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20/11/2024 | FRANCE | N°23PA05393

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 20 novembre 2024, 23PA05393


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 avril 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2315970/1-2 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2023, M. A..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 avril 2023 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2315970/1-2 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Partouche-Kohana, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2315970/1-2 du 3 octobre 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement contenues dans l'arrêté du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Partouche-Kohana, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que son conseil renonce au bénéfice de la somme versée au titre de l'aide juridictionnelle ou, dans l'hypothèse d'un rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement n'est pas suffisamment motivé ;

- la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation par le préfet ;

- elle aurait dû être précédée de la saisine de la commission du titre de séjour en application des articles L. 435-1 et L. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par une ordonnance du 4 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 août 2024 à 12 heures.

Un mémoire a été enregistré le 25 octobre 2024, présenté après clôture par le préfet de police, qui n'a pas été communiqué.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 28 novembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- et les observations de Me Partouche-Kohana pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 19 septembre 1988, est entré en France en 2007 selon ses déclarations. Le 5 septembre 2022, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi et des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 4 avril 2023, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. A... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé. Toutefois, le moyen tel qu'il est formulé, en ce qu'il met en cause l'insuffisante prise en considération par le tribunal de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français et de son respect de l'ordre public, relève du bien-fondé du jugement et est, par suite, sans incidence sur sa régularité. En tout état de cause le jugement attaqué, qui n'était pas tenu de faire mention de l'ensemble des éléments versés au dossier et des arguments de l'intéressé est suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. En premier lieu, M. A... reprend en appel, sans apporter d'éléments de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour et du défaut d'examen de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué.

4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) ". Aux termes de l'article 3 de cet accord : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".

6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ".

8. Il résulte des dispositions citées au point précédent et des stipulations citées au point 4 du présent arrêt que la première délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " à un ressortissant marocain est subordonnée à la production d'un visa de long séjour.

9. En l'espèce, il est constant que M. A... ne justifie pas d'un tel visa et qu'ainsi il ne remplit pas les conditions fixées par l'article 3 de l'accord franco-marocain pour se voir délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ". Dès lors, le préfet de police a pu, pour ce seul motif, refuser de faire droit à sa demande de titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain.

10. En quatrième lieu, les stipulations de l'accord franco-marocain n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.

11. Si M. A... soutient résider de manière continue en France depuis 2007, il n'établit toutefois pas la continuité de son séjour à compter de cette date par les seules pièces qu'il produit, notamment, pour les années 2014 à 2017, des factures d'électricité établies à son nom mais également au nom de son père qui déclare l'héberger, plusieurs reçus de mandats de transfert de fonds ou encore des avis d'imposition non renseignés s'agissant du montant des revenus perçus, ainsi que différents documents médicaux datés du mois de décembre 2017. En outre, pour l'année 2018, les pièces produites concernent le seul mois de janvier, à l'exception de l'attestation d'hébergement de son père qui n'est pas suffisante pour établir la continuité du séjour de l'intéressé. Il ne ressort, par ailleurs, d'aucune des pièces du dossier que le requérant, célibataire et sans charge de famille en France, serait isolé en cas de retour dans son pays d'origine, certains mandats envoyés par lui au Maroc étant, au demeurant, qualifiés par lui " d'aide familiale ". Les mêmes pièces ne permettent en outre pas d'établir qu'il aurait tissé sur le territoire français des liens d'une particulière intensité et stabilité. Enfin, s'il ressort des pièces du dossier que M. A... travaille en France en qualité de carrossier depuis juin 2020, le requérant ne justifie pas, pour autant, de motifs exceptionnels justifiant la mise en œuvre, par le préfet, de son pouvoir de régularisation.

12. En cinquième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 11 du présent arrêt, la situation personnelle et familiale du requérant ne permet pas de caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce moyen doit, dès lors, être écarté.

13. En sixième lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 11 et 12 du présent arrêt, la décision portant refus de séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

14. En dernier lieu, M. A... ne justifiant pas, ainsi qu'il a été dit la continuité de son séjour en France à compter d'avril 2013, notamment entre 2014 et 2018, le préfet n'était pas tenu, avant de statuer sur sa demande, de saisir la commission du titre de séjour. Par suite, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. Pour les mêmes motifs qu'aux points 11 à 13, la décision contestée n'est pas entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

16. Il résulte de ce qui a été dit au point 15 que le moyen soulevé à l'encontre de la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est pas fondé. Ce dernier ne peut dès lors se prévaloir de l'illégalité de cette décision. Le moyen tiré, par voie de conséquence, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit ainsi être écarté.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation des décisions portant refus de délivrance de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 4 avril 2023 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2024.

La rapporteure,

M-D. JAYERLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA05393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05393
Date de la décision : 20/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : PARTOUCHE-KOHANA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-20;23pa05393 ?
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