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12/03/2025 | FRANCE | N°24PA02001

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 3ème chambre, 12 mars 2025, 24PA02001


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société BSREC 2 a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

23 juin 2016 par lequel la maire de Paris a autorisé la société Leroy Merlin France à installer une enseigne parallèle lumineuse et deux enseignes perpendiculaires non lumineuses sur la façade de l'immeuble situé au 25/27 place de la Madeleine et une enseigne perpendiculaire non lumineuse au 7 rue Castellane, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'annul

er la décision implicite par laquelle la maire de Paris a refusé d'ordonner l'enlèvement de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BSREC 2 a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

23 juin 2016 par lequel la maire de Paris a autorisé la société Leroy Merlin France à installer une enseigne parallèle lumineuse et deux enseignes perpendiculaires non lumineuses sur la façade de l'immeuble situé au 25/27 place de la Madeleine et une enseigne perpendiculaire non lumineuse au 7 rue Castellane, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de Paris a refusé d'ordonner l'enlèvement de l'enseigne parallèle située sur la façade de l'immeuble du 25/27 place de la Madeleine, sur le fondement de l'article L. 581-27 du code de l'environnement, d'enjoindre à la maire de Paris d'ordonner l'enlèvement de l'enseigne parallèle non lumineuse sur la façade de l'immeuble situé au 25/27 place de la Madeleine et la remise en état des lieux dans un délai de 5 jours sous astreinte, pour le contrevenant, de 200 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la Ville de Paris et de la société Leroy Merlin France la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2219867 du 29 février 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 mai 2024 et 10 décembre 2024, la société BSREC 2, représentée par Me Cloëz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 février 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 juin 2016 par lequel la maire de Paris a autorisé la société Leroy Merlin France à installer une enseigne parallèle lumineuse et deux enseignes perpendiculaires non lumineuses sur la façade de l'immeuble situé au 25/27 place de la Madeleine et une enseigne perpendiculaire non lumineuse au 7 rue Castellane, ensemble la décision du 11 septembre 2022 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la maire de Paris d'ordonner l'enlèvement de l'enseigne parallèle lumineuse sur la façade de l'immeuble sis 25/27 place de la madeleine (75008) et de remettre en état les lieux dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la Ville de Paris et de la SA Leroy Merlin France la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce que la version non signée communiquée à la requérante ne permet pas d'établir que la minute dudit jugement comporterait les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience en application de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal a à tort jugé que les dispositifs publicitaires litigieux avaient le caractère d'enseignes au sens de l'article L. 581-3 du code de l'environnement et non de pré-enseignes ;

- les moyens soulevés en première instance sont de nature à justifier l'annulation des décisions attaquées, une fois le jugement annulé pour erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2024, la société Leroy-Merlin France, représentée par M. B..., conclut au rejet de la requête, à titre principal pour irrecevabilité ou à titre subsidiaire comme mal fondée, et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société BSREC2 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable faute d'intérêt à agir de la société requérante dès lors notamment qu'elle ne justifie pas d'un quelconque préjudice en lien avec l'autorisation litigieuse, que celle-ci est antérieure à son acquisition de locaux au 25/27 place de la Madeleine et qu'elle n'est pas propriétaire de la façade du bâtiment A de cet ensemble immobilier, qui est intégrée dans les parties communes ;

- elle n'a pas qualité pour agir au nom de la copropriété ;

- la demande de première instance était tardive dès lors que la requérante avait connaissance des autorisations concernant ces enseignes à tout le moins dès le mois de juin 2021 ;

- les moyens soulevés par la société BSREC 2 ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2024, la Ville de Paris, représentée par M. A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société BSREC 2 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est irrecevable faute d'intérêt à agir de la requérante ;

- cette demande était irrecevable aussi du fait de sa tardiveté ;

- les moyens soulevés par la société BSREC 2 ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 10 décembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 10 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- les conclusions de Mme Dégardin, rapporteure publique,

- les observations de Me Cloëz, représentant la société BSREC 2,

- les observations de Me Gorse, représentant la Ville de Paris,

- et les observations de Me de Cirugeda, représentant la société Leroy-Merlin France.

Une note en délibéré, enregistrée le 5 février 2025, a été présentée pour la société BSREC 2.

Considérant ce qui suit :

1. La société BSREC 2 a acquis le 21 juin 2021 les parties privatives d'un corps de bâtiment situé au 25/27 place de la Madeleine, à usage de bureaux, identifié comme le bâtiment A de l'ensemble immobilier dit " C... ", ainsi que les quatre mille cent quatre-vingt-trois /cent mille soixantièmes (4183 /100060 èmes) des parties communes générales. Celui-ci, placé sous le régime de la copropriété, comprend en outre trois autres bâtiments, dont un bâtiment B situé en cœur d'ilôt qui abrite un magasin exploité par la société Leroy Merlin France sous l'enseigne Leroy Merlin, ainsi qu'un bâtiment C donnant sur le 11 rue Tronchet et un bâtiment D donnant sur le 7 rue de Castellane. Par arrêté du 23 juin 2016 la maire de Paris a, à la demande de la société Leroy-Merlin, autorisé l'implantation sur la façade du bâtiment A, situé au 25/27 place de la Madeleine, d'une enseigne lumineuse parallèle à la façade et de deux enseignes perpendiculaires non lumineuses signalant le local exploité par Leroy-Merlin en cœur d'îlot. Le 21 mars 2022, la société BSREC 2 a demandé à la maire de Paris de lui communiquer cet arrêté, qui lui a été transmis le 11 mai 2022. Par un courrier du 8 juillet 2022, elle a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision et a demandé à la maire de Paris d'enjoindre à la société Leroy Merlin France de déposer l'enseigne parallèle lumineuse, sur le fondement de l'article L. 581-27 du code de l'environnement. Dans le silence de la maire de Paris une décision implicite de rejet de cette demande a été formée, et la société BSREC 2 a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande que celui-ci a interprétée comme tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juin 2016, en tant qu'il autorise l'installation d'enseignes, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux, ainsi qu'à l'annulation de la décision implicite par laquelle la maire de Paris a rejeté la demande de la requérante du 8 juillet 2022 et refusé d'enjoindre à la société Leroy Merlin France de retirer l'enseigne lumineuse parallèle. Le tribunal a rejeté cette demande par un jugement du

29 février 2024 dont la société BSREC 2 relève dès lors appel.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par la présidente de la formation de jugement, le rapporteur et la greffière d'audience en application de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite la seule circonstance que la copie de ce jugement notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité dudit jugement.

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

3. Aux termes de l'article L. 581-3 du code de l'environnement : " Au sens du présent chapitre : / 1° Constitue une publicité, à l'exclusion des enseignes et des préenseignes, toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilées à des publicités ; / 2° Constitue une enseigne toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à une activité qui s'y exerce ;/3° Constitue une préenseigne toute inscription, forme ou image indiquant la proximité d'un immeuble où s'exerce une activité déterminée ". Selon l'article

L. 581-19 du même code, les préenseignes sont soumises aux dispositions qui régissent la publicité.

4. Il résulte de ces dispositions que ne peut recevoir la qualification d'enseigne que l'inscription, forme ou image apposée sur la façade ou devanture du lieu même où s'exerce l'activité, tandis que doit être regardée comme une préenseigne toute inscription, forme ou image qui, se dissociant matériellement du lieu de l'activité, indique sa proximité à l'attention du public.

5. Ainsi que l'ont à juste titre relevé les premiers juges, le local dans lequel la société Leroy Merlin exerce son activité est situé sur la même parcelle cadastrale n° 0122 que le bâtiment A, l'ensemble immobilier relève dans sa globalité du statut de la copropriété, et les façades, dont celles du bâtiment A sur lesquelles ont été autorisés les dispositifs en litige, constituent des parties communes. Ainsi la totalité de cet ensemble immobilier constitue un même immeuble au sens des dispositions précitées. De plus si la société requérante fait valoir que le local commercial exploité par la société Leroy Merlin, qui occupe le bâtiment B de l'ensemble immobilier dénommé " C... ", n'a pas d'accès direct sur la place de la Madeleine, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'il n'en a pas davantage sur la rue Tronchet et la rue de Castellane, et, d'autre part, que l'accès principal à ce local commercial se fait par le porche situé au 25 place de la Madeleine, à partir duquel il est visible, qui donne directement sur la cour dans laquelle sont exposés des pots de fleurs et arbustes commercialisés par la société Leroy Merlin devant son local de vente, et qu'ainsi ce porche constitue son entrée principale, peu important que le local de la société Leroy Merlin soit en contrebas par rapport au niveau de la voirie comme le fait valoir la requérante ; le caractère d'entrée principale de ce porche résulte également de ce que l'adresse du local telle que figurant sur les réseaux sociaux, laquelle a nécessairement pour objet d'indiquer à la clientèle éventuelle l'adresse principale d'accès du local, est le 25 place de la Madeleine. Enfin, le constat d'huissier produit devant le tribunal et établi à la demande de la société requérante, s'il constate certes l'existence de deux accès au local de la société Leroy Merlin au 11 rue Tronchet et au 8 rue Castellane, relève néanmoins, à propos du bâtiment A sis 25/27 place de la Madeleine et sur lequel sont implantés les dispositifs litigieux, que " l'accès à l'immeuble s'effectue entre l'accès au magasin Leroy-Merlin et l'accès au parking livraison de ce dernier ", attestant ainsi du caractère d'entrée principale de cet accès. Par suite c'est à juste titre que le tribunal a jugé qu'en qualifiant les dispositifs en cause d'enseignes, la maire de Paris n'avait pas méconnu l'article L. 581-3 du code de l'environnement et, dès lors, que la requérante ne pouvait utilement invoquer la méconnaissance de l'article PE.2.1 du règlement local de publicité, qui ne s'applique qu'aux pré enseignes.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société BSREC 2 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en première instance et en appel. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.

Sur les conclusions relatives aux frais d'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Ville de Paris et de la société Leroy Merlin, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme que la société BSREC 2 demande au titre des frais de l'instance. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société BSREC 2 une somme de 1 500 euros à verser d'une part à la Ville de Paris et d'autre part à la société Leroy Merlin France sur le fondement des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société BSREC 2 est rejetée.

Article 2 : La société BSREC 2 versera à la Ville de Paris d'une part et à la société Leroy Merlin France d'autre part une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société BSREC 2, à la Ville de Paris et à la société Leroy Merlin France.

Délibéré après l'audience du 4 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Delage, président de chambre,

- Mme Julliard, présidente assesseure,

- Mme Labetoulle, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2025.

La rapporteure,

M-I. LABETOULLE Le président,

P. DELAGE

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile de France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA02001


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02001
Date de la décision : 12/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DELAGE
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : LPA CGR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-12;24pa02001 ?
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