Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes :
1°) d'annuler l'avis émis le 26 septembre 2017 par la commission départementale de réforme ;
2°) d'annuler la décision du 19 janvier 2018 par laquelle le recteur de la région académique Occitanie a refusé de prolonger son congé de longue durée imputable au service pour la période du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018, ainsi que la décision du 3 juillet 2018 rejetant son recours gracieux formé à l'encontre de cette décision ;
3°) d'annuler l'arrêté du 5 février 2018 par lequel le recteur de la région académique Occitanie l'a placé en congé de longue durée non imputable au service du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018 ;
4°) d'enjoindre au recteur de la région académique Occitanie de le placer en congé de longue durée imputable au service à compter du 30 octobre 2017.
Par un jugement n° 1803210 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 janvier et 10 avril 2021 sous le n° 21MA00734 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL00734, et un mémoire complémentaire enregistré le 26 octobre 2022, M. A... B..., représenté par la SELARL Ivorra et Ortigosa-Liaz agissant par Me Ortigosa-Liaz, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 décembre 2020 ;
2°) d'enjoindre à la rectrice de la région académique Occitanie de déclarer imputable au service la prolongation de son congé de longue durée pour la période du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à défaut de lui enjoindre de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de deux mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête devant le tribunal a été présentée tardivement, mais il était dans l'impossibilité manifeste de présenter sa requête dans le délai de deux mois, se trouvant dans un cas de force majeure ;
- sa requête était suffisamment motivée ;
- l'absence d'un médecin spécialiste des affections mentales lors de la commission de réforme du 19 décembre 2017 a vicié la procédure et lui a porté préjudice ;
- le refus de prolongation de l'imputabilité au service de son congé de longue durée est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conclusions rendues par les deux experts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2022, la rectrice de la région académique Occitanie conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- elle reprend ses observations présentées devant le tribunal ;
- la requête de M. B... devant le tribunal était irrecevable en raison de sa tardiveté et en l'absence d'exposé de tout moyen présenté, en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse la requête de M. B....
Par ordonnance du 17 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 13 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., professeur agrégé en sciences industrielles de l'ingénieur, a été placé en congé de longue durée imputable au service du 31 octobre 2013 au 30 octobre 2017. Par décision du 19 janvier 2018, le recteur de la région académique Occitanie a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la prolongation de son congé de longue durée pour la période du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018. M. B... a formé un recours gracieux contre cette décision qui a été rejeté par décision du 3 juillet 2018. Par arrêté du 5 février 2018, le recteur a placé M. B... en congé de longue durée non imputable au service du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018. L'intéressé a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'avis émis le 26 septembre 2017 par la commission départementale de réforme, ainsi que les décisions du recteur en date des 19 janvier 2018, 3 juillet 2018 et 5 février 2018. Il relève appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit :/ (...) 4° A un congé de longue durée, en cas de (...), maladie mentale, (...), de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement (...)/ Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
4. D'autre part, aux termes de l'article 13 du décret du 14 novembre 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La commission de réforme est consultée notamment sur :/ (...) 2. L'imputabilité au service de l'affection entraînant l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 34 (4°) de la loi du 11 janvier 1984 susvisée (...) ". En vertu de l'article 12 de ce décret, la commission de réforme départementale, placée sous la présidence du préfet ou de son représentant, est notamment composée des membres du comité médical prévu à l'article 6 dudit décret. En application de cet article, qui renvoie à l'article 5 du même décret, ce comité comprend deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, pour l'examen des cas relevant de sa qualification, un spécialiste de l'affection pour laquelle est demandé le bénéfice des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984. Aux termes de l'article 19 du même décret : " La commission de réforme ne peut délibérer valablement que si la majorité des membres en exercice assiste à la séance ; un praticien de médecine générale ou le médecin spécialiste compétent pour l'affection considérée doit participer à la délibération (...) ".
5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que si aucun médecin spécialiste n'a siégé au sein de la commission de réforme qui s'est réunie le 19 décembre 2017 pour examiner la demande de prolongation du congé de longue durée imputable au service formée par M. B..., ladite commission disposait cependant de plusieurs expertises émanant d'un psychiatre. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'absence d'un médecin de cette spécialité n'a pas privé M. B... d'une garantie. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission de réforme était irrégulièrement composée doit être écarté.
7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a été placé en congé de maladie à partir du 17 septembre 2013, puis en congé de longue durée reconnu imputable au service pour la période du 31 octobre 2013 au 30 octobre 2017, ainsi qu'il en a été informé par lettre du 10 octobre 2017 à la suite de l'avis favorable émis par la commission de réforme du Gard le 26 septembre 2017. Selon l'expertise réalisée le 23 octobre 2017 par un médecin spécialiste en psychiatrie, l'intéressé présente une psychose chronique paraphrénique confabulante, préexistante aux difficultés professionnelles rencontrées à l'automne 2013, qui avait conduit à une prise en charge psychiatrique de septembre 1981 à septembre 1999. L'expert a relevé que M. B... n'était plus suivi sur le plan psychiatrique ni traité depuis 1999, et que sa situation professionnelle en septembre 2013 avait réactualisé des conflits psychiques et entraîné une décompensation de sa pathologie dépressive. Toutefois, selon l'expert, M. B... présente un état stable depuis la précédente expertise du 15 mai 2017 lors de laquelle il avait retenu une date de consolidation au 16 septembre 2017. Si selon ce premier expert la période de congé de longue durée du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018 doit être reconnue comme imputable au service, il ressort cependant des autres constatations qu'il a effectuées que si l'affection psychiatrique dont souffre M. B... a été décompensée en septembre 2013, les séquelles qu'il présente quatre années plus tard ne peuvent être considérées en elles-mêmes comme imputables au contexte professionnel. De plus, ces éléments sont confirmés par une seconde expertise, réalisée à la suite du recours gracieux formé par M. B... contre la décision du 19 janvier 2018, l'expert évoquant un trouble bipolaire de type I, préexistant à son recrutement, compliqué par des éléments délirants, le rendant inapte à toutes fonctions. Cet expert conclut à l'absence d'imputabilité au service du congé de longue durée pour la période en cause. Si M. B... soutient que les conditions d'exercice de son activité professionnelle sont à l'origine de sa pathologie, il ne produit cependant aucune pièce permettant de justifier de la dégradation de ses conditions de travail. Les certificats médicaux établis par son médecin psychiatre le 25 janvier 2018 et le 4 septembre 2018 évoquant " une décompensation dépressive à la suite de problèmes administratifs empêchant le cours normal de son activité professionnelle " ne permettent pas de remettre en cause les constatations effectuées par les experts et l'avis défavorable émis par la commission de réforme départementale selon lequel " M. B... est atteint d'une pathologie mentale chronique dont l'origine est catégoriquement sans lien avec ses fonctions ". Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, le recteur de la région académique Occitanie n'a entaché sa décision d'aucune erreur d'appréciation en refusant d'imputer au service le congé de longue durée de M. B... pour la période du 31 octobre 2017 au 30 avril 2018.
8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de sa requête de première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
Sur les frais de l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Occitanie.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023.
La rapporteure,
A. Blin
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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