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23/04/2024 | FRANCE | N°23PA05161

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 23 avril 2024, 23PA05161


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2023 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son certificat de résidence et de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.



Par un jugement n° 2318998/2-2 du 13 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2023 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son certificat de résidence et de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné, et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2318998/2-2 du 13 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2023, et un mémoire, enregistré le 2 février 2024, M. B..., représenté par Me Menage, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Paris du 13 novembre 2023 en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre la décision lui refusant un certificat de résidence ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 juillet 2023 par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler son certificat de résidence et de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans, ou, à défaut, de renouveler son certificat de résidence mention " commerçant ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, pendant ce réexamen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision refusant le renouvellement de son certificat de résidence est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen complet de son dossier ;

- elle est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale, le préfet de police ayant irrégulièrement consulté le fichier du traitement des antécédents judiciaires (TAJ) ;

- elle est entachée d'erreur de fait et d'erreur de droit au regard de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sa présence en France ne constituant pas une menace pour l'ordre public ;

- elle repose, compte tenu de la durée de sa présence en France, sur une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en ce qu'elle lui refuse la délivrance d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans, elle méconnait en outre l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 septembre 1968.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2024, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 septembre 1968;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- et les observations de Me Menage, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien, né le 12 mars 1972 à Bejaia (Algérie), qui a déclaré être entré en France le 15 octobre 2003, a été titulaire de plusieurs certificats de résidence, mention " salarié " ou " commerçant ", entre le 10 novembre 2016 et le 30 novembre 2021. Il en a, le 8 décembre 2021, sollicité le renouvellement, et a alors demandé la délivrance d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans, sur le fondement de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 septembre 1968. Par un arrêté du 7 juillet 2023, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a assorti sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par la suite, le préfet de police lui a, le 25 juillet 2023, délivré un récépissé de demande de titre de séjour valable jusqu'au 24 octobre 2023. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2023. Il fait appel du jugement du 13 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de la motivation de la décision du 7 juillet 2023 par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler le certificat de résidence de M. B... et de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans, et de l'absence d'examen complet de son dossier, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale : " I. - Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, (...) les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : 1° Les personnels de la police et de la gendarmerie habilités selon les modalités prévues au 1° et au 2° du I de l'article R. 40-28 ; / (...) / 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat. L'habilitation précise limitativement les motifs qui peuvent justifier pour chaque personne les consultations autorisées. Lorsque la consultation révèle que l'identité de la personne concernée a été enregistrée dans le traitement en tant que mise en cause, l'enquête administrative ne peut aboutir à un avis ou une décision défavorables sans la saisine préalable, pour complément d'information, des services de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d'information sur les suites judiciaires, du ou des procureurs de la République compétents. Le procureur de la République adresse aux autorités gestionnaires du traitement un relevé des suites judiciaires devant figurer dans le traitement d'antécédents judiciaires et relatif à la personne concernée. Il indique à l'autorité de police administrative à l'origine de la demande si ces données sont accessibles en application de l'article 230-8 du présent code (...) ".

4. Pour refuser de délivrer un certificat de résidence à M. B..., le préfet de police s'est fondé sur la circonstance qu'il a été condamné le 27 juin 2022 par le président du tribunal judiciaire de Beauvais à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et 1 000 euros d'amende pour aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France, exécution d'un travail dissimulé et emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié, et sur la circonstance qu'il était défavorablement connu des services de police pour des faits d'infraction aux conditions générales d'entrée et de séjour des étrangers, commis le 7 octobre 2011.

5. Dès lors que les dispositions citées ci-dessus prévoient la possibilité que certains traitements automatisés de données à caractère personnel soient consultés au cours de l'enquête conduite par l'administration dans le cadre de ses pouvoirs de police, préalablement à la décision portant refus de titre de séjour, la circonstance que l'agent ayant procédé à cette consultation n'aurait pas été, en application des dispositions également citées ci-dessus du code de procédure pénale, individuellement désigné et régulièrement habilité à cette fin, si elle est susceptible de donner lieu aux procédures de contrôle de l'accès à ces traitements, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'irrégularité la décision prise. Il en va de même de l'absence d'information par le procureur de la République sur les suites judiciaires.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".

7. Compte tenu de de la gravité et du caractère récent des faits qui ont donné lieu à la condamnation prononcée le 27 juin 2022, rappelée ci-dessus, à la date de la décision attaquée, c'est sans entacher sa décision d'erreur de droit ou d'erreur de fait que le préfet de police a estimé que la présence en France de M. B... constituait une menace pour l'ordre public, la circonstance que cette condamnation ne figure pas au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé, étant sans incidence à cet égard.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

9. Si M. B... soutient qu'il réside en France depuis 2003, les pièces qu'il produit ne permettent pas d'établir sa résidence habituelle sur le territoire français avant l'année 2011. Il ne conteste pas que son épouse réside en Algérie. Dans ces conditions, et compte tenu de la menace que sa présence représente pour l'ordre public, la décision refusant le renouvellement de son certificat de résidence ne peut être regardée comme ayant porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations citées ci-dessus, ni comme reposant sur une appréciation manifestement erronée.

10. En dernier lieu, le moyen tiré d'une violation de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 septembre 1968 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Bonifacj, présidente de chambre,

M. Niollet, président-assesseur,

Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 avril 2024.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°23PA05161


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA05161
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : MENAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-23;23pa05161 ?
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