prioritairement les moyens qu'elle soulevait mettant en cause le bien-fondé du titre exécutoire ;

- il est également irrégulier dès lors que les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier en considérant, à tort, que le titre exécutoire critiqué portait sur sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire situé à Montauban pour l'année universitaire 2017-2018 ;

- le titre exécutoire est insuffisamment motivé quant aux bases de calcul de la créance ;

- les bases de liquidation de la créance sont erronées puisque le titre exécutoire mentionne sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année 2017, alors que le tribunal administratif a jugé, à tort, que ce titre exécutoire portait sur sa participation financière aux frais de fonctionnement de ce centre pour l'année universitaire 2017-2018 ;

- les conditions auxquelles était contractuellement subordonnée sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire, à savoir la production par le département d'un état récapitulatif des dépenses et son association de plein droit au conseil de gestion du centre universitaire, prévues respectivement par les articles 3 et 4 de la convention, n'étaient pas satisfaites ;

- le montant total des sommes réclamées par le département de Tarn-et-Garonne au titre de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année 2017 excède le montant maximal stipulé par l'article 3 de la convention du 11 mai 2000.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2023, le département de Tarn-et-Garonne, représenté par Me Heymans, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Montauban la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Montauban ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 4 décembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Restino,

- les conclusions de M. Clen, rapporteur public,

- et les observations de Me Platel, représentant le département de Tarn-et-Garonne.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention conclue le 11 mai 2000, le département de Tarn-et-Garonne et la commune de Montauban se sont engagés à participer financièrement au fonctionnement du centre universitaire situé à Montauban. Le 31 décembre 2018, le département de Tarn-et-Garonne a émis à l'encontre de la commune de Montauban un titre exécutoire n° 013537 d'un montant de 152 449 euros pour avoir paiement de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année 2017. Par un jugement du 7 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de la commune de Montauban tendant à l'annulation de ce titre exécutoire et à la décharge de la somme de 152 449 euros. La commune de Montauban relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, l'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions à fin de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre dès lors que, statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse.

3. Dès lors que le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de la commune de Montauban, les principes rappelés au point 2 ne lui imposaient pas d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre exécutoire. Par suite et en tout état de cause, la commune de Montauban n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité au motif qu'il s'est prononcé sur les moyens relatifs à la régularité en la forme du titre exécutoire avant ceux relatifs au bien-fondé de la créance.

4. En second lieu, la commune de Montauban ne peut utilement se prévaloir, pour contester la régularité du jugement attaqué, de ce que les premiers juges auraient dénaturé les pièces du dossier en estimant que le titre exécutoire critiqué était relatif aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année universitaire 2017-2018.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité en la forme du titre exécutoire :

5. L'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique dispose que : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet (...) d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur.

6. Il résulte de l'instruction que le titre exécutoire critiqué porte la mention " frais particip 2017 CU 82 + Conv. 11/05/2000 + Ext. Regi Delib CM 27/04/2000 + Recap dépense ". Ce titre indique la nature de la créance et fait expressément référence à la convention du 11 mai 2000 sur la base de laquelle est appelée la créance, ainsi qu'à l'état récapitulatif du 15 octobre 2018 préalablement adressé à la commune par le département. Cet état récapitulatif indique le montant total des dépenses de fonctionnement exposées par le département pour le fonctionnement du centre universitaire en 2017, s'élevant à 736 127 euros. Il précise que ce montant correspond à des dépenses de fluides à hauteur de 54 189 euros, des dépenses documentation et vie étudiante à hauteur de 29 993 euros, des dépenses de fonctionnement, petits équipements et gestion administrative à hauteur de 4 979 euros et des dépenses de personnel à hauteur de 646 966 euros.

7. D'une part, comme exposé au point 5, la motivation d'un titre exécutoire s'apprécie au regard des dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012. Par suite, la commune de Montauban n'est pas fondée à soutenir que le titre exécutoire critiqué est insuffisamment motivé au motif que l'état récapitulatif du 15 octobre 2018 ne respecte pas les exigences fixées par les stipulations de la convention du 11 mai 2000. D'autre part, ce document, auquel renvoie expressément le titre exécutoire critiqué et qui avait été préalablement adressé à la commune de Montauban, indique les différents éléments de la dette, par catégories de dépenses, et leur montant respectif comme exposé au point 6. Si la commune de Montauban soutient que cet état récapitulatif serait incomplet au motif qu'il ne mentionne pas de dépenses de maintenance, le département de Tarn-et-Garonne fait en tout état de cause valoir, sans être utilement contredit, qu'il n'a pas exposé de telles dépenses au cours de l'année 2017 pour le fonctionnement du centre universitaire. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation du titre exécutoire doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé du titre exécutoire :

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire critiqué a été émis pour avoir paiement de la participation financière de la commune de Montauban aux frais de fonctionnement du centre universitaire situé sur son territoire pour l'année 2017. La circonstance que les premiers juges ont estimé que cette participation avait vocation à financer le fonctionnement d'une année universitaire est sans incidence à cet égard. Par suite, le moyen tiré de ce que les bases de liquidation de la participation financière de la commune de Montauban aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année 2017 seraient erronées manque en fait et ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, l'attribution d'une subvention par une personne publique crée des droits au profit de son bénéficiaire. Toutefois, de tels droits ne sont ainsi créés que dans la mesure où le bénéficiaire de la subvention respecte les conditions mises à son octroi, que ces conditions découlent des normes qui la régissent, qu'elles aient été fixées par la personne publique dans sa décision d'octroi, qu'elles aient fait l'objet d'une convention signée avec le bénéficiaire, ou encore qu'elles découlent implicitement mais nécessairement de l'objet même de la subvention.

10. D'une part, aux termes de l'article 3 de la convention conclue le 11 mai 2000 entre le département de Tarn-et-Garonne et la commune de Montauban : " La ville de Montauban s'acquittera de sa participation financière aux dépenses de fonctionnement, à hauteur de 50 %, sur la base d'un relevé récapitulatif. / Les dépenses prises en charge par la ville n'excèderont pas les sommes suivantes : / - Participation forfaitaire : 600 000 F en 1998 / 750 000 F en 1999 / 1 000 000 F à partir de l'an 2000 / - Echéancier : fin d'année universitaire ". En l'absence de précision, par ces stipulations, quant au formalisme et au niveau de détail attendu dans l'établissement du relevé récapitulatif, le document adressé à la commune de Montauban le 15 octobre 2018 et dont le contenu a été rappelé au point 6, doit être regardé comme satisfaisant aux exigences prévues conventionnellement. Par suite, le moyen tiré de ce que le département de Tarn-et-Garonne n'aurait pas respecté ces stipulations, pour ce motif, doit être écarté.

11. D'autre part, l'article 4 de cette même convention stipule que : " La commune de Montauban est associée de plein droit au conseil de gestion du site universitaire ". Contrairement à ce qui est soutenu et en tout état de cause il ne résulte pas de ces stipulations que la participation financière de la commune de Montauban aux frais de fonctionnement du centre universitaire serait subordonnée à son association au conseil de gestion du site universitaire. Par suite, le moyen doit être écarté.

12. En dernier lieu et comme exposé au point 8, selon la commune de Montauban, les premiers juges ont estimé à tort que le titre exécutoire critiqué a été émis pour avoir paiement de sa participation financière aux frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année universitaire 2017-2018, et non pas pour l'année 2017. Dès lors que, par un titre exécutoire n° 23 émis le 17 janvier 2020, le département de Tarn-et-Garonne a mis à sa charge une somme de 152 449 euros pour avoir paiement de sa participation financière aux frais de fonctionnement de ce centre universitaire pour le premier semestre de l'année 2018, la commune de Montauban soutient que le montant total des sommes qui lui sont réclamées par le titre en litige excède le montant maximal stipulé par l'article 3 de la convention du 11 mai 2000, à savoir 1 000 000 francs (152 449 euros). Toutefois, comme exposé au point 8, il résulte de l'instruction que le titre exécutoire critiqué a été émis pour avoir paiement de la participation financière de la commune de Montauban au frais de fonctionnement du centre universitaire pour l'année 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que le titre exécutoire en litige ferait double emploi avec le titre exécutoire n° 23 du 17 janvier 2020 émis pour l'année 2018, de sorte que la créance en litige excèderait le montant maximal stipulé par la convention du 11 mai 2000, doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Montauban n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de Tarn-et-Garonne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la commune de Montauban, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions au bénéfice du département de Tarn-et-Garonne.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Montauban est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département de Tarn-et-Garonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Montauban et au département de Tarn-et-Garonne.

Délibéré après l'audience du 8 février 2024, où siégeaient :

- M. Lafon, président, assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Restino, première conseillère,

- Mme Chalbos, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 février 2024.

La rapporteure,

V. RestinoLe président,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21293
Date de la décision : 29/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-03-02-01-01 Comptabilité publique et budget. - Créances des collectivités publiques. - Recouvrement. - Procédure. - État exécutoire.


Composition du Tribunal
Président : M. LAFON
Rapporteur ?: Mme Virginie RESTINO
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : ADALTYS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-29;22tl21293 ?
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