Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2022 par lequel le préfet de police a prononcé son expulsion du territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle est légalement admissible.
Par un jugement n° 2224986 du 13 avril 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés les 12 octobre 2023 et 31 janvier 2025, Mme C..., représentée par Me Dose, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une " carte de résident " portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :
- la décision d'expulsion est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 7, paragraphe 4, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que l'exposante remplit les conditions pour séjourner régulièrement en France et obtenir le renouvellement de sa carte de résident ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision d'expulsion ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Par une décision du 7 août 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Velasco, substituant Me Dose, avocate de Mme C..., et celles de Mme C....
Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 mars 2025, présentée pour Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante nigériane, née le 28 juin 1974 et entrée en France, selon ses déclarations, au mois de décembre 2010, fait appel du jugement du 13 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2022 du préfet de police prononçant son expulsion du territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout pays où elle est légalement admissible.
Sur la légalité de la décision d'expulsion :
2. En premier lieu, la décision d'expulsion contestée, qui vise, notamment, l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne, outre l'identité et la nationalité de Mme C..., les faits délictueux qu'elle a commis entre 2015 et 2016, notamment les faits de traite d'êtres humains et de proxénétisme aggravé, ainsi que l'arrêt du 24 novembre 2020 de la cour d'appel de Paris confirmant sa condamnation à une peine de 6 ans d'emprisonnement ferme. Elle se réfère également à l'avis du 17 mai 2022 de la commission d'expulsion, lequel fait état, en particulier, de sa situation personnelle et familiale. Elle indique également qu'en raison de son comportement et de l'absence d'atteinte manifestement disproportionnée à sa vie privée et familiale, sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public. Ainsi, cette décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, et est, par suite, suffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, il ne ressort ni de cette motivation, ni d'aucune autre pièce du dossier qu'avant de prononcer l'expulsion de Mme C... du territoire français, le préfet de police se serait uniquement fondé sur les infractions pénales commises par l'intéressée et aurait, afin d'apprécier si sa présence sur le territoire était de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public, omis de procéder à un examen particulier de l'ensemble des circonstances de l'affaire et, en particulier, du comportement de l'intéressée ainsi que de sa situation personnelle et familiale. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée de ce chef cette décision doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 ".
5. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.
6. Il est constant que Mme C... s'est rendue coupable, entre le 1er janvier 2015 et le 13 septembre 2016, de faits d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier d'étrangers en France, en bande organisée, de faits de traite d'êtres humains, commis à l'égard de plusieurs personnes et à l'égard de personnes hors du territoire de la République, de faits de proxénétisme aggravé, commis à l'égard de plusieurs personnes, à l'égard de personnes incitées à se livrer à la prostitution à leur arrivée sur le territoire de la République et avec l'emploi de la contrainte, de violences ou de manœuvres dolosives, et de faits de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de 10 ans d'emprisonnement. En l'occurrence, dans le cadre d'un réseau nigérian de traite d'êtres humains à des fins d'exploitation sexuelle, l'intéressée a en particulier, durant la période en cause, recruté plusieurs jeunes femmes nigérianes en s'assurant de leur acheminement en France ou en facilitant leur entrée ou leur séjour irrégulier sur le territoire en vue de les contraindre à la prostitution et a été leur proxénète, en les contraignant à se prostituer et à lui remettre leurs gains. Ces faits lui ont valu d'être condamnée à une peine de 6 ans d'emprisonnement ferme par un jugement correctionnel du 7 décembre 2018 du tribunal de grande instance de Paris, confirmée par un arrêt du 24 novembre 2020 de la cour d'appel de Paris. Dans cette affaire, Mme C... a été placée en détention provisoire à compter du 16 septembre 2016, puis sous contrôle judiciaire à partir du 20 mars 2018, avant d'être incarcérée du 7 décembre 2018 au 11 mars 2021, date à laquelle elle a bénéficié d'une libération conditionnelle jusqu'au 21 avril 2022. Dans son arrêt du 24 novembre 2020, le juge pénal a, notamment, considéré que l'intéressée avait choisi délibérément d'exploiter sexuellement plusieurs compatriotes " dont la misère dans leur pays natal les [a] conduites à accepter de venir en France " où elles ont été contraintes de se prostituer et qu'elle a ainsi tiré profit de la prostitution de plusieurs jeunes filles, certaines " appartenant " à d'autres " mamas ", notamment en les hébergeant à son domicile, ces dernières devant payer leur nourriture et le loyer. Le juge pénal a également mis en exergue les circonstances que " les faits s'inscrivant dans une criminalité organisée sont particulièrement graves en ce qu'ils portent une atteinte considérable à l'ordre public et à la dignité humaine et génèrent une économie souterraine importante ".
7. Si Mme C... soutient que les faits qui lui sont reprochés sont anciens, qu'elle n'a eu aucun comportement répréhensible depuis l'année 2016 et que la condamnation dont elle a fait l'objet est la seule inscrite à son casier judiciaire, l'intéressée, qui a, entre 2016 et 2022, été placée en détention provisoire, puis sous contrôle judiciaire, avant d'être condamnée et incarcérée entre 2018 et 2021 et de bénéficier d'une libération conditionnelle jusqu'au 21 avril 2022, ne présente pas de gages avérés et sérieux de distanciation ou de remise en cause par rapport aux faits dont elle s'est rendue coupable sur une période conséquente, entre les mois de janvier 2015 et septembre 2016, ainsi qu'à leur extrême gravité. A cet égard, la requérante ne livre aucune explication étayée, ni ne fait montre d'une réelle distanciation quant aux raisons, circonstances et conséquences de ses agissements ayant porté aux victimes en cause une atteinte grave à leurs droits humains et, en particulier, à leur dignité. De même, si elle se prévaut d'un accompagnement par l'association " Tamaris ", association dissoute en 2021, depuis l'année 2013, alors qu'elle se serait elle-même prostituée en France depuis l'année 2010, un tel accompagnement, justifié par différentes attestations, n'a nullement fait obstacle à la commission des faits entre 2015 et 2016, notamment de traite d'êtres humains et de proxénétisme aggravé, pour lesquels elle a été condamnée à une peine de 6 ans d'emprisonnement ferme. En outre, ni la circonstance que l'intéressée a suivi des cours de français et travaillé durant sa détention provisoire entre 2017 et 2018 ou qu'elle a, en détention, eu un bon comportement et bénéficié d'un accompagnement associatif, ni le fait que, par son arrêt du 24 novembre 2020, la cour d'appel de Paris a infirmé la peine d'interdiction définitive du territoire français prononcée à son encontre en première instance, en estimant " réelles ses capacités d'insertion socio-professionnelle ", ni le fait qu'elle a bénéficié, le 5 mars 2021, d'une mesure de libération conditionnelle, assortie, au demeurant, d'une prolongation d'un an des mesures d'accompagnement, ne sauraient suffire à constituer des garanties avérées et suffisantes de distanciation, de non-réitération et de réinsertion. En particulier, à la date de la décision contestée, soit le 27 juillet 2022, Mme C... ne justifie pas d'une insertion sociale et professionnelle stable et ancienne en France avant ou entre ses périodes de détention, ni d'une réinsertion professionnelle significative après sa sortie de prison. A cet égard, si la requérante déclare être entrée en France en 2010, sans en justifier, et avoir déposé une plainte, en 2014, contre des membres du réseau qui l'auraient fait venir en France pour se prostituer, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette plainte aurait eu des suites judiciaires. De même, sa demande de titre de séjour présentée en 2016 sur le fondement des dispositions de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, qui lui a permis de se voir délivrer un récépissé de demande de carte de séjour valable à compter du 16 mars 2016 et renouvelé jusqu'au 11 décembre 2016, n'a pas davantage eu de suites. De surcroît, si ce récépissé lui a permis de travailler, de mars à septembre 2016, en qualité d'" agent de service " à temps très partiel, l'intéressée a continué de commettre, durant cette période, les faits qui lui sont reprochés, notamment ceux de traite d'êtres humains et de proxénétisme aggravé. De plus, durant son contrôle judiciaire en 2018, l'intéressée ne justifie avoir travaillé que durant le mois d'octobre 2018 en qualité d'" agent de service ", de nouveau à temps très partiel. En outre, depuis sa sortie de prison le 11 mars 2021 et jusqu'à la date de la décision attaquée du 27 juillet 2022, Mme C... n'établit pas avoir exercé une activité professionnelle et se borne à produire une promesse d'embauche du 16 mai 2022 en qualité d'" aide à domicile " auprès de l'association " la vie à domicile ", sans justifier de ses conditions d'existence durant cette période de plus d'un an. Enfin, si la requérante produit en dernier lieu des bulletins de salaire pour une activité d'" emploi familial ", à temps partiel, auprès de différents employeurs entre les mois de novembre 2022 et décembre 2024, ces éléments, postérieurs à la décision attaquée, sont sans incidence sur sa légalité qui s'apprécie à la date de son édiction.
8. Il suit de là que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la nature et de la gravité des faits qui sont reprochés à Mme C... et en l'absence de garanties sérieuses et suffisantes de distanciation, de non réitération et de réinsertion, le préfet de police, en estimant, par son arrêté du 27 juillet 2022 et en dépit de l'avis défavorable de la commission d'expulsion en date du 17 mai 2022, que sa présence en France constituait une menace grave pour l'ordre public et, en conséquence, en prononçant son expulsion du territoire français, n'a commis aucune erreur de droit, ni fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
10. A supposer que Mme C... doive être regardée comme établissant l'ancienneté et la continuité de son séjour en France depuis le mois de décembre 2010, la requérante ne justifie ni d'une vie familiale, ni d'une insertion sociale et professionnelle stable et ancienne en France. En particulier, si elle fait valoir, en dernier lieu, que sa fille B..., née le 12 mai 2001 à Lagos, séjourne en France sous couvert d'une carte de séjour pluriannuelle, la requérante, qui se déclare originaire de Bénin City, n'a jamais fait état devant l'autorité préfectorale ou devant la commission d'expulsion, ni en première instance, de cette présence, ni de l'existence de cette enfant, l'intéressée ayant déclaré être mère de quatre enfants nés respectivement en 1992, 1995, 1998 et 2004 et résidant au Nigéria. De plus, elle ne démontre pas, notamment par la production d'un acte d'état civil, le lien de parenté avec cette personne qu'elle présente comme étant sa fille. En outre la requérante n'établit, ni n'allègue sérieusement aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'elle poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, au Nigéria où résident sa mère, sa fratrie et ses enfants et où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans, de sorte qu'elle y dispose d'attaches personnelles et familiales au moins aussi fortes qu'en France. Enfin, son comportement justifiait légalement, ainsi qu'il a été dit aux points 6 à 8, qu'elle soit expulsée du territoire français en application des dispositions de l'article L. 631-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision d'expulsion attaquée n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
11. En dernier lieu, la décision en litige, qui ne constitue pas, ni ne révèle un refus de renouvellement de titre de séjour opposé à Mme C... qui n'a jamais été titulaire d'un titre de séjour, n'a pas été prise sur le fondement des dispositions de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la requérante ne peut se prévaloir utilement de ces dispositions à l'encontre de la décision d'expulsion en litige. De même, cette mesure d'expulsion n'a pas été édictée sur le fondement des dispositions transposant la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Par suite, la requérante ne peut, en tout état de cause, se prévaloir utilement des dispositions de l'article 7, paragraphe 4, de cette directive à l'encontre de la décision d'expulsion contestée.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
12. D'une part, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision d'expulsion en litige, ne peut qu'être écarté.
13. D'autre part, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes des stipulations de cet article 3 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
14. Mme C..., qui se prévaut de plusieurs décisions de la Cour nationale du droit d'asile portant sur les craintes en cas de retour au Nigéria de femmes victimes de traite d'êtres humains à des fins d'exploitation sexuelle, soutient qu'elle encourt des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine par les membres du réseau de traite dont elle a été victime et qu'elle a dénoncés ainsi que par des membres de sa famille qui lui reprochent de ne plus subvenir à leurs besoins. Toutefois, la requérante, qui n'a, au demeurant, jamais sollicité l'asile, ne fournit aucun développement suffisamment circonstancié, vraisemblable et crédible sur les modalités de son recrutement au Nigéria, à l'âge de 36 ans, par un réseau de prostitution, sur l'organisation et les modalités de son départ pour l'Europe et sur ses activités prostitutionnelles sur le territoire français. De même, elle ne livre pas d'informations étayées et tangibles sur les raisons et les circonstances selon lesquelles elle se serait soustraite à l'emprise du réseau qu'elle évoque à une date qu'elle ne précise pas. A cet égard, ainsi qu'il a été dit au point 7, si elle déclare avoir déposé une plainte, en 2014, contre des membres de ce réseau, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette plainte aurait eu des suites judiciaires. De même, sa demande de titre de séjour présentée en 2016 sur le fondement des dispositions de l'article L. 316-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable, n'a eu aucune suite. En tout état de cause, la requérante n'apporte aucune précision, ni aucun élément probant sur d'éventuelles menaces qui auraient été proférées à son encontre, ou à l'encontre de sa famille, par des membres de ce réseau, alors que, de surcroît, l'intéressée a eu, entre 2015 et 2016, une activité de proxénète, sans même alléguer avoir été contrainte d'effectuer une telle activité. Par ailleurs, si Mme C... produit un constat dressé le 16 janvier 2023 par un commissaire de justice, constatant sur le téléphone portable de l'intéressée la présence de trois messages à caractère menaçant, notamment à l'égard de ses enfants, qui auraient été laissés par son frère, prénommé " Miracle ", le 4 mars 2022, un tel document ne revêt aucun caractère probant en l'absence de tout développement circonstancié et convaincant et de tout autre élément probant sur les menaces dont Mme C... pourrait faire l'objet en cas de retour dans son pays de la part de membres de sa famille, la requérante n'apportant aucune précision suffisante et crédible sur les circonstances de ces menaces proférées par son frère, ni n'alléguant que de telles menaces auraient été réitérées ou même mises à exécution. Ainsi, Mme C... n'apporte aucun élément sérieux et convaincant permettant de considérer qu'elle encourrait dans le cas d'un retour dans son pays d'origine, de manière suffisamment personnelle, certaine et actuelle, des menaces quant à sa vie ou sa personne ou des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, en décidant que l'intéressée pourra être éloigné d'office à destination du Nigéria, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations et les dispositions précitées.
15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des frais de l'instance ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 6 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 mars 2025.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGESLa greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA04312