Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée Urbalterre a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande devant être regardée comme tendant, d'une part, à contester la validité de la décision du 19 décembre 2018 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a prononcé la résiliation pour faute du marché n° C°16-002, d'autre part, à ordonner la reprise des relations contractuelles et à condamner l'État à lui verser la somme de 13 372,80 euros en réparation du préjudice subi du fait de cette résiliation unilatérale irrégulière. La société Urbalterre a également demandé à ce tribunal d'annuler la décision du 28 septembre 2018 par laquelle ce préfet a refusé le paiement de la facture n° 2018/019 et de condamner l'État au paiement de cette facture d'un montant de 12 624 euros, majorée des intérêts de retard, sous astreinte de cent euros par jour de retard dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir jusqu'au paiement effectif de cette somme.
Par un jugement n° 1901759 du 7 octobre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 décembre 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire, enregistré le 19 avril 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Urbalterre, représentée par Me Savaïdes, demande :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 7 octobre 2021 ;
2°) d'annuler la décision par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé de faire droit à sa demande indemnitaire du 4 février 2019 ;
3°) de condamner l'État à lui verser la somme de 12 624 euros en paiement de la facture n° 2018/019 du 28 septembre 2019, majorée des intérêts de retard, augmentée de la somme forfaitaire de quarante euros, sous astreinte de cent euros par jour de retard dans un délai d'une semaine à compter de la décision à intervenir jusqu'au paiement effectif de cette somme ;
4°) de condamner l'État à l'indemniser à hauteur de la somme de 13 372,80 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation fautive du marché ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué qui est insuffisamment motivé, est entaché d'illégalité ;
- ce jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il a déclaré, à tort, que ses demandes tendant à ce que soit constatée l'illégalité de la décision de résiliation du marché étaient irrecevables ; elle n'a jamais sollicité la reprise des relations contractuelles mais demandait le versement d'une indemnisation du fait de l'illégalité de la décision de résiliation du marché à ses torts exclusifs ;
- ce jugement est également entaché d'irrégularité pour avoir considéré, à tort, que ses conclusions indemnitaires étaient irrecevables ; son courrier de mise en demeure du 18 janvier 2019 devait être regardé comme un mémoire en réclamation qui a été adressé dans les deux mois prévus par l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles ;
- elle a droit à une indemnité du fait de la résiliation irrégulière du marché dès lors qu'elle n'a commis aucun manquement dans l'exécution du contrat ; en effet, les livrables attendus par le pouvoir adjudicateur avant la tenue de l'atelier n° 3, lui ont été remis le 20 février 2018, dans les délais et, à défaut d'observations adressées par le pouvoir adjudicateur dans les trente jours à compter de leur remise, la prestation était réputée admise conformément à l'article 5.4 du cahier des clauses administratives et techniques particulières ; compte tenu des nombreux manquements dans l'exécution du marché imputables à la direction départementale des territoires et de la mer des Pyrénées-Orientales, la décision de résiliation est illégale et ouvre, de plus fort, droit à une indemnité en sa faveur ;
- le refus de payer opposé par une personne publique à son cocontractant qui a, pour sa part, exécuté le marché qui les liait, est constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité ; elle a droit à l'indemnisation intégrale de son préjudice comprenant le préjudice commercial et les gains espérés du marché ; son manque à gagner, déduction faite de la marge brute, s'élève à la somme de 13 372,80 euros ;
- en toutes hypothèses, en application de l'article 34.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles, les prestations de livrables reçues auraient dues lui être réglées ; le pouvoir adjudicateur devait donc s'acquitter du paiement de la facture n° 2018/19 d'un montant de 12 888,12 euros, augmentée de la somme forfaitaire de 40 euros et des intérêts de retard ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mars 2023, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles sont tardives et donc, à titre principal, irrecevables ; en effet, la société appelante a produit devant le tribunal administratif de Montpellier des conclusions tendant à faire constater l'illégalité de la décision de résiliation du marché et à annuler la décision de refus de retirer la décision de résiliation, qui ont été requalifiées en action en contestation de la validité de la décision de résiliation et en reprise des relations contractuelles ;
- les conclusions tendant au paiement de la facture n° 2018/019 et celles tendant à la condamnation de l'État à verser à la société appelante la somme de 13 372,80 euros en réparation du préjudice prétendument subi en raison de la résiliation fautive du marché, sont irrecevables ;
- les conclusions en paiement de la facture n° 2018/19 ne sont pas fondées ; au sens du cahier des clauses administratives techniques particulières, le livrable n'est ni un élément remis pour discussion ni un simple document de travail, mais la production aboutie d'un travail qui doit pouvoir être immédiatement utilisé ; aucun livrable n'ayant été transmis, le délai de vérification de 30 jours ne pouvait pas commencer à courir
- à titre subsidiaire, les conclusions indemnitaires ne sont pas fondées.
Par une ordonnance du 22 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée le 24 avril 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;
- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un marché n° C16-002 en date du 4 novembre 2016, la direction départementale des territoires et de la mer des Pyrénées-Orientales a confié au groupement d'entreprise Urbalterre, Horizons Paysage, Convergence Public Privé, dont la société Urbalterre est le mandataire, une mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour la définition de stratégie d'aménagement sur le territoire de la communauté de communes Capcir Haut Conflent, devenue Pyrénées Catalanes. Par un courriel du 20 février 2018 la société Urbalterre a adressé au pouvoir adjudicateur des documents en vue de la préparation de l'atelier n° 3. Le 13 mars 2018, le pouvoir adjudicateur a annulé cet atelier, qui devait se tenir le 20 mars 2018, et a mis en demeure, le 19 juin 2018, cette société de lui communiquer les documents contractuellement exigibles ainsi que l'exhaustivité des échanges intervenus avec les collectivités ou directeurs de stations. Le 9 octobre 2018, la société Urbalterre a adressé à la direction départementale des territoires et de la mer des Pyrénées-Orientales une facture n° 2018/019 de 12 624 euros toutes taxes comprises en date du 28 septembre 2018 pour les prestations remises le 20 février 2018. Le 19 décembre 2018, le préfet des Pyrénées-Orientales a notifié à la société Urbalterre la résiliation pour faute du marché n° C16-002 prenant effet au 16 juillet 2018. Le 18 janvier 2019, la société précitée a mis la direction départementale des territoires et de la mer des Pyrénées-Orientales en demeure de lui régler le montant de la facture n° 2018/019, augmenté des intérêts moratoires et de la somme de 40 euros. La direction départementale a refusé par courrier du 4 février 2019, notifié le 9 février 2019, de faire droit à cette demande. La société Urbalterre relève appel du jugement du 7 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes devant être regardées comme tendant, d'une part, à contester la validité de la décision de résiliation du marché du 19 décembre 2018 et à ordonner la reprise des relations contractuelles, d'autre part, à condamner l'État à lui verser la somme de 13 372,80 euros en réparation du préjudice subi du fait de cette résiliation unilatérale irrégulière et, enfin, à condamner l'État au paiement de la facture n° 2018/19 pour un montant de 12 624 euros toutes taxes comprises, majoré des intérêts de retard et sous astreinte.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements doivent être motivés ". Le jugement attaqué qui répond de manière suffisamment circonstanciée aux moyens présentés en première instance, satisfait donc à l'obligation de motivation imposée par l'article L. 9 du code de justice administrative.
3. En deuxième lieu, d'une part, le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions " aux fins d'annulation " d'une mesure de résiliation, de les regarder comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.
4. D'autre part, ce recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles doit être exercé dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle le cocontractant de l'administration a été informé de la mesure de résiliation. Aucun principe ni aucune disposition, notamment pas celles de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, qui ne sont pas applicables à un recours de plein contentieux tendant à la reprise des relations contractuelles, n'impose qu'une mesure de résiliation soit notifiée avec mention des voies et délais de recours pour que ce délai de deux mois commence à courir.
5. Dans sa demande du 4 avril 2019, la société Urbalterre, qui concluait à ce que les premiers juges constatent " l'illégalité de la décision de résiliation du marché n° C16-002 du 19 décembre 2018 ", soutenait que " l'annulation de cette décision [de résiliation] s'impose. ". De plus, dans son mémoire du 4 mai 2021, elle demandait au tribunal " d'annuler la décision de résiliation du marché n° C16-002 du 19 décembre 2018. ".
6. Compte tenu de la demande qui leur était présentée, les premiers juges qui ont, à bon droit, considéré qu'ils étaient saisis de conclusions " en annulation de la décision de résiliation du marché ", étaient tenus de requalifier ces conclusions et de les regarder comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.
7. En l'absence de notification par lettre recommandée avec accusé de réception de la décision du 19 décembre 2018 par laquelle le préfet a résilié le marché, la date de réception du pli contenant cette décision par la société appelante ne peut être prouvée avec certitude. Toutefois, dès lors que dans sa lettre du 18 janvier 2019, elle faisait état de ce qu'aux termes d'un courrier du 19 décembre 2018, il lui avait été notifié une décision de résiliation du marché pour faute du titulaire prise le 19 décembre 2018 à effet au 16 juillet 2018, elle a nécessairement eu connaissance de ce courrier au plus tard à la date du 18 janvier 2019. La société Urbalterre disposait alors d'un délai de deux mois à compter du 18 janvier 2019 pour présenter son recours en contestation de la validité de la résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles devant le tribunal administratif de Montpellier. Le courrier du 4 février 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté la demande de règlement de la société Urbalterre du 18 janvier 2019 et a confirmé sa décision de résiliation du marché, n'a pas eu pour effet d'interrompre ce délai de recours. La demande ayant été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier le 8 avril 2019, soit plus de deux mois après la date du 18 janvier 2019, est donc tardive. Par suite, la société Urbalterre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevables ses conclusions en annulation de la décision de résiliation du marché devant être regardées comme contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.
8. En dernier lieu, l'article 14 du cahier des clauses administratives et techniques applicable au marché en litige renvoie, en ce qui concerne les modalités dans lesquelles le pouvoir adjudicateur peut mettre fin à l'exécution du marché, aux articles 29 et suivant du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles
9. D'une part, selon l'article 29 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestation intellectuelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 16 septembre 2009, applicable au litige : " Le pouvoir adjudicateur peut mettre fin à l'exécution des prestations faisant l'objet du marché avant l'achèvement de celles-ci, soit à la demande du titulaire dans les conditions prévues à l'article 31, soit pour faute du titulaire dans les conditions prévues à l'article 32, soit dans le cas des circonstances particulières mentionnées à l'article 30. (...) ". Aux termes de l'article 32 de ce cahier : " Résiliation pour faute du titulaire / 32. 1. Le pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : (...) c) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels ; (...) ".
10. D'autre part, selon l'article 37 de ce même cahier : " Différends entre les parties /Le pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché. Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de deux mois, courant à compter de la réception de la lettre de réclamation, pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation ".
11. Il résulte de ces stipulations que, lorsqu'intervient, au cours de l'exécution d'un marché, un différend entre le titulaire et l'acheteur, résultant d'une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de ce dernier et faisant apparaître le désaccord, le titulaire doit présenter, dans le délai qu'elles prescrivent, un mémoire en réclamation, à peine d'irrecevabilité de la saisine du juge du contrat.
12. Un mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens des stipulations précitées que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées.
13. La société appelante soutient qu'elle a fait état d'un différend entre elle et le pouvoir adjudicateur ayant pour objet la contestation de la décision de résiliation unilatérale pour faute du marché, dans sa lettre du 18 janvier 2019. Cette lettre, qui avait pour objet " mise en demeure du règlement de la facture n° 2018/019 du 28 septembre 2019 ", indiquait, tout d'abord, les motifs sur lesquels sa réclamation était fondée et qui étaient tirés, d'une part, de ce qu'ayant remis au pouvoir adjudicateur les livrables prévus par le marché dans les délais, celui-ci était redevable de la somme facturée, et, d'autre part, de ce qu'elle avait droit, en vertu des stipulations de l'article 34.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles, à ce que figure à son crédit du décompte de résiliation la valeur contractuelle des prestations reçues y compris, s'il y a lieu, les intérêts moratoires. Elle indiquait ensuite le montant dont l'administration était redevable soit une somme de 12 624 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts moratoires d'un montant de 224,12 euros et de la somme forfaitaire de 40 euros. Ainsi, la lettre du 18 janvier 2019 qui comporte l'énoncé d'un différend en ce qui concerne le paiement de la facture du 28 septembre 2019 et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées, doit être regardée comme une réclamation au sens de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles en ce qui concerne les conclusions tendant au paiement de la facture et à la contestation du décompte de résiliation.
14. Si, de façon incidente, cette lettre informait également le pouvoir adjudicateur qu'à défaut de paiement de sa part de la facture litigieuse, la société Urbalterre se réservait le droit d'engager une procédure contentieuse pour demander, du fait de la résiliation unilatérale du marché, une indemnisation intégrale de ses préjudices dont le préjudice commercial et la perte de gains espérés du marché, elle ne faisait pas état cependant d'un différend actuel mais seulement éventuel en ce qui concerne l'indemnisation des préjudices subis du fait de la résiliation irrégulière du marché. De plus, elle n'exposait pas de manière précise et détaillée, d'une part, les montants des préjudices à indemniser et, d'autre part, les motifs et les justifications des indemnités sollicitées.
15. Il en résulte que la lettre du 18 janvier 2019 ne peut pas être regardée comme une réclamation au sens de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles en ce qui concerne les conclusions indemnitaires de la société appelante. Dès lors, faute d'avoir respecté la procédure prévue à cet article 37, la société Urbalterre n'est pas fondée à soutenir que sa demande indemnitaire de première instance était recevable et que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de de l'État à lui verser une indemnité de 13 372,80 euros en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation irrégulière du marché.
Sur les conclusions en paiement de la facture du 18 novembre 2019 et en contestation du décompte de résiliation :
16. Aux termes de l'article 4.6 du cahier des clauses administratives et techniques particulières applicable au marché en litige : " Calendrier estimatif de remise des différents livrables/ 10 jours ouvrés avant les séances d'atelier sur site 1, 2 et 3, le titulaire transmet à la maîtrise d'ouvrage pour discussion : - Les documents de travail éventuel et les supports nécessaires au bon déroulement des réunions (diaporama, stratégie de séance, support graphiques, etc.) ; - Une courte note indiquant les éléments de fond que l'équipe souhaite mobiliser au cours de l'atelier // 15 jours ouvrés au plus tard après chaque séance d'atelier, le titulaire transmet à la maîtrise d'ouvrage : - Les esquisses et cartographies légendées élaborées pour chaque site pendant l'atelier ; - Le contenu de leurs interventions ; - Un rendu du rapport d'avancement pour chaque site (...) // - Le rapport d'atelier (...) ". Aux termes de l'article 5.4 de ce cahier : " Les prestations sont soumises à des vérifications qualitatives et quantitatives qui sont destinées à constater qu'elles répondent aux stipulations prévues dans le marché. Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai maximum de 30 jours pour vérifier, valider les livrables après leur remise, et notifier sa décision d'admission, d'ajournement, de réception avec réfaction ou de rejet. Les prestations sont réputées admises si la personne publique ne notifie pas sa décision dans le délai imparti (...) / Si les prestations ne répondent pas aux stipulations, la personne publique prononce le rejet des prestations. La décision est motivée et précise les modalités d'exécution des prestations (...) ".
17. Aux termes de l'article 32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 16 septembre 2009, applicable au litige : " Résiliation pour faute du titulaire 32. 1. Le pouvoir adjudicateur peut résilier le marché pour faute du titulaire dans les cas suivants : (...) c) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels ; (...) ". Aux termes de l'article 34 de ce marché : " 34. 1. La résiliation fait l'objet d'un décompte de résiliation, qui est arrêté par le pouvoir adjudicateur et notifié au titulaire. 34. 2. Le décompte de résiliation qui fait suite à une décision de résiliation prise en application des articles 31 et 33 comprend : 34. 2. 2. Au crédit du titulaire : 34. 2. 2. 1. La valeur des prestations fournies au pouvoir adjudicateur, à savoir : ' la valeur contractuelle des prestations reçues, y compris, s'il y a lieu, les intérêts moratoires ; (...) ".
18. Il résulte de l'instruction que, par un courriel du 20 février 2018, la société appelante a envoyé au pouvoir adjudicateur une version 10 du document de préparation et un programme en vue de l'atelier n° 3 initialement fixé à la date du 20 mars 2018. Si la direction départementale des territoires et de la mer des Pyrénées-Orientales a informé, par un courriel du 13 mars 2018, la société que la tenue de l'atelier n° 3 était annulée pour plusieurs raisons et notamment du fait de l'absence de transmission des documents de séance, la société Urbalterre lui a cependant répondu le même jour que les documents lui avaient été transmis le 20 février Au vu de cette réponse, le pouvoir adjudicateur ne pouvait pas considérer qu'il n'était pas saisi des livrables requis pour la séance n° 3 au sens de l'article 4.6 du cahier précité. Il lui appartenait dès lors de procéder aux vérifications quantitatives et qualitatives dans un délai de 30 jours à compter de la remise des documents et de notifier dans ce délai sa décision, le cas échéant, de rejet. De plus, en l'absence de stipulations le prévoyant expressément, la circonstance que l'atelier n° 3 ait été annulé postérieurement à cette remise, ne pouvait avoir pour effet de reporter le délai imparti au pouvoir adjudicateur pour procéder au contrôle des prestations livrées. Faute de notification de sa décision dans le délai de 30 jours, le pouvoir adjudicateur est réputé avoir admis ces prestations qui doivent être considérées comme ayant été régulièrement reçues par ce dernier. Dès lors, leur montant facturé à la somme de 12 624 euros toutes taxes comprises, augmentée, conformément à l'article 9.5 du cahier des clauses administratives et techniques particulières, des intérêts moratoires à compter du 17 juillet 2018 et de la somme forfaitaire de 40 euros, devait être porté au crédit du décompte de résiliation de la société Urbalterre. La société appelante est donc fondée à demander la condamnation de l'État à lui payer cette somme. Il n'y a cependant pas lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte.
19. Il résulte de tout ce qui précède que la société Urbalterre est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de condamnation de l'État au paiement de la somme de 12 624 euros majorée des intérêts de retard.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE:
Article 1er : L'État est condamné à payer à la société Urbalterre la somme de 12 624 euros toutes taxes comprises, augmentée des intérêts moratoires à compter du 17 juillet 2018 et de la somme forfaitaire de 40 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : L'État versera à la société Urbalterre une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Urbalterre et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023 à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21TL04631