Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juin 2022 par lequel le recteur de l'académie de Créteil l'a affectée à titre définitif à compter de la date de la notification de cette décision, au collège Paul Eluard de Montreuil.
Par une ordonnance n° 2213425 du 25 janvier 2023, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et par des mémoires en réplique, enregistrés les 17 avril 2023, 29 octobre 2024 et 19 mars 2025, Mme B..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil du 25 janvier 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du recteur de l'académie de Créteil du 8 juin 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la fin de non-recevoir soulevée par le recteur de l'académie de Créteil doit être écartée ;
- c'est à tort que le premier juge a regardé les moyens de légalité externe de sa demande de première instance comme manifestement infondés, et ses moyens de légalité interne comme n'étant manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; son ordonnance a été prise irrégulièrement, les dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative n'autorisant pas le rejet par ordonnance lorsque la juridiction s'est bornée à communiquer le mémoire en défense de l'administration au requérant, en lui indiquant le délai dans lequel il lui est loisible de répondre ; cette ordonnance est entachée d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur d'appréciation ;
- la signataire de l'arrêté est incompétente ;
- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;
- il est dépourvu de fondement en fait et en droit ;
- il méconnaît les textes qui protègent le fonctionnaire et les droits acquis par celui-ci pendant le déroulement de sa carrière, et constitue en réalité une nouvelle sanction prise en violation de la règle " non bis in idem ".
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2024, le recteur de l'académie de Créteil conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête a été présentée tardivement ;
- les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 3 mars 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 mars 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- l'arrêté du 30 janvier 2017 du recteur de l'académie de Créteil, portant sanction disciplinaire de déplacement d'office à l'encontre de Mme B... ;
- l'arrêté collectif rectoral du 25 juin 2019 du recteur de l'académie de Créteil, portant mutation intra-académique pour l'année 2019 ;
- l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles n° 19VE01603 du 19 mai 2022 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me B..., pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., professeure certifiée d'anglais, a été affectée au collège Romain Rolland de Clichy-sous-Bois à partir du 1er septembre 2000. Par un arrêté du 30 janvier 2017, le recteur de l'académie de Créteil a prononcé à son encontre une sanction disciplinaire de déplacement d'office. Par un arrêté du 23 mai 2017, il l'a affectée au collège Paul Eluard de Montreuil à compter du 1er février 2017. Par un arrêt n° 19VE01603 du 19 mai 2022, la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2017, et a annulé l'arrêté du 23 mai 2017, en tant qu'il prenait effet à une date antérieure à celle de sa notification. Par un arrêté du 8 juin 2022, le recteur de l'académie de Créteil a fixé la date d'affectation de Mme B... au collège Paul Eluard à la date de la notification de cet arrêté, soit au 1er juillet 2022. Par une ordonnance du 25 janvier 2023, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2022. Mme B... fait appel de cette ordonnance.
Sur la fin de non-recevoir opposée par le recteur de l'académie de Créteil :
2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4-1 (...) ". Il résulte des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative que les décisions doivent être notifiées à toutes les parties en cause, à leur domicile réel.
3. Il ressort des pièces du dossier que l'ordonnance attaquée du 25 janvier 2023 a été notifiée à de Mme B... par voie postale, et que celle-ci en a accusé réception le 14 février 2023. Le délai d'appel de deux mois, qui revêt le caractère d'un délai franc, est donc venu à expiration le lundi 17 avril 2023. Ainsi, la requête de Mme B..., enregistrée précisément le lundi 17 avril 2023, n'a pas été présentée tardivement. La fin de non-recevoir soulevée par le recteur de l'académie de Créteil doit par conséquent être écartée.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
4. Par l'article 4 de son arrêt du 19 mai 2022, la Cour administrative d'appel de Versailles n'a annulé l'arrêté du 23 mai 2017 affectant Mme B... au collège Paul Eluard de Montreuil, qu'en tant qu'il prenait effet à une date antérieure à celle de sa notification. Ainsi, Mme B... doit, même si elle était alors placée en congé de maladie, être regardée comme ayant été affectée à ce collège à partir de cette dernière date. Elle est donc fondée à se prévaloir de l'arrêté collectif du 25 juin 2019 par lequel le recteur de l'académie de Créteil l'a par la suite mutée au collège Romain Rolland de Clichy-sous-Bois à partir du 1er septembre 2019, et à soutenir qu'en décidant par l'arrêté attaqué du 8 juin 2022 de l'affecter au collège Paul Eluard de Montreuil à compter de la date de la notification de cet arrêté, soit le 1er juillet 2022, le recteur lui a en réalité infligé une nouvelle sanction en violation du principe général du droit selon lequel une autorité administrative ne peut sanctionner deux fois la même personne à raison des mêmes faits.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité de l'ordonnance attaquée et sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par cette ordonnance, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761 1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme B... d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2213425 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montreuil du 25 janvier 2023 et l'arrêté du recteur de l'académie de Créteil du 8 juin 2022 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme B... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Créteil.
Délibéré après l'audience du 15 avril 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente,
- M. Niollet, président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2025.
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLa présidente,
J. BONIFACJLa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne à la ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA01603