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24/01/2023 | FRANCE | N°20TL24155

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 24 janvier 2023, 20TL24155


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Tarn l'a affecté au centre de secours de Carmaux, et d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours du Tarn de procéder à sa réintégration dans les fonctions qu'il occupait au centre de secours de ..., sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement

à venir.

Par un jugement n° 1801370 du 30 octobre 2020, le tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Tarn l'a affecté au centre de secours de Carmaux, et d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours du Tarn de procéder à sa réintégration dans les fonctions qu'il occupait au centre de secours de ..., sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à venir.

Par un jugement n° 1801370 du 30 octobre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 décembre 2020 et le 21 février 2022, sous le n° 20BX04155 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL24155, M. B... A..., représenté par Me Hudrisier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Tarn l'a affecté au centre de secours de Carmaux ;

3°) d'enjoindre au service départemental d'incendie et de secours du Tarn de procéder à sa réintégration dans les fonctions qu'il occupait au centre de secours de ..., sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Tarn la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement contesté a retenu à tort que son changement d'affectation a été pris pour un motif tiré de l'intérêt du service alors que celui-ci n'est pas démontré ;

- il a également écarté à tort le fait qu'il s'agit d'une sanction déguisée illégale ;

- l'arrêté du 18 janvier 2018 est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas été pris dans les conditions prévues à l'article R. 723-7 du code de la sécurité intérieure ; cette violation a exercé une influence sur le sens de la décision et l'a privé d'une garantie ;

- l'arrêté a été pris en méconnaissance des dispositions prévues à l'article R. 723-51 du même code, en l'absence de demande de sa part et en l'absence d'intérêt du service ;

- son changement d'affectation constitue une sanction déguisée prise en méconnaissance de l'article R. 723-38 du même code, en l'absence d'entretien hiérarchique préalable et de la possibilité de faire valoir ses droits à la défense.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 décembre 2021 et le 21 mars 2022, le service départemental d'incendie et de secours du Tarn, représenté par la SELARL Racine agissant par Me Hounieu, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. A....

Par ordonnance du 27 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 26 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Hudrisier, représentant M. A..., et de Me Dupeyron de la SELARL Racine, représentant le service départemental d'incendie et de secours du Tarn.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., pompier volontaire depuis le 1er janvier 2006 au centre de secours de ..., auprès du service départemental d'incendie et de secours du Tarn, a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2018 par lequel le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours l'a affecté au centre de secours de Carmaux à compter du 10 janvier 2018. Il relève appel du jugement rendu le 30 octobre 2020 qui a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 723-51 du code de la sécurité intérieure : " Tout sapeur-pompier volontaire peut faire l'objet, à sa demande, et sous réserve de l'intérêt du service, d'une affectation au sein d'un autre service d'incendie et de secours ou d'un autre service de l'Etat qui est investi à titre permanent de missions de sécurité civile. L'autorité d'accueil procède par arrêté à un engagement quinquennal par voie de changement d'affectation dans les conditions prévues à l'article R. 723-7. ". Aux termes de l'article R. 723-7 du même code : " L'engagement est subordonné à des conditions d'aptitude physique et médicale définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité civile et correspondant aux missions effectivement confiées aux sapeurs-pompiers volontaires. / Il est précédé d'un examen médical pratiqué par un médecin de sapeurs-pompiers désigné par le médecin chef du service départemental d'incendie et de secours ainsi que d'un examen d'aptitude physique organisé par ce service. A l'issue de ces examens, le médecin de sapeurs-pompiers certifie que le candidat remplit les conditions d'aptitude physique et médicale exigées. / L'engagement d'un sapeur-pompier volontaire du corps départemental est prononcé après avis, le cas échéant, du comité de centre ou intercentres et en l'absence de celui-ci après avis du comité consultatif départemental des sapeurs-pompiers volontaires. ".

3. En premier lieu, l'arrêté contesté portant changement d'affectation de M. A... à compter du 10 janvier 2018 n'a pas pour effet de l'affecter au sein d'un autre service d'incendie et de secours que celui au sein duquel il était affecté depuis janvier 2006. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entaché l'arrêté du 10 janvier 2018 en raison de l'absence de consultation préalable du comité consultatif des sapeurs-pompiers volontaires du service départemental d'incendie et de secours du Tarn, en méconnaissance des dispositions prévues à l'article R. 723-7 du code de la sécurité intérieure, doit être écarté comme étant inopérant.

4. En deuxième lieu, si M. A... soutient que l'arrêté mentionne à tort qu'il aurait présenté une demande de changement d'affectation du centre de secours de ... à celui de Carmaux, il est constant qu'il avait sollicité un tel changement le 30 septembre 2014, en faisant état d'un désaccord avec le management du chef de centre. Sa demande avait alors fait l'objet d'un refus du chef du groupement territorial Tarn Nord par décision du 6 janvier 2015 au motif de son lieu de résidence à ..., plus proche du centre de ..., ainsi que pour un motif opérationnel, au regard des effectifs de ce centre à cette date. S'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. A... ait renouvelé sa demande par la suite, il ne peut cependant utilement invoquer la méconnaissance des dispositions prévues à l'article R. 723-51 du code de la sécurité intérieure dès lors qu'ainsi qu'il a été exposé au point précédent, il n'a pas fait l'objet d'un changement d'affectation au sein d'un autre service d'incendie et de secours que celui au sein duquel il était affecté.

5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que des dissensions sont apparues au sein du centre de secours de ... en raison de désaccords avec les choix managériaux conduits par le chef de centre, à l'origine de la demande de changement d'affectation de M. A... le 30 septembre 2014. A la suite du refus qui lui a été signifié, l'appelant a, sur sa demande, été suspendu de ses fonctions pour une durée de six mois à compter du 16 janvier 2015. M. A... a cependant sollicité la reprise de ses fonctions à compter du 16 mars suivant, en exposant avoir eu une discussion avec le chef de centre et son adjoint. De nouvelles tensions se sont toutefois manifestées au sein du centre de secours de ... en juin 2017, conduisant quatorze sapeurs-pompiers volontaires parmi lesquels M. A..., à solliciter une " mise en indisponibilité " à effet immédiat, en raison d'un problème de management, de la centralisation des informations autour des proches du chef de centre, de problèmes de gestion et de l'absence d'écoute et de concertation. Par un courrier du 18 juillet 2017, le directeur départemental du service d'incendie et de secours du Tarn indiquait ne pas souhaiter accepter ces demandes de suspension d'engagement, mais avoir pris en compte la situation exposée et demandé au chef du groupement Nord d'effectuer une analyse globale de cette situation et d'examiner attentivement les problèmes signalés afin de lui adresser des propositions d'actions visant à rétablir un fonctionnement serein et apaisé du centre de secours. Un deuxième adjoint au chef du centre de secours de ... a été nommé à compter du 1er janvier 2018, au regard des difficultés rencontrées par le chef de centre. Si M. A... soutient que l'arrêté attaqué n'a pu être pris dans l'intérêt du service, alors que sa demande de changement d'affectation avait été rejetée le 6 janvier 2015 pour des motifs tenant à l'intérêt dudit service, il ressort des pièces du dossier que les effectifs des centres de secours de ... et de Carmaux avaient évolué depuis le refus qui lui avait été opposé. Il ressort ainsi des écritures non sérieusement contestées du service départemental d'incendie et de secours du Tarn qu'alors que les effectifs des chefs d'agrès " tout engin " ont été augmentés de deux personnes au centre de ..., lequel comptait de ce fait cinq chefs d'agrès " tout engin " ainsi que trois chefs d'agrès " une équipe " en 2017, ceux du centre de Carmaux avaient diminué entre 2015 et 2017 et trois autres départs étaient annoncés pour 2018. Au regard par ailleurs des tensions qui persistaient au sein du centre de secours de ..., l'affectation de M. A... au centre de secours de Carmaux était effectivement justifiée par l'intérêt du service. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions prévues à l'article R. 723-51 du code de la sécurité intérieure en l'absence d'intérêt du service doit, en toute hypothèse, être également écarté.

6. En dernier lieu, si M. A... se prévaut de courriers de trois anciens collègues du centre de ..., dont deux d'entre eux n'y exerçaient plus de fonctions depuis 1999 et 2011 respectivement et selon lesquels son changement d'affectation pourrait constituer une sanction disciplinaire, ni ces attestations, ni la circonstance que l'avis du comité consultatif départemental des sapeurs-pompiers volontaires du service départemental d'incendie et de secours du Tarn, consulté le 18 juin 2018, mentionne que l'appelant a pris une part active dans la rédaction et la diffusion d'une lettre de reproches à l'attention de ses supérieurs, traduisant " un manque de loyauté manifeste de la part de l'intéressé ", ne permettent de caractériser que la décision attaquée aurait été prise dans l'intention de le sanctionner. Au surplus, le simple déplacement géographique de M. A... du centre de secours de ... au centre de secours de Carmaux, dans lequel il avait demandé à être affecté en 2014, ne peut être considéré comme ayant porté atteinte aux prérogatives que l'intéressé tient de son statut et de son grade, alors au demeurant qu'il a depuis bénéficié d'une promotion, et nonobstant la circonstance que son nouveau poste est plus éloigné de son domicile que l'ancien. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision de changement d'affectation constituerait une sanction déguisée et aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière, à défaut de respecter les garanties procédurales attachées au prononcé d'une sanction disciplinaire, doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Tarn, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le service départemental d'incendie et de secours du Tarn et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera au service départemental d'incendie et de secours du Tarn une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. B... A... et au service départemental d'incendie et de secours du Tarn.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2023.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°20TL24155 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL24155
Date de la décision : 24/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Affectation et mutation.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SELARL INTERBARREAUX RACINE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-01-24;20tl24155 ?
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