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07/02/2023 | FRANCE | N°20TL22925

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 07 février 2023, 20TL22925


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite du maire de Toulouse du 28 avril 2018 rejetant sa demande de réintégration, de requalification de sa situation en agent non titulaire de la fonction publique pour la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2017 et de versement la somme de 25 000 euros au titre de son préjudice matériel et de 5 000 euros au titre de son préjudice de carrière, d'ordonner sa réintégration au sein de la direction de la communication-

presse en tant qu'agent contractuel de droit public dans un emploi permane...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite du maire de Toulouse du 28 avril 2018 rejetant sa demande de réintégration, de requalification de sa situation en agent non titulaire de la fonction publique pour la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2017 et de versement la somme de 25 000 euros au titre de son préjudice matériel et de 5 000 euros au titre de son préjudice de carrière, d'ordonner sa réintégration au sein de la direction de la communication-presse en tant qu'agent contractuel de droit public dans un emploi permanent à l'indice 349 et de condamner la commune de Toulouse à lui verser la somme de 20 000 euros au titre du préjudice matériel résultant du non-paiement des congés et primes et la somme de 15 000 euros au titre du préjudice de carrière résultant de la pérennisation d'une situation précaire et illégale, à titre subsidiaire de condamner la commune de Toulouse à lui verser la somme de 8 490,12 euros au titre de l'indemnité de licenciement, la somme de 30 000 euros au titre du préjudice matériel résultant du non-paiement des congés et primes auxquels ont droit les agents contractuels et la somme de 30 000 euros au titre du préjudice de carrière résultant de la pérennisation d'une situation précaire et illégale et enfin de mettre à la charge de la collectivité la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Par un jugement n° 1802935 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision implicite par laquelle le maire de Toulouse a rejeté la demande de M. A... tendant à requalifier ses contrats de vacation pour la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2017 en contrats d'agent non titulaire de la fonction publique, enjoint à la commune de Toulouse de procéder à la régularisation de la situation de M. A... en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009, avec toutes conséquences de droit, mis à la charge de la collectivité une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 31 août 2020 et des mémoires enregistrés le 2 décembre 2020 et le 29 avril 2021 sous le n°20BX022901 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL22901, la commune de Toulouse, représentée par Me Lonqueue, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 juin 2020 en tant qu'il lui a enjoint de procéder à la régularisation de la situation de M. A... en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009 avec toutes conséquences de droit, alors que la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2013 est prescrite ;

2°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les sommes dues par la collectivité pour la période antérieure au 1er janvier 2014, correspondant en matière de rémunération au service fait calculé année après année n'ayant pas été payées dans un délai de 4 ans sont prescrites ;

- la période à compter de laquelle M. A... pouvait bénéficier d'un contrat à durée déterminée doit en conséquence être décorrélée de la période d'indemnisation des droits afférents à cette requalification ;

- une personne morale de droit public ne peut être condamnée à verser une somme qu'elle ne doit pas.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2021, M. A..., représenté par Me Cabrol, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Toulouse d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le fait générateur de sa créance est l'illégalité de la décision implicite de rejet, du fait de l'illégalité de la situation contractuelle dans laquelle il a été placé ; le fait générateur de la régularisation de sa situation et de ses droits à rémunération est le jugement du tribunal administratif de sorte que dans un cas comme dans l'autre, sa créance n'est pas prescrite ;

- la commune est à l'origine d'une situation illégale qui a perduré dans le temps.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la commune de Toulouse.

Par une ordonnance du 25 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 25 juin 2021 à 12 heures.

II. Par une requête enregistrée le 1er septembre 2020 et un mémoire ampliatif et récapitulatif enregistré le 23 juin 2021 sous le n°20BX02925 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL22925, M. B... A..., représenté par Me Cabrol, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement en tant qu'il a rejeté par son article 4 sa demande sollicitant le versement d'une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

2°) de confirmer le jugement en son article 1er ;

3°) d'enjoindre à la commune de Toulouse de procéder à la régularisation de sa situation en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009 avec toutes conséquences de droit notamment en termes de rémunération et d'éléments accessoires de rémunération et au plan des cotisations sociales et droits sociaux, et des droits à la retraite, de sorte qu'il soit intégralement rempli de ses droits comme un agent non titulaire sur la période concernée ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Toulouse une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- il ne conteste plus la requalification des contrats de vacataires en contrats d'agent public non titulaire, ni l'injonction telle que prononcée ; il renonce à solliciter sa réintégration et renonce à sa demande indemnitaire en réparation du préjudice matériel et économique, réparé par la régularisation ;

- l'injonction prononcée par le tribunal implique que le statut d'agent non titulaire de la fonction publique lui soit appliqué à compter du 17 juin 2009 jusqu'au 31 décembre 2017 avec toutes conséquences de droit, notamment en terme de rémunération et ses éléments accessoires ainsi que les cotisations sociales, les droits sociaux et à la retraite ;

- il a subi un préjudice moral en raison de son maintien dans une situation de précarité professionnelle pendant de nombreuses années justifiant le versement d'une somme de 15 000 euros.

Par des mémoires en défense enregistrés le 27 avril 2021, la commune de Toulouse, représentée par Me Lonqueue, conclut :

1°) à la jonction des procédures enregistrées sous les n° 20BX22901 et 20BX22925 ;

2°) au rejet de la requête d'appel de M. A... ;

3°) à la réformation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 juin 2020 en tant que par son article 2, il lui a enjoint de procéder à la régularisation de la situation de M. A... en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009 avec toutes conséquences de droit alors que la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2013 est prescrite ;

4°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande d'appel de M. A... qui sollicite de procéder à la régularisation de sa situation en précisant quelles sont les conséquences de droit de cette régularisation est nouvelle et par suite irrecevable ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle partielle au taux de 25% par une décision du 29 octobre 2020 confirmée en appel le 21 janvier 2021.

Par une ordonnance du 25 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 25 juin 2021 à 12 heures.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Antoniolli substituant Me Sartorio pour la commune de Toulouse et celles de Me Cabrol pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a été recruté par la commune de Toulouse à compter du 1er avril 2009 par contrats de " vacataire-chargé de rédaction " et a conclu à compter du 1er février 2014, des contrats de même nature avec la communauté urbaine de Toulouse Métropole devenue Toulouse Métropole. Le dernier de ces contrats est arrivé à terme le 31 janvier 2018. M. A... a demandé au maire de Toulouse, par lettre du 28 février 2018, de requalifier sa situation en agent non titulaire de la fonction publique pour la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2017 et de lui verser les sommes de 25 000 euros au titre de son préjudice matériel et de 5 000 euros au titre de son préjudice de carrière. Sa demande a été implicitement rejetée. Par un jugement du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la décision implicite par laquelle le maire de Toulouse a rejeté sa demande tendant à requalifier ses contrats de vacation en contrat d'agent non titulaire de la fonction publique pour la période du 17 juin 2009 au 31 décembre 2017, enjoint à la commune de Toulouse de procéder à la régularisation de la situation de M. A... en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009 avec toutes conséquences de droit et rejeté les surplus de ses demandes. La commune de Toulouse en relève appel et forme également un appel incident en tant que la période de régularisation des droits de M. A... en qualité d'agent non titulaire retenue au titre de l'injonction prononcée par le jugement du tribunal administratif de Toulouse court à compter du 17 juin 2009. M. A... relève appel du jugement en tant que sa demande d'indemnisation à hauteur de 15 000 euros au titre de son préjudice moral a été rejetée. Ces requêtes enregistrées respectivement sous le n°20BX22901 et sous le n° 20TL22925, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :

2. Aux termes de l'article 7 de la loi susvisée du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ".

3. Il résulte de ces dispositions que la prescription quadriennale ne peut être invoquée pour la première fois en appel. Dans son mémoire en défense devant le tribunal administratif, la commune de Toulouse n'a pas opposé la prescription quadriennale, de sorte qu'elle n'est pas recevable en application des dispositions citées au point 2 à l'invoquer pour la première fois en appel. La commune n'ayant pas invoqué la prescription devant le tribunal, elle ne peut, par conséquent, être regardée comme ayant été condamnée à verser une somme qu'elle ne doit pas. L'exception tirée de la prescription quadriennale opposée par la commune de Toulouse doit ainsi être écartée.

En ce qui concerne le préjudice moral :

4. Il est constant que M. A... n'était pas fondé à solliciter la transformation de ses contrats de vacataires en contrat de travail à durée indéterminée mais qu'il a, à bon droit, sollicité leur requalification en contrat d'agent non titulaire de la fonction publique territoriale. La commune de Toulouse a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité en renouvelant comme elle l'a fait les contrats de recrutement de M. A... en qualité de vacataire. Eu égard à la durée de plusieurs années durant lesquelles il a été maintenu dans une situation d'incertitude économique et de l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de bénéficier des droits reconnus aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral de M. A... en fixant à 3 000 euros la somme due par la commune.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Toulouse doit être condamnée à verser à M. A... une somme de 3 000 euros.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. En faisant injonction à la commune de Toulouse de procéder à la régularisation de la situation de M. A... en lui reconnaissant le statut d'agent non titulaire à compter du 17 juin 2009 " avec toutes conséquences de droit ", le tribunal a suffisamment précisé au point 10 du jugement cette injonction qui implique le versement des rappels de cotisations sociales qui auraient dû être versées auprès de l'organisme compétent, ainsi que le versement des compléments de rémunération et de leurs accessoires qui seraient dus en conséquence de ce changement de statut. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Toulouse une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens. En revanche, M. A... n'ayant exposé aucun des frais mentionnés à l'article R. 761-1 du même code, ses conclusions tendant à mettre à la charge de la commune les entiers dépens de l'instance doivent être rejetées. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font par ailleurs obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par la commune de Toulouse au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La commune de Toulouse est condamnée à verser à M. A... une somme de 3 000 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1802935 du 25 juin 2020 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Toulouse versera à M. A... une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La requête d'appel de la commune de Toulouse ainsi que son appel incident et ses conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Toulouse.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 février 2023.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20TL22901, 20TL22925


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL22925
Date de la décision : 07/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIÉ
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SCP DENJEAN et ASSOCIES;SCP DENJEAN et ASSOCIES;SCP SARTORIO-LONQUEUE-SAGALOVITSCH et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-02-07;20tl22925 ?
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