Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... E... et Mme C... B... épouse E... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les arrêtés du 4 mars 2022 par lesquels le préfet de la Haute-Garonne a rejeté leurs demandes de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement.
Par un jugement n° 2201740, 2201741 du 30 novembre 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2022 sous le n° 22TL22636, M. E..., représenté par Me Laspalles, demande à la cour :
1°) de lui accorder à titre provisoire le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement ;
3°) d'annuler l'arrêté du 4 mars 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;
4°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision de la cour et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision de la cour et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement n'a pas répondu à son argumentation selon laquelle le préfet de la Haute-Garonne ne justifiait pas d'une évolution de l'offre de soins au Maroc alors qu'il bénéficiait précédemment d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle a été prise en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'ayant pas été pris à l'issue d'une procédure contradictoire ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant considéré comme lié par l'avis du collège des médecins ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du même code ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation du séjour ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle méconnaît le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne ;
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation du séjour ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation par le préfet de la Haute-Garonne ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant estimé en situation de compétence liée pour fixer à une durée de trente jours le délai de départ volontaire ;
- elle s'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est entachée d'un défaut de motivation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 octobre 2023.
La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. E... a été rejetée par une décision du 5 juillet 2023 du bureau d'aide juridictionnelle.
II. Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2022 sous le n° 22TL22637, Mme E..., représentée par Me Laspalles, demande à la cour :
1°) de lui accorder à titre provisoire le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler ce jugement ;
3°) d'annuler l'arrêté du 4 mars 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;
4°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision de la cour et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la notification de la décision de la cour et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement n'a pas répondu à l'argumentation développée par son mari selon laquelle le préfet de la Haute-Garonne ne justifiait pas d'une évolution de l'offre de soins au Maroc alors qu'il bénéficiait précédemment d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- cette décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle a été prise en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions des articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation par le préfet de la Haute-Garonne ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'ayant pas été pris à l'issue d'une procédure contradictoire ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant considéré comme lié par l'avis du collège des médecins de l'Office sur la situation médicale de son mari ;
- c'est en méconnaissance les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet de la Haute-Garonne a estimé que son mari n'avait pas droit à un titre de séjour en tant qu'étranger malade ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du même code ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation du séjour ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle méconnaît le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne ;
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation du séjour ;
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :
- cette décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- elle est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation par le préfet de la Haute-Garonne ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant estimé en situation de compétence liée pour lui donner un délai de trente jours ;
- elle s'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est entachée d'un défaut de motivation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 17 octobre 2023.
Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 juillet 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barthez a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E..., ressortissants marocains nés respectivement le 21 mai 1971 et le 31 mai 1979, sont entrés en France le 23 février 2019 et ont obtenu des autorisations provisoires de séjour, respectivement pour suivre des soins en France et en qualité d'accompagnante d'un étranger malade, le 11 juin 2019 et le 15 mai 2020, ces autorisations étant renouvelées et M. E... bénéficiant d'une carte de séjour temporaire valable du 22 octobre 2020 au 21 octobre 2021. Le 24 août 2021, il a sollicité le renouvellement de cette carte de séjour temporaire sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme E... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-23 du même code. Par des arrêtés du 4 mars 2022, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté leurs demandes de renouvellement et de délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement. Ils font appel du jugement du 30 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
2. Les requêtes enregistrées sous les n° 22TL22636 et n° 22TL22637 présentées respectivement par M. E... et par Mme E... étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par le même arrêt.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
3. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président. / L'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut également être accordé lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l'intéressé, notamment en cas d'exécution forcée emportant saisie de biens ou expulsion (...) ". Par une décision du 5 juillet 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle à Mme E.... Ses conclusions sont donc devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer. Par une décision du même jour, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande de M. E.... Il n'y a pas lieu, dans ces circonstances de faire droit à la demande de M. E....
Sur la régularité du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal administratif de Toulouse, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par les parties, a motivé de manière suffisante, aux points 11 à 14 du jugement attaqué, sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour :
5. En premier lieu, ces décisions visent les stipulations et dispositions applicables pertinentes et mentionnent de manière circonstanciée le parcours des intéressés en précisant notamment qu'ils ne justifient pas de l'impossibilité pour M. E... d'accéder aux soins nécessaires dans leur pays d'origine. Elles comportent ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elles sont donc suffisamment motivées.
6. En deuxième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code des relations entre le public et l'administration relatifs à la procédure contradictoire préalable doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Toulouse au point 5 du jugement attaqué.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical (...) est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) ". L'article R. 425-13 de ce code dispose que : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 6 du même arrêté : " (...) un collège de médecins (...) émet un avis (...) précisant : a) si l'état de santé du demandeur nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / (...) / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
8. Les dispositions citées au point 7, issues de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France et de ses textes d'application, ont modifié l'état du droit antérieur pour instituer une procédure particulière aux termes de laquelle le préfet statue sur la demande de titre de séjour présentée par l'étranger malade au vu de l'avis rendu par trois médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui se prononcent en répondant par l'affirmative ou par la négative aux questions figurant à l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu d'un rapport médical relatif à l'état de santé du demandeur établi par un autre médecin de l'Office, lequel peut le convoquer pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Cet avis commun, rendu par trois médecins et non plus un seul, au vu du rapport établi par un quatrième médecin, le cas échéant après examen du demandeur, constitue une garantie pour celui-ci. Les médecins signataires de l'avis ne sont pas tenus, pour répondre aux questions posées, de procéder à des échanges entre eux, l'avis résultant de la réponse apportée par chacun à des questions auxquelles la réponse ne peut être qu'affirmative ou négative. Par suite, la circonstance que, dans certains cas, ces réponses n'aient pas fait l'objet de tels échanges, oraux ou écrits, est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis.
9. Ainsi, le moyen soulevé selon lequel, d'une part, il ne serait pas établi que les médecins, membres du collège, auraient procédé à des échanges écrits ou oraux avant de rendre leur avis et, d'autre part, de tels échanges seraient invraisemblables eu égard notamment au lieu d'exercice de ces médecins ne peut qu'être écarté.
10. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment eu égard à la motivation précédemment rappelée au point 5 que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. et Mme E... avant de prendre les décisions contestées de refus de titre de séjour.
11. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des motifs des arrêtés contestés, qu'après avoir pris en compte l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le préfet de la Haute-Garonne a porté sa propre appréciation sur la situation de M. et Mme E... et en a tiré les conséquences en rejetant leur demande de titre de séjour. Il ne s'est ainsi pas cru lié par cet avis et le moyen soulevé à cet égard doit donc être écarté.
12. En sixième lieu, au soutien du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile, les requérants produisent en appel, à titre principal, des pièces dont ils estiment qu'elles établissent que l'état de santé de M. E... s'est détérioré postérieurement aux décisions en litige. Toutefois, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas contesté que le défaut de prise en charge médicale pourrait avoir des conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation de M. E... mais il a estimé qu'il pourrait effectivement bénéficier d'une prise en charge médicale dans son pays d'origine. M. E... ne produit aucun élément de nature à établir qu'en raison de cette détérioration, l'accès effectif aux soins ne serait plus assuré. Au surplus, en tout état de cause, dès lors que cette détérioration ne peut être regardée comme probable à la date des décisions contestées du préfet de la Haute-Garonne, elle est sans incidence sur leur légalité qui s'apprécie à la date où elles ont été prises. En outre, à supposer même que l'état de santé de M. E... ne se soit pas amélioré par rapport à la date où il avait bénéficié précédemment d'un titre de séjour et que les possibilités de prise en charge médicale au Maroc restent les mêmes, ces circonstances ne permettent pas à elles-seules d'établir que les conditions fixées par les dispositions de l'article L. 425-9 pour bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade seraient en l'espèce remplies. Ainsi, et pour les motifs mentionnés à bon droit par le tribunal administratif de Toulouse au point 14 du jugement attaqué, ce moyen doit être écarté.
13. En septième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Toulouse respectivement au point 16 et au point 18 du jugement attaqué.
14. En huitième lieu, au regard des éléments de fait précédemment mentionnés aux points 12 et 13, il a lieu d'écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions portant refus de titre de séjour au regard de leurs conséquences sur les situations personnelles de M. et Mme E.... Ceux-ci ne sont donc pas fondés à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire pour régulariser leur situation au regard du droit au séjour.
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour.
16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour (...) ". Les décisions portant refus de titre de séjour étant suffisamment motivées, les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'ont pas à faire l'objet d'une motivation distincte.
17. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Toulouse au point 21 du jugement attaqué.
18. En quatrième lieu, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé, dans ses arrêts C-166/13 Sophie Mukarubega du 5 novembre 2014 et C-249/13 Khaled Boudjlida du 11 décembre 2014, que le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.
19. Il résulte en outre de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-383/13 M. A..., N. R./ Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie du 10 septembre 2013, que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
20. L'étranger qui sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour ne saurait ignorer, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, qu'il pourra, en cas de refus, faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il est, par ailleurs, conduit à l'occasion du dépôt de sa demande, qui doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle auprès des services de la préfecture, à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il est également loisible à l'étranger, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire ou élément nouveau. Le droit de l'intéressé d'être entendu avant que n'intervienne le refus de titre de séjour est ainsi assuré par la procédure prévue et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'espèce, Mme et M. E... auraient été privés, au cours de l'instruction de leur demande, de la possibilité de faire état de tous éléments pertinents relatifs à leurs situations personnelles et susceptibles d'influer sur le sens des décisions se prononçant sur ces demandes. En particulier, ils n'établissent pas avoir sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux ou avoir été empêchés de faire valoir leurs observations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
21. En cinquième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 13 du présent arrêt.
22. En sixième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions portant obligation de quitter le territoire au regard de leurs conséquences sur les situations personnelles de M. et Mme E... doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 14 du présent arrêt. Ils ne sont donc pas fondés à soutenir que c'est à tort que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire en ne prenant pas de mesure d'éloignement.
En ce qui concerne les décisions fixant le délai pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français :
23. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour ni, d'ailleurs, de celles portant obligation de quitter le territoire français.
24. En deuxième lieu, en tout état de cause, le préfet de la Haute-Garonne a cité, dans les arrêtés contestés du 4 mars 2022, les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au délai laissé à l'étranger pour exécuter la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Il a, en outre, indiqué que M. et Mme E... ne faisaient état d'aucune circonstance pouvant justifier qu'un délai supérieur à celui de trente jours leur soit accordé. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation des décisions fixant le délai pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français doit donc être écarté.
25. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Toulouse au point 24 du jugement attaqué.
26. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation rappelée au point 24, que le préfet de la Haute-Garonne a procédé à un examen particulier de la situation de M. E... et de celle de Mme E... avant de prendre les décisions contestées fixant le délai pour exécuter les mesures d'éloignement prises à leur encontre.
27. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation rappelée au point 24, que le préfet de la Haute-Garonne ne s'est pas cru tenu de fixer à trente jours le délai laissé aux requérants pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit ainsi être écarté.
28. En sixième lieu, c'est sans erreur manifeste d'appréciation, en l'absence de circonstances exceptionnelles, que le préfet de Haute-Garonne a fixé à trente jours le délai laissé à M. et Mme E... pour exécuter volontairement les décisions portant obligation de quitter le territoire français prises à leur encontre.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
29. Les décisions fixant le pays de destination, qui indiquent notamment que les intéressés n'établissent pas être exposés à des peines ou traitements contraires aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elles sont ainsi suffisamment motivées.
30. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
31. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une somme à verser au conseil de M. et Mme E... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme E... tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme E... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., à Mme C... B... épouse E..., à Me Sylvain Laspalles et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 février 2024.
Le président-rapporteur,
A. Barthez
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
N. Lafon
Le greffier,
F. Kinach
Le République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Nos 22TL22636,22TL22637 2