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10/07/2025 | FRANCE | N°23PA03418

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 9ème chambre, 10 juillet 2025, 23PA03418


Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2013 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant les années 2010 et 2011, ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 2017685 du 14 juin 2023 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa deman

de. Procédure devant la Cour : ...

Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2013 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant les années 2010 et 2011, ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 2017685 du 14 juin 2023 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 27 juillet 2023 et 29 novembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Sorin, demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement n° 2017685 du tribunal administratif de Paris en date du 14 juin 2023 ; 2°) de prononcer la décharge sollicitée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - s'agissant de l'impôt sur le revenu des années 2010 et 2011, les premiers juges ne pouvaient pas procéder à une substitution de base légale, la demande de l'administration n'ayant été faite qu'à titre subsidiaire et l'administration n'ayant pas justifié au fond de l'existence d'opérations relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux ; - ni l'avis de vérification de comptabilité adressé le 7 juin 2016, au titre des années 2010 et 2011, ni le courrier adressé par la suite le 28 juin 2016, ne comportaient de précisions quant à la nature de l'activité objet de la vérification ; - la vérification de comptabilité a commencé dès le 10 novembre 2015, date d'exercice du droit de communication de l'administration auprès de l'autorité judiciaire ; c'est donc irrégulièrement que l'administration n'a pas fait précéder ces opérations de l'envoi d'un avis ; - aucune activité professionnelle n'ayant été réalisée au titre des années 2010 et 2011, le délai de reprise ordinaire ne pouvait être étendu à ces années sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ; - en l'absence d'activité professionnelle, aucune taxe sur la valeur ajoutée ne pouvait être réclamée ; - les redressements effectués dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sont dépourvus de motivation et de fondement ; les virements émanant de M. C... correspondent à un prêt, ayant donné lieu à remboursement par une tierce personne ; - l'application aux sommes taxées au titre des années 2010 et 2011 de la majoration de 25 % sur le fondement du a) du 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts n'a pas été motivée ; - s'agissant de l'impôt sur le revenu des années 2012 et 2013, la demande d'éclaircissements et de justifications sur ses comptes bancaires adressée sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales le 22 juin 2015 n'a pas été précédée d'un débat contradictoire, faisant suite à l'envoi de l'avis d'examen ; - les relevés de ses comptes bancaires personnels lui ont été communiqués tardivement ; - le bref délai durant lequel il a disposé des relevés de ses comptes bancaires personnels, antérieurement à la mise en recouvrement des impositions au titre des années 2012 et 2013, a méconnu le principe d'égalité des armes devant la juridiction résultant de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 6, 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le délai de prescription n'a pas été interrompu régulièrement pour l'année 2012 par la proposition de rectification du 21 décembre 2015 ; - aucun débat oral et contradictoire n'a eu lieu concernant les sommes taxées au titre de l'année 2013 ; - aucune activité occulte n'ayant été exercée, les sommes taxées au titre des années 2010 et 2011 ne pouvaient faire l'objet de la pénalité de 80 % prévue au c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 août 2023 et 15 décembre 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés. Vu : - l'ordonnance n° 23PA03419 du 5 septembre 2023 du juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris ; - les autres pièces du dossier. Vu : - la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale ; - la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Boizot, - et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public. Considérant ce qui suit : 1. Après l'exercice d'un droit de communication auprès de l'autorité judiciaire le 10 novembre 2015 et l'envoi d'un avis de vérification le 7 juin 2016, l'administration fiscale a diligenté une vérification de comptabilité à raison d'activités exercées par M. A... B... en 2010 et 2011 en tant qu'intermédiaire missionné par les autorités françaises, notamment auprès des autorités kazakhes, qu'elle a regardées comme ayant été exercées de manière occulte et comme ayant revêtu un caractère industriel et commercial. En conséquence, le service a notifié à M. A... B..., par une proposition de rectification du 12 septembre 2017, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison de bénéfices industriels et commerciaux, majorés du coefficient de 1,25 prévu au a) du 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, établis selon la procédure d'évaluation d'office et assortis des majorations de 80 % pour activité occulte prévues à l'article 1728 du code général des impôts. Par ailleurs, par un avis du 29 avril 2015, elle a engagé un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. A... B..., qui a donné lieu à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013, notifiés respectivement les 21 décembre 2015 et 18 juillet 2016, assortis de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 du code général des impôts. Par un jugement du 14 juin 2023, dont M. A... B... relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'ensemble de ces compléments d'imposition, rappels et majorations.

Sur la régularité du jugement attaqué : 2. L'administration fiscale a imposé à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des sommes perçues par M. A... B..., qu'elle a regardées comme lui ayant été versées en contrepartie de l'exercice d'une activité d'entremise. Saisi par l'administration d'une demande en ce sens, qui était suffisamment précise, le tribunal a considéré que ces sommes constituaient des bénéfices non commerciaux et il a en conséquence retenu l'article 92 du code général des impôts comme fondement légal des cotisations litigieuses d'impôt sur le revenu. Contrairement à ce que soutient M. A... B..., alors même que cette demande avait été présentée à titre subsidiaire, il n'a dès lors entaché son jugement d'aucune irrégularité en procédant à cette substitution de base légale. Sur le bien-fondé du jugement attaqué : En ce qui concerne la régularité des procédures d'imposition : S'agissant du respect du principe de l'égalité des armes et du droit à un procès équitable au regard des éléments de la procédure pénale utilisée par l'administration : 3. M. A... B... soutient que l'utilisation par l'administration fiscale d'éléments issus de la procédure pénale diligentée à son encontre depuis le 18 mars 2013 pour des faits de blanchiment commis en bande organisée, corruption active d'agents publics étrangers, complicité et recel de ces délits, ainsi que la communication tardive des relevés bancaires ayant servi de fondement aux rehaussements contestés le 30 octobre 2018, soit près de trois ans après ses demandes de communication de pièces formulées les 5 octobre 2015 et 2 mars 2016, contreviennent au principe de l'égalité des armes tel que reconnu par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, ainsi qu'au droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. 4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) ". 5. Si le requérant fait valoir que l'utilisation d'éléments issus de la procédure pénale pour le taxer d'office méconnaît le droit au procès équitable protégé par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il n'a pas eu accès à l'ensemble des pièces du dossier le concernant, ces stipulations ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale, et non aux procédures administratives. Par suite, le moyen doit être écarté. 6. En second lieu, aux termes de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter. Une aide juridictionnelle est accordée à ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes, dans la mesure où cette aide serait nécessaire pour assurer l'effectivité de l'accès à la justice ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment de son arrêt C-199/11 Europese Gemeenschap c/ Otis NV et autres du 6 novembre 2012, que le principe de protection juridictionnelle effective figurant à cet article 47 est constitué de divers éléments, lesquels comprennent, notamment, les droits de la défense, le principe d'égalité des armes, le droit d'accès aux tribunaux, ainsi que le droit de se faire conseiller, défendre et représenter. 7. Il résulte de l'instruction qu'en application des articles L. 81 et suivants du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a exercé son droit de communication auprès des établissements bancaires Crédit Agricole et Neuflize OBC afin d'obtenir une copie des relevés bancaires de M. A... B... et de son épouse au titre des années 2012 et 2013, ainsi qu'auprès de l'autorité judiciaire qui l'a autorisée le 18 août 2015 à consulter le dossier pénal du requérant ouvert auprès du tribunal de grande instance de Paris. 8. Si le service s'est notamment fondé sur les pièces obtenues grâce à l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire et de plusieurs établissements bancaires pour établir la proposition de rectification du 18 juillet 2016, cette dernière, qui mentionne l'origine et la teneur des informations ainsi recueillies, pouvait notamment sur cette base établir l'imposition sans attendre l'issue de la procédure pénale. En outre, si M. A... B... se plaint de ne pas avoir eu accès à son entier dossier pénal, il ne résulte pas de l'instruction que le vérificateur se serait appuyé sur des documents détenus par l'autorité judiciaire autres que ceux dont il a été mis en mesure de demander la communication. 9. De surcroît, les relevés bancaires dont la communication a été demandée par M. A... B... avant la mise en recouvrement des rappels litigieux, étaient ses propres relevés bancaires, ainsi que ceux de son épouse, dont ils disposaient et dont il n'est pas soutenu qu'ils ne leur étaient pas directement et effectivement accessibles dans les mêmes conditions que l'administration. En tout état de cause, en réponse à la demande de communication de pièces formée par le requérant le 2 mars 2016, l'administration fiscale lui a adressé le 3 mars suivant un courrier par lequel elle lui a communiqué une copie des relevés bancaires obtenus dans le cadre du droit de communication exercé les 1er et 6 juillet 2015 auprès du Crédit Agricole et de la banque Neuflize OBC, soit cinq relevés pour le compte n° 20140770002 ouvert auprès de la banque Neuflize OBC couvrant la période du 31 décembre 2012 au 30 avril 2013 et un relevé auprès de cette même banque pour le compte n° 25139650001 couvrant la période du 31 mars 2013 au 30 avril 2014, le Crédit Agricole n'ayant communiqué aucun relevé pour les comptes ouverts auprès de cet établissement. Puis, par un second courrier en date du 30 octobre 2018, elle lui a également communiqué, dans un délai raisonnable avant la mise en recouvrement des impositions en litige le 30 novembre 2018, les copies des comptes bancaires et des pièces de crédits concernant les établissements bancaires Crédit Agricole, Neuflize OBC et BNP. Au regard de ce qui précède, le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense tels que garantis par l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit en tout état de cause être écarté. S'agissant de la vérification de comptabilité : 10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / L'avis informe le contribuable que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié peut être consultée sur le site internet de l'administration fiscale ou lui être remise sur simple demande. (...) ". 11. Contrairement à ce que soutient M. A... B..., aucune disposition ni aucun principe ne prescrit à l'administration fiscale d'indiquer, dans l'avis qu'elle adresse au contribuable avant l'engagement d'une vérification de comptabilité en application des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, la nature de l'activité et la catégorie de revenus sur lesquelles portera la vérification. Dès lors, M. A... B... ne saurait utilement soutenir que la procédure de vérification est irrégulière dès lors que l'activité concernée par le contrôle n'est mentionnée ni par l'avis de vérification du 7 juin 2016, ni, en tout état de cause, par le courrier du 28 juin 2016 lui communiquant une copie de cet avis, qui était revenu avec la mention " pli avisé et non réclamé ", et reportant le premier entretien avec le vérificateur. 12. En deuxième lieu, aucune disposition ni aucun principe ne fait obstacle à ce que l'administration exerce son droit à communication avant de diligenter, si elle le juge utile, une vérification de comptabilité. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que les opérations de vérification de comptabilité, dont ne faisait pas partie l'exercice du droit de communication de l'administration fiscale auprès de l'autorité judiciaire, auraient commencé avant l'envoi de l'avis de vérification, nonobstant les mentions figurant dans la proposition de rectification du 12 septembre 2017 et la réponse aux observations du contribuable en date du 5 avril 2018 qui énoncent que l'analyse des crédits bancaires de l'intéressé les 10 novembre 2015 et 1er décembre 2016 telle qu'elle ressort de la consultation de la procédure judiciaire ouverte à son encontre a permis de révéler la perception par l'intéressé de plusieurs sommes au cours de la période de vérification. Par ces mentions, l'administration ne fait que préciser qu'en l'absence de souscription de déclarations fiscales dans les délais et de documents comptables, elle s'est appuyée sur les informations comptables recueillies lors de la communication judiciaire pour imposer les sommes créditées sur les comptes bancaires du requérant. Dès lors, doit être écarté le moyen de M. A... B... tiré de ce que la vérification de comptabilité a irrégulièrement débuté avant la réception de l'avis de vérification du 7 juin 2016 et sans qu'il ait bénéficié pendant cette période des droits attachés à la vérification de comptabilité et notamment de la garantie d'un débat oral et contradictoire.

13. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions ". Contrairement à ce que soutient M. A... B..., la proposition de rectification du 12 septembre 2017, qui vise le a) du 1° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, en vertu duquel le coefficient de 1,25 prévu par ces dispositions s'applique à l'assiette des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles réalisés par des contribuables soumis à un régime réel d'imposition qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréés, et qui relève que M. A... B... s'est livré à une activité occulte d'entremise et d'intermédiaire relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, est suffisamment motivée s'agissant de l'application de ce coefficient. S'agissant de l'examen de situation fiscale personnelle pour les années 2012 et 2013 : 14. En premier lieu, le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 de ce livre, marque l'achèvement de cet examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir. 15. Si M. A... B... soutient qu'il a été privé d'un débat oral et contradictoire, aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige l'administration à engager sous une forme orale le débat contradictoire qu'elle est tenue de mener avec un contribuable qui fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale d'ensemble. Par ailleurs, si le requérant fait valoir que son état de santé à cette époque ne lui permettait pas de suivre les opérations de contrôle, il résulte de l'instruction qu'il a été en capacité de désigner un représentant dans le cadre de l'examen contradictoire de situation fiscale au titre de l'année 2012, à savoir son conseil, qui a été reçu par le vérificateur pour un entretien le 5 juillet 2016, et qu'à cette occasion, il a pu présenter divers documents et des observations orales, lesquels ont été examinés préalablement à la proposition de rectification. De plus, la circonstance qu'une proposition d'entretien fixée au 17 février 2016 ait été reportée en raison de l'état de santé du requérant et des disponibilités du conseil au 5 juillet 2016, avant l'envoi de la proposition de rectification, est sans influence sur la régularité des rectifications notifiées au titre de l'année 2013. Dans ces conditions, l'administration a respecté l'ensemble des garanties attachées à la procédure. Par suite, le moyen doit être écarté. 16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition (...) ". 17. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque l'administration fonde les rectifications envisagées sur plusieurs motifs distincts et autonomes, le défaut de communication des informations utilisées pour établir l'un de ces motifs n'est pas de nature à entacher d'irrégularité, dans son ensemble, la procédure d'imposition, dès lors qu'elle a bien communiqué les informations concernant les motifs justifiant à eux-seuls l'imposition. 18. M. A... B... soutient que, malgré ses demandes formulées dès les 5 octobre 2015 et 2 mars 2016, le service ne lui a communiqué l'ensemble des documents sollicités que le 30 octobre 2018. Toutefois, il résulte de l'instruction que les documents en litige ont été adressés par l'administration fiscale dans un délai raisonnable avant la mise en recouvrement des impositions, qui est intervenue le 30 novembre 2018. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté. 19. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins 150 000 euros ". 20. Par un courriel en date du 22 juin 2015 adressé au conseil de M. A... B... à la suite de l'entretien du 17 juin 2015, l'administration fiscale a accusé réception des relevés bancaires communiqués lors de cet entretien et constaté qu'un certain nombre de relevés étaient manquants. Ce courrier, qui, au demeurant, ne comporte aucun libellé mentionnant expressément une demande de justifications ou d'éclaircissements et n'indique pas que le contribuable serait taxé d'office en l'absence de réponse à cette demande, ne peut être regardé comme une demande d'éclaircissement ou de justification au sens de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. Par suite, M. A... B..., qui ne saurait utilement reprocher à l'administration de ne pas avoir engagé avec lui un débat contradictoire avant l'envoi de ce courrier, n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir qu'il a été privé des garanties attachées à la mise en œuvre des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. En ce qui concerne le bien-fondé des impositions : S'agissant des rectifications résultant de la vérification de comptabilité : Quant à l'existence d'une activité occulte et à la qualification catégorielle des revenus correspondants : 21. Aux termes de l'article 92, 1 du code général des impôts : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ". 22. Il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, l'administration fiscale a recueilli des éléments faisant ressortir qu'au cours des années 2010 et 2011, M. A... B... a perçu des virements sur l'un de ses comptes bancaires pour des montants totaux de 219 984 euros en 2010 et 596 683 euros en 2011, ainsi que des versements en espèces pour un montant total de 118 000 euros en 2011. Il est apparu que ces sommes provenaient, d'une part, de la société de droit britannique Antigone Holding Corp, installée dans un pays à fiscalité privilégiée (les Iles vierges britanniques), dont le bénéficiaire économique est M. C..., ressortissant belge, et, d'autre part, de M. C... lui-même, en contrepartie de l'intervention du requérant, avec le concours de l'avocate de trois hommes d'affaires kazakhs détenus en Belgique, auprès d'un sénateur belge pour favoriser l'adoption par le parlement du royaume de Belgique d'une loi élargissant le champ d'application de la transaction pénale en y incluant des crimes et délits punis d'une peine de 20 ans d'emprisonnement, et ce, afin de permettre aux trois hommes d'affaires concernés d'échapper à la justice belge, ainsi que de la communication d'informations ou contacts permettant de réaliser des opérations économiques en France et à l'étranger. 23. Au regard de ce qui précède, le versement des sommes en litige doit être regardé comme s'inscrivant dans le prolongement de l'intervention de M. A... B... en qualité d'intermédiaire. De plus, le requérant ne produit aucun document relatif à la nature de ses relations avec M. C... ou la société Antigone Holding Corp permettant de regarder lesdites sommes comme une rémunération alors même qu'aucun document n'établirait que M. A... B... aurait formellement demandé le paiement de ces sommes et qu'aucun contrat écrit n'aurait été établi. S'il soutient que les virements bancaires effectués par M. C... d'un montant de 89 984 euros en 2010 et 306 000 euros en 2011 ont pour origine un prêt devant initialement être consenti par l'avocate des hommes d'affaires kazakhs à son profit pour l'acquisition d'un bien immobilier situé en Normandie, mais que cette dernière aurait préféré que ces prêts soient effectués par l'intermédiaire de M. C..., il résulte de la proposition de rectification du 12 septembre 2017 que M. C... a admis, lors de son interrogatoire devant les autorité judiciaires, que les deux conventions de prêt n'avaient été qu'un habillage juridique pour donner une causalité apparente aux deux virements effectués en faveur de M. A... B..., ces propos ayant été confirmés, lors de son audition, par l'avocate, qui a précisé que lesdites sommes correspondaient à des commissions versées pour l'aide du requérant dans le dossier kazakh. 24. En outre, M. A... B... n'a ni déposé les déclarations fiscales correspondant aux sommes perçues, ni fait connaître son activité auprès d'un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce. M. A... B... doit, en conséquence, être regardé comme ayant exercé une activité occulte. 25. Enfin, les sommes perçues en contrepartie de l'opération d'entremise susmentionnée, qui avait un caractère occasionnel mais était susceptible de se renouveler, relevaient de la catégorie de bénéfices non commerciaux. La seule circonstance que cette source de profit, qui n'est pas, par nature, insusceptible de se renouveler, ait été occasionnelle ne fait pas obstacle à la qualification de bénéfice non commercial, le revenu en cause n'étant par ailleurs rattachable à aucune autre catégorie.

Quant au délai de reprise : 26. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte (...). L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable (...) n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. / (...) ". 27. Il résulte de ce qui précède, qu'en présence d'une activité occulte d'entremise et en application de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, l'administration était fondée à étendre son droit de reprise au-delà du délai de droit commun de trois ans. Par conséquent, le moyen tiré de la prescription doit être écarté. Quant à l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée : 28. D'une part, aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention (...). Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ". 29. D'autre part, aux termes de l'article 259 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est situé en France : 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis ; c) Ou, à défaut du a ou du b, son domicile ou sa résidence habituelle ; 2° Lorsque le preneur est une personne non assujettie, si le prestataire : a) A établi en France le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France à partir duquel les services sont fournis ; b) Ou dispose d'un établissement stable en France à partir duquel les services sont fournis ; c) Ou, à défaut du a ou du b, a en France son domicile ou sa résidence habituelle ". 30. Comme il a été indiqué aux points 22 et 23 du présent arrêt, M. A... B... a, au cours des années 2010 et 2011, perçu une rémunération d'un montant global de 934 667 euros versée par une avocate française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée pour avoir usé de son influence dans le cadre de la procédure pénale diligentée par les autorités belges à l'encontre de trois ressortissants kazakhs. La contrepartie était, par suite, taxable en France en application des dispositions précitées, alors même que la rémunération a été versée par une société implantée aux Iles vierges britanniques à partir d'un compte suisse. M. A... B... était donc redevable de la taxe sur la valeur ajoutée. S'agissant des rectifications résultant de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle : Quant au délai de reprise pour l'année 2012 : 31. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (...) ". Aux termes de l'article L. 189 de ce livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) ". 32. Eu égard à l'objet de ces dispositions, relatives à la détermination du délai dont dispose l'administration pour exercer son droit de reprise, la date d'interruption de la prescription est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification a été présenté à l'adresse du contribuable. Il en va de même lorsque le pli n'a pu lui être remis lors de sa présentation et que le contribuable a été avisé de sa mise en instance, qu'il l'ait retiré ultérieurement ou ait négligé de le retirer. 33. M. A... B... soutient que la proposition de rectification du 21 décembre 2015 résultant du contrôle opéré au titre de ses revenus de l'année 2012, ne lui a pas été notifiée avant le 1er janvier 2016 et qu'à cette date, le délai de reprise de l'administration applicable à l'impôt sur le revenu de l'année 2012 avait expiré. Il fait valoir que la signature apposée sur l'accusé de réception de la proposition de rectification diffère de la signature figurant sur l'attestation délivrée lors de l'enquête des services de La Poste. 34. Il résulte toutefois de l'instruction que le pli contenant la proposition de rectification du 21 décembre 2015 a été présenté et distribué au contribuable à son domicile situé au 249, chemin des Monts à Glanville le 28 décembre 2015, comme en attestent l'accusé de réception et l'enquête postale. En outre, le service a également adressé un exemplaire de la proposition de rectification au 61, boulevard Hausmann à Paris, où elle a été distribuée le 24 décembre 2015, comme le précise l'attestation émanant des services postaux. En se bornant à soutenir que les signatures portées sur les deux accusés de réception diffèrent et qu'elles ne seraient pas la sienne, sans apporter aucune précision sur l'identité du tiers qui aurait signé et sans fournir la liste des personnes qui, même non expressément habilitées, auraient toutefois entretenu avec lui des relations susceptibles de leur donner qualité pour réceptionner le pli, M. A... B... n'établit pas que la signature portée sur les accusés de réception ne serait pas la sienne ou a été apposée par une personne non habilitée. Dans ces conditions, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la proposition de rectification du 21 décembre 2015 lui a été irrégulièrement notifiée. Par suite, le moyen tiré de la prescription du délai de reprise dont disposait l'administration, faute de notification de la proposition de rectification dans le délai fixé aux articles L. 169 et L. 189 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

En ce qui concerne les pénalités : 35. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) / c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte (...) ". 36. M. A... B... s'étant livré à une activité occulte, ainsi qu'il a été dit précédemment, c'est à bon droit que l'administration a fait application à son encontre de la majoration de 80 % prévue par les dispositions précitées du c. du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. 37. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions à fins d'annulation et de décharge doivent dès lors être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles qu'il a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D E C I D E :Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales.Délibéré après l'audience du 2 juillet 2025, à laquelle siégeaient :- M. Lemaire, président, - Mme Boizot, première conseillère.- Mme Lorin, première conseillère. Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 10 juillet 2025. La rapporteure,S. BOIZOTLe président,O. LEMAIRELa greffière,C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.N° 23PA03418 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03418
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAIRE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SORIN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;23pa03418 ?
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