La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/03/2022 | FRANCE | N°19TL23431

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 29 mars 2022, 19TL23431


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " (GIP MIPIH) à réparer les préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'illégalité des décisions de licenciement du 20 mai 2011, du 14 juin 2011 et du 3 novembre 2015 et du comportement fautif de cette administration.

Par un jugement n° 1800757 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2019, et des mémoires enregistrés les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " (GIP MIPIH) à réparer les préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'illégalité des décisions de licenciement du 20 mai 2011, du 14 juin 2011 et du 3 novembre 2015 et du comportement fautif de cette administration.

Par un jugement n° 1800757 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2019, et des mémoires enregistrés les 10 novembre 2020 et 25 janvier 2021 sous le n°19BX03431 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 19TL23431, M. D... B..., représenté par Me Laclau, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1800757 du 27 juin 2019 ;

2°) de condamner le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " à lui verser :

- une somme de 40 000 euros au titre de son préjudice moral consécutif aux décisions d'éviction illégales selon jugement définitif du 9 octobre 2014 ;

- une indemnité de licenciement consécutive au licenciement du 3 novembre 2015 ;

- une indemnité compensatrice de préavis consécutive au licenciement du 3 novembre 2015 correspondant à deux mois de traitement ;

- et une somme de 20 000 euros au titre de son préjudice moral consécutif à la décision d'éviction illégale du 3 novembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur d'appréciation en ce qu'il a considéré que l'illégalité des décisions d'éviction prises en 2011 n'ouvrait droit à aucune indemnisation ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ce qu'il a considéré, s'agissant de la décision de licenciement du 3 novembre 2015, qu'il était en situation d'abandon de poste ; le tribunal a dénaturé les pièces du dossier en occultant les justifications apportées au titre de sa pathologie et de la répétition des mises en demeure ; la motivation adoptée ne peut qu'être censurée ;

- il a été victime d'un préjudice moral en raison de l'illégalité des décisions d'éviction prises en 2011 dès lors qu'aucune règle de procédure n'a été respectée, s'agissant de la convocation à un entretien préalable ou même de l'invitation à solliciter un reclassement ; les décisions n'étaient aucunement motivées ; son licenciement apparaît discriminatoire en raison de son handicap et de son origine ; au regard de l'importance de l'atteinte portée à sa personne et des conséquences psychiques induites, il est fondé à solliciter l'indemnisation de son préjudice à hauteur de la somme de 40 000 euros ;

- l'abandon de poste qui fonde la décision du 3 novembre 2015 n'étant pas caractérisé, au regard des problématiques médicales de M. B..., cette décision est entachée d'une erreur de droit la rendant illégale ; le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " a par ailleurs entendu le licencier pour un motif disciplinaire, en l'absence d'une quelconque faute de nature à justifier une telle sanction ; la procédure de licenciement n'a pas été respectée, en l'absence de convocation à un entretien préalable ; la décision constitue un détournement de pouvoir, la radiation des cadres ayant pour seul but de tenter de justifier une mesure d'éviction prise sans procédure préalable ;

- il est fondé à solliciter la juste indemnisation de ses préjudices présentant un lien causal avec cette décision, à savoir la liquidation de l'indemnité de licenciement due selon les modalités du titre XII du décret n° 91-155, la liquidation de l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à deux mois de traitement et la somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Par des mémoires en défense enregistrés le 9 novembre 2020 et le 4 janvier 2021, le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ", représenté par Me Rayssac, conclut au rejet de la requête de M. B... et à ce que soit mise à sa charge une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le requérant ne justifie pas du préjudice moral subi à la suite des décisions de licenciement de mai et juin 2011 par les attestations médicales produites, notamment l'expertise médicale qui est entachée de nombreuses contradictions ; les allégations de licenciement discriminatoire, évoquées pour la première fois par le requérant, ne sont nullement étayées et sont mensongères ; en tout état de cause, aucun élément susceptible d'établir un quelconque préjudice n'est apporté ;

- la décision de licenciement pour abandon de poste du 3 novembre 2015 est régulière dès lors qu'elle est intervenue dans un contexte d'absences injustifiées de M. B... ; le moyen tiré du défaut d'entretien préalable est inopérant ; les allégations de détournement de pouvoir sont fallacieuses et dénuées de toutes précisions ;

- ses demandes indemnitaires ne pourront dès lors qu'être rejetées ; au demeurant, le préjudice moral allégué n'est pas justifié.

Par une ordonnance en date du 27 janvier 2021, la date de clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 19 février 2021.

Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret 91-155 du 6 février 1991;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Tesseyre, représentant M. B..., et de Me Rayssac, représentant le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ".

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté en contrat à durée indéterminée le 3 mars 2011, en application de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière par le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ", en tant que responsable de la logistique interne, au grade de technicien hospitalier chef. Par décision du 20 mai 2011, le directeur du groupement a mis fin à sa période d'essai et lui a notifié la fin de son contrat de travail à compter du 6 juin 2011. Par courrier du 14 juin 2011, prenant acte d'un arrêt de travail du 24 mai 2011 consécutivement à un accident de travail survenu le 14 mai 2011, le directeur du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " a, en application de l'article 6 du contrat de travail de l'intéressé, reporté la fin de fonction de l'intéressé au 27 juin 2011 et l'a placé en congé du 13 au 27 juin 2011. Ces deux décisions ont été annulées par un jugement n°1103719 du tribunal administratif de Toulouse en date du 9 octobre 2014, devenu définitif. Par une décision du 3 novembre 2015, le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " a procédé à la radiation des effectifs de M. B.... Par un courrier du 19 octobre 2017, l'intéressé a demandé au groupement d'intérêt public de l'indemniser des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait des décisions illégales prises à son encontre et des fautes commises par son ancien employeur. Cette demande étant restée sans réponse, M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le groupement d'intérêt public à l'indemniser de ces préjudices. Par le jugement attaqué du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. B.... Ce dernier relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Il résulte des termes du jugement que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments avancés par les parties, a suffisamment explicité les raisons pour lesquelles la décision du groupement d'intérêt public du 3 novembre 2015 n'était entachée d'aucune erreur d'appréciation. S'il a ensuite indiqué au point 8 que cette décision était illégale et que le groupement d'intérêt public avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité, cette contradiction interne du jugement en affecte le bien-fondé mais non sa régularité. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur la responsabilité du groupement d'intérêt public :

En ce qui concerne la faute tenant à l'adoption des décisions illégales des 20 mai et 14 juin 2011 :

3. Aux termes de l'article 42 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n°86-33, dans ses dispositions alors en vigueur : " En cas de licenciement des agents recrutés pour une durée indéterminée et des agents dont le contrat à durée déterminée est rompu avant le terme fixé, les intéressés ont droit à un préavis de : 1° Huit jours pour les agents qui ont moins de six mois de services ; (...) Le préavis n'est pas dû en cas de licenciement prononcé soit à titre de sanction disciplinaire, soit pour inaptitude physique, soit à la suite d'un congé sans traitement d'une durée égale ou supérieure à un mois, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai. " Selon l'article 44 du même décret : " Lorsque l'autorité signataire du contrat envisage de licencier un agent contractuel, elle doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, en lui indiquant l'objet de la convocation. / Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs à la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. / Lors de cette audition, l'agent contractuel peut se faire assister par une ou plusieurs personnes de son choix. / La décision de licenciement est notifiée aux intéressés par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Cette lettre précise le ou les motifs du licenciement et la date à laquelle celui-ci doit intervenir compte tenu des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis ".

4. D'une part, par un jugement n°1103719 en date du 9 octobre 2014, devenu définitif, le tribunal administratif de Toulouse a qualifié, aux termes de ses motifs, les décisions des 20 mai 2011 et 14 mai 2011 de décisions de licenciement et les a annulées pour insuffisance de motivation. Cette illégalité est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ".

5. D'autre part, par le jugement attaqué, le tribunal a retenu l'existence d'une autre faute de nature à engager la responsabilité du groupement d'intérêt public, tenant à l'absence d'entretien préalable de nature à priver le requérant d'une garantie. Il résulte cependant de l'instruction que l'intéressé a bien été entendu lors d'un entretien qui s'est tenu le 20 mai 2011, qui devait initialement avoir lieu en présence d'un agent de son équipe afin d'évoquer le comportement général de cet agent ainsi que les faits dénoncés par M. B... à l'encontre de cet agent. Toutefois, il n'est pas établi que M. B... aurait été préalablement informé de ce que le groupement d'intérêt public envisageait de mettre fin à son contrat à l'issue de la période d'essai de trois mois, ce dont il n'a été informé qu'au cours de cet entretien. Dans cette mesure, M. B... est fondé à invoquer l'irrégularité de la procédure de licenciement. Ainsi, le requérant est également fondé à soutenir que l'irrégularité dans la procédure suivie lors de son licenciement est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ".

6. Si M. B... soutient ensuite que son licenciement constitue une mesure discriminatoire dans le contexte des insultes dont il a été victime de la part de l'un de ses agents concernant le handicap dont il est atteint et son origine ultra-marine, il ne résulte d'aucune pièce que son licenciement aurait un motif distinct de celui de la non adéquation à son poste de travail qui a été retenu par le groupement d'intérêt public.

7. Enfin, alors que le motif dont a fait état son employeur pour mettre fin à son contrat réside dans " la non adéquation au poste de travail ", aucune disposition de nature législative ou règlementaire ni aucun principe n'imposait que M. B... soit invité à solliciter un reclassement.

En ce qui concerne la faute tenant à l'illégalité de la décision de licenciement du 3 novembre 2015 :

8. Une mesure de radiation des effectifs pour abandon de poste est justifiée lorsque l'agent public, en refusant de rejoindre son poste sans raison valable, malgré une mise en demeure régulière, se place dans une situation telle qu'elle rompt le lien entre l'agent et le service.

9. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'annulation des décisions des 20 mai et 14 juin 2011 par le tribunal administratif de Toulouse par jugement du 9 octobre 2014, M. B... n'a pas repris son poste de travail au sein du groupement d'intérêt public, et a adressé à son employeur des arrêts de travail successifs de prolongation, le premier allant jusqu'au 4 novembre 2014, et ne s'est dès lors pas présenté aux visites de médicales de reprise auxquelles il a été convoqué à plusieurs reprises, les 4 novembre 2014, 21 septembre 2015, 20 octobre 2015 et 2 novembre 2015. Par un courrier du 21 avril 2015, le groupement d'intérêt public l'a mis en demeure de justifier son absence au titre de la période du 1er au 14 avril, et de reprendre son poste. L'intéressé a adressé le 30 avril un nouvel arrêt de travail de prolongation allant jusqu'au 28 mai 2015. Par des courriers des 21 et 28 octobre 2015, M. B... a de nouveau été mis en demeure de justifier son absence ou de réintégrer son poste. Il résulte des pièces produites que l'intéressé avait adressé un courriel à la médecine du travail le 19 octobre 2015 l'informant de la prolongation de son arrêt maladie jusqu'au mois de novembre, et transmis en ligne à la caisse primaire d'assurance maladie le 16 octobre 2015 son arrêt de prolongation courant jusqu'au 15 novembre suivant. M. B... ne justifie avoir informé le groupement d'intérêt public de cette dernière prolongation que par un courrier du 5 novembre 2015, soit deux jours après la décision de licenciement qui lui a été notifiée par voie d'huissier. Toutefois, au regard de la situation de l'intéressé qui était en arrêt de travail de manière continue depuis octobre 2014, l'administration ne pouvait, sans entacher sa décision d'erreur de droit, procéder à son licenciement pour abandon de poste dès lors que M. B... ne pouvait être regardé comme ayant rompu tout lien avec le service. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, M. B... est fondé à soutenir que le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

Sur les préjudices de M. B... :

En ce qui concerne le préjudice subi du fait de l'illégalité des décisions des 20 mai et 14 juin 2011 :

10. Lorsqu'un agent public sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité, pour un vice de procédure, de la décision prononçant son éviction du service, il appartient au juge de plein contentieux, saisi de moyens en ce sens, de déterminer, en premier lieu, la nature de cette irrégularité procédurale puis, en second lieu, de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si, compte tenu de la nature et de la gravité de cette irrégularité procédurale, la même décision aurait pu être légalement prise dans le cadre d'une procédure régulière.

11. De même, lorsque la décision administrative est entachée d'un vice de forme, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement être prise. Si tel est le cas, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme trouvant sa cause directe dans le vice de forme entachant la décision administrative illégale.

12. Il résulte de l'instruction que les fautes imputables au groupement d'intérêt public tenant seulement au défaut de motivation des décisions et à l'irrégularité de la procédure de licenciement suivie, la même décision aurait pu être légalement prise dans le cadre d'une procédure régulière à l'issue de la période d'essai prévue à l'article 6 de son contrat, ainsi que le souhaitait l'employeur, M. B... ne contestant au demeurant pas sérieusement le motif de la non adéquation au poste de travail qui fonde les décisions des 20 mai et 14 juin 2011, alors qu'il avait été recruté à compter du 3 mars précédent.

13. M. B... soutient cependant que son licenciement a constitué un choc psychologique ayant rendu nécessaire un suivi psychiatrique régulier depuis mai 2011, dans le contexte des insultes liées à son handicap et à ses origines ultra-marines proférées à son encontre par un de ses subordonnés au cours des opérations de déménagement des 14 et 15 mai 2015, et invoque une atteinte à sa personne et des conséquences psychiques. Il résulte des pièces produites, notamment de l'attestation établie par le docteur C... le 7 décembre 2011 dans le cadre du maintien de la reconnaissance de travailleur handicapé et de celle du Dr A... du 21 décembre 2015, que le requérant a bénéficié d'un suivi régulier par un psychiatre et un psychologue du centre hospitalier Gérard Marchant après son licenciement en raison d'une souffrance au travail et d'un état anxio-dépressif réactionnel. S'il résulte des pièces qu'il n'a informé son supérieur hiérarchique des insultes proférées à son encontre que par un courrier électronique du 16 mai au soir alors que celui-ci était présent sur le chantier de déménagement pendant les opérations des 14 et 15 mai, la confrontation entre les deux agents, pourtant prévue le 20 mai suivant par son supérieur hiérarchique, ne s'est pas tenue malgré la gravité des faits relevés. Dans les circonstances particulières de l'espèce, alors même que M. B... ne produit aucune attestation des personnes présentes venant appuyer ses dires, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par l'intéressé en lien direct avec les manquements relevés en lui allouant une somme de 3 000 euros.

En ce qui concerne le préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du 3 novembre 2015 :

14. Aux termes de l'article 42 du décret du 6 février 1991 : " En cas de licenciement des agents recrutés pour une durée indéterminée (...), les intéressés ont droit à un préavis de : 1° Huit jours pour les agents qui ont moins de six mois de services ; 2° Un mois pour ceux qui ont au moins six mois et au plus deux ans de services ; 3° Deux mois pour ceux qui ont au moins deux ans de services. / Le préavis n'est pas dû en cas de licenciement prononcé soit à titre de sanction disciplinaire, soit pour inaptitude physique, soit à la suite d'un congé sans traitement d'une durée égale ou supérieure à un mois, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai. ". Selon l'article 46 de ce décret : " Le licenciement au cours ou à l'expiration d'une période d'essai ne donne pas lieu à indemnité. ". Selon l'article 47 de ce décret : " En cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, une indemnité de licenciement est versée : 1° Aux agents recrutés pour une durée indéterminée ; (...) L'indemnité de licenciement est réduite de moitié en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle. ". Selon l'article 49 de ce décret : " La rémunération servant de base au calcul de l'indemnité de licenciement est la dernière rémunération nette des cotisations de sécurité sociale et, le cas échéant, des cotisations d'un régime de prévoyance complémentaire effectivement perçue au cours du mois civil précédant le licenciement. Elle ne comprend ni les prestations familiales, ni le supplément familial de traitement, ni les indemnités pour travaux supplémentaires ou autres indemnités accessoires. (...) "

15. Ainsi qu'il a été exposé au point 9, M. B... n'a pas repris ses fonctions au sein du groupement d'intérêt public à la suite de l'annulation des décisions de licenciement prises à son encontre les 20 mai et 14 juin 2011 par jugement du tribunal administratif du 9 octobre 2014, jusqu'à la décision de licenciement du 3 novembre 2015. Dès lors qu'il avait été licencié alors que la période d'essai de trois mois fixée à son contrat n'était pas expirée, il ne peut prétendre à une indemnité de licenciement en application des dispositions énoncées à l'article 46 du décret du 6 février 1991. Pour les mêmes motifs, il ne peut davantage prétendre au versement de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article 42 du même décret.

16. Compte tenu des conditions d'éviction de M. B..., il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi en lui allouant une somme de 2 000 euros.

17. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a refusé de faire droit, dans cette mesure, à sa demande.

Sur les frais liés au litige :

18. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " une somme de 1 500 euros à verser à M. B... au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font en revanche obstacle à ce que M. B..., qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse au groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 27 juin 2019 est annulé.

Article 2 : Le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " est condamné à verser une somme de 5 000 euros à M. B... en réparation de ses préjudices.

Article 3 : Le groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... et les conclusions du groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière " tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au groupement d'intérêt public " Midi Picardie Informatique Hospitalière ".

Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

- Mme Blin, présidente-assesseure,

- Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

La rapporteure,

A. BlinLa présidente,

A. Geslan-Demaret

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°19TL23431 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19TL23431
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : RAYSSAC

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-03-29;19tl23431 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award