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24/05/2022 | FRANCE | N°19TL05755

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 24 mai 2022, 19TL05755


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau - actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner la communication du procès-verbal de la commission de délégation de service public, le rapport d'analyse des offres, le rapport du président sur le choix du délégataire et l'économie du contrat, l'offre du candidat retenu, les pièces de l'accord cadre attribué le 4 avril 2018 au groupement Chauvet-Sade, d'annuler la conv

ention de délégation de service public de l'assainissement conclue le 26...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau - actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner la communication du procès-verbal de la commission de délégation de service public, le rapport d'analyse des offres, le rapport du président sur le choix du délégataire et l'économie du contrat, l'offre du candidat retenu, les pièces de l'accord cadre attribué le 4 avril 2018 au groupement Chauvet-Sade, d'annuler la convention de délégation de service public de l'assainissement conclue le 26 décembre 2017 entre le syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin et la société Véolia Eau, ou à titre subsidiaire, d'annuler l'article 29.3 de cette convention, et de mettre à la charge du syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin et de la société Véolia Eau la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800963 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A... et du collectif " Coll Eau " et mis à la charge, d'une part, de M. A... une somme de 1 500 euros à verser au syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin, ainsi qu'une somme de 2 500 euros à verser à la société Véolia Eau et, d'autre part, du collectif aletois gestion publique de l'eau-actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois une somme de 1 500 euros à verser au syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin, ainsi qu'une somme de 2 500 euros à verser à la société Véolia Eau en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2019, des mémoires enregistrés le 12 juillet 2021, le 14 septembre 2021 et le 29 octobre 2021, ce dernier non communiqué, sous le n°19MA05557 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 19TL05755, M. B... A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau - actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau ", représentés par Me Darribère, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 octobre 2019 ;

2°) d'annuler la convention de délégation de service public de l'assainissement conclue le 26 décembre 2017 entre le syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin et la société Véolia Eau ou, à titre subsidiaire, d'annuler l'article 29.3 de cette convention

3°) et de mettre à la charge du syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- M. A... a intérêt à agir en sa qualité d'usager du service de l'assainissement, de même que l'association au regard de ses statuts ; les vices qu'ils dénoncent sont en lien direct pour M. A... avec sa qualité d'usager et pour le collectif avec son objet statutaire ;

- les écritures déposées au nom du syndicat intercommunal à vocation unique, sont irrecevables en appel en l'absence de pièces justifiant que son président dispose d'un mandat valide pour représenter le syndicat en justice ;

- les écritures déposées au nom de la société Véolia Eau sont irrecevables en appel, comme en première instance, en l'absence de production des statuts de la société permettant d'établir les liens avec le signataire du contrat et la régularité de cette signature, la réalité d'une autorisation d'ester en justice au nom de la société Véolia Eau- compagnie générale des eaux, en l'absence d'indication de la fonction et du nom du représentant légal, n'est pas justifiée ;

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal a statué ultra petita en mettant à leur charge au titre des frais liés à l'instance en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, des sommes supérieures à celles demandées par le syndicat et la société Véolia ; seules les demandes soumises au débat contradictoire peuvent être prises en compte ; les frais mis à leur charge, d'un montant total de 16 500 euros pour les recours entrepris en contestation de la convention de délégation de service du service de distribution d'eau potable conclue par la commune de Limoux (n°1704085), de la convention de délégation de service d'assainissement (n°1800963), la délibération du 22 décembre 2017 " vote de la surtaxe syndicale " (n°1800906) et la délibération du 22 juin 2017 par laquelle la commune de Limoux a approuvé la convention de délégation du service d'eau potable (n°1804086), recours dont ils se sont désistés, sont disproportionnés au regard des moyens dont disposent M. A... et l'association ; cette pratique prive les citoyens d'un accès à la justice ;

- le tribunal n'a pas procédé à la vérification de l'habilitation de la personne physique qui a engagé pour le compte de Véolia une action en défense, de sorte que son intérêt à agir n'était pas justifié et que ses écritures auraient dû être regardées comme irrecevables ; il existe un déséquilibre dans l'examen de la situation des parties selon qu'elle est demandeur ou défendeur ;

- le tribunal ne pouvait écarter comme inopérants les moyens relatifs aux défauts dénoncés dans la procédure de mise en concurrence ; il y a un lien direct entre les moyens tirés des défauts dénoncés dans la procédure de mise en concurrence et les intérêts qu'ils défendent, à savoir le juste prix du service de l'assainissement, qui aboutissent à une mise en concurrence non sincère ;

En ce qui concerne le bien fondé du jugement :

- la convention de délégation de service public doit être requalifiée en contrat de marché public en l'absence d'aléa, les usagers étant captifs, et les travaux de renouvellement étant plafonnés ; cette requalification nécessaire révèle un détournement de procédure ou un vice de procédure substantiel ;

- la procédure de consultation a été substantiellement viciée, le délai accordé aux candidats pour la remise de leurs candidatures ou de leurs offres n'étant que de 33 jours à compter de la parution de l'annonce au journal officiel de l'Union Européenne en méconnaissance de l'article 18 du décret du 1er février 2016 et de l'article 39 de la directive européenne 2014-23-UE du 26 février 2014 ; ce délai était insuffisant compte tenu de la nécessité de recueillir des informations techniques et financières volumineuses et de procéder à une visite des lieux ;

- le consentement des conseillers syndicaux a été vicié en raison des contradictions substantielles entre les articles 18.2 et 18.3 de la convention et la lettre de la délibération du 22 décembre 2017 et l'article 29.3 de la convention ainsi qu'en raison de l'absence d'informations donnée sur les subventions éventuelles accordées par le département ;

- le temps de retour sur capital investi méconnaît les dispositions de l'article 6 du décret du 1er février 2016, le temps raisonnablement escompté pour l'amortissement des investissements prévus au contrat devant se rapprocher de la durée de vie des équipements, fixée à 40 ans, alors que la durée de la convention est de 7 ans ;

- les membres du comité syndical n'ont pas été suffisamment informés d'une part, en raison d'une distinction incompréhensible entre les obligations de gros entretien et de renouvellement et le fonds de travaux et d'autre part, en raison d'un défaut de programme de renouvellement des canalisations, d'informations contradictoires sur la charge des renouvellements des canalisations, d'absence d'informations sur les subventions accordées pour ces renouvellements, et enfin d'informations contradictoires et finalement non sincères sur le sort des biens de retour et les durées d'amortissement ;

- les conseillers syndicaux n'ont pas eu connaissance des règles d'attribution des subventions par le conseil départemental de l'Aude, qui ne retient pas les travaux réalisés dans le cadre d'un contrat de délégation, alors que les subventions peuvent aller jusqu'à 80 % du montant des travaux pour lesquels les maîtres d'ouvrage sont des collectivités publiques ; si les conseillers avaient eu connaissance de ces règles, ils n'auraient pas approuvé le contrat ;

- les besoins du service n'ont pas été correctement recensés et les offres ne peuvent être objectivement comparées, ce qui constitue une manœuvre visant à détourner les règles du code des marchés publics ; en effet, il est impossible de distinguer les opérations relevant du fonds de travaux de l'article 18.2 d'un montant de 546 450,03 euros fixé par le candidat et celles relevant du fonds de travaux prévu à l'article 18.3 de 500 000 euros fixé par le document de consultation des entreprises, lequel ne comprend pas de descriptif des travaux, ni de demande au candidat d'un descriptif de travaux ; le cahier des charges ne donne pas les informations minimales pour que les candidats puissent présenter des informations comparables ; la distinction entre les travaux de gros entretien et de renouvellement à la charge du concessionnaire et ceux à la charge du concédant n'est pas clairement établie ;

- le contrat est entaché d'erreur de droit ; l'article 18.3 prévoit que le délégataire réalise le renouvellement des canalisations, tandis que l'article 18.2 met ces renouvellements à la charge du concédant, qui va alors engager des travaux dans le cadre de marchés publics ; il existe une confusion entre les renouvellements de l'article 18.2, déterminés par le délégataire, réalisés par le délégataire et financés par une dotation annuelle et ceux de l'article 18.3, indéfinis et réalisés par le délégataire à partir d'un bordereau de prix, financés par un fonds de travaux ; les différents besoins ne sont donc pas clairement identifiés ; l'article 18.3 ne permet pas de définir les devoirs du délégataire et de sélectionner la meilleure offre ; les travaux concernés n'étant pas identifiés, le syndicat est amené à sélectionner une offre à partir d'un bordereau de prix vague pour certaines interventions ; ces articles montrent que les besoins du syndicat et les devoirs du délégataire n'ont pas été déterminés, ce qui a faussé les conditions de l'appel à concurrence et montre que la procédure de marché public de travaux s'imposait ;

- il méconnaît l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 et l'article 6 du décret du 1er février 2016 en raison d'une pratique d'obsolescence programmée, un temps de retour sur capital investi dérisoire et illégal ; le temps raisonnablement escompté pour l'amortissement des investissements devant se rapprocher de la durée de vie des équipements ; la durée d'amortissement d'une canalisation étant de 40 ans, la convention ne pouvait être conclue pour une durée de 7 ans ; une obsolescence fictive des pompes de relevage est organisée ; le plan prévisionnel de renouvellement des pompes de relevage se base en effet sur une durée de vie de 12 ans, alors qu'elles fonctionnent depuis 23 ans dans le périmètre du service public de l'assainissement du syndicat ;

- le compte d'exploitation prévisionnel présente deux irrégularités qui vicient le contrat ; il n'est pas sincère et est entaché d'erreur de droit au regard de l'article R.2221-19-10 du code général des collectivités territoriales ; la présentation non sincère du compte prévisionnel ayant trompé les membres du comité, le contrat est entaché un vice du consentement ; il y a une diminution artificielle des recettes et une augmentation factice des dépenses générant des profits irréguliers à l'avantage du délégataire et au détriment des usagers ; il présente des frais financiers de 34 % pour un crédit de 7 ans qui constituent une lésion manifeste au détriment des usagers relevant d'une pratique d'usure ; les aides publiques aux investissements ne sont pas mentionnées, et il n'y a aucune mention des amortissements ; il n'y a aucune information sur les contributions des services centraux et de recherche qui dépassent 2% des charges ; le compte prévisionnel confond contribution aux services centraux et recherche, la ligne frais de structures et frais généraux ne mentionne aucune dépense sur les 7 ans ;

- le compte d'exploitation prévisionnel ne mentionne pas la marge prévue par la société, les amortissements, la nature de la contribution des services centraux et de la recherche, les subventions pour les investissements ;

- l'économie du contrat révèle des profits exorbitants à l'avantage du délégataire et au détriment des usagers, et une erreur de droit et manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 2224-19 du code général des collectivités territoriales ;

- les travaux de l'article 18.5 attribués à titre exclusif sont contraires au principe de liberté du commerce et d'industrie ; en application de l'article L.1331-2 du code de la santé publique, l'autorité délégante ne peut se charger de l'exécution des branchements sur réseau existant qu'à la demande des propriétaires, mais elle ne peut en confier l'exclusivité à son délégataire ; ce moyen, qui concerne une clause portant sur une condition essentielle du contrat et non une disposition réglementaire, est recevable ; à supposer même que le monopole ne serait pas illégal, la procédure d'appel à concurrence aurait dû aboutir à des tarifs plus acceptables pour les usagers ; l'activité du délégataire est viciée par une présentation non sincère des travaux exclusifs sur le compte d'exploitation prévisionnel ; la sous-évaluation du monopole est aggravée par le fait que ce poste n'est pas pris en compte dans les critères de sélection des candidats lors de l'examen des offres ; aucun motif d'intérêt général ne justifie un monopole pour les branchements ;

- l'article 29.3 du contrat, qui prévoit le versement au concédant par le délégataire d'une indemnité dans le cas où les biens à remettre au concédant ne seraient pas amortis, due même dans le cas de déchéance définie à l'article 48, alors que cet article n'existe pas, est irrégulier ; il subsiste un doute sérieux sur la réalité de la remise des biens à titre gratuit ;

- la convention est fondée sur l'ordonnance du 29 janvier 2016, laquelle est contraire au droit européen ; l'article 12 de la directive 2014/23/CE exclut en effet du droit des concessions les contrats concernant l'évacuation ou le traitement des eaux usées ; le régime des concessions ne pouvait être étendu aux contrats d'exploitation dans le domaine de l'assainissement, compte tenu de cette exclusion ;

- aucun mandat n'a été produit de nature à justifier que le signataire du contrat était habilité à le signer au nom de Véolia Eau.

Par des mémoires en défense enregistrés le 18 mai 2020 et 12 octobre 2021, la société Véolia Eau, représentée par Me Laridan, conclut au rejet de la requête et à mise la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau-action sur le Limouxin et le Saint -Hilairois d'une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal n'a pas statué ultra petita, l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative s'apprécie instance par instance ; le tribunal a tenu compte des circonstances de l'espèce, ce qui n'est pas de nature à priver les citoyens d'un accès la justice ; il n'avait pas à tenir compte du fait que les requérants ont été partie perdante dans d'autres instances introduites devant le tribunal administratif de Montpellier ; les difficultés financières de M. A... et du collectif ne sont pas établies, ils ne bénéficient pas de l'aide juridictionnelle et leur recours n'est pas pécuniaire ; le caractère surabondant des mémoires produits par les requérants, en nombre comme en substance, implique que des sommes soient mises à leur charge en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; les conséquences dilatoires et les multiples productions ont, dans les circonstances de l'espèce, conditionné le principe et le quantum des sommes mises à leur charge par le tribunal au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

- le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que les requérants ne contestaient pas sérieusement la qualité pour agir de la société délégataire de service public de l'assainissement ; la faculté dont dispose le juge administratif de s'assurer de la qualité pour agir d'une personne morale défenderesse n'est employée que lorsque cette qualité est sérieusement contestée par l'autre partie ;

- il a écarté à juste titre comme inopérants les moyens tirés des défauts dans la procédure de mise en concurrence ; la qualité d'usager du service public dont se prévaut un requérant lui donne seulement intérêt à présenter des moyens en rapport avec l'organisation et le fonctionnement du service public, de sorte qu'un tel manquement, à le supposer avéré, est sans rapport avec l'intérêt lésé dont il se prévaut ; de la même manière, le collectif, dont l'objet est la gestion directe de l'eau par les citoyens et qui a pour objectif le rejet des délégations de service public, n'a pas un intérêt suffisant à soulever des moyens portant sur la procédure de mise en concurrence de la convention ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

- il est loisible aux Etats membres de soumettre aux dispositions prises pour la transposition de la directive 2014/24/UE des marchés qu'elle exclut de son champ d'application ou de prévoir, pour des marchés qui entrent dans son champ d'application, des règles plus contraignantes que celles qu'elle définit, de sorte que l'ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 n'est pas contraire au droit européen en ce qu'elle n'exclut pas de son champ d'application les conventions de délégation du service public de l'assainissement ;

- le compte d'exploitation prévisionnel fait état du résultat prévisionnel de la convention, année par année, les subventions n'avaient pas à y figurer puisque la société n'en perçoit pas ; l'irrégularité de sa présentation n'est pas établie ;

- le renouvellement des canalisations fait contractuellement l'objet de deux modes de financement distincts complémentaires, ce qui ne constitue ni une contradiction, ni un vice affectant la légalité du contrat ainsi que l'a jugé le tribunal ;

- le moyen selon lequel le consentement des conseillers aurait été vicié sur les biens de retour n'est pas assorti des précisions suffisantes ;

- la circonstance que le renouvellement des canalisations fasse l'objet de deux stipulations complémentaires aux articles 18.2 " gros entretien et renouvellement " et 18.3 fonds de travaux, et celle selon laquelle les stipulations du contrat rappellent le principe d'indemnisation des biens non amortis en fin de contrat ou que la délibération approuvant la convention précise que les biens de retour réputés amortis seront remis à titre gratuit ne caractérisent pas un vice du consentement ; à supposer qu'il existe des contradictions, les conseillers ont pu en prendre connaissance et elles n'ont pas été déterminantes dans leur consentement ;

- le tribunal n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ni d'erreur de droit en rejetant le moyen, qui n'est pas articulé de manière intelligible, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 34 de l'ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 et de l'article 6 du décret n°2016-86 du 1er février 2016 ; la durée normale d'amortissement des installations ne se confond pas avec la durée de vie des équipements ; la durée d'amortissement normal peut ne pas coïncider avec la durée d'amortissement comptable ; de plus, il ressort des dispositions de l'article 34 II de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 que dans le domaine de l'assainissement, les conventions ne peuvent avoir une durée supérieure à 20 ans ; il ne résulte pas de l'article 34-I de l'ordonnance ou de l'article 6-II du décret de 2016, ni même de la jurisprudence administrative, que la durée d'une convention de délégation de service public doive être fixée " en fonction de l'acceptation des tarifs par ces usagers " ;

- le renouvellement d'un patrimoine vieillissant, avant qu'il ne dysfonctionne et ne cause éventuellement des dommages, ne constitue pas une technique de réduction artificielle de la durée de vie d'un équipement ; il n'est pas établi que les renouvellements envisagés des équipements seraient techniquement injustifiés ;

- le compte d'exploitation prévisionnel n'est pas insincère au motif que les frais financiers seraient exorbitants ; les requérants n'apportent aucune précision quant au calcul conduisant à un taux d'intérêt de 8% ;

- la circonstance que la " contribution aux services centraux et recherches " ne fasse pas l'objet d'un sous-détail dans le compte d'exploitation prévisionnel est sans incidence dès lors que ce compte a pour seule vocation de retracer l'économie générale de la convention sur sa durée ; elle ne signifie pas que cette somme n'a pas été justifiée auprès de l'autorité délégante, la société ayant détaillé l'intégralité de ses charges dans des cahiers financiers pendant la procédure de délégation et elle n'entache pas d'insincérité le compte d'exploitation prévisionnel, qui précise que cette contribution correspond à 2% du chiffre d'affaires total du délégataire ;

- lorsque des propriétaires lui demandent de se charger de l'exécution des branchements sur réseau existant, la collectivité peut valablement confier l'exclusivité de cette réalisation à son délégataire, au prix fixé dans un bordereau des prix, sans obérer la possibilité pour les propriétaires de solliciter l'entrepreneur de leur choix ;

- le moyen selon lequel la convention devrait être requalifiée en marché public est sans rapport avec l'intérêt dont fait état M. A... en sa qualité d'usager ; de la même manière, l'objet de l'association " de gestion directe de l'eau par les citoyens " ne lui donne pas un intérêt suffisamment direct et certain à soulever le vice tiré du recours irrégulier au mécanisme contractuel de la délégation de service public en lieu et place d'un marché public ; à titre subsidiaire, la conclusion d'un accord-cadre entre le syndicat et une filiale de la société Véolia pour la réalisation de travaux divers sur le réseau d'assainissement n'est pas de nature à établir que le service devrait être exploité au travers d'un marché ; les dispositions de la directive 2014/25/EU du 26 février 2014, qui existent dans l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, ne peuvent être regardées comme encourageant la conclusion de marché public pour l'exploitation d'un service public ; l'affirmation selon laquelle le caractère captif des usagers de l'assainissement ferait disparaître les aléas du marché, qui sont liés à l'offre et la demande, est erronée ; la requalification en marché public est prononcée à raison des mécanismes contractuels de compensation par la personne publique de l'essentiel des charges induites par le service associé à l'existence d'un prix fixe, la constance du nombre d'usagers étant un aspect complémentaire ; or la société se rémunère intégralement sur les usagers et ne perçoit aucune somme ou subvention de la part de l'autorité délégante, elle voit sa rémunération varier à raison des volumes d'eau consommés à traiter ; la société n'a aucune garantie quant aux recettes susceptibles d'être retirées de l'exécution de branchements neufs auprès des usagers ; elle supporte le risque d'impayés des usagers s'agissant de sa rémunération propre ; elle supporte un risque tenant à son obligation d'assurer la continuité du service, ainsi qu'un risque d'aggravation de ses charges d'exploitation consécutif aux évolutions législatives et réglementaires en matière d'assainissement et d'environnement, tant qu'elles ne présentent pas un caractère substantiel qui conduirait à bouleverser l'économie du contrat ; elle supporte le risque lié à la pollution environnementale, ainsi que des dotations fixes en matière de " gros entretien renouvellement " (article 18.2 de la convention) et des charges fixes au titre d'un fonds de travaux (article 18.3) sans possibilité de conservation des sommes éventuellement non utilisées et en conservant à sa charge le solde éventuellement négatif ;

- les délais de réception des candidatures et /ou des offres ne sont pas susceptibles d'avoir affecté de façon directe et certaine les intérêts de M. A... ou de l'association ; à titre subsidiaire, les requérants se bornent à évoquer des textes sans établir qu'ils auraient été méconnus ; le délai de remise des candidatures et des offres était supérieur de 10 jours par rapport aux délais minimaux de l'article 18 I 1° du décret du 1er février 2016, les requérants n'établissent nullement que ce délai n'aurait pas permis aux candidats de prendre connaissance des données du service communiquées dans les documents de la consultation et d'élaborer une offre ou méconnaîtrait les textes applicables ;

- les travaux entrepris par un délégataire ne sont pas éligibles aux aides financières, il n'est donc pas insincère que le " compte d'exploitation prévisionnel " ne comporte aucune somme au titre des aides des collectivités ;

- les requérants n'établissent pas l'irrégularité de la présentation du compte d'exploitation prévisionnel, ni son irrégularité ou son insincérité ; la circonstance que les requérants n'aient pas accès à l'ensemble des mécaniques financières participant à l'offre de la société Véolia, détaillées dans les cahiers financiers de son offre pendant la procédure mais non retranscrites dans le compte d'exploitation prévisionnel n'est pas susceptible d'entacher la validité du contrat ni même la régularité du compte ; ce compte ayant pour seule vocation de retracer l'économie globale de la convention, la circonstance que le détail des frais de siège n'y apparaisse pas n'est pas de nature à l'entacher d'irrégularité ;

- le moyen tiré de ce que l'article 18.5 de la convention et le règlement du service public attribueraient le monopole de la réalisation des branchements à la société délégataire et méconnaîtraient le principe de liberté du commerce et de l'industrie est irrecevable dans la mesure où il concerne une stipulation de nature réglementaire ; à titre subsidiaire le moyen est infondé ; la collectivité peut valablement, lorsque des propriétaires lui demandent de se charger de l'exécution des branchements sur réseau existant, confier l'exclusivité de cette réalisation à son délégataire, au prix fixé dans un bordereau des prix, sans obérer la possibilité pour les propriétaires de solliciter l'entrepreneur de leur choix ;

- les tarifs du branchement ne peuvent être utilement invoqués à l'appui d'un recours en contestation de la validité du contrat ;

- les travaux attribués à titre exclusif dans le compte d'exploitation prévisionnel ne sont pas présentés de manière insincère ou minorée ;

- les stipulations de l'article 29.3 de la convention, relatives aux principes régissant la remise des biens de retour en fin normale ou anticipée du contrat, ne sont pas en lien direct et certain avec les intérêts dont se prévalent individuellement les requérants ; à titre subsidiaire, l'erreur consistant à renvoyer à l'article 48 au lieu de l'article 25.4 de la convention est une erreur purement matérielle ; seules les dispositions de l'article 25.4 de la convention définissent la déchéance contractuelle, aucune des parties ne peut se prévaloir de bonne foi de cette erreur de plume, laquelle ne peut entacher la validité du contrat ;

- le contrat n'ayant pas de contenu illicite, il ne peut faire l'objet de conclusions à fin d'annulation ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants ne porte sur un vice du consentement puisque la convention ne peut être regardée comme ayant été approuvée par dol, par violence, ou même par erreur ;

- à supposer même pour les besoins de la discussion que le contrat puisse être entaché d'imprécisions, ou d'incohérences, ou de frais financiers trop élevés, ou de tarifs qui mécontenteraient les usagers, l'ensemble de ces éléments figurait sans dissimulation au contrat ou ses annexes, de sorte que la convention ne peut avoir été conclue aux termes d'un vice du consentement des délégués syndicaux ;

- le droit à l'information des conseillers syndicaux ne recouvre pas celui d'être informés d'hypothétiques subventions que le syndicat aurait pu percevoir s'il n'avait pas confié l'exploitation du service public de l'assainissement collectif à un délégataire ; il importe à l'exécutif de les informer sur l'économie générale de la convention soumise à leur approbation, c'est-à-dire sur les éléments essentiels de la convention ;

- l'objet de l'article 29.3 de la convention, n'est pas illicite et n'est entaché d'aucun vice susceptible d'être relevé d'office, et dont l'adoption par les délégués syndicaux ne résulte nullement d'un vice du consentement ;

- aucun des vices allégués ne constitue un vice d'ordre public devant être relevé d'office par le juge administratif.

Par des mémoires en défense enregistrés le 21 janvier 2021 et le 27 octobre 2021, le syndicat intercommunal à vocation unique de la station du Limouxin, devenu à compter du 1er janvier 2021 le syndicat intercommunal à vocation multiple du Limouxin, représenté par Me Meneau, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise respectivement à la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau - action sur le Limouxin et le Saint -Hilairois en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir les mêmes moyens de défense que ceux la société Véolia Eau-compagnie générale des eaux et fait en outre valoir que le comité syndical a autorisé son président à ester en justice par délibération n°2021/4 du 25 février 2021 en désignant le cabinet Jean-Philippe Meneau pour le représenter ; la circonstance que le mémoire ne citerait pas l'identité du président du syndicat est sans effet sur la recevabilité de ses écritures en défense.

Par une ordonnance du 15 septembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 29 octobre 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession ;

-le code de la consommation ;

- le code général des collectivités territoriales

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de la santé publique ;

- l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

- le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Darribère pour M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau - actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau ", de Me Hudrisier substituant Me Menau pour le syndicat intercommunal à vocation multiple du Limouxin et de Me Morain pour la société Véolia Eau.

Une note en délibéré a été enregistrée le 16 mai 2022 pour M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau - actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau ".

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 16 juin 2017, le comité syndical du syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin a approuvé le principe d'une gestion déléguée du service public de l'assainissement collectif. L'offre de la société Veolia Eau a été retenue. A l'issue d'une procédure de mise en concurrence, le conseil syndical a approuvé, par une délibération du 22 décembre 2017, le choix du délégataire et autorisé le maire à signer la convention de délégation de service public de l'assainissement collectif avec la société Véolia Eau- compagnie générale des eaux. La convention a été signée le 26 décembre 2017. M. A..., usager du service de l'assainissement, et le collectif aletois gestion publique de l'eau-actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " relèvent appel du jugement n°1800963 du 24 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant principalement à l'annulation de la convention conclue entre le syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration de Limouxin et la société Veolia Eau-Compagnie générale des eaux.

Sur la recevabilité des mémoires en défense devant la cour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L.5210-1-1 A du code général des collectivités territoriales : " Forment la catégorie des établissements publics de coopération intercommunale les syndicats de communes, les communautés de communes, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les métropoles.". Aux termes de l'article L. 5211-9 du même code: " Le président est l'organe exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale(...)Il représente en justice l'établissement public de coopération intercommunale. (...) ". Selon l'article L. 5211-2 du même code : " A l'exception de celles des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2122-4, les dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la deuxième partie relative au maire et aux adjoints sont applicables au président et aux membres du bureau des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. ". L'article L. 2122-21 du même code dispose que : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (...) 8° De représenter la commune soit en demandant, soit en défendant (...). ". Et enfin aux termes de son article L. 2122-22 : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...). ".

3. Il résulte de ces dispositions que le président d'un établissement public de coopération intercommunale a qualité pour engager une action en justice au nom de l'établissement ou défendre celui dans les actions où il est mis en cause à condition de bénéficier par délibération de l'organe délibérant, soit d'une délégation générale pour ester en justice ou représenter en justice l'établissement soit aux mêmes fins, d'une habilitation pour une instance donnée. La production de l'habilitation est régularisable, notamment lorsqu'une fin de non-recevoir est opposée en défense, jusqu'à la clôture de l'instruction.

4. Par une délibération du 25 février 2021, le comité syndical du syndicat intercommunal à vocation unique du Limouxin, devenu le syndicat à vocation multiple des eaux du Limouxin, a donné pouvoir à son président d'ester en justice pour défendre les intérêts du syndicat dans la présente instance. Par suite, les mémoires en défense présentés par le syndicat intercommunal à vocation multiples des eaux du Limouxin en appel sont recevables.

5. En second lieu, lorsqu'une partie est une personne morale, il appartient à la juridiction administrative saisie, qui en a toujours la faculté, de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour agir au nom de cette partie. Tel est le cas lorsque cette qualité est contestée sérieusement par l'autre partie ou qu'au premier examen l'absence de qualité du représentant de la personne morale semble ressortir des pièces du dossier. Par ailleurs, lorsque la personne morale pour le compte de laquelle l'avocat agit est une société commerciale dont les dispositions législatives qui la régissent désignent elles-mêmes le représentant, cette circonstance dispense le juge ou l'autorité administrative, en l'absence de circonstance particulière, de s'assurer de la qualité pour agir du représentant de cette personne morale.

6. L'action de la société Véolia Eau, société en commandite par actions, a été engagée pour le compte de son représentant légal, son gérant, lequel a qualité pour agir de plein droit au nom de celle-ci en raison " des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société " qu'il tient des dispositions de l'article L. 226-7 du code de commerce, ce qui lui donne qualité pour agir, tant en attaque qu'en défense. La circonstance invoquée par M. A... et le collectif " Coll Eau " selon laquelle il est régulièrement demandé, notamment aux associations, de produire une habilitation et des statuts, ne constitue pas une circonstance particulière pas plus que celle selon laquelle la société Véolia Eau comprend une multitude de ramifications et de filiales diverses. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par les appelants, tirée de ce que la société Véolia Eau-Compagnie Générale des Eaux ne serait pas recevable en sa défense, faute pour elle de justifier de l'habilitation de son représentant légal à agir en justice, doit être écartée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

7. En premier lieu, le moyen tiré de ce que les défauts dénoncés dans la procédure de mise en concurrence ne pouvaient être écartés comme inopérants, qui relève du bien-fondé du jugement, n'est pas de nature à remettre en cause sa régularité.

8. En deuxième lieu, si M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau- actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois soutiennent que le montant des frais mis à leur charge est disproportionné, un tel moyen, qui relève du bien-fondé du jugement, n'est pas non plus de nature à remettre en cause sa régularité.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 6, le moyen tiré de l'irrégularité tenant au défaut d'habilitation des défendeurs en première instance doit, en tout état de cause, être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ". Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : "(...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

11. Le syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin a demandé, par son mémoire enregistré le 24 avril 2019 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, de mettre à la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau une somme de 1 500 euros au titre des frais d'instance. Cette somme a été portée à 3 000 euros par un mémoire enregistré le 27 juin 2019, antérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 3 juillet 2019, mais non communiqué. La société Véolia Eau a demandé, par son mémoire enregistré le 7 mars 2019 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, de mettre à la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau une somme de 10 000 euros au titre des frais d'instance. Cette somme a été ramenée à 7 000 euros par un mémoire enregistré le 27 juin 2019, antérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 3 juillet 2019, mais non communiqué. En accordant, par ses articles 2 et 3 du jugement querellé, au syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin la somme totale de 3 000 euros qu'il demandait, sans avoir transmis aux requérants le mémoire du 27 juin 2019 portant sa demande à 3 000 euros, le tribunal a méconnu les exigences de la procédure contradictoire. En revanche, en accordant par ses mêmes articles à la société Véolia Eau la somme totale de 5 000 euros, inférieure au montant dont les requérants avaient connaissance, le tribunal n'a pas accordé un montant de frais qui n'aurait pas été soumis à la procédure contradictoire. Il suit de là que M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau sont fondés à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation en tant qu'il fixe le montant des frais à verser par M A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " au syndicat intercommunal à vocation unique du Limouxin.

12. Par suite, il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur le montant des frais d'instance accordés au syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin et par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur la recevabilité du mémoire en défense de première instance :

13. En application de ce qui a été dit au point 5, en se bornant à soutenir en première instance que la personne physique, qui a engagé l'action au nom de la société Véolia Eau, ne justifiait pas d'une habilitation et qu'il est régulièrement demandé, notamment aux associations, de produire une habilitation et des statuts, M. A... et le collectif Eau ne contestaient pas sérieusement cette qualité à agir. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de ce que la société Véolia Eau-Compagnie Générale des Eaux n'était pas recevable en sa défense en première instance, faute pour elle de justifier de l'habilitation de son représentant légal à agir en justice, doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

14. Saisi par un tiers autre que le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que les vices invoqués par l'auteur du recours sont en rapport direct avec l'intérêt lésé dont il se prévaut ou sont d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci.

En ce qui concerne la procédure de passation :

15. M A..., en sa qualité d'usager du service public de l'eau et de l'assainissement et le collectif aletois gestion publique de l'eau-actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau ", en sa qualité de groupement d'intérêt collectif ayant pour objet de promouvoir " la gestion directe de l'eau par les citoyens " et d'exclure toute gestion privée sous forme de délégation de service public ou de marché de prestations de services permanents, indiquent qu'ils défendent le juste prix du service de l'assainissement et se prévalent du prix élevé de l'assainissement sur le territoire du Limouxin.

16. Les manquements invoqués par les requérants relatifs à la procédure de passation et tirés d'une insuffisante évaluation des besoins du service, d'une information insuffisante donnée aux candidats dans le cahier des charges de la procédure pour présenter une offre comparable, d'un affichage irrégulier des comptes rendus du syndicat, et de l'insuffisance du délai de 33 jours entre la publication de la parution de l'annonce d'appel à concurrence et le dépôt des offres, ne sont pas en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Montpellier a écarté le moyen tiré du défaut dans la procédure de mise en concurrence comme inopérant.

En ce qui concerne la requalification de la délégation en marché public :

17. Aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée : " Les contrats de concession sont les contrats conclus par écrit, par lesquels une ou plusieurs autorités concédantes soumises à la présente ordonnance confient l'exécution de travaux ou la gestion d'un service à un ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l'exploitation de l'ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d'exploiter l'ouvrage ou le service qui fait l'objet du contrat, soit de ce droit assorti d'un prix./ La part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, de sorte que toute perte potentielle supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement nominale ou négligeable. Le concessionnaire assume le risque d'exploitation lorsque, dans des conditions d'exploitation normales, il n'est pas assuré d'amortir les investissements ou les coûts qu'il a supportés, liés à l'exploitation de l'ouvrage ou du service ". Aux termes de l'article 5 de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession : " ...L'attribution d'une concession de travaux ou d'une concession de services implique le transfert au concessionnaire d'un risque d'exploitation lié à l'exploitation de ces travaux ou services, comprenant le risque lié à la demande, le risque lié à l'offre ou les deux. Le concessionnaire est réputé assumer le risque d'exploitation lorsque, dans des conditions d'exploitation normales, il n'est pas certain d'amortir les investissements qu'il a effectués ou les coûts qu'il a supportés lors de l'exploitation des ouvrages ou services qui font l'objet de la concession. La part de risque transférée au concessionnaire implique une réelle exposition aux aléas du marché, telle que toute perte potentielle estimée qui serait supportée par le concessionnaire ne doit pas être purement nominale ou négligeable... ". Aux termes du considérant 20 de ladite directive : " Un risque d'exploitation devrait trouver son origine dans des facteurs sur lesquels les parties n'ont aucun contrôle. Les risques liés à une mauvaise gestion, à un manquement de l'opérateur économique aux obligations contractuelles ou à des cas de force majeure ne sont pas déterminants aux fins de la qualification en tant que concession, ces risques étant inhérents à tous les contrats, qu'il s'agisse d'un marché public ou d'une concession. Un risque d'exploitation devrait être considéré comme étant le risque d'exposition aux aléas du marché, qui peut être soit un risque lié à la demande, soit un risque lié à l'offre, soit un risque lié à la demande et à l'offre. Le risque lié à la demande désigne le risque portant sur la demande effective pour les travaux ou services qui font l'objet du contrat. Le risque lié à l'offre désigne le risque portant sur la fourniture des travaux ou services qui font l'objet du contrat, en particulier le risque que la fourniture des services ne corresponde pas à la demande. Aux fins de l'évaluation du risque d'exploitation, la valeur actuelle nette de tous les investissements, coûts et recettes du concessionnaire devrait être prise en compte de manière homogène et uniforme ". Selon la Cour de justice de l'Union Européenne dans sa décision du 21 mars 2015, Kansaneläkelaitos, aff. C-269/14, point 33, " Un tel risque doit être compris comme étant le risque d'exploitation aux aléas du marché, lequel peut notamment se traduire par le risque de concurrence de la part d'autres opérateurs, le risque d'une inadéquation entre l'offre et la demande de services, le risque d'insolvabilité des débiteurs du prix des services fournis, le risque d'absence de couverture des dépenses d'exploitation par les recettes ou entre le risque de responsabilité d'un préjudice lié à un manquement dans le service ".

18. Un contrat par lequel un acheteur public confie l'exécution de travaux ou la gestion d'un service à un ou plusieurs opérateurs économiques ne constitue un contrat de concession que s'il transfère un risque réel lié à l'exploitation de l'ouvrage ou du service et si le transfert de ce risque trouve sa contrepartie, au moins partiellement, dans le droit d'exploiter l'ouvrage ou le service. Le risque d'exploitation est constitué par le fait de ne pas être assuré d'amortir les investissements ou les coûts liés à l'exploitation du service.

19. Il résulte de l'article 2 de la convention litigieuse que le délégataire est seul responsable du fonctionnement du service, dont il assure l'exploitation à ses risques et périls et qu'en application de son article 5, il assume la responsabilité de la gestion des équipements du service public dont il a la charge, ainsi que, par conséquent, l'ensemble des responsabilités lié à un manquement dans le service, en cas de préjudice. En contrepartie de ses obligations, le délégataire se rémunère intégralement sur les usagers et ne perçoit aucune somme ou subvention de la part de l'autorité délégante ou d'autres collectivités. Il résulte également des termes de la convention que les recettes du délégataire proviennent presque exclusivement de l'exploitation du service et que sa rémunération varie à raison des volumes d'eau consommés à traiter. Il n'a pas, par ailleurs, de garantie de recettes susceptibles d'être retirées de l'exécution des branchements neufs auprès des usagers, et supporte différents risques tels le risque d'impayés des usagers sur sa rémunération propre, celui tenant à l'obligation d'assumer la continuité du service ainsi qu'un risque d'aggravation de ses charges d'exploitation consécutif aux évolutions législatives ou réglementaires en matière d'assainissement et d'environnement, tant qu'elle ne bouleverse pas l'économie du contrat. Il supporte enfin des dotations fixes au titre des articles 18.2 et 18.3 sans possibilité de conserver éventuellement les sommes non utilisées. Par ailleurs, la circonstance selon laquelle le syndicat aurait conclu un marché public distinct avec un groupement d'entreprises pour la réalisation de travaux sur le réseau d'assainissement, trois mois après la signature de la convention attaquée, est sans influence sur la qualification et la validité de cette convention. Par suite, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que la convention devrait être requalifiée en marché public et que le consentement des conseillers syndicaux aurait de ce fait été vicié.

En ce qui concerne les contradictions dans la convention :

20. En premier lieu, l'article 18.2 de la convention donne la définition et la répartition des travaux en précisant que " le remplacement à l'identique, tant en capacité qu'en qualité, des biens dont le renouvellement s'avère nécessaire est régi par les principes généraux détaillés ci-dessous. Il ne se substitue pas à l'entretien et aux réparations. La répartition détaillée des obligations entre le délégataire et le concédant est la suivante (tableau) ". Il précise ensuite que les travaux de renouvellement sont assurés par un compte de gros entretien et de renouvellement des ouvrages à la charge du délégataire selon un plan prévisionnel de " gros entretien et réparation " figurant en annexe 10 qui répartit les travaux de renouvellement entre le délégataire et le concédant et dont il résulte en particulier que le délégant prend en charge le renouvellement des canalisations au-delà de 6 mètres linéaire. Un montant annuel de 78 064,29 euros hors taxes est ainsi prévu pour le " gros entretien - renouvellement " qui concerne l'ensemble du matériel, notamment les branchements, des canalisations et accessoires, le matériel d'épuration, de traitement des boues et de pompage, du génie civil et bâtiment et les aménagements extérieurs. L'article 18.3 prévoit, quant à lui, un fonds de travaux consacré au renouvellement des seules canalisations, à hauteur de 71 428,57 euros hors taxes annuel. Ainsi, le renouvellement des canalisations de plus de 6 mètres linéaires peut être assuré par le délégataire dans le cadre du fonds de travaux à hauteur de 500 000 euros sur la durée du contrat au titre de l'article 18.3, ou par le délégant dans le cadre des obligations de renouvellement au titre de l'article 18.2. Par suite, alors que les conseillers syndicaux ont pu prendre connaissance de ces différents articles et en mesurer la portée, M. A... et le collectif " Coll Eau " ne sont pas fondés, en tout état de cause, à soutenir que les contradictions substantielles entre les articles 18.2 et 18.3 de la convention quant à la répartition de la charge du renouvellement des canalisations seraient de nature à avoir vicié le consentement des conseillers syndicaux.

21. En deuxième lieu, en stipulant à son article 18.2 " qu'à l'expiration du contrat, à son terme normal ou de manière anticipée et ce quel qu'en soit le motif, le solde du compte s'il est positif (différence entre les provisions et les dépenses effectuées au titre du GER) sera restitué en totalité au concédant. S'il est négatif, ce solde sera à la charge du délégataire ", la convention ne fait que traiter du sort du solde éventuellement positif du fonds de travaux à la fin du contrat, sans instituer un droit d'entrée proscrit pour ce qui concerne les concessions d'eau potable, assainissement ou ordures ménagères par l'article 31 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée relative aux contrats de concession, aujourd'hui intégrée dans la partie législative du code de la commande publique.

22. En troisième lieu, l'article 29.3 de la convention stipule qu'à l'expiration de la délégation, le délégataire sera tenu de remettre gratuitement au concédant, en état normal d'entretien, tous les ouvrages et équipements qui font partie intégrante de la délégation et précise, si ces biens ne sont pas amortis, moyennant, une indemnité calculée à l'amiable ou à dire d'expert. La délibération du 22 décembre 2017 indique que : " Les biens de retour seront restitués en bon état de fonctionnement, toutes les dépenses correspondant aux obligations du délégataire étant réputées amorties. Cette remise s'effectuera à titre gratuit ", enfin l'article 13 de la convention sur les investissements réalisés par le délégataire prévoit l'amortissement des investissements d'un montant total de 55 322 euros sur la durée du contrat et que ces biens sont nécessairement des biens de retour et feront retour à " valeur nette comptable " zéro à l'issue normale du contrat. Il en résulte que l'ensemble des investissements prévus au contrat seront remis gratuitement au délégant et qu'en cas d'investissement non prévus au contrat, mais intégrés en cours d'exécution du contrat et non encore totalement amortis à la fin de la concession, une indemnisation sera versée au délégataire. Ainsi, le moyen tiré de la contradiction entre la délibération du 22 décembre 2017 et l'article 29.3 de la convention doit être écarté.

En ce qui concerne la durée de la convention, la durée de renouvellement des matériels, la durée d'amortissement :

23. Aux termes de l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée relative aux contrats de concession aujourd'hui intégrée dans la partie législative du code de la commande publique : " I. - Les contrats de concession sont limités dans leur durée. Cette durée est déterminée par l'autorité concédante en fonction de la nature et du montant des prestations ou des investissements demandés au concessionnaire, dans les conditions prévues par voie réglementaire. / II. - Dans le domaine de l'eau potable, de l'assainissement, des ordures ménagères et autres déchets, les contrats de concession ne peuvent avoir une durée supérieure à vingt ans sauf examen préalable par l'autorité compétente de l'Etat, à l'initiative de l'autorité concédante, des justificatifs de dépassement de cette durée. Les conclusions de cet examen sont communiquées, le cas échéant, aux membres de l'organe délibérant compétent, avant toute délibération de celui-ci ". Aux termes de l'article 6 du décret du 1er février 2016 susvisé relatif aux contrats de concession, aujourd'hui intégré dans la partie règlementaire du code de la commande publique : " I. - Pour l'application de l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée, les investissements s'entendent comme les investissements initiaux ainsi que ceux devant être réalisés pendant la durée du contrat de concession, nécessaires pour l'exploitation des travaux ou des services concédés. Sont notamment considérés comme tels les travaux de renouvellement, les dépenses liées aux infrastructures, aux droits d'auteur, aux brevets, aux équipements, à la logistique, au recrutement et à la formation du personnel. / II. - Pour les contrats de concession d'une durée supérieure à cinq ans, la durée du contrat n'excède pas le temps raisonnablement escompté par le concessionnaire pour qu'il amortisse les investissements réalisés pour l'exploitation des ouvrages ou services avec un retour sur les capitaux investis, compte tenu des investissements nécessaires à l'exécution du contrat. / III. - L'autorité compétente de l'Etat mentionnée au II de l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée est le directeur départemental des finances publiques ".

24. Il résulte de ces dispositions que la durée d'une concession doit être fixée en fonction de la nature et du montant des prestations ou des investissements demandés au concessionnaire et une durée maximale de 20 ans est imposée pour les concessions dans le domaine de l'eau, de l'assainissement et des ordures ménagères. Par ailleurs, la durée normale d'amortissement des installations susceptible d'être retenue par une collectivité concédante, peut être la durée normalement attendue pour que le concessionnaire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement, compte tenu des contraintes d'exploitation liées à la nature du service et des exigences du concédant, ainsi que de la prévision des tarifs payés par les usagers, que cette durée coïncide ou non avec la durée de l'amortissement comptable des investissements. Il résulte par ailleurs du compte prévisionnel d'exploitation que le délégataire parvient à l'équilibre économique et financier global sur une durée de 7 années. Le fait que les travaux de gros entretien-renouvellement soient simplement financés par le délégataire via une redevance, puis exécutés par le syndicat, n'est pas en lui-même de nature à établir que la durée de la convention conclue serait insuffisante pour permettre un amortissement des investissements réalisés par le délégataire dans des conditions normales. Par ailleurs, si les requérants soutiennent que certaines pompes de relevage fonctionnent depuis 23 ans dans le périmètre du service public de l'assainissement du syndicat, alors que dans le même temps le plan prévisionnel de renouvellement retient une durée de vie de 12 années pour ces équipements, il n'est pas établi, en l'absence notamment de justificatifs techniques, que cette durée serait sans lien avec la durée de vie utile moyenne des équipements et constituerait de ce fait une obsolescence programmée prohibée par l'article L 212-4-1 du code de la consommation. Enfin, la circonstance supplémentaire que la durée d'amortissement de 7 ans retenue pénaliserait les usagers, à la supposer établie, est sans incidence sur la validité de la convention. Par suite, M. A... et le collectif " Coll Eau " ne sont pas fondés à soutenir que la durée de 7 ans de la convention serait trop courte et par suite contraire aux dispositions précitées de l'article 34 de l'ordonnance du 29 janvier 2016.

En ce qui concerne les branchements à titre exclusif prévus par l'article 18.5 de la convention :

25. Aux termes de l'article 18.5 de la convention en litige : " Le délégataire a l'exclusivité de la réalisation des branchements sur les réseaux existants dans les conditions posées par l'article L. 1331-2 du code de la santé publique (...) ". Aux termes de l'article L.1331-2 du code de la santé publique : " Lors de la construction d'un nouveau réseau public de collecte ou de l'incorporation d'un réseau public de collecte pluvial à un réseau disposé pour recevoir les eaux usées d'origine domestique, la commune peut exécuter d'office les parties des branchements situées sous la voie publique, jusque et y compris le regard le plus proche des limites du domaine public. Pour les immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte, la commune peut se charger, à la demande des propriétaires, de l'exécution de la partie des branchements mentionnés à l'alinéa précédent. Ces parties de branchements sont incorporées au réseau public, propriété de la commune qui en assure désormais l'entretien et en contrôle la conformité. La commune est autorisée à se faire rembourser par les propriétaires intéressés tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux, suivant des modalités à fixer par délibération du conseil municipal. (...) . ".

26. Les stipulations de l'article 18.5 de la convention, combinées avec les dispositions de l'article L 1331-2 du code de la santé publique, ne donnent pas à la société Véolia le monopole de la réalisation de tous les branchements au réseau d'assainissement mais seulement pour ceux mis en œuvre dans le cadre de l'article L. 1331-2 du code de la santé publique au titre de la salubrité des immeubles et des agglomérations. Elles ont pour effet, dans l'hypothèse où les propriétaires demandent au syndicat de s'en charger, de confier l'exclusivité de la réalisation des branchements sur réseau d'assainissement existant au délégataire, au prix fixé dans un bordereau de prix, et ne sauraient par conséquent être regardées comme contraignant les particuliers usagers à s'adresser à un entrepreneur déterminé en prescrivant que tout branchement ne pourra être exécuté que par la société Véolia Eau. Les requérants ne peuvent par ailleurs utilement se prévaloir de la circonstance que le tarif des raccordements réalisés par Véolia Eau est abusivement trop élevé pour contester la validité de la convention. Par suite, alors que le caractère réglementaire ou contractuel des clauses de l'article 18.5 est sans incidence sur la recevabilité du moyen introduit dans le cadre du présent recours " Tarn-et-Garonne ", le moyen tiré de ce que la convention méconnaîtrait le principe de liberté du commerce et de l'industrie doit être écarté comme infondé.

En ce qui concerne la non-conformité de la convention conclue à la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession :

27. Aux termes de l'article 12 de la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession : " 1. La présente directive ne s'applique pas aux concessions attribuées pour : / a) la mise à disposition ou l'exploitation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'eau potable ; / b) l'alimentation de ces réseaux en eau potable./ 2. La présente directive ne s'applique pas non plus aux concessions portant sur l'un des objets suivants ou sur les deux lorsqu'elles concernent une activité visée au paragraphe 1 : / a) des projets de génie hydraulique, d'irrigation ou de drainage, pour autant que le volume d'eau destiné à l'alimentation en eau potable représente plus de 20 % du volume total d'eau mis à disposition par ces projets ou ces installations d'irrigation ou de drainage; ou/ b) l'évacuation ou le traitement des eaux usées ". Aux termes de l'article 11 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 susvisée relative aux contrats de concession, qui définit ce qui doit être regardé comme des activités d'opérateur de réseaux : " I. - Sont des activités d'opérateur de réseaux au sens de la présente ordonnance : / 1° La mise à disposition, l'exploitation ou l'alimentation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution de gaz ou de chaleur ; / 2° La mise à disposition, l'exploitation ou l'alimentation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'électricité ;/ 3° La mise à disposition, l'exploitation ou l'alimentation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'eau potable./ Sont également soumis aux dispositions applicables aux entités adjudicatrices les contrats de concession passés par les entités adjudicatrices exerçant une des activités mentionnées à l'alinéa précédent qui sont liés :/ a) Soit à l'évacuation ou au traitement des eaux usées ;/ b) Soit à des projets de génie hydraulique, d'irrigation ou de drainage, pour autant que le volume d'eau utilisé pour l'alimentation en eau potable représente plus de 20 % du volume/ total d'eau utilisé pour ces projets ;/ 4° Les activités relatives à l'exploitation d'une aire géographique ayant pour objet :/ a) D'extraire du pétrole ou du gaz ;/ b) De prospecter ou d'extraire du charbon ou d'autres combustibles solides ;/ 5° Les activités d'exploitation destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition des transporteurs des aéroports, des ports maritimes, des ports fluviaux ou d'autres terminaux ;/ 6° Les activités d'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramway, trolleybus, autobus, autocar, câble ou tout système automatique, ou les achats destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition d'un exploitant de ces réseaux./ Le service de transport est regardé comme fourni par un réseau de transport lorsqu'une autorité nationale ou territoriale compétente définit les conditions générales d'organisation du service, notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service ;/ 7° Les activités visant à fournir des services postaux mentionnés à l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques ou, lorsqu'ils sont fournis par une entité adjudicatrice exerçant par ailleurs de tels services postaux, les services suivants :/ a) Les services de gestion de services courrier ;/ b) Les services d'envois non postaux tels que le publipostage sans adresse./ II. - Ne sont pas des activités d'opérateur de réseaux au sens de la présente ordonnance :/ 1° L'alimentation en gaz ou en chaleur des réseaux destinés à fournir un service au public par une entreprise publique ou un organisme de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes : a) La production de gaz ou de chaleur par l'entité concernée est le résultat inévitable de l'exercice d'une activité autre que celles mentionnées au I ;/ b) L'alimentation du réseau public ne vise qu'à exploiter à des fins commerciales cette production et ne dépasse pas 20 % du chiffre d'affaires de l'entité en prenant en considération la moyenne de l'année en cours et des deux années précédentes ;/ 2° L'alimentation en électricité des réseaux destinés à fournir un service au public par une entreprise publique ou un organisme de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes :/ a) La production d'électricité par l'entité concernée est rendue nécessaire par une activité autre que celles mentionnées au I ;/ b) La quantité d'électricité utilisée pour l'alimentation du réseau public ne dépasse pas 30 % de la production totale d'énergie de l'entité en prenant en considération la moyenne de l'année en cours et des deux années précédentes ;/ 3° L'alimentation en eau potable des réseaux destinés à fournir un service au public par une entreprise publique ou un organisme de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes :/ a) La production d'eau potable par l'entité concernée est rendue nécessaire par une activité autre que celles mentionnées au I ;/ b) La quantité d'eau utilisée pour l'alimentation du réseau public ne dépasse pas 30 % de la production totale d'eau potable de l'entité en prenant en considération la moyenne de l'année en cours et des deux années précédentes./ III. - Au sens du présent article, l'alimentation de réseaux comprend la production, la vente en gros et la vente de détail. ".

28. Si les Etats membres ne peuvent, dans le cadre de la transposition de cette directive, instituer des obligations de publicité et de mise en concurrence moins contraignantes que celles qu'elle prévoit, hors les cas où elle ouvrirait elle-même une telle faculté, il leur est loisible de décider de soumettre aux dispositions prises pour sa transposition des concessions qu'elle exclut de son champ d'application ou de prévoir, pour des concessions qui entrent dans son champ d'application, des règles plus contraignantes que celles qu'elle définit, dès lors que la soumission à ces règles est compatible avec le respect du droit de l'Union européenne. Dès lors, l'ordonnance du 29 janvier 2016, en ce qu'elle n'exclut pas de son champ d'application les conventions de délégation du service public de l'assainissement, ne peut être regardée comme contraire au droit européen. Par suite, le moyen tiré de la contrariété de la convention avec la directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l'attribution de contrats de concession doit être écarté.

En ce qui concerne l'insincérité du compte prévisionnel d'exploitation :

29. Au soutien du moyen tiré de ce que le compte prévisionnel d'exploitation annexé à la convention serait insincère en ce qu'il mentionne pour les dépenses d'investissement un montant de 55 322 euros hors taxes annuel, des frais financiers à hauteur de 34% équivalant à un taux d'intérêt de plus de 8% pour un crédit de 7 ans, que les calculs qu'ils ont réalisé conduiraient à un taux d'intérêt supérieur à 8%, que le compte ne mentionne aucune somme au titre des " aides des collectivités et autres organismes ", que sa présentation est irrégulière, que la contribution aux services centraux et recherche n'est pas précisée, que le montant indiqué des sommes au titre des travaux pour les nouveaux raccordements, les appelants ne se prévalent devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance et ne critiquent pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif. Par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne les frais liés au litige de première instance :

30. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " une somme de 750 euros chacun à verser au syndicat intercommunal à vocation unique du Limouxin, devenu le syndicat intercommunal à vocation multiple de la station d'épuration du Limouxin, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

31. Au regard de la situation économique de M. A..., dont il justifie en appel, et de l'équité, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... et du collectif aletois gestion publique de l'eau une somme de 750 euros chacun à verser à la société Véolia Eau en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Par suite, les requérants sont fondés à solliciter que la somme de 2 500 euros à verser chacun à la société Véolia Eau soit ramenée à la somme de 750 euros chacun.

Sur les frais liés au litige d'appel :

32. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de l'une des parties à l'instance une somme au titre des frais exposés par les autres et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 24 octobre 2019 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a fixé par ses articles 2 et 3 le montant des frais à verser par M A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau " au syndicat intercommunal à vocation unique du Limouxin.

Article 2 : M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau verseront au syndicat intercommunal à vocation unique de la station d'épuration du Limouxin une somme de 750 euros chacun en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : La somme de 2 500 euros que M. A... et le collectif aletois gestion publique de l'eau ont chacun été condamnés à verser à la société Véolia Eau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est ramenée à 750 euros chacun.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au collectif aletois gestion publique de l'eau-actions sur le Limouxin et le Saint-Hilairois " Coll Eau ", au syndicat intercommunal à vocation multiple de la station d'épuration du Limouxin et à la société Véolia Eau.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de l'Aude, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19TL05755


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19TL05755
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : LARIDAN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-05-24;19tl05755 ?
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