Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 9 janvier 2019 par laquelle la commune de Pérols a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son accident survenu le 28 janvier 2013, d'enjoindre à la commune de Pérols de prendre un arrêté formalisant l'imputabilité au service de l'accident du 28 janvier 2013 ainsi que les arrêts maladie jusqu'au 10 avril 2013 et de mettre à la charge de la commune de Pérols une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°1901366 du 22 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 février et 20 octobre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, sous le n°21MA00751 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL00751, Mme B..., représentée par Me Mazas, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 décembre 2020 ;
2°) d'annuler la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Pérols a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son accident survenu le 28 janvier 2013 ;
3°) d'enjoindre à la commune de Pérols de prendre un arrêté formalisant l'imputabilité au service de l'accident du 28 janvier 2013 ainsi que les arrêts maladie jusqu'au 10 avril 2013 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen d'ordre public transmis n'était pas assez précis pour être utilement débattu ;
- c'est à tort que le tribunal a retenu une irrecevabilité au visa de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ; la décision contestée ne pouvait être prise qu'après consultation de la commission de réforme ; partant, seule une décision expresse pouvait faire courir le délai de recours, en application du 1° de l'article R.421-3 du code ; le jugement contesté est ainsi entaché d'erreur de droit dans le cadre d'un moyen d'ordre public erroné ;
- le délai raisonnable pour contester la décision était en l'espèce supérieur à un an dès lors qu'elle a dû saisir l'administration, le juge des référés puis à nouveau l'administration qui lui a indiqué instruire sa demande et l'a fait patienter durant 14 mois ;
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure substantiel, en l'absence de saisine de la commission de réforme ;
-elle est illégale en tant qu'elle retire, sans motif et sans texte, une décision implicite initiale de reconnaissance d'accident de travail révélée par les bulletins de salaire produits ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 septembre 2021, la commune de Pérols, représentée par la SCP Margall-D'Albenas, agissant par Me Margall, conclut au rejet de la requête et à ce que qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme B... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une ordonnance du 16 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 octobre 2021.
Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de Mme B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., adjoint technique territorial de la commune de Pérols (Hérault), était affectée à des travaux d'entretien des bâtiments municipaux. Le 28 janvier 2013, sur son lieu de travail, elle a chuté d'un escabeau et s'est blessée au dos. Par une lettre du 4 août 2017, reçue le 9 août 2017, Mme B... a demandé au maire de Pérols de statuer sur l'imputabilité au service de l'accident survenu le 28 janvier 2013. Par un jugement du 22 décembre 2020, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Pérols a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes du 5° de l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet dans les relations entre l'administration et ses agents. Le premier alinéa de l'article R. 421-2 du code de justice administrative dispose : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. ". Aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : 1° Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, si la mesure sollicitée ne peut être prise que par décision ou sur avis des assemblées locales ou de tous autres organismes collégiaux ;(...) ".
3. Aux termes des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) /Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ". Aux termes de l'article 16 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 alors applicable : " (...) la commission de réforme (...) est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2ème alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 ".
4. En l'espèce, Mme B... a sollicité, le 4 août 2017, la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident. Le maire de Pérols a opposé un refus explicite à cette demande le 9 janvier 2019. Dès lors qu'il résulte des dispositions citées au point précédent qu'une telle mesure expresse de refus ne pouvait être prise que sur avis de la commission de réforme, qui constitue un organisme collégial au sens de l'article R. 421-3 du code de justice administrative, le recours de Mme B... dirigé contre ladite décision expresse, enregistré dans les deux mois de sa notification, était recevable, en application de ces mêmes dispositions de l'article R.421-3 du code citées au point 2. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa requête comme irrecevable au motif que la décision en litige était confirmative d'une décision implicite de rejet née le 9 octobre 2017 en application de l'article R. 421-2 du code et devenue définitive, faute de recours contentieux avant le 11 décembre 2017. Il s'ensuit également que le jugement du tribunal administratif de Montpellier est entaché d'irrégularité et doit être annulé.
5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Montpellier.
Sur la demande tendant à l'annulation de la décision du maire de Pérols du 9 janvier 2019 :
6. Il résulte des dispositions citées au point 3 que la question de l'imputabilité d'un accident au service doit donner lieu, lorsque l'administration envisage de refuser la reconnaissance de cette imputabilité et hormis le cas où le défaut d'imputabilité serait manifeste, à un avis de la commission de réforme. Or, il est, en l'espèce, constant que la décision contestée refusant de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de Mme B... en date du 28 janvier 2013 a été prise en l'absence d'avis de la commission de réforme sans que la commune ne fasse valoir que le défaut d'imputabilité aurait été manifeste. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par Mme B... à son encontre, cette décision, intervenue au terme d'une procédure irrégulière, est illégale et eu égard au motif d'illégalité doit donc être annulée.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au maire de Pérols de réexaminer la demande de Mme B... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident du 28 janvier 2013, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la commune de Pérols au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de Mme B... qui n'est pas la partie perdante à l'instance. Les conclusions présentées par Mme B... sur ce même fondement, dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie au litige, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er: Le jugement n°1901366 du 22 décembre 2020 du tribunal administratif de Montpellier et la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Pérols a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident de Mme B... en date du 28 janvier 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au maire de Pérols de réexaminer la demande de Mme B... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de son accident du 28 janvier 2013 dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Pérols.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023.
Le rapporteur,
T. Teulière
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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