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19/03/2024 | FRANCE | N°23PA00400

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 19 mars 2024, 23PA00400


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui accorder le bénéfice du regroupement familial au profit de son fils.



Par un jugement n° 2103768/3-3 du 29 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 27 janvier 2023, Mme A..., repr

ésentée par Me El Amine, demande à la Cour :



1°) d'annuler le jugement n° 2103768/3-3 du 29 novembre 2023 du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 décembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui accorder le bénéfice du regroupement familial au profit de son fils.

Par un jugement n° 2103768/3-3 du 29 novembre 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2023, Mme A..., représentée par Me El Amine, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2103768/3-3 du 29 novembre 2023 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police d'autoriser le regroupement familial sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que l'arrêté du 11 décembre 2020 portant refus de regroupement familial méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 juillet 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme d'Argenlieu a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante guinéenne née le 20 décembre 1968 et entrée en France en 2006 selon ses déclarations, a sollicité le 17 janvier 2020 le bénéfice du regroupement familial pour son fils E... C... B..., né le 29 août 2004. Par un arrêté du 11 décembre 2020, le préfet de police a refusé de faire droit à cette demande. Par un jugement du 29 novembre 2022, dont Mme A... fait appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable et désormais codifié à l'article L. 434-2 : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins un an, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans".

3. D'une part, il résulte des dispositions citées au point 2 que le regroupement familial doit concerner, en principe, l'ensemble de la famille du ressortissant étranger qui demande à en bénéficier et qu'un regroupement familial partiel ne peut être autorisé que si l'intérêt de l'enfant au bénéfice duquel la mesure de regroupement est sollicitée le justifie. D'autre part, il résulte des mêmes dispositions que, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit de rejeter la demande dans le cas où l'intéressé ne justifierait pas remplir l'une ou l'autre des conditions légalement requises, notamment en cas de présence anticipée sur le territoire français du membre de la famille bénéficiaire de la demande. Il dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par les dispositions précitées, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit du demandeur de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou lorsqu'il est porté atteinte à l'intérêt supérieur d'un enfant tel que protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.

4. Il n'est plus contesté qu'à la date de la décision en litige, Mme A... ne remplissait pas les conditions prévues à l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour pouvoir bénéficier du regroupement familial. Pour autant, Mme A... soutient que le refus qui lui est opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale, dans la mesure où il a pour effet de maintenir la cellule familiale séparée, sa fille aînée vivant en France depuis le 21 décembre 2010, et son fils cadet l'ayant rejointe sous couvert d'un visa valant titre de séjour du 12 septembre 2022, soit postérieurement à la décision en litige. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, deux des trois enfants de Mme A... vivaient encore en Guinée avec leur père. Par ailleurs, il est constant que l'appelante n'a présenté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son dernier enfant, qui n'était âgé que de deux ans lorsqu'elle s'est installée en France en 2006, que le 17 janvier 2020, soit quatorze ans après son arrivée sur le territoire national, sans toutefois s'expliquer sur les raisons d'un tel délai. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

5. En second lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un refus d'autorisation de regroupement familial, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de ce que le refus opposé à la demande de regroupement familial déposée par Mme A... pour son dernier enfant méconnaitrait les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEU

La présidente,

J. BONIFACJ La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA00400


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00400
Date de la décision : 19/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : EL AMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-19;23pa00400 ?
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