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15/02/2024 | FRANCE | N°22TL00146

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 15 février 2024, 22TL00146


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le maire de Cornillon a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la construction d'un hangar agricole.



Par un jugement n° 2000590 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté et a mis à la charge de la commune de Cornillon une somme de 1 200 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.



Procédure devant la cour :



Par une requête et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le maire de Cornillon a refusé de lui délivrer un permis de construire en vue de la construction d'un hangar agricole.

Par un jugement n° 2000590 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté et a mis à la charge de la commune de Cornillon une somme de 1 200 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 22MA00146 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL00146 les 14 janvier 2022 et 27 avril 2023, la commune de Cornillon, représentée par Me Rey, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus opposé à la demande de permis de construire n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme dès lors que la nécessité fonctionnelle de la construction projetée pour les besoins de l'exploitation fait défaut et que le projet de construction est manifestement disproportionné par rapport à l'activité agricole de Mme A..., l'activité équine de cette dernière ne pouvant pas être qualifiée d'activité agricole ;

- le projet en litige ne respecte pas les dispositions de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme et le maire était tenu de refuser la demande de permis de construire pour ce motif dès lors que l'adaptation mineure demandée n'est pas rendue nécessaire par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 mars 2023 et 30 octobre 2023, Mme A..., représentée par Me Tardivel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Cornillon une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la commune de Cornillon ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la commune de Cornillon.

Par ordonnance du 19 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rouault, représentant Mme A....

Une note en délibéré, présentée par Mme A..., représentée par Me Tardivel, a été enregistrée le 2 février 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Le 20 août 2019, Mme A... a déposé une demande de permis de construire en vue de la construction d'un hangar agricole sur une parcelle ..., sur le territoire de la commune de Cornillon (Gard). Par arrêté du 18 décembre 2019, le maire de Cornillon a, après avis défavorable conforme du préfet du Gard émis le 24 septembre 2019, refusé de faire droit à sa demande en se fondant, d'une part, sur le motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme et, d'autre part, après avoir constaté que le préfet du Gard avait émis un avis défavorable, sur l'absence de nécessité du hangar agricole pour les besoins de l'exploitation agricole de Mme A... au sens des dispositions du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme. La commune de Cornillon relève appel du jugement par lequel du tribunal administratif de Nîmes a annulé cet arrêté et a mis à sa charge une somme de 1 200 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne les motifs retenus par le tribunal administratif :

2. Pour annuler le refus de permis de construire en litige, le tribunal administratif s'est fondé sur l'illégalité de l'avis conforme défavorable du préfet du Gard, lequel ne pouvait légalement considérer que le projet en litige ne relevait pas de l'exception prévue au 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme dès lors que Mme A... démontrait la nécessité du hangar agricole pour les besoins de son exploitation agricole. Les premiers juges ont également estimé qu'il ne résultait pas de l'instruction que le maire de Cornillon aurait, s'il n'avait retenu que le motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme, pris la même décision alors que le non-respect des règles d'implantation de la construction sur une distance de 18 centimètres aurait pu faire l'objet d'une adaptation mineure.

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". Aux termes de l'article L. 111-4 du même code : " Peuvent toutefois être autorisés en dehors des parties urbanisées de la commune : / (...) 2° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole (...) dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; (...) ".

4. En application des dispositions précitées du 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, la construction projetée doit être liée à l'activité agricole mais elle doit aussi lui être nécessaire. Le lien de nécessité, qui doit faire l'objet d'un examen au cas par cas, s'apprécie entre, d'une part, la nature et le fonctionnement des activités de l'exploitation agricole et, d'autre part, la destination de la construction ou de l'installation projetée. Il s'ensuit que la seule qualité d'exploitant agricole du pétitionnaire ne suffit pas à caractériser un tel lien.

5. Il est constant que le terrain d'assiette du projet en litige est situé en dehors des parties urbanisées de la commune de Cornillon. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... envisage de réaliser un hangar agricole de 800 m² pour entreposer le matériel agricole destiné à son activité viticole sur une zone de 360 m² et réaliser neuf boxes sur une surface de 308 m² ainsi qu'un entrepôt de fourrage sur une surface de 132 m² pour son activité équine. Toutefois, d'une part, en se bornant à produire des photographies de son matériel agricole viticole entreposé en extérieur, Mme A... n'apporte aucun élément quant à la consistance des bâtiments déjà existants et, ainsi, ne démontre pas la nécessité d'un nouveau hangar agricole pour entreposer les matériels nécessaires à son activité viticole. D'autre part, si Mme A... s'est prévalue, dans la notice descriptive jointe à sa demande de permis de construire, de la création d'une poulinière en 2017 et de sa volonté de développer cette activité d'élevage équin par l'achat de juments, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a acheté qu'une jument de 11 ans en 2019 et n'envisage l'achat que de deux autres juments de 16 ans et 6 ans en 2020. De plus, elle n'apporte aucun élément sur la consistance de la poulinière qu'elle aurait déjà construite. Dans ces conditions, elle ne démontre pas la nécessité de construire un hangar agricole incluant neuf boxes d'une surface de 308 m² pour son activité équine. Par suite, Mme A... ne démontre pas, en l'état de l'instruction, la nécessité de son projet de hangar agricole tant pour son activité viticole que, en tout état de cause, pour son activité équine. Dans ces conditions, le préfet a pu légalement considérer que le projet en litige ne relevait pas de l'exception prévue au 2° de l'article L.111-4 du code de l'urbanisme et émettre pour ce motif un avis défavorable. Par suite, la commune de Cornillon est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a accueilli le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de l'avis conforme défavorable du préfet du Gard.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme, " A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres. ". L'article L. 152-3 du même code dispose que : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme :/ 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de permis de construire, de déterminer si le projet qui lui est soumis ne méconnaît pas les dispositions du plan local d'urbanisme applicables, y compris telles qu'elles résultent le cas échéant d'adaptations mineures, comme le prévoient ces dispositions, lorsque la nature particulière du sol, la configuration des parcelles d'assiette du projet ou le caractère des constructions avoisinantes l'exige. Le pétitionnaire peut, à l'appui de sa contestation, devant le juge de l'excès de pouvoir, du refus opposé à sa demande se prévaloir de la conformité de son projet aux règles d'urbanisme applicables, le cas échéant assorties d'adaptations mineures dans les conditions précisées ci-dessus, alors même qu'il n'a pas fait état, dans sa demande à l'autorité administrative, de l'exigence de telles adaptations.

7. Il ressort des pièces du dossier que le projet de construction d'un hangar agricole aura une hauteur de 6,67 mètres au faîtage et sera à une distance de 3,15 mètres de la limite séparative. Dans ces conditions, en n'étant pas implanté à une distance minimale de 3,33 mètres, ce projet méconnaît la règle de distance d'implantation des constructions par rapport à la limite séparative prévue à l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme. Si Mme A... soutient que son projet pouvait être autorisé par le recours à une adaptation mineure en application de l'article L. 152-3 précité en ce qui concerne l'absence d'un retrait supplémentaire de 18 centimètres par rapport à la limite séparative, elle n'établit ni même n'allègue qu'une telle adaptation mineure serait rendue nécessaire par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes. Par suite, la commune de Cornillon est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a estimé, au regard d'une possible adaptation mineure, qu'il ne résulte pas de l'instruction que le maire de Cornillon aurait, s'il n'avait retenu que ce motif, pris la même décision.

8. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué par Mme A... en première instance.

En ce qui concerne l'autre moyen de la demande de Mme A... :

9. Aux termes de l'article L. 111-5 du même code : " La construction de bâtiments nouveaux mentionnée au 1° de l'article L. 111-4 et les projets de constructions, aménagements, installations et travaux mentionnés aux 2° et 3° du même article ayant pour conséquence une réduction des surfaces situées dans les espaces autres qu'urbanisés et sur lesquelles est exercée une activité agricole ou qui sont à vocation agricole doivent être préalablement soumis pour avis par l'autorité administrative compétente de l'Etat à la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. ".

10. Il résulte des dispositions précitées que si la commission doit être saisie en cas de réduction des surfaces agricoles sur lesquelles est exercée une activité agricole, c'est uniquement lorsque la construction envisagée est nécessaire à l'exploitation agricole comme le prévoit le 2° de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme. En l'espèce, ainsi qu'il vient d'être dit au point 5 du présent arrêt, la construction en litige ne pouvait être regardée comme nécessaire à une exploitation agricole. Par suite, l'absence d'avis de la commission départementale de préservation des espaces naturels et forestiers ne constitue pas un vice de procédure.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Cornillon est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 18 décembre 2019 par lequel le maire de Cornillon a refusé de délivrer à Mme A... un permis de construire en vue de la construction d'un hangar agricole et a mis à sa charge une somme de 1 200 euros à verser à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cornillon qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme que demande la commune de Cornillon sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 9 novembre 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des parties présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Cornillon et à Mme B... A....

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. ChabertLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL00146


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00146
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BLANC - TARDIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22tl00146 ?
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