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06/04/2023 | FRANCE | N°22TL00406

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 06 avril 2023, 22TL00406


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier, par la voie de la tierce opposition, de déclarer non avenu le jugement n° 1803858 du 23 avril 2019 rendu par ce dernier, d

e rejeter la requête de la société civile immobilière SM Invest dans...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier, par la voie de la tierce opposition, de déclarer non avenu le jugement n° 1803858 du 23 avril 2019 rendu par ce dernier, de rejeter la requête de la société civile immobilière SM Invest dans cette instance et d'annuler le permis de construire modificatif délivré le 11 juin 2020 à la société civile immobilière SM Invest.

Par un jugement n° 2002068 du 30 décembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°22MA00406 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°22TL00406 le 1er février 2022, l'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B..., représentés par la SELARL avocats Valette-Berthelsen, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de déclarer non avenu le jugement n° 1803858 du tribunal administratif de Montpellier du 23 avril 2019 ;

3°) de rejeter la demande de la société civile immobilière SM Invest présentée dans l'instance n°1803858 devant le tribunal administratif de Montpellier ;

4°) de mettre à la charge de la société civile immobilière SM Invest une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils remplissent les conditions de recevabilité d'une requête en tierce opposition ;

- la société pétitionnaire a commis une fraude lors du dépôt de sa demande de permis de construire révélée par l'inexistence de toute servitude de passage qui justifie son retrait, le permis de construire modificatif du 11 juin 2020 ne pouvant pas régulariser cette fraude ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'aucune servitude de passage n'existe.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2022, la société civile immobilière SM Invest, représentée par Me Vigo, conclut au rejet de la requête au fond et subsidiairement, à son rejet comme irrecevable et dépourvu d'objet et à ce qu'il soit mis à la charge de chacun des requérants la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, leur tierce opposition est irrecevable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 août 2022, la commune de Fleury d'Aude, représentée par la société civile professionnelle CGCB et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge solidaire des requérants une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 12 octobre 2022, l'instruction a fait l'objet d'une clôture immédiate.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Arroudj, représentant la commune de Fleury d'Aude ;

- et les observations de Me Vigo, représentant la société civile immobilière SM Invest.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 17 octobre 2017, le maire de la commune de Fleury d'Aude a délivré à la société civile immobilière SM Invest un permis de construire deux bâtiments collectifs de 23 logements. L'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B... ont formé un recours gracieux le 13 décembre 2017 auquel le maire de Fleury d'Aude a fait droit en retirant, par arrêté du 14 mars 2018, le permis de construire. Par jugement n° 1803858 du 23 avril 2019, sur requête de la société civile immobilière SM Invest, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 14 mars 2018 par laquelle le maire de Fleury d'Aude a procédé au retrait du permis de construire du 17 octobre 2017 ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux de la société civile immobilière SM Invest du 14 juin 2018. L'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B..., qui n'étaient pas parties dans cette instance, ont alors formé une tierce opposition contre ce jugement. Par le jugement susvisé du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur tierce opposition comme infondée. Par la présente requête, l'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire. ".

3. D'une part, un permis de construire ne peut faire l'objet d'un retrait, une fois devenu définitif, qu'au vu d'éléments, dont l'administration a connaissance postérieurement à la délivrance du permis, établissant l'existence d'une fraude à la date où il a été délivré. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration. Lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer, au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Si postérieurement à la délivrance du permis de construire, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai.

4. D'autre part, le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, si le juge administratif doit, pour apprécier la légalité du permis au regard des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des engins d'incendie et de secours, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne lui appartient pas de vérifier ni la validité de cette servitude ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

5. Il est constant que le dossier de demande de permis de construire déposé par la société SM Invest comportait une erreur dans l'assiette de la servitude de passage dont elle disposait. Toutefois, il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que, pour se prévaloir de cette servitude de passage, la société a fourni une attestation établie par la SCP Orrit Blanquer, géomètre-expert, certifiant que la parcelle cadastrée section BR n°81 dispose d'un accès à la voie publique par l'ensemble immobilier " maisons sur la colline " et " horizon sur mer " s'effectuant par la parcelle cadastrée n°110 qui jouxte la voie publique " avenue des garrigues ", ainsi que l'acte notarié de servitude y afférent. Dans ces conditions, cette erreur ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration. Par suite, le moyen tiré de ce que le permis du permis de construire initial délivré le 17 octobre 2017 aurait été obtenu par fraude et pouvait, par suite, être retiré à tout moment doit être écarté. Par conséquent, le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif du 11 juin 2020 ne pouvait pas régulariser cette fraude doit être également écarté.

6. En deuxième lieu, lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

7. Il ressort des pièces du dossier que, par un permis de construire modificatif du 2 février 2022, le maire de Fleury d'Aude a autorisé la société SM Invest à modifier l'accès de son projet qui s'effectuera désormais depuis la rue des pluviers, sans utilisation d'une servitude de passage. Par suite, le moyen tiré de l'inexistence de toute servitude de passage ne peut qu'être écarté comme inopérant.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société civile immobilière SM Invest qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", les syndicats des copropriétaires " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et M. A... B... la somme de 500 euros chacun en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à la société civile immobilière SM Invest et la somme de 1 500 euros à verser solidairement à la commune de Fleury d'Aude.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et autres est rejetée.

Article 2 : Les requérants verseront solidairement à la commune de Fleury d'Aude une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II " et autres verseront chacun à la société civile immobilière SM Invest une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'union syndicale des copropriétés " les maisons sur la colline I ", " les maisons sur la colline II ", " les maisons sur la colline III ", " les maisons sur la colline IV ", " La colline ", " Horizon sur Mer I " et " Horizon sur Mer II ", première dénommée, pour l'ensemble des requérants, à la commune de Fleury d'Aude et à la société civile immobilière SM Invest.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Haïli, président-assesseur assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Jazeron, premier conseiller,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

X. Haïli

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de l'Aude en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°22TL00406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00406
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Voies de recours - Tierce-opposition.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Retrait du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : COULOMBIE, GRAS, CRETIN, BECQUEVORT, ROSIER, SOLAND

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-04-06;22tl00406 ?
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