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09/11/2023 | FRANCE | N°21TL01782

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 09 novembre 2023, 21TL01782


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal d'Apt a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 25 septembre 2019.

Par un jugement n° 2000216 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2021 sous le n° 21MA017

82 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL01782 au ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal d'Apt a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 25 septembre 2019.

Par un jugement n° 2000216 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 mai 2021 sous le n° 21MA01782 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL01782 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, Mme A..., représentée par Me Borel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 mars 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal d'Apt du 23 juillet 2019 ainsi que la décision rejetant le recours gracieux formé contre cette délibération ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Apt la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la délibération litigieuse a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas établi que les conseillers municipaux ont été régulièrement convoqués à la séance du conseil municipal en méconnaissance de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- il n'est pas établi qu'ils aient reçu toutes les communications préalables et nécessaires pour décider de la révision du zonage du plan local d'urbanisme et de la modification du même document en méconnaissance de l'article L. 2121-13 du même code ;

- le classement de sa parcelle en zone agricole est fondé sur des faits matériellement inexacts puisqu'elle est desservie par le réseau viaire et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement est incohérent avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme en litige puisqu'elle est incluse dans une zone présentant un potentiel de densification non négligeable.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 juin 2021, la commune d'Apt, représentée par Me Avril, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable en l'absence de motivation ;

- aucun des moyens soulevés n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée au 22 mars 2022 par une ordonnance du 7 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Lemoine, représentant la commune d'Apt.

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 23 juillet 2019, le conseil municipal d'Apt a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Mme A..., propriétaire de la parcelle cadastrée ..., classée en zone agricole par ce document d'urbanisme, relève appel du jugement du 9 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 12 septembre 2019 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 25 septembre 2019.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales dans sa version applicable au litige : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s'ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée ". Aux termes de l'article L. 2121-13 de ce code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".

3. L'appelante reprend en appel, sans développer d'élément nouveau et sans davantage étayer ses allégations, les vices de procédure tirés de l'absence de convocation régulière des élus municipaux en vue de la séance du 23 juillet 2019, au cours de laquelle le conseil municipal d'Apt a approuvé la modification du plan local d'urbanisme et d'une information suffisante de ces élus. A cet égard, les allégations réitérées de l'appelante, à qui il appartient d'apporter un commencement de preuve au soutien de ses moyens, ne sauraient conduire à remettre en cause les mentions factuelles et précises du registre des délibérations, qui font foi jusqu'à preuve contraire. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.

4. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". En outre, aux termes de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ".

5. Pour apprécier la cohérence entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le plan, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Ainsi, l'inadéquation d'une disposition du règlement à une orientation générale ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence des autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre le règlement et ce projet.

6. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement et de développement durables de la commune d'Apt prévoit de recentrer le développement urbain en limitant les extensions urbaines aux stricts besoins de la population à l'horizon 2027 dans un souci de préserver notamment l'activité agricole aptésienne, en luttant contre le mitage et la spéculation immobilière sur le territoire communal. Cette orientation trouve sa traduction réglementaire dans la délimitation des zones urbaines et à urbaniser, dimensionnées en stricte cohérence avec le scénario de croissance démographique, la délimitation des zones agricoles et naturelles, dont la superficie évolue positivement par rapport au document d'urbanisme précédent de près de 270 hectares supplémentaires, et dans le règlement des zones urbaines et à urbaniser de la commune, qui offre la possibilité de poursuivre la densification du tissu existant et de créer de nouvelles opérations aux formes urbaines diversifiées. L'appelante soutient que la zone dans laquelle est incluse sa parcelle est présentée dans le projet d'aménagement et de développement durables comme une zone offrant un potentiel de densification non négligeable. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le classement opéré s'inscrit, en cohérence avec les objectifs du projet, dans une logique de moindre consommation de l'espace et que la ... dont Mme B... est propriétaire est considérée par les documents cartographiques comme " parcellaire agricole sous pression ", à proximité immédiate du bâti diffus. D'autre part, cette seule circonstance ne saurait suffire à caractériser une incohérence avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durables, en raison notamment de ce que l'objectif de préservation des terres agricoles face au mitage urbain et de densification du tissus urbain existant doit s'apprécier à l'échelle de la zone couverte. Par suite, le choix de la commune de classer la parcelle en litige, d'une superficie de 23 000 m², dépourvue de toute construction et s'ouvrant à l'est, au sud et à l'ouest sur une vaste zone agricole et naturelle, dans la zone agricole et naturelle d'Apt, est cohérent avec les orientations et les objectifs retenus dans le projet d'aménagement et de développement durables.

7. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme dont les dispositions ont été reprises à l'article R. 151-22 : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il appartient aux auteurs du plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer, en conséquence, le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation peut être censurée par le juge si elle repose sur des faits matériellement inexacts ou si elle est entachée d'une erreur manifeste.

8. Si la requérante fait valoir que sa parcelle forme une dent creuse dans l'urbanisation existante, par sa situation immédiate au sud d'un lotissement, l'ensemble des autres parcelles qui lui sont limitrophes sont dénuées de toute construction. Ainsi, la parcelle en litige, d'une superficie importante et dépourvue de toute construction ainsi qu'il a été exposé au point 6 ci-dessus, constitue davantage une coupure de cette urbanisation puisqu'elle s'ouvre à l'est, au sud et à l'ouest sur une vaste zone agricole et naturelle. Par ailleurs, la requérante n'établit par aucun élément probant que sa parcelle, non exploitée mais qui borde une vaste parcelle exploitée sous forme de jardins familiaux, ne présenterait pas de potentiel agronomique, alors que le rapport de présentation a identifié sur la base d'un diagnostic la parcelle au titre des cultures annuelles. Enfin, si l'appelante soutient que sa parcelle desservie par le réseau viaire aurait dû être classée en zone urbaine, cette circonstance ne fait pas obstacle, en application des dispositions précitées de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, à ce qu'elle puisse faire l'objet d'un classement en zone agricole. En outre, il n'appartient pas au juge d'apprécier l'opportunité du choix retenu par les auteurs du document d'urbanisme d'opérer le classement en zone agricole de la parcelle de l'intéressée qui ne s'appuie pas sur des faits matériellement inexacts. Par suite, eu égard aux caractéristiques du secteur en cause, et au parti d'aménagement retenu par ses auteurs, le plan local d'urbanisme adopté, en tant qu'il procède audit classement de la parcelle de l'appelante n'est pas entaché d'erreur de fait ni d'erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune intimée, que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Apt, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B..., une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Apt au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la commune d'Apt une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... et à la commune d'Apt.

Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.

Le président-assesseur,

X. HaïliLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne à la préfète de Vaucluse en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL01782


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01782
Date de la décision : 09/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : BOREL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-09;21tl01782 ?
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