Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... et A... B... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014, et 2015.
Par un jugement n° 1903757 du 21 octobre 2022, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2022 et le 6 mars 2024, M. et Mme B..., représentés par Me Chabane et Me Laurant, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1903757 du 21 octobre 2022 du tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué, qui constitue un arrêt de règlement, est entaché d'erreur de droit ;
- ils n'ont pas reçu la proposition de rectification préalablement à la mise en recouvrement des impositions supplémentaires contestées ;
- la notification par voie dématérialisée de la proposition de rectification méconnait les dispositions de l'article R. 103-1 du livre des procédures fiscales ;
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée en ce qui concerne les rectifications relatives à l'investissement " Scellier " ;
- les réductions d'impôt non encore imputées au 31 décembre 2013 sont reportables sur les années 2014 et 2015 ;
- ils ont droit au bénéfice de la réduction d'impôt au titre des services à la personne pour l'année 2014.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marjanovic ;
- et les conclusions de M. Perroy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un contrôle sur pièces du dossier de M. et Mme B... portant sur les années 2013, 2014 et 2015, l'administration fiscale les a assujettis, au titre de chacune de ces années, à des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales procédant de la remise en cause des réductions d'impôt dont ils se sont prévalus au titre des dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts. Ils relèvent régulièrement appel du jugement du 21 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 5 du code civil : " Il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises ".
3. En estimant que la capture d'écran du rapport généré par l'application " Escale " (échanges de fichiers sécurisés), versée aux débats par l'administration fiscale, était suffisante à rapporter la preuve de la réception par les requérants de la proposition de rectification en date du 20 octobre 2016, les premiers juges n'ont aucunement méconnu les dispositions rappelées au point précédent. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance desdites dispositions ne peut qu'être écarté.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 103-1 de ce même livre : " Les correspondances de toute nature échangées entre les agents de l'administration des impôts ou entre les agents de l'administration des douanes et droits indirects, selon le cas ou adressées par eux aux contribuables doivent être transmises sous enveloppe fermée, en application de l'article L. 103 ".
5. En l'absence de dispositions le lui imposant, il n'est pas fait obligation à l'administration de recourir exclusivement à l'envoi d'une proposition de rectification par lettre recommandée avec accusé de réception. Toutefois, si elle utilise d'autres voies, elle doit justifier de la notification de la proposition de rectification par des modes de preuve offrant des garanties équivalentes.
6. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 20 octobre 2016 a été adressée à M. B... par voie dématérialisée, par le biais d'un lien vers l'application dénommée " Escale " (échanges de fichiers sécurisés), communiqué par la voie d'un courriel envoyé à l'adresse électronique que les contribuables avaient communiquée à l'administration fiscale. L'administration fiscale produit une capture d'écran du rapport, généré par cette application, indiquant que le destinataire du courriel émis le 20 octobre 2016 à 11h16 a téléchargé, le 20 octobre 2016 à 20h52, le fichier 2120.pdf mis à sa disposition. Ce rapport présente des garanties équivalentes à celles d'un envoi par lettre recommandée avec accusé de réception, en ce qui concerne tant la date de la notification de la proposition de rectification et de la connaissance qu'en avait le contribuable, que la confidentialité de la transmission de ce document. Ainsi, l'administration fiscale apporte la preuve de la régularité de la notification au contribuable de la proposition de rectification en cause. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées au point 4 du présent arrêt doit être écarté.
7. En second lieu, aux termes de l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées.
8. En l'espèce, la proposition de rectification adressée le 20 octobre 2016 à M. et Mme B... précise les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées, permettant aux contribuables de présenter utilement leurs observations. S'agissant, en particulier, des rectifications relatives aux réductions non imputées des années 2009 à 2013 et pour l'année 2014, le service vérificateur a détaillé à la page 2 de la proposition de rectification les circonstances de droit et les constats factuels sur lesquels il s'est fondé pour opérer les rehaussements correspondants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées au point précédent ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
9. Aux termes de l'article 199 septvicies du code général des impôts : " I. - 1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu à condition qu'ils s'engagent à le louer nu à usage d'habitation principale pendant une durée minimale de neuf ans./ Le taux de la réduction d'impôt est de :/ - 25 % pour les logements acquis ou construits en 2009 et en 2010 ;/ La réduction d'impôt est répartie sur neuf années. Elle est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure et imputée sur l'impôt dû au titre de cette même année puis sur l'impôt dû au titre de chacune des huit années suivantes à raison d'un neuvième de son montant total au titre de chacune de ces années. Lorsque la fraction de la réduction d'impôt imputable au titre d'une année d'imposition excède l'impôt dû par le contribuable au titre de cette même année, le solde peut être imputé sur l'impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement pour autant que l'immeuble soit maintenu à la location pendant lesdites années (...) ".
10. M. et Mme B... ont acquis, par acte du 23 décembre 2009, un logement en l'état futur d'achèvement dont la construction a été achevée en 2011. Il résulte des dispositions précitées que la réduction d'impôt est accordée au titre de l'année d'achèvement du logement, de sorte que les requérants ne pouvaient prétendre à aucun report de réduction d'impôt au titre des années 2009 et 2010. Il ressort, par ailleurs, de l'instruction que les requérants ont bénéficié de l'intégralité de la réduction d'impôt annuelle pour les années 2011 à 2015. Par suite, aucune réduction d'impôt non encore imputée en 2013 n'était reportable sur l'impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes.
11. Aux termes de l'article 199 sexdecies du code général des impôts : " : " 1. Lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories, ouvrent droit à une aide les sommes versées par un contribuable domicilié en France au sens de l'article 4 B pour : / a) L'emploi d'un salarié qui rend des services définis aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail ; (...) 4. L'aide prend la forme d'un crédit d'impôt sur le revenu égal à 50 % des dépenses mentionnées au 3... "
12. Les requérants indiquent contester les rectifications opérées par le service vérifateur concernant le crédit d'impôt au titre de l'année 2014 en raison de l'emploi d'un salarié à domicile. Toutefois, ils n'assortissent cette contestation d'aucun élément de nature à l'étayer.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. et Mme B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques de Seine et Marne.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- M. Marjanovic, président assesseur,
- M. Dubois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2024
Le rapporteur,
V. MARJANOVICLa présidente,
H. VINOT
La greffière,
A. MAIGNAN
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 22PA05281