Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2020 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour.
Par un jugement n° 2002662 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n° 22MA00736 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL00736 le 28 février 2022, M. B..., représenté par Me Bruna-Rosso, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2020 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer une carte de séjour temporaire, ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation administrative, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 440 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, l'arrêté en litige est entaché d'un défaut d'examen de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il procède d'une méconnaissance par le préfet de son pouvoir de régularisation ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est à tort estimé lié par l'application des stipulations des articles 7 quater et 7 ter d) de l'accord franco-tunisien ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
- à titre subsidiaire, l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été consultée ;
- il a été signé par une personne n'ayant pas compétence à cet effet ;
- il est entaché d'un défaut de motivation.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. B....
Par ordonnance du 6 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 5 août 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lasserre, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 7 juillet 2020, le préfet de Vaucluse a refusé un titre de séjour à M. B..., ressortissant tunisien né le 30 avril 1976. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions en annulation :
2. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué et du défaut de motivation de cet arrêté. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement en litige.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " (...) les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale". ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui est célibataire et sans charge de famille, ne démontre pas être inséré socialement sur le territoire français et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. De plus, contrairement à ce qu'il soutient, M. B... n'établit pas être présent sur le territoire français de façon continue depuis 33 ans en se bornant à produire des documents, notamment médicaux, attestant seulement de sa présence ponctuelle en France. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts d'intérêt public en vue desquels le refus contesté a été pris. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, l'appelant n'est pas en situation d'obtenir la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur et le préfet de Vaucluse n'a pas entaché l'arrêté en litige d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 7 ter-d) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, dans sa rédaction issue de l'article 2 de l'accord-cadre du 28 avril 2008 : " Reçoivent de plein droit un titre de séjour renouvelable valable un an et donnant droit à l'exercice d'une activité professionnelle dans les conditions fixées à l'article 7 : / - les ressortissants tunisiens qui, à la date d'entrée en vigueur de l'accord signé à Tunis le 28 avril 2008, justifient par tous moyens résider habituellement en France depuis plus de dix ans, le séjour en qualité d'étudiant n'étant pas pris en compte dans la limite de cinq ans ". Il résulte de ces stipulations que seuls les ressortissants tunisiens justifiant d'une résidence habituelle sur le territoire français depuis plus de dix ans au 1er juillet 2009, date d'entrée en vigueur de l'accord du 28 avril 2008, sont admissibles au bénéfice de de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien.
6. En l'espèce, si M. B... soutient avoir résidé en France de façon continue au titre de la période du 1er juillet 1999 au 1er juillet 2009 prise en compte pour l'application des stipulations précitées, il n'a apporté à l'appui de ces allégations devant les premiers juges que des documents, notamment médicaux, ne démontrant que sa présence ponctuelle en France. En cause d'appel, il ne produit au surplus qu'un accusé de réception de La Poste du 7 mai 1998 et trois ordonnances médicales de 2014, lesquels ne permettent pas plus de démontrer sa présence habituelle en France sur cette période. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 7 ter-d) de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 doit être écarté.
7. En quatrième lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de Vaucluse se serait estimé lié par l'application des stipulations des articles 7 ter-d) et 7 quater de l'accord franco-tunisien.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable au litige : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. ".
9. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 4 du présent arrêt, M. B... ne démontre pas être présent sur le territoire français de façon continue depuis 33 ans en se bornant à produire des documents, notamment médicaux, ne permettant de ne démontrer que sa présence ponctuelle en France. Par suite, et en l'absence de circonstance de nature à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de régularisation, le préfet de Vaucluse n'a méconnu ni son pouvoir général de régularisation, ni les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant un titre de séjour à M. B.... D'autre part, et pour les mêmes motifs, le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2023.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. ChabertLa greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL00736