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20/10/2022 | FRANCE | N°20TL02013

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 20 octobre 2022, 20TL02013


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté n° PC 30 330 18 C0010 du 20 septembre 2018, par lequel le maire de la commune de Tornac lui a refusé le permis de construire trois bâtiments professionnels sur un terrain sis La Madeleine.

Par un jugement n° 1803641 du 24 avril 2020, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du maire de Tornac du 20 septembre 2018 et a enjoint à la commune de réexaminer la demande de permis de construire.

Procédure d

evant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 juin 2020 sous le numéro 20MA02013 au ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté n° PC 30 330 18 C0010 du 20 septembre 2018, par lequel le maire de la commune de Tornac lui a refusé le permis de construire trois bâtiments professionnels sur un terrain sis La Madeleine.

Par un jugement n° 1803641 du 24 avril 2020, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du maire de Tornac du 20 septembre 2018 et a enjoint à la commune de réexaminer la demande de permis de construire.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 juin 2020 sous le numéro 20MA02013 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le numéro 20TL02013 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la commune de Tornac, représentée par la SCP d'avocats Territoire Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont méconnu la législation en matière de cristallisation des règles d'urbanisme par la délivrance d'un certificat d'urbanisme au regard des dispositions de l'article R. 410-3 du code de l'urbanisme ;

- la cristallisation des règles d'urbanisme est intrinsèquement liée aux caractéristiques substantielles du projet envisagé lors du dépôt du certificat d'urbanisme et une modification substantielle du projet fait perdre le bénéfice de la cristallisation des règles d'urbanisme par la délivrance d'un certificat d'urbanisme ;

- au vu de l'augmentation significative de la volumétrie du projet et de sa destination, le projet de construction déposé lors de la demande de permis de construire ne correspond pas au projet déposé lors de la demande de certificat tant dans sa destination que dans les dispositions juridiques applicables ;

- les premiers juges ont également commis une erreur de droit compte tenu de l'absence de cristallisation des règles d'urbanisme au regard de la préservation de la salubrité publique s'agissant de la création d'une station de lavage ;

- la gestion des eaux usées sur la commune est une vraie problématique et nécessite une étude du projet au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date du dépôt de la demande de permis de construire ;

- le projet de construction d'une station de lavage ne répond pas aux mêmes règles d'urbanisme que celles du projet de construction initialement prévu lors du dépôt du certificat d'urbanisme ;

- contrairement à ce que soutient le pétitionnaire, l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ne s'applique pas à son dossier de permis, compte tenu de la modification du projet et elle a pu valablement fonder sa décision de refus sur le plan local d'urbanisme approuvé le 26 juin 2018 ;

- le projet de construction ne s'inscrit pas dans l'orientation d'aménagement et de programmation, qui se borne à donner une orientation à l'aménagement sur l'ensemble du B... " La Madeleine ", prévue par la commune et contrevient à un aménagement cohérent du secteur ;

- aucun erreur manifeste d'appréciation n'entache le plan local d'urbanisme dans le classement de la parcelle d'assiette en zone 1AUe :

- le plan local d'urbanisme inclut les parcelles qui se situent dans une zone où les équipements publics ne sont pas en nombre suffisant pour accueillir de nouvelles constructions et il est nécessaire d'obtenir un aménagement cohérent de la zone ;

- en l'espèce, la zone concernée en friche n'est pas opérationnelle en terme d'équipement public pour accueillir plusieurs opérations de construction et d'aménagement et le projet de construction nécessite des équipements publics de réseaux soumis à autorisation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2020, M. C... A..., représenté par la SELARL Schneider Associés, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au maire de Tornac de lui délivrer le permis de construire sollicité, et le cas échéant de procéder à une nouvelle instruction de son dossier dans un délai de 15 jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) à ce que soit mise à la charge de la commune de Tornac la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé ;

- l'annulation de la décision litigieuse entraîne l'obligation pour la commune de lui délivrer l'autorisation de construire ou, au moins, de réexaminer sa demande.

Par une ordonnance du 17 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 septembre 2022, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de la santé publique ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Meunier-Garnier, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Téles représentant la commune de Tornac et les observations de Me Schneider représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., propriétaire des parcelles sises la Madeleine sur la commune de Tornac, a présenté une demande de permis de construire en vue de la réalisation de trois bâtiments professionnels, à savoir deux bâtiments jumelés accueillant des entreprises d'ambulance et de pompes funèbres et un bâtiment de station de lavage pour une surface de plancher autorisée de 436 m². Par arrêté du 20 septembre 2018, le maire de Tornac a rejeté sa demande de permis de construire. Par la présente requête, la commune de Tornac fait appel du jugement n° 1803641 du 24 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du maire du 20 septembre 2018.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'urbanisme : " Le règlement national d'urbanisme s'applique sur l'ensemble du territoire. / Toutefois : / 1° Les dispositions des articles L. 111-3 à L. 111-5 ne sont pas applicables dans les territoires où un plan local d'urbanisme, un document d'urbanisme en tenant lieu ou une carte communale est applicable ; (...) ". Aux termes de l'article L. 111-3 du même code : " En l'absence de plan local d'urbanisme, de tout document d'urbanisme en tenant lieu ou de carte communale, les constructions ne peuvent être autorisées que dans les parties urbanisées de la commune. ". Aux termes de l'article L. 410-1 de ce code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation (...) est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique (...) ".

3. Les dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ont pour effet de garantir à la personne à laquelle a été délivré un certificat d'urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le refus de permis de construire du 20 septembre 2018 a été pris au motif que le projet qui est situé en zone 1AUe du plan local d'urbanisme n'est pas conforme aux dispositions règlementaires de ce zonage et à l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur dit " B... de la Madeleine ". Or, le 18 avril 2018, date à laquelle le certificat d'urbanisme a été délivré par le maire de Tornac, les dispositions du règlement de la zone 1AUe ou de l'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme, approuvées le 26 juin 2018, n'étaient pas applicables. Dès lors, en application des dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, l'intimé avait droit à voir sa demande, qui a été déposée durant les dix-huit mois qui suivent la délivrance de ce certificat d'urbanisme, être examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat. Si à l'appui de sa requête d'appel la commune de Tornac soutient que la modification substantielle du projet de construction, tenant à l'augmentation significative de la volumétrie du projet et à sa destination, faisait obstacle à la garantie prévue à l'article L 410-1 du code de l'urbanisme, cette circonstance concernant le contenu du certificat est sans incidence sur le droit du pétitionnaire à la cristallisation des règles d'urbanisme légalement applicables à la date de sa délivrance. Par suite, c'est à bon droit que pour annuler l'arrêté attaqué, les premiers juges se sont fondés sur ce que le maire ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions du règlement de la zone 1AUe du plan local d'urbanisme ou sur l'orientation d'aménagement et de programmation du secteur dit " B... de la Madeleine " en lieu et place du règlement national d'urbanisme.

5. En second lieu, la commune de Tornac soutient pour la première fois en appel que le projet de station de lavage de M. A... fait obstacle à la cristallisation des règles d'urbanisme applicables à la date de délivrance du certificat d'urbanisme dès lors que l'exploitation d'un tel équipement est soumise à diverses dispositions dont celles de l'article L. 1331-10 du code de la santé publique et de l'article R. 211-60 du code de l'environnement ayant pour objet la préservation de la salubrité publique. Toutefois, si ces dispositions soumettent à autorisation le déversement d'eaux usées autres que domestiques dans le réseau public de collecte et interdisent le déversement dans les eaux superficielles notamment après ruissellement de lubrifiants ou huiles neufs ou usagés, ces règles ne sont pas au nombre de celles qui sont sanctionnées par la délivrance d'un permis de construire mais relèvent de législations distinctes de celles de l'urbanisme. Par suite, ce moyen, au demeurant non étayé d'éléments circonstanciés, ne peut être qu'écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Tornac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 18 avril 2018.

Sur les conclusions à fin d'injonction présentée par M. A... :

7. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt, qui confirme l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Nîmes, n'implique pas que le maire de Tornac délivre un permis de construire, comme le demande M. A..., ni que l'injonction aux fins de réexamen prononcée par les premiers juges soit modifiée. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par l'intimé en appel doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "

9. M. A... n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de la commune présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Tornac la somme de 2 000 euros à verser à M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Tornac est rejetée.

Article 2 : La commune de Tornac versera la somme de 2 000 euros à M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tornac et à M. C... A....

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2022.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert Le greffier,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°20TL02013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL02013
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-045 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Régimes de déclaration préalable.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : SCP MARGALL. D'ALBENAS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-10-20;20tl02013 ?
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