Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Fare Rata a demandé au tribunal administratif de Polynésie française d'annuler la facture émise par le port autonome de Papeete n° 2022/5640 du 17 octobre 2022 mettant à sa charge la somme de 4 353 641 F CFP.
Par un jugement du 26 septembre 2023, le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté la demande de la société Fare Rata.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 décembre 2023, la société Fare Rata, représentée par Me Tang, demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 2300013 du 26 septembre 2023 du tribunal administratif de Polynésie française ;
2°) de réduire les sommes dues au port autonome de Papeete à raison de l'occupation du bâtiment dénommé B2 dans la zone portuaire de Fare Ute à un montant de 3 839 331 F CFP ;
3°) de mettre à la charge du port autonome de Papeete la somme de 250 000 F CFP en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- comme l'a jugé la Cour dans un arrêt 22PA05529, l'indisponibilité des locaux du domaine public en litige a pris fin le 29 septembre 2021 ;
- le préjudice dont se prévaut le port autonome de Papeete ne peut correspondre qu'à une période d'occupation courant du 1er août 2021 au 29 septembre 2021 ; la somme due doit donc être réduite d'un montant de 1 514 310 F CFP.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2024, le port autonome de Papeete, représenté par Me Mendiola-Aromaiterai, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Fare Rata au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Palis de Koninck,
- et les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par une convention conclue le 3 juillet 1984, le port autonome de Papeete (PAP) a autorisé l'office des postes et télécommunications (OPT) de Polynésie française à occuper un entrepôt d'une superficie totale de 1 782 m2 au sein de la zone portuaire en vue de l'exploitation d'un bureau postal pour le tri, la distribution, le stockage et l'expédition des colis. Cette convention a été tacitement renouvelée jusqu'au 31 décembre 2017, date de sa résiliation par le port autonome. Des négociations ont alors été engagées en vue de la conclusion d'une nouvelle convention mais n'ont pas abouti. Constatant l'absence de libération des lieux dans leur état initial, le port autonome de Papeete a adressé à la société Fare Rata, qui a succédé à l'OPT le 1er janvier 2019, une facture du 17 octobre 2022 valant titre de recettes d'un montant de 4 353 641 F CFP pour la période d'occupation courant du 1er août au 31 octobre 2021. La société Fare Rata relève appel du jugement du 26 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre de recettes.
Sur le bien fondé du titre de recettes :
2. L'occupation sans droit ni titre d'une dépendance du domaine public constitue une faute commise par l'occupant qui l'oblige à réparer le dommage causé au gestionnaire de ce domaine par cette occupation irrégulière. Le gestionnaire du domaine public est fondé à réclamer à ce titre à l'occupant irrégulier une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période. A cette fin, il doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l'occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la dépendance concernée du domaine public.
3. L'article 7 de la convention conclue le 3 juillet 1984 intitulé " Restitution des lieux - remise en état " stipule : " Sauf s'il a préalablement présenté un successeur agréé par le Port Autonome de Papeete, acceptant de lui reprendre les locaux l'amodiataire doit, en fin d'occupation à la date de cessation pour quelque cause que ce soit de l'autorisation donnée par la convention, remettre les lieux libres de toutes installations qu'il aurait construites ou dont il aurait fait l'acquisition d'un précédent occupant. / A défaut pour l'amodiataire de s'être acquitté de cette obligation dans le délai fixé par la mise en demeure adressée par lettre recommandée, le Port Autonome pourra y pourvoir d'office aux frais et aux risques de l'amodiataire. Dans ce cas la redevance domaniale continuera d'être due jusqu'à la remise en état des lieux. (...) Dans tous les cas, la restitution au Port Autonome du terrain et éventuellement des constructions faisant l'objet de la présente convention est constatée par un procès-verbal contradictoirement par un représentant du Port Autonome de Papeete et signé par l'amodiataire. ".
4. En vertu de la convention conclue le 3 juillet 1984, le port autonome de Papeete a autorisé l'OPT de Polynésie française à occuper un entrepôt d'une superficie totale de 1 782 m2 au sein de la zone portuaire divisé en deux surfaces distinctes, l'une de 1 536 m2 affectée au tri postal, l'autre de
246 m2 affectée à l'agence du bureau de poste. Le 31 décembre 2017, le port autonome de Papeete a résilié cette convention. Dès lors, à compter de cette date, l'OPT de Polynésie française, auquel a succédé la société Fare Rata, ne disposait plus d'un titre l'autorisant à occuper cet entrepôt.
5. La société Fare Rata soutient que, conformément à ce qu'a jugé la Cour dans un arrêt rendu le 13 juillet 2023 concernant les titres exécutoires émis pour la période d'occupation courant du
1er janvier 2019 au 31 juillet 2021, les locaux ont été indisponibles jusqu'au 29 septembre 2021, date à laquelle elle a transmis au PAP le résultat des tests évaluant la qualité de l'air au sein des locaux à la suite de travaux de désamiantage, et qu'aucune indemnité n'est due au port autonome passé cette date. Toutefois, il n'est nullement contesté que les locaux n'avaient pas encore été remis en état et ce alors qu'ils n'étaient plus effectivement occupés depuis plusieurs mois. A ce titre, il résulte de l'instruction que d'importants aménagements ont été effectués pour les besoins de l'activité postale et que ni l'OPT de Polynésie française, ni la société Fare Rata n'ont procédé au retrait des installations édifiées et des matériels entreposés au sein de l'entrepôt qui initialement ne comportait qu'un seul accès, n'avait aucune fenêtre et ne comportait qu'un seul niveau. Un accord n'a été trouvé entre le PAP et la société Fare Rata sur la prise en charge des travaux de remise en état des locaux qu'à compter du 9 novembre 2021. Dans ces conditions, pour la période objet du titre de recettes contesté comprise entre le 1er août 2021 et le 31 octobre 2021, la société Fare Rata doit être regardée comme ayant continué à occuper le domaine public sans autorisation faute d'avoir remis en état les locaux après leur libération. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la somme mise à sa charge devrait être réduite pour tenir compte d'une période d'occupation plus réduite.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Fare Rata n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Polynésie française a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du port autonome de Papeete, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société Fare Rata demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société une somme de 1 500 euros à verser au port autonome de Papeete.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Fare Rata est rejetée.
Article 2 : La société Fare Rata versera au port autonome de Papeete la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Fare Rata et au port autonome de Papeete.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Philippe Delage, président de chambre,
- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,
- Mme Mélanie Palis De Koninck première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2025.
La rapporteure,
M. PALIS DE KONINCKLe président,
Ph. DELAGE
Le greffier,
E. MOULINLa République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA05355