Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... Randriambao a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler :
1°) la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, notifiée le 4 décembre 2019, en tant qu'elle rattache ses fonctions au groupe n°3 du corps des greffiers des services judiciaires pour l'application du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), au lieu du groupe n°2, et en tant qu'elle prend effet le 1er janvier 2019 au lieu du 1er novembre 2018, ainsi que le rejet implicite de son recours gracieux dirigé contre cette décision ;
2°) la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, du 26 mai 2020, rattachant ses fonctions au groupe n°2 du corps des greffiers des services judiciaires pour l'application du RIFSEEP, en tant qu'elle prend effet le 1er janvier 2019 au lieu du 1er novembre 2018 ;
3°) la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de rattacher ses fonctions exercées du 1er juillet 2018 au 31 octobre 2018 au groupe n°3 pour l'application du RIFSEEP ;
4°) la décision implicite par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de lui octroyer la revalorisation de 800 euros prévue par le point 4.1.1 de la circulaire du 3 juillet 2019 du garde des sceaux, ministre de la justice, en cas de changement de fonctions vers un groupe supérieur.
Par un jugement n° 2006879/5-2 du 12 janvier 2023, le tribunal administratif de Paris a :
- constaté un non-lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 4 décembre 2019 en tant qu'elle classe les fonctions de M. Randriambao dans le groupe n°3 à compter du 1er janvier 2019 (article 1er) ;
- annulé le rejet de la demande de M. Randriambao tendant au bénéfice du RIFSEEP au titre des fonctions qu'il a exercées entre le 1er juillet 2018 et le 31 octobre 2018, la décision du 26 mai 2020, en tant qu'elle prend effet le 1er janvier 2019, et le rejet de sa demande tendant à la revalorisation prévue par le point 4.1.1 de la circulaire du 3 juillet 2019 (article 2) ;
- enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de réexaminer la situation de M. Randriambao (article 3) ;
- rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. Randriambao (article 4).
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 14 mars 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris du 12 janvier 2023 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Randriambao devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- la décision du 26 mai 2020 se borne à classer M. Randriambao dans le groupe de fonctions n° 2 et à fixer le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) qui peut lui être alloué à compter du 1er janvier 2019 ; le moyen tiré d'une irrégularité dans la fixation par la circulaire du 3 juillet 2019, de la date d'entrée en vigueur du RIFSEEP, au regard de l'arrêté du 17 décembre 2018, est inopérant à l'encontre de cette décision ;
- c'est donc à tort que le tribunal administratif a estimé qu'en fixant, par la circulaire du 3 juillet 2019, la date d'entrée en vigueur du RIFSEEP, pour le corps des greffiers des services judiciaires au 1er janvier 2019, il avait méconnu l'article 5 de l'arrêté interministériel du 17 décembre 2018, fixant la date d'adhésion de ce corps au RIFSEEP au 1er juillet 2018 ;
- il se réfère s'agissant des autres moyens, à ses écritures de première instance.
La requête a été communiquée à M. Randriambao qui, bien qu'informé de l'obligation de ministère d'avocat, n'a pas produit de mémoire par avocat.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- l'arrêté du 17 décembre 2018 pris pour l'application au corps des greffiers des services judiciaires des dispositions du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Niollet,
- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. Randriambao, greffier des services judiciaires, qui a, à partir du 1er mars 2018, exercé les fonctions de gestionnaire, référent en matière de maladie, au sein de la sous-direction des ressources humaines de la magistrature du ministère de la justice, s'est en outre vu confier, à partir du 1er novembre 2018, les fonctions de référent des magistrats honoraires. Le 4 décembre 2019, l'administration a porté à sa connaissance, verbalement, la décision rattachant ses fonctions au groupe n°3 du corps des greffiers des services judiciaires à compter du 1er janvier 2019 pour l'application du RIFSEEP, sans qu'une copie de cette décision ne lui soit remise, malgré plusieurs demandes en ce sens. Par un recours gracieux reçu le 4 février 2020, M. Randriambao a demandé le rattachement au groupe n°3 de ses fonctions exercées du 1er juillet 2018 au 31 octobre 2018, le rattachement au groupe n°2 des fonctions qu'il a exercées à compter du 1er novembre 2018 et la revalorisation, prévue par le point 4.1.1 de la circulaire du 3 juillet 2019 du garde des sceaux, ministre de la justice, en cas de changement de fonctions vers un groupe supérieur. Ce recours gracieux a été implicitement rejeté. Par une décision du 26 mai 2020, l'administration a rattaché ses fonctions au groupe n°2 à compter du 1er janvier 2019.
2. Par un jugement du 12 janvier 2023, le tribunal administratif de Paris a, à la demande de M. Randriambao, annulé le rejet de sa demande tendant au bénéfice du RIFSEEP au titre des fonctions qu'il avait exercées entre le 1er juillet 2018 et 31 octobre 2018, la décision du 26 mai 2020, en tant qu'elle prend effet, non le 1er novembre 2018, mais le 1er janvier 2019, et le rejet de sa demande tendant à la revalorisation prévue par le point 4.1.1 de la circulaire du 3 juillet 2019. Le garde des sceaux, ministre de la justice fait régulièrement appel de ce jugement.
3. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret. / Des arrêtés du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé fixent, après avis du comité technique compétent ou du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, la liste des corps et emplois bénéficiant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, le cas échéant, du complément indemnitaire annuel mentionné à l'alinéa précédent (...) ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. / Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. / Ce même arrêté fixe les montants minimaux par grade et statut d'emplois, les montants maximaux afférents à chaque groupe de fonctions et les montants maximaux applicables aux agents logés par nécessité de service. / Le versement de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est mensuel. " Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : 1° En cas de changement de fonctions ; / 2° Au moins tous les quatre ans, en l'absence de changement de fonctions et au vu de l'expérience acquise par l'agent ; / 3° En cas de changement de grade à la suite d'une promotion. " Par un arrêté conjoint du 17 décembre 2018, entré en vigueur le 1er juillet 2018, le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de l'action et des comptes publics et le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'action et des comptes publics ont fixé à trois le nombre de groupes de fonctions dans lesquels doivent être classés les greffiers des services judiciaires, les plafonds annuels de l'IFSE afférents à chacun de ces trois groupes, ainsi que les montants minimaux annuels de l'indemnité pour chacun des deux grades de ce corps. Par une circulaire du 3 juillet 2019, le garde des sceaux, ministre de la justice a fixé les modalités de gestion du régime indemnitaire pour le corps des directeurs des services de greffe judiciaires et le corps des greffiers des services judiciaires, en précisant que cette circulaire entrait en vigueur le 1er janvier 2019.
4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des échanges de courriers électroniques du 4 décembre 2019, intitulés " Notification individuelle du groupe de fonctions RIFSEEP - Greffiers ", invitant M. Randriambao à se présenter au bureau compétent, que la décision qui a alors été portée verbalement à sa connaissance, avait pour objet le rattachement de ses fonctions au groupe n°3 du corps des greffiers des services judiciaires. Il ressort pareillement de la décision du 26 mai 2020, présentée sous la forme d'un tableau intitulé " Notification individuelle du groupe de fonctions RIFSEEP ", que cette décision avait pour objet le rattachement de ses fonctions au groupe n°2 de ce corps. Si cette seconde décision a précisé que le rattachement prenait effet à compter du 1er janvier 2019, elle s'est ainsi bornée à rappeler cette date qui ne résulte que des prescriptions de la circulaire du 3 juillet 2019, mentionnée ci-dessus. Le moyen tiré d'une irrégularité affectant le choix de cette date au regard de l'arrêté du 17 décembre 2018, était donc inopérant à l'encontre des décisions individuelles en litige qui se sont bornées à classer les fonctions de M. Randriambao dans un groupe de fonctions. Par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que le tribunal administratif ne pouvait se fonder sur ce moyen pour annuler les décisions en litige.
5. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Randriambao devant le tribunal administratif.
6. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, M. Randriambao n'est pas fondé à soutenir que ses fonctions auraient dû être rattachées au groupe n°3 du 1er juillet au 31 octobre 2018, et au groupe n°2 du 1er novembre au 31 décembre 2018, et que, compte tenu de l'élargissement de ses fonctions à compter du 1er novembre 2018, il pourrait prétendre à la revalorisation prévue par le point 4.1.1 de la circulaire du 3 juillet 2019.
7. De plus, M. Randriambao qui ne conteste pas le rattachement de ses fonctions au groupe n° 2 à compter du 1er janvier 2019, ne peut utilement se plaindre de ce que la décision du 26 mai 2020 n'ait pas été signée, et de ce qu'elle aurait été prise en méconnaissance de la procédure de réexamen de l'IFSE, prévue par la circulaire du 3 juillet 2019.
8. Il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de M. Randriambao.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 2006879/5-2 du tribunal administratif de Paris du 12 janvier 2023 sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. Randriambao devant le tribunal administratif de Paris, accueillies par les articles 2 et 3 du jugement mentionné ci-dessus, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. A... Randriambao.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Bonifacj, présidente de chambre,
M. Niollet, président-assesseur,
Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 mars 2025
Le rapporteur,
J-C. NIOLLETLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA01072