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28/03/2023 | FRANCE | N°21TL01332

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 28 mars 2023, 21TL01332


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2019 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 4 mars 2019, et d'enjoindre au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de procéder à la régul

arisation de sa situation administrative et financière.

Par un jugement n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2019 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 4 mars 2019, et d'enjoindre au président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard de procéder à la régularisation de sa situation administrative et financière.

Par un jugement n° 1902306 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er avril 2021, sous le n° 21MA01332 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL01332, et un mémoire enregistré le 11 octobre 2022, M. A... C..., représenté par Me Allegret-Dimanche, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2019 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 4 mars 2019 ;

3°) d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours du Gard de régulariser sa situation administrative et financière ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur en considérant qu'il devait être obligatoirement en poste au centre de secours à 13h30 ;

- aucune faute de nature à justifier une sanction disciplinaire ne peut être retenue à son encontre : la matérialité des faits retenus n'est pas établie ; en tout état de cause, son retard dans la prise de son poste ne justifie pas une telle sanction ; aucune intention délibérée ne peut être retenue ;

- à supposer même que son comportement soit considéré comme fautif, la sanction prononcée est manifestement disproportionnée ;

- la sanction constitue une sanction supplémentaire, en violation du principe " non bis in idem " dès lors que depuis l'accident, plus de dix comptes rendus ont été pris à son encontre ainsi que trois décisions de changement d'affectation et une prolongation de stage.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2021, le service départemental d'incendie et de secours du Gard, représenté par Me Journault, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. C....

Par ordonnance du 11 octobre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Allegret, représentant M. C..., et de Me Journault, représentant le service départemental d'incendie et de secours du Gard.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., capitaine stagiaire de sapeur-pompier en poste au centre de secours principal de Nîmes, a fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours par arrêté du 8 janvier 2019, au motif qu'il a, à la suite d'un accident de la circulation avec un véhicule de service, modifié l'horaire de survenance des faits sur le constat amiable et que, lors de l'évocation de cette situation par sa hiérarchie, il a eu un comportement agressif et a tenu des propos injurieux. M. C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler cet arrêté ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 4 mars 2019. Il relève appel du jugement rendu le 4 février 2021 qui a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; (...) / Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période ; (...) ".

3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

4. Pour prononcer une sanction du premier groupe à l'encontre de M. Servent, le président du conseil d'administration du service d'incendie et de secours du Gard s'est fondé en premier lieu sur le fait que, lors de la rédaction du constat amiable, l'intéressé a modifié l'horaire de survenance de l'accident de la circulation dont il a été victime, le 16 juillet 2018, alors qu'il était au volant d'un véhicule de service et se rendait à son travail. Il ressort des pièces du dossier que le constat amiable établi sur les lieux de l'accident mentionne que celui-ci est survenu à 13 heures 15, et il apparaît que cet horaire a fait l'objet d'une réécriture au regard de la grosseur des traits. Il est constant que les secours ont été alertés à 14 heures 13, ainsi qu'il est mentionné dans le journal des interventions du service départemental d'incendie et de secours, et que deux agents sont arrivés sur place vers 14 heures 30. L'automobiliste responsable de l'accident a confirmé, dans un courriel du 6 septembre 2018 adressé au supérieur hiérarchique de M. C..., qu'ainsi qu'il l'avait indiqué le jour de l'accident à un autre agent du service, l'heure de l'accident mentionnée sur le constat était erronée et que celui-ci était en réalité survenu vers 14 heures 10. Contrairement à ce que soutient l'appelant, les attestations établies par cet automobiliste les 4 et 18 octobre 2018 ne viennent pas infirmer ses précédentes déclarations concernant l'heure approximative de survenance de l'accident. Dans un courriel adressé à son supérieur hiérarchique le 24 juillet 2018, M. C... a d'ailleurs reconnu avoir modifié l'heure du constat " de façon non délibérée ", exposant avoir rempli le document dans un état de stress émotionnel important. Alors qu'il devait prendre son service à 13 heures 30, ainsi qu'il est indiqué dans la fiche de renseignements administratifs qu'il a signée, et bien qu'il soutienne qu'il n'a pas modifié l'heure de survenance de l'accident de manière délibérée et qu'il l'a fait en présence de l'autre automobiliste, M. C... a cependant reconnu la matérialité de ce premier fait reproché. Dans ce même courriel du 24 juillet 2018, l'intéressé a également reconnu la matérialité des autres faits sur lesquels l'autorité administrative s'est fondée en second lieu pour prononcer la sanction contestée, portant sur son comportement agressif ainsi que sur les propos particulièrement injurieux et inacceptables qu'il a tenus envers sa hiérarchie directe. Il a ainsi reconnu s'être emporté lors de la conversation téléphonique avec son supérieur du 17 juillet 2018, lequel lui proposait de refaire le constat pour clore l'affaire, sans être en mesure de se souvenir des mots employés, et indiqué s'en être excusé lors de l'entretien du 24 juillet 2018. Il ressort en outre de l'attestation établie le 19 octobre 2018 par le commandant B..., qui était présent lors de l'altercation téléphonique, que M. C... a tenu des propos à caractère injurieux et insultant à l'encontre de son supérieur. Par suite, l'arrêté du 8 janvier 2019 n'est entaché d'aucune erreur dans la matérialité des faits reprochés à M. C....

5. Au regard des faits qui viennent d'être exposés, lesquels sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction, et alors même que M. C... n'a fait l'objet d'aucune sanction depuis sa prise de fonctions au sein du centre de secours de Nîmes le 15 septembre 1994 et a toujours eu un comportement exemplaire, la sanction prise à son encontre n'est pas disproportionnée aux faits ainsi relevés.

6. M. C... invoque la violation du principe " non bis in idem " au motif que depuis l'accident dont il a été victime le 16 juillet 2018, il a fait l'objet de trois changements d'affectation qui révèlent une sanction déguisée, ainsi que d'une décision de prolongation de son stage en raison de ses arrêts de travail. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa période de stage a dû faire l'objet d'une prolongation en raison de la seule circonstance qu'il a été placé en congé de maladie pendant une durée continue de 212 jours à compter du 11 septembre 2018. Si, par ordonnance du 31 octobre 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a prononcé la suspension de l'exécution de la première décision de changement d'affectation prononcée à son encontre, il est constant que l'autorité administrative a rapporté cette décision. S'il se prévaut de ce qu'il n'a jamais connu de difficultés relationnelles ni de comportement au centre de secours ... où il est affecté depuis le 8 avril 2019, comme dans le cadre de l'ensemble de sa carrière, il ne ressort pas des pièces produites que son changement d'affectation, qui a été pris dans l'intérêt du service, constituerait une sanction déguisée. Par suite, M. C... ne peut utilement soutenir que la sanction en litige a été prise dans le but de nuire à sa situation professionnelle, en méconnaissance du principe " non bis in idem ".

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours du Gard et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera au service départemental d'incendie et de secours du Gard une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. A... C... et au service départemental d'incendie et de secours du Gard.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL01332
Date de la décision : 28/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : JOURNAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-03-28;21tl01332 ?
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