Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 22 septembre 2020 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a procédé au retrait de sa décision du 8 septembre 2020 le recrutant dans le corps des inspecteurs de la jeunesse et des sports, ainsi que la décision du 31 décembre 2020 rejetant son recours hiérarchique.
Par un jugement n° 2103530/5-4 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête du 12 juin 2023, M. B..., représenté par Me Lopez-Longueville, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports du 22 septembre 2020 et la décision de rejet de son recours hiérarchique du 31 décembre 2020 ;
3°) d'enjoindre à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques de procéder à son recrutement au sein du corps des inspecteurs de la jeunesse et des sports, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, afin de le placer dans une position régulière au regard des règles statutaires applicables et de ses aptitudes professionnelles ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement contesté est insuffisamment motivé dans la mesure où il ne fait pas état des motifs pour lesquels les premiers juges ont rejeté, comme étant inopérants, les moyens soulevés à l'encontre des décisions contestées ;
- les décisions contestées méconnaissent l'autorité de la chose jugée par le jugement du tribunal administratif de Paris du 17 juillet 2020 ;
- elles méconnaissent l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 puisque sa situation devait être appréciée à la date de sa demande de recrutement dans le corps des inspecteurs de la jeunesse et des sports ;
- elles méconnaissent la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où aucune circonstance nouvelle de droit ou de fait ne justifiait qu'il soit procédé au retrait de la décision du 8 septembre 2020 le titularisant ;
- elles méconnaissent le caractère rétroactif de l'annulation prononcée par le jugement du tribunal administratif de Paris du 17 juillet 2020 ;
- elles sont entachées de détournement de pouvoir, dans la mesure où il est un lanceur d'alerte.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2024, la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a sollicité, le 19 février 2019, en tant que bénéficiaire de l'obligation d'emploi, son intégration dans le corps des inspecteurs de la jeunesse et des sports (IJS). Par une décision du 30 juillet 2019, la ministre des sports a refusé de procéder à son recrutement. Par un jugement n° 1918019 du 17 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports de procéder dans un délai de deux mois au recrutement de M. B... dans le corps des IJS. Par une décision du 8 septembre 2020, le ministre a procédé à ce recrutement à compter du 1er octobre 2020. Ayant été informé le 10 septembre 2020 que M. B... était recruté dans le corps des professeurs de lycée professionnel à compter du 1er septembre 2020, le ministre a, le 22 septembre 2020, retiré sa décision. Le 22 octobre 2020, M. B... a exercé un recours hiérarchique à l'encontre de ce retrait, lequel a été rejeté le 31 décembre suivant. Par un jugement du 14 avril 2023, dont M. B... fait appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions des 22 septembre 2020 et 31 décembre 2020.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision parait susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement (...) en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent (...) présenter leurs observations sur le moyen communiqué ". Le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a motivé sa décision de retrait par le fait que M. B... ayant " acquis la qualité de fonctionnaire ", ceci faisait " obstacle à (son) recrutement sur le fondement des dispositions (...) de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 ". Par suite, les premiers juges n'ont fait que déduire de ce motif que le ministre se trouvait en situation de compétence liée pour prendre la décision en litige et ainsi écarter l'ensemble des moyens soulevés à son encontre comme inopérants. Ce faisant, ils n'ont pas relevé d'office un moyen, mais se sont bornés à exercer leur office. Ils n'étaient dès lors pas tenus de communiquer, comme moyen d'ordre public, l'existence de cette compétence liée. Le moyen tiré de ce que le jugement serait à ce titre irrégulier doit donc être écarté.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Les premiers juges ont relevé que la compétence du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports étant liée par la titularisation de M. B... en qualité de professeur de lycée professionnel, celui-ci était tenu de procéder au retrait de la décision recrutant l'appelant dans le corps des IJS. Or, ce seul motif suffisait à caractériser l'inopérance des autres moyens soulevés à l'encontre de cette décision. Ils ont ainsi suffisamment motivé leur jugement. Le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit donc être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article 20, dans sa version applicable, de la loi susvisée du 11 janvier 1984 : " (...) les nominations sont prononcées dans l'ordre d'inscription sur la liste principale, puis dans l'ordre d'inscription sur la liste complémentaire. S'il apparaît au moment de la vérification des conditions requises pour concourir, laquelle doit intervenir au plus tard à la date de la nomination, qu'un ou plusieurs candidats déclarés aptes par le jury ne réunissaient pas lesdites conditions, il peut être fait appel, le cas échéant, aux candidats figurant sur la liste complémentaire (...) ". Aux termes du II. de l'article 27 de cette même loi , dans sa version applicable,: " Les personnes mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du corps dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. Les dispositions de l'alinéa précédent s'appliquent aux catégories de niveau équivalent de La Poste, exploitant public créé par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application des deux alinéas précédents, notamment les conditions minimales de diplôme exigées pour le recrutement en qualité d'agent contractuel en catégories A et B, les modalités de vérification de l'aptitude préalable au recrutement en catégorie C, les conditions du renouvellement éventuel du contrat, les modalités d'appréciation, avant la titularisation, de l'aptitude à exercer les fonctions. Ce mode de recrutement n'est pas ouvert aux personnes qui ont la qualité de fonctionnaire (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été titularisé en qualité de professeur de lycée professionnel par un arrêté du 8 janvier 2021, avec effet au 1er septembre 2020. Par suite, l'intéressé avait déjà la qualité de fonctionnaire lorsqu'il appartenait au ministre de se prononcer sur l'injonction fixée à son encontre par le jugement du tribunal administratif de Paris du 17 juillet 2020, cité au point 1. Dans ces conditions, dès lors que l'administration devait prendre en compte la situation du demandeur au jour de sa décision, et non à la date à laquelle l'intéressé avait déposé sa demande de recrutement en tant que bénéficiaire de l'obligation d'emploi, le ministre était en situation de compétence liée, sans que puisse lui être opposée l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Paris le 17 juillet 2020, pour refuser de recruter M. B... dans le corps des IJS. Aussi, les moyens tirés de la violation de l'article 27 précité de la loi du 11 janvier 1984 et de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, de l'erreur manifeste d'appréciation, de la méconnaissance du caractère rétroactif du jugement du 17 juillet 2020 et du détournement de pouvoir doivent être écartés comme inopérants.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 septembre 2020 et du rejet de son recours hiérarchique du 31 décembre 2020. Par conséquent, sa requête doit être rejetée, en ce compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques.
Délibéré après l'audience du 7 mai 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mai 2024.
La rapporteure,
L. d'ARGENLIEULa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne à la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA02553