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23/03/2023 | FRANCE | N°21TL02439

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 23 mars 2023, 21TL02439


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 par lequel le maire de Saint-Julien-les-Rosiers a sursis à statuer sur la déclaration préalable qu'elle a déposée en vue de la division en deux lots d'une propriété non bâtie et la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 2002893 du 26 avril 2021, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juin 2021 et le 3 novembre 2022 au gref...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 par lequel le maire de Saint-Julien-les-Rosiers a sursis à statuer sur la déclaration préalable qu'elle a déposée en vue de la division en deux lots d'une propriété non bâtie et la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 2002893 du 26 avril 2021, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juin 2021 et le 3 novembre 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille sous le n°21MA02439 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL02439, Mme A..., représentée par le cabinet Cornille-Fouche-Manetti, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 du maire de Saint-Julien-les-Rosiers et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Julien-les-Rosiers une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une omission à statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dès lors que l'élaboration du plan local d'urbanisme n'était pas assez avancée et que le projet ne compromet pas l'exécution de ce futur plan ;

- l'arrêté attaqué est illégal dès lors que le classement en zone N dans le futur plan local d'urbanisme est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 12 septembre et 14 novembre 2022, la commune de Saint-Julien-les-Rosiers, représentée par Me Ducroux, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme A... la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de Mme A....

Par ordonnance du 4 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 18 novembre 2022.

Les parties ont été informées le 24 février 2023, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes ne pouvait se fonder sur les dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande de Mme A... dès lors que le moyen figurant dans sa requête, fondé sur la méconnaissance par l'arrêté en litige de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, ne pouvait être regardé comme n'étant pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Eizaga, représentant Mme A..., et de Me Mouakil, représentant la commune de Saint-Julien-les-Rosiers.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 23 janvier 2020, le maire de Saint-Julien-les-Rosiers (Gard) a sursis à statuer sur la déclaration préalable déposée par Mme A... en vue de la division en deux lots d'une propriété non bâtie. Mme A... a formé un recours gracieux réceptionné par la commune le 21 avril 2020. Par la présente requête, Mme A... demande à la cour d'annuler l'ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes du 26 avril 2021 rejetant, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / ( ...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ".

3. Pour rejeter, sur le fondement de ces dispositions, la demande présentée par Mme Evesque, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes a relevé, au point 4 de l'ordonnance attaquée, que le moyen fondé sur la méconnaissance par l'arrêté en litige des dispositions de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Toutefois, il ressort de l'examen de ladite demande que Mme A... invoquait à l'appui de ce moyen la circonstance que son projet de division parcellaire en deux lots de sa propriété n'était pas d'une ampleur suffisante pour compromettre l'élaboration du plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, ce moyen ne pouvait être regardé comme n'étant manifestement pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il s'ensuit que le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes ne pouvait se fonder sur les dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande de Mme A.... Ainsi, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée.

4. Il y a lieu pour la cour, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen relatif à la régularité de l'ordonnance attaquée, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nîmes.

Sur la légalité de l'arrêté du maire de Saint-Julien-les-Rosiers du 23 janvier 2020 :

5. En premier lieu, l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineures aux règles d'urbanisme applicables. (...) ".

6. L'arrêté en litige vise le code de l'urbanisme et cite les dispositions de l'article L. 153-11 de ce code sur le fondement duquel il a été pris. Ce même arrêté mentionne l'intérêt environnemental que présente le terrain d'assiette du projet, l'objectif de protection des espaces naturels afin de lutter contre la dégradation des richesses naturelles du territoire communal et la constitution des corridors écologiques et des réservoirs de biodiversité identifiés sur le territoire par le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme en cours d'élaboration. En indiquant également que le projet de division prévoit la création d'un espace constructible sur l'emprise des lots 1 et 2 sur un terrain devant être classé en zone naturelle par le futur plan local d'urbanisme, le maire de Saint-Julien-les-Rosiers, qui a mentionné que ce projet aura pour effet de compromettre l'exécution du futur plan, a suffisamment motivé son arrêté.

7. En deuxième lieu, il ressort clairement des énonciations de l'arrêté en litige que le sursis à statuer porte sur une division de terrain en deux lots et non en cinq lots, alors même qu'il mentionne par une erreur de plume le lot cinq dans l'un de ses motifs. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ".

9. Il résulte également des dispositions du code de l'urbanisme que les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les règles tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un lot d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité compétente de refuser le permis d'aménager sollicité ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la compatibilité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

10. Enfin, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des divers secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

11. D'une part, l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Julien-les-Rosiers a été prescrite par délibération du 10 décembre 2015. Par délibération du 23 mars 2017, le conseil municipal a débattu sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables et, par délibération du 4 juillet 2019, ce même conseil a approuvé le bilan de la concertation et arrêté le projet de plan local d'urbanisme, lequel a été soumis à enquête publique du 17 octobre 2019 au 16 novembre 2019. Dans ces conditions, et alors même que les élus n'auraient pas répondu à certaines questions du public lors de la réunion de présentation du 2 juillet 2019 ou que le site internet de la commune ne faisait pas état de la publicité du projet de plan local d'urbanisme, la commune établit que l'élaboration de son plan local d'urbanisme était suffisamment avancée à la date de l'arrêté en litige pour lui permettre d'opposer valablement un sursis à statuer à la déclaration préalable déposée par Mme A... pour la division d'un terrain en deux lots à bâtir.

12. D'autre part, il ressort du projet d'aménagement et de développement durables et du projet du plan de zonage du plan local d'urbanisme arrêté le 4 juillet 2019 que le terrain d'assiette du projet en litige devait être classé en zone naturelle, dans laquelle les constructions nouvelles ne sont pas autorisées, sauf constructions à usage d'équipements collectifs et services publics. Il en ressort également que les auteurs du plan avaient déjà pour objectif de protéger les espaces naturels afin de lutter contre la dégradation des richesses naturelles du territoire communal et de constituer des corridors écologiques et des réservoirs de biodiversité identifiés sur le territoire tout en stoppant l'étalement urbain. Alors qu'il ressort également des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet est un terrain de caractère boisé dépourvu de toute construction, bordé au sud, à l'est et à l'ouest par des espaces naturels, son projet de classement en zone naturelle N ne peut être regardé comme procédant d'une erreur manifeste d'appréciation commise par les auteurs du plan local d'urbanisme en cours d'élaboration. La commune ayant pour objectif de lutter contre la dégradation des richesses naturelles ainsi qu'il vient d'être dit, la circonstance que cette parcelle ne serait pas située dans un corridor écologique ou un réservoir de biodiversité existant ne peut, à elle seule, caractériser une telle erreur manifeste d'appréciation. Par suite, eu égard à sa consistance et à sa localisation, le projet de Mme A..., bien que de faible ampleur, est de nature à compromettre l'exécution du futur plan lequel prohibe toute construction nouvelle sauf constructions à usage d'équipements collectifs et services publics. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme doit donc être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté en date du 23 janvier 2020 par lequel le maire de Saint-Julien-les-Rosiers a sursis à statuer sur sa déclaration préalable de division foncière ni celle de la décision rejetant implicitement son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Julien-les-Rosiers, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par la commune de Saint-Julien-les-Rosiers en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Nîmes du 26 avril 2021 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions des parties présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Saint-Julien-les-Rosiers.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. ChabertLa greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL02439


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Instruction - Pouvoirs généraux d'instruction du juge - Jugement sans instruction.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Régimes de déclaration préalable.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP CORNILLE POUYANNE FOUCHET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 23/03/2023
Date de l'import : 27/03/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 21TL02439
Numéro NOR : CETATEXT000047340188 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-03-23;21tl02439 ?
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