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31/10/2024 | FRANCE | N°23PA03559

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 4ème chambre, 31 octobre 2024, 23PA03559


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 14 septembre 2022 par laquelle la commission de l'académie de Créteil devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille a confirmé la décision du

29 août 2022 par laquelle la directrice académique des services de l'éducation nationale de Seine-et-Marne a rejeté sa demand

e d'autorisation d'instruire dans la famille son fils C....



Par un jugement n° 221...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 14 septembre 2022 par laquelle la commission de l'académie de Créteil devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille a confirmé la décision du

29 août 2022 par laquelle la directrice académique des services de l'éducation nationale de Seine-et-Marne a rejeté sa demande d'autorisation d'instruire dans la famille son fils C....

Par un jugement n° 2210052 du 9 juin 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2023, Mme B..., représentée par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 14 septembre 2022 ainsi que celle, en tant que de besoin, du 29 août 2022 ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Créteil de lui délivrer l'autorisation d'instruction dans la famille demandée ou, à défaut, de réexaminer sa demande à la lumière de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en raison de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation dont il est entaché au regard des articles L. 131-5 et L. 131-10 du code de l'éducation, ainsi que du IV. de l'article 49 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République ;

- la décision attaquée du 14 septembre 2022 est entachée d'incompétence de son auteur ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en ce que l'élève n'a pas fait l'objet, après un premier contrôle ayant conclu à des résultats insuffisants, d'un second contrôle et en ce qu'elle n'a pas été, en qualité de titulaire de l'autorisation d'instruire en famille, informée au préalable des insuffisances relevées ;

- la décision est également entachée d'erreur de droit dès lors que l'autorisation était en tout état de cause fondée au regard du 1° ou du 4° du quatrième alinéa de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, relatifs à l'état de santé de l'enfant ou à l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ;

- l'enfant suit un enseignement avec le centre national d'enseignement à distance (CNED) lui permettant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation.

Par un mémoire, enregistré le 25 octobre 2023, la rectrice de l'académie de Créteil conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au

4 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mantz,

- et les conclusions de Mme Lipsos, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'enfant C... B..., né en 2008, a été instruit en famille au titre de l'année scolaire 2021-2022. Mme B..., sa mère, a sollicité, par une demande du 29 avril 2022, réceptionnée le 3 mai 2022, l'autorisation d'instruction dans la famille de son fils C... au titre de l'année scolaire 2022-2023. Par une décision du 14 septembre 2022 prise après recours administratif préalable obligatoire, la commission académique du rectorat de Créteil a rejeté le recours de Mme B... contre la décision du 29 août 2022 par laquelle le recteur de l'académie de Créteil a rejeté sa demande d'autorisation précitée. Mme B... relève appel du jugement du 9 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 septembre 2022.

Sur la régularité du jugement :

2. Les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation commises par le tribunal administratif de Melun au regard des articles L. 131-5 et L. 131-10 du code de l'éducation, ainsi que du IV de l'article 49 de la loi du 24 août 2021, relèvent du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la cadre juridique applicable :

3. D'une part, l'article L. 131-2 du code de l'éducation, modifié par l'article 49 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, soumet l'instruction en famille à un régime d'autorisation préalable à compter du 1er septembre 2022. Les conditions permettant la délivrance de cette autorisation d'instruction en famille sont précisées à l'article L. 131-5 du même code, aux termes duquel : " Les personnes responsables d'un enfant soumis à l'obligation scolaire définie à l'article L. 131-1 doivent le faire inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé ou bien, à condition d'y avoir été autorisées par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, lui donner l'instruction en famille. / (...) / La présente obligation s'applique à compter de la rentrée scolaire de l'année civile où l'enfant atteint l'âge de trois ans. / L'autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant : 1° L'état de santé de l'enfant ou son handicap ; 2° La pratique d'activités sportives ou artistiques intensives ; 3° L'itinérance de la famille en France ou l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public ; 4° L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille. / L'autorisation mentionnée au premier alinéa est accordée pour une durée qui ne peut excéder l'année scolaire. Elle peut être accordée pour une durée supérieure lorsqu'elle est justifiée par l'un des motifs prévus au 1°. Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités de délivrance de cette autorisation. / L'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation peut convoquer l'enfant, ses responsables et, le cas échéant, les personnes chargées d'instruire l'enfant à un entretien afin d'apprécier la situation de l'enfant et de sa famille et de vérifier leur capacité à assurer l'instruction en famille (...) ".

4. Pour la mise en œuvre de ces dispositions, dont il résulte que les enfants soumis à l'obligation scolaire sont, en principe, instruits dans un établissement d'enseignement public ou privé, il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce que l'instruction d'un enfant dans la famille soit, à titre dérogatoire, autorisée, de rechercher, au vu de la situation de cet enfant, quels sont les avantages et les inconvénients pour lui de son instruction, d'une part dans un établissement d'enseignement, d'autre part, dans la famille selon les modalités exposées par la demande et, à l'issue de cet examen, de retenir la forme d'instruction la plus conforme à son intérêt. Toutefois, le IV de l'article 49 de la loi du 24 août 2021 a prévu que, par dérogation, l'autorisation d'instruction dans la famille serait accordée de plein droit, pour les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024, aux enfants régulièrement instruits dans la famille au cours de l'année scolaire 2021-2022 et pour lesquels les résultats du contrôle organisé en application du troisième alinéa de l'article L. 131-10 du code de l'éducation ont été jugés satisfaisants.

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 131-10 du code de l'éducation, dans sa version applicable : " (...) L'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation doit au moins une fois par an, à partir du troisième mois suivant la déclaration d'instruction par les personnes responsables de l'enfant prévue au premier alinéa de l'article L. 131-5, faire vérifier, d'une part, que l'instruction dispensée au même domicile l'est pour les enfants d'une seule famille et, d'autre part, que l'enseignement assuré est conforme au droit de l'enfant à l'instruction tel que défini à l'article L. 131-1-1. A cet effet, ce contrôle permet de s'assurer de l'acquisition progressive par l'enfant de chacun des domaines du socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire. Il est adapté à l'âge de l'enfant et, lorsqu'il présente un handicap ou un trouble de santé invalidant, à ses besoins particuliers. Le contrôle est prescrit par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation selon des modalités qu'elle détermine. Il est organisé en principe au domicile où l'enfant est instruit. / (...) / Les résultats du contrôle sont notifiés aux personnes responsables de l'enfant. Lorsque ces résultats sont jugés insuffisants, les personnes responsables de l'enfant sont informées du délai au terme duquel un second contrôle est prévu et des insuffisances de l'enseignement dispensé auxquelles il convient de remédier. Elles sont également avisées des sanctions dont elles peuvent faire l'objet, au terme de la procédure, en application du premier alinéa de l'article 227-17-1 du code pénal. Si les résultats du second contrôle sont jugés insuffisants, l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation met en demeure les personnes responsables de l'enfant de l'inscrire, dans les quinze jours suivant la notification de cette mise en demeure, dans un établissement d'enseignement scolaire public ou privé et de faire aussitôt connaître au maire, qui en informe l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, l'école ou l'établissement qu'elles auront choisi (...) ".

En ce qui concerne la légalité de la décision du 14 septembre 2022 :

6. En premier lieu, aux termes de l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation, dans sa version applicable : " Toute décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille peut être contestée dans un délai de quinze jours à compter de sa notification écrite par les personnes responsables de l'enfant auprès d'une commission présidée par le recteur d'académie ". Aux termes de l'article D 131-11-11 du même code : " La commission est présidée par le recteur d'académie ou son représentant. (...) ".

7. Par un décret en date du 14 février 2018, M. A... D... a été nommé recteur de l'académie de Créteil. Il était ainsi compétent pour présider la commission académique qui a statué, le 14 septembre 2022, sur la demande d'instruction dans la famille de Mme B... et signer la décision de cette commission. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté.

8. En second lieu, les articles R. 131-12 et suivants du code de l'éducation détaillent les modalités d'organisation des contrôles pédagogiques permettant de s'assurer que les enfants recevant une instruction dans la famille acquièrent progressivement les connaissances et compétences dans chaque domaine de formation du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. L'article R. 131-16-1 du même code dispose ainsi : " Le bilan du contrôle est notifié par lettre recommandée avec accusé de réception aux personnes responsables de l'enfant dans un délai qui ne peut être supérieur à trois mois. Lorsque les résultats du contrôle sont jugés insuffisants, ce bilan : 1° Précise aux personnes responsables de l'enfant les raisons pour lesquelles l'enseignement dispensé ne permet pas l'acquisition progressive par l'enfant de chacun des domaines du socle commun de connaissances, de compétences et de culture ; 2° Rappelle aux personnes responsables de l'enfant qu'elles feront l'objet d'un second contrôle dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois et précise les modalités de ce contrôle, qui ne peut être inopiné (...) ". Et l'article R. 131-16-2 de ce code dispose : " Lorsque les personnes responsables de l'enfant ont été avisées, dans un délai ne pouvant être inférieur à un mois, de la date et du lieu du contrôle et qu'elles estiment qu'un motif légitime fait obstacle à son déroulement, elles en informent sans délai le directeur académique des services de l'éducation nationale qui apprécie le bien-fondé du motif invoqué. Lorsque le motif opposé est légitime, le directeur académique des services de l'éducation nationale en informe les personnes responsables de l'enfant et organise à nouveau le contrôle dans un délai qui ne peut être inférieur à une semaine. Lorsque le motif opposé n'est pas légitime, il informe les personnes responsables de l'enfant du maintien du contrôle. ".

9. Il est constant que le jeune C... B... bénéficiait d'une instruction dans la famille au titre de l'année scolaire 2021-2022. Par suite, sa situation entrait dans le champ d'application du IV de l'article 49 de la loi du 24 août 2021 prévoyant, à titre dérogatoire, une autorisation d'instruction en famille de plein droit pour les années scolaires 2022-2023 et

2023-2024 sous réserve que les résultats du contrôle organisé en application des dispositions précitées de l'article L. 131-10 du code de l'éducation soient jugés satisfaisants. Il ressort des pièces du dossier que les résultats du premier contrôle d'instruction effectué le 9 mars 2022 n'ont pas été jugés satisfaisants, ainsi qu'il résulte de la lettre produite en première instance de la directrice académique des services de l'éducation nationale de Seine-et-Marne du 11 avril 2022 adressée à Mme B..., que cette dernière ne conteste pas avoir reçue, laquelle, tout en soulignant les capacités et les connaissances acquises C..., contenait le descriptif des insuffisances de l'enseignement dispensé et indiquait qu'un second contrôle serait effectué avant la fin de l'année scolaire. Par une lettre du 20 avril 2022, la même autorité a informé

Mme B... que ce second contrôle serait effectué à son domicile le lundi 23 mai 2022 entre

14 heures et 17 heures, pour une durée d'environ une heure. Toutefois, Mme B... a annulé ce dernier rendez-vous par un courriel du 22 mai 2022 envoyé à 22 heures 14 et réceptionné par le service le 23 mai 2022 au matin, au motif d'une suspicion de covid-19. Le second contrôle prévu au cinquième alinéa de l'article L. 313-10 du code de l'éducation n'a ainsi pu avoir lieu du seul fait de Mme B..., sans que cette dernière ne justifie de cette annulation par un certificat médical ou toute autre pièce ou, à tout le moins, fasse connaître à l'administration son intention de convenir d'un nouveau rendez-vous pour ce second contrôle. Par suite, en motivant le rejet du recours administratif préalable obligatoire de Mme B..., d'une part par " les résultats insuffisants lors du premier contrôle de l'instruction en famille au cours de l'année 2021-2022 " et, d'autre part, par " l'absence de la famille lors du second contrôle de l'instruction en famille ", la commission académique doit être regardée comme ayant estimé, à bon droit, que le motif opposé par Mme B... pour annuler le rendez-vous de second contrôle n'était pas légitime au sens de l'article R 131-16-2 du code de l'éducation et qu'elle avait fait obstacle au déroulement du contrôle de l'instruction en famille. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'un vice de procédure en raison de l'absence d'un second contrôle pédagogique, qui lui est imputable, et qu'elle aurait été de ce fait privée d'une garantie.

10. En troisième lieu, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 9, le second contrôle de l'instruction dans la famille du jeune C... B... au titre de l'année scolaire 2021-2022 n'a pu avoir lieu du seul fait de Mme B..., et que les résultats du premier contrôle d'instruction effectué le 9 mars 2022 n'ont pas été jugés satisfaisants, les résultats du contrôle organisé en application du troisième alinéa de l'article L. 131-10 du code de l'éducation ne peuvent être regardés comme satisfaisants. Il en résulte que le recteur de l'académie de Créteil a pu légalement refuser à Mme B... le renouvellement de plein droit de l'autorisation d'instruction dans la famille sur le fondement du IV de l'article 49 de la loi du 24 août 2021 pour les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 131-11 du code de l'éducation : " Les personnes responsables d'un enfant qui sollicitent la délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille dans les conditions prévues par l'article L. 131-5 adressent leur demande au directeur académique des services de l'éducation nationale du département de résidence de l'enfant entre le 1er mars et le 31 mai inclus précédant l'année scolaire au titre de laquelle cette demande est formulée. / La délivrance d'une autorisation peut toutefois être sollicitée en dehors de cette période pour des motifs apparus postérieurement à cette dernière et tenant à l'état de santé de l'enfant (...) ". Aux termes de l'article R. 131-11-2 du même code : " Lorsque la demande d'autorisation est motivée par l'état de santé de l'enfant, elle comprend un certificat médical de moins d'un an sous pli fermé attestant de la pathologie de l'enfant. / (...) Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, le directeur académique des services de l'éducation nationale transmet le certificat médical sous pli fermé au médecin de l'éducation nationale. Celui-ci rend un avis sur cette demande ".

12. Mme B... fait valoir que sa demande d'instruction dans la famille était en tout état de cause fondée au regard des dispositions du 1° du quatrième alinéa de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, relatives à l'état de santé de l'enfant, dès lors que son fils C... souffre d'une phobie des transports et des accidents, à l'origine d'une phobie scolaire. Toutefois, un tel moyen est inopérant dès lors, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation de plein droit d'instruction dans la famille de Mme B... pour son fils C..., en date du 29 avril 2022, n'était pas fondée sur ces dispositions. D'autre part, Mme B... ne peut utilement se prévaloir, aux fins d'établir le bien-fondé de sa demande, d'une évaluation d'un psychologue en date du 1er octobre 2022 ainsi que deux certificats de psychiatres en dates respectives des 23 mars 2023 et 28 juin 2023, lesquels sont postérieurs à la décision attaquée et n'ont pas été soumis pour avis au médecin de l'éducation nationale, la requérante n'ayant pas davantage sollicité la délivrance d'une autorisation en considération de l'état de santé de son fils en dehors de la période visée à l'article R. 131-11 du code de l'éducation, pour des motifs apparus postérieurement à cette dernière.

13. Enfin, les dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation mentionnées au point 2 prévoyant la délivrance par l'administration, à titre dérogatoire, d'une autorisation pour dispenser l'instruction dans la famille en raison de " l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ", telles qu'elles ont été interprétées par la décision n° 2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021, impliquent que l'autorité administrative, saisie d'une telle demande, contrôle que cette demande expose de manière étayée la situation propre à cet enfant motivant, dans son intérêt, le projet d'instruction dans la famille et qu'il est justifié, d'une part, que le projet éducatif comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de cet enfant, d'autre part, de la capacité des personnes chargées de l'instruction de l'enfant à lui permettre d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire.

14. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le projet éducatif présenté par

Mme B... pour son fils C..., à l'appui de sa demande du 29 avril 2022, se limitait à une description sommaire des outils et des appuis pédagogiques dont celui-ci dispose aux fins d'acquérir le socle de connaissances mentionné au point 14, ainsi que de son emploi du temps journalier, en mentionnant une appétence particulière pour la langue anglaise, sans toutefois traduire ces éléments par des objectifs propres à son enfant ni démontrer en quoi les modalités d'instruction souhaitées seraient spécifiquement adaptées à des besoins particuliers qui ne pourraient être satisfaits dans le cadre d'un enseignement collectif. Dans ces conditions, la commission académique, en rejetant le recours administratif préalable que Mme B... avait exercé contre la décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille prise par la directrice académique des services de l'éducation nationale, au motif notamment d'une absence de justification d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L.131-5 du code de l'éducation.

15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... et à la ministre de l'éducation nationale.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bruston, présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme Saint-Macary, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 octobre 2024.

Le rapporteur,

P. MANTZ

La présidente,

S. BRUSTONLa greffière,

E. FERNANDO

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23PA03559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA03559
Date de la décision : 31/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRUSTON
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: Mme LIPSOS
Avocat(s) : S.E.L.A.F.A. CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-31;23pa03559 ?
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