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10/05/2022 | FRANCE | N°21TL02336

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 10 mai 2022, 21TL02336


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 18 mars 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Narbonne a décidé de suspendre sa rémunération compte tenu d'une absence de service fait.

Par un jugement n° 1902588 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision du 18 mars 2019.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 juin 2021 et le 28 octobre 2021 sous le

n° 21MA02336 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 18 mars 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Narbonne a décidé de suspendre sa rémunération compte tenu d'une absence de service fait.

Par un jugement n° 1902588 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette décision du 18 mars 2019.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 juin 2021 et le 28 octobre 2021 sous le n° 21MA02336 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL02336, le centre hospitalier de Narbonne, représenté par SELARL Lysis Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2021 ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- l'absence de Mme B... était injustifiée et la retenue sur traitement qui en découlait s'imposait dès lors que le certificat médical du 28 février 2019 était irrégulier au regard tant de la date de consolidation de son état de santé, que de la rechute survenue le 23 mai 2019 ; elle ne pouvait dès lors être placée en congé de maladie ordinaire ; le tribunal administratif a par ailleurs confirmé que la date de consolidation devait être fixée au 26 novembre 2018 dans un jugement du 14 octobre 2021 ;

- en l'absence de service fait, l'administration était tenue de procéder à la suspension du versement des traitements de l'intéressée, qui avait été affectée sur un poste adapté à son état de santé à compter du 1er mars 2019.

Une mise en demeure a été adressée le 13 octobre 2021 à Mme B....

Par ordonnance du 28 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;

- le décret n° 2007-1188 du 3 août 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bequain de Coninck, représentant le centre hospitalier de Narbonne.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., aide-soignante titulaire au centre hospitalier de Narbonne, a été victime d'un accident de service, le 2 octobre 2017, à l'origine de brûlures sur ses membres inférieurs. Par une décision du 8 mars 2019 prise après avoir ordonné deux expertises médicales, le directeur du centre hospitalier a fixé une date de consolidation au 26 novembre 2018. Par un jugement rendu le 14 octobre 2021 sous le n° 1902310, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme B... présentée à l'encontre de cette décision. Par une autre décision prise le 8 mars 2019, le directeur du centre hospitalier a affecté Mme B... sur un poste de travail administratif à compter du 18 mars 2019, laquelle décision a été annulée par le tribunal administratif de Montpellier par un jugement rendu le 15 avril 2021 sous le n° 1902342, au motif du défaut de saisine de la commission de réforme ou du comité médical sur l'aptitude de Mme B... à exercer ses fonctions préalablement au reclassement de celle-ci. Enfin, par une décision du 18 mars 2019 prise après deux mises en demeure de reprise de fonctions, le directeur du centre hospitalier a suspendu le traitement de l'intéressée en l'absence de service fait. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de cette dernière décision. Par un jugement du 15 avril 2021 dont le centre hospitalier de Narbonne relève appel, le tribunal a annulé cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. D'une part, aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévues en application de l'article 42 ". L'article 42 de la même loi renvoie à des décrets en Conseil d'Etat. Aux termes de l'article 15 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière : " Pour obtenir un congé de maladie ainsi que le renouvellement du congé initialement accordé, le fonctionnaire adresse à l'autorité dont il relève, dans un délai de quarante-huit heures suivant son établissement, un avis d'interruption de travail. Cet avis indique, d'après les prescriptions d'un médecin, d'un chirurgien-dentiste ou d'une sage-femme, la durée probable de l'incapacité de travail. (...). Les fonctionnaires bénéficiaires d'un congé de maladie doivent se soumettre au contrôle exercé par l'autorité investie du pouvoir de nomination. Cette dernière peut faire procéder à tout moment à la contre-visite de l'intéressé par un médecin agréé ; le fonctionnaire doit se soumettre, sous peine d'interruption de sa rémunération, à cette contre-visite ".

4. Les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 selon lesquelles le fonctionnaire conserve, selon la durée du congé, l'intégralité ou la moitié de son traitement, ont pour objet de compenser la perte de rémunération due à la maladie en apportant une dérogation au principe posé par l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 subordonnant le droit au traitement au service fait.

5. Il ressort des pièces du dossier que le 4 mars 2019, Mme B... a adressé au centre hospitalier un arrêt de travail, valable du 28 février 2019 au 30 avril 2019, en lien avec un accident du travail survenu le 2 octobre 2017 et faisant mention de " brûlures des deux pieds ". Le centre hospitalier soutient que cet arrêt de travail était irrégulier tant au regard de la date de consolidation de l'état de Mme B... à la suite de l'accident de service, qu'il a fixée au 26 novembre 2018, qu'au regard de la rechute survenue le 23 mai 2019, et qu'elle ne pouvait dès lors pas être placée en congé de maladie ordinaire. Toutefois, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, en l'absence de mise en œuvre de la procédure de contrôle par un médecin agréé, telles que le prévoient les dispositions de l'article 15 du décret du 19 avril 1988 précitées, le directeur du centre hospitalier ne pouvait régulièrement décider de suspendre la rémunération de cet agent pour absence de service fait, alors que Mme B... justifiait d'un arrêt de travail pour cause de maladie. Le centre hospitalier ne peut utilement soutenir que le poste sur lequel Mme B... a été affectée à compter du 8 mars 2019 est adapté à ses restrictions médicales, alors qu'en tout état de cause la décision de reclassement a été annulée par jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 avril 2021. Ainsi, le centre hospitalier a fait une inexacte application des dispositions précitées en estimant que Mme B... devait nécessairement être privée de rémunération, faute de " service fait " au sens des dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983.

6. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Narbonne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 18 mars 2019 par laquelle il a suspendu la rémunération de Mme B.... Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Narbonne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Narbonne et à Mme A... B....

Délibéré après l'audience du 12 avril 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°21TL02336


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL02336
Date de la décision : 10/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Traitement - Retenues sur traitement - Retenues sur traitement pour absence du service fait.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SELARL LYSIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-05-10;21tl02336 ?
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