Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2302045 du 23 mai 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 août 2023, M. B..., représenté par Me Mileo, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 17 janvier 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable dès lors qu'il a agi dans le délai d'appel d'un mois, interrompu par la demande d'aide juridictionnelle ;
- la décision portant refus de certificat de résidence est entachée d'un défaut d'examen personnel de sa situation ;
- elle méconnait les stipulations du cinquième paragraphe de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale, par voie de conséquence, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.
La Défenseure des droits, en application des dispositions de l'article 33 de la loi organique du 29 mars 2011 portant création de cette haute autorité, a présenté des observations, enregistrées le 6 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par une décision du 20 juin 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande d'aide juridictionnelle déposée par M. B....
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu ;
- et les observations de Me Moller pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 22 avril 1990 et entré en France le 8 novembre 2016, a sollicité, le 26 août 2021, la délivrance d'un certificat de résidence. Par un arrêté du 17 janvier 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 23 mai 2023, dont M. B... fait appel, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence :
2. En premier lieu, si le requérant reprend en appel son moyen de première instance tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas tenu compte de l'ensemble de éléments qui lui étaient soumis pour refuser de lui délivrer le certificat de résidence sollicité, il ne développe au soutien de ce moyen aucun argument complémentaire et pertinent de nature à remettre en cause l'analyse et la motivation retenues par le tribunal administratif. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 3 de leur jugement.
3. En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".
4. Pour refuser de faire droit à la demande de certificat de résidence de M. B..., le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur le fait que M. B... et sa partenaire de pacte civil de solidarité n'établissaient pas la réalité d'une communauté de vie, ni, par voie de conséquence, que l'intéressé aurait fixé ses intérêts privés et familiaux sur le territoire français.
5. Pour contester cette appréciation, M. B... fait valoir qu'il vit en France de manière habituelle, depuis près de sept ans, qu'il partage sa vie avec Mme C..., ressortissante française, avec laquelle il réside depuis le mois d'octobre 2019, à Sevran, que le couple a conclu un pacte civil de solidarité, le 7 août 2020 et que le préfet ne pouvait lui opposer leur différence d'âge. Certes, M. B... produit des pièces attestant que les intéressés disposent de la même adresse, des captures d'écran de leurs échanges téléphoniques et quelques photos d'une semaine passée ensemble à Pornic. Toutefois, ces éléments ne sauraient suffire à établir la réalité de leur vie commune, alors que Mme C... réside en Corse, et que l'appelant ne fait état d'aucun motif, professionnel notamment, le contraignant à rester dans la région parisienne. Si le préfet relève dans sa décision la différence d'âge séparant les deux intéressés, il n'en a toutefois pas fait l'un des motifs de son refus. Il ressort, en outre, des pièces du dossier, à supposer établie sa présence en France depuis 2016, que l'intéressé n'a déposé sa première demande de titre de séjour qu'en 2021. Celui-ci ne conteste, par ailleurs, pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie où résident ses parents et sa fratrie, et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 26 ans. Enfin, s'il soutient exercer la profession de cariste, il ne l'établit pas en produisant quelques épars bulletins de paie. Dans ces conditions, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne saurait être regardé comme ayant porté une atteinte excessive à la vie privée et familiale de M. B... en refusant de faire droit à sa demande de certificat de résidence. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour qui lui a été opposée, ne peut qu'être écarté.
7. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis en obligeant M. B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, aurait porté une atteinte excessive à son droit à mener une vie privée et familiale normale. .
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête et ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressé au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 24 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2024.
La rapporteure,
L. d'ARGENLIEU
La présidente,
J. BONIFACJ La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 23PA03536