Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... et la société à responsabilité limitée (SARL) Symbiose Paradis ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 15 octobre 2024 par laquelle le préfet de police leur a adressé un avertissement en application de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique.
Par une ordonnance n° 2433534/3-1 du 20 décembre 2024, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2025, M. B... et la SARL Symbiose Paradis, représentés par Me Enyegue, demandent à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 20 décembre 2024 de la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 15 octobre 2024 du préfet de police ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 471 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- contrairement à ce qu'a estimé la présidente de section du tribunal administratif, la décision contestée, qui n'est pas un " courrier ", s'analyse en une sanction et peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;
- l'ordonnance est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise en violation du principe d'impartialité ;
- la présidente de section du tribunal administratif ne pouvait prendre l'ordonnance attaquée dès lors qu'elle a également statué dans le cadre d'une procédure de référé suspension ;
- son ordonnance est entachée d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision contestée n'est pas motivée ;
- elle a été prise en violation du principe d'impartialité ;
- elle est entachée de vices de procédure, M. B... n'ayant pas été informé des motifs de sa convocation devant les services de police et de son droit de se faire assister par un avocat, et n'ayant pas été mis à même de demander la communication du dossier et de présenter ses observations ;
- elle est entachée d'erreurs de droit au regard de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, et d'erreur de fait, ainsi que d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2025, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 avril 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 juin 2025 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Jayer,
- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Symbiose Paradis exploite un restaurant sous l'enseigne " Symbiose Paradis ", situé 11 rue de Paradis, à Paris dans le 10ème arrondissement. Lors d'un contrôle effectué le 7 septembre 2024, les services de police y ont constaté la vente d'alcool, sans vente concomitante de nourriture constituant un véritable repas. Par un courrier du 15 octobre suivant, le préfet de police a indiqué à son gérant, M. B..., que les faits constatés étaient constitutifs du délit d'ouverture illicite d'un débit de boisson et lui a adressé un avertissement en lui demandant de se conformer pour l'avenir à la réglementation, le constat de tout nouveau manquement aux lois et règlements en la matière étant susceptible d'entraîner une fermeture administrative de l'établissement, d'une durée maximum de six mois. M. B... et la SARL Symbiose Paradis relèvent appel de l'ordonnance du 20 décembre 2024 par laquelle la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet avertissement, comme manifestement irrecevable, faute pour celui-ci de faire grief.
2. Aux termes du 1 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. / Cette fermeture doit être précédée d'un avertissement qui peut, le cas échéant, s'y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. (...) ".
3. L'avertissement prévu par ces dispositions a pour objet, d'une part, d'informer l'exploitant d'un débit de boissons ou d'un restaurant qu'il a commis des infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements et, d'autre part, d'imposer à cet exploitant de remédier à cette situation sous peine d'encourir une mesure de fermeture. Il constitue un préalable obligatoire au prononcé d'une mesure de fermeture de l'établissement prise sur le fondement des dispositions citées au point 2. Lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou d'une défaillance à laquelle il lui est aisé de remédier, l'avertissement se substitue alors à la mesure de fermeture. Dès lors, compte tenu des effets qu'il comporte sur la situation de l'exploitant et, notamment, des conséquences qu'il est susceptible d'entraîner pour ce dernier en cas de nouvelle infraction, l'avertissement présente alors le caractère d'une mesure faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif. M. B... et la SARL Symbiose Paradis sont par conséquent fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté, comme irrecevable, la demande dont le tribunal était saisi.
4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler l'ordonnance attaquée sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Paris.
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2433534/3-1 du 20 décembre 2024 de la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Paris.
Article 3 : Les conclusions de M. B... et de la SARL Symbiose, présentées devant la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., premier dénommé en sa qualité de représentant unique des requérants, et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juillet 2025.
La rapporteure,
M-D. JAYERLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 25PA00435