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17/10/2023 | FRANCE | N°23PA01924

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 17 octobre 2023, 23PA01924


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé.

Par un jugement n° 2215167 du 6 avril 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requ

te, enregistrée le 9 mai 2023, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 20 juillet 2023, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé.

Par un jugement n° 2215167 du 6 avril 2023, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mai 2023, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 20 juillet 2023, M. C..., représenté par Me Caoudal, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 6 avril 2023 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- il est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors qu'en l'absence de production de l'avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), il n'est pas établi que le médecin rapporteur ayant rédigé le rapport médical relatif à son état de santé n'a pas siégé au sein du collège de médecin de l'OFII, que le collège a délibéré de manière collégiale, et que les signatures des trois médecins signataires de l'avis sont authentiques ;

- il est entaché d'erreur de droit, dès lors que le préfet s'est estimé lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII ;

- il méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a présenté des observations le 18 septembre 2023.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 27 septembre 2023, M. C... conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Niollet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant malien né le 31 décembre 1981 à Bamako (Mali), déclare être entré en France en octobre 2018. Il a obtenu un titre de séjour pour raisons de santé, valable du 4 février au 3 août 2021. Il en a, le 6 août 2021, sollicité le renouvellement. Il a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai. M. C... fait appel du jugement du 6 avril 2023 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, M. C... n'est, pour les motifs retenus par les premiers juges qu'il a lieu d'adopter, pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux ne serait pas suffisamment motivé, ni que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait abstenu de procéder à l'examen sérieux de sa situation personnelle et se serait cru lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 de ce code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) ". Aux termes de l'article R. 425-13 de ce code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis du collège des médecins de l'OFII du 10 décembre 2021 et de son bordereau de transmission, que le rapport médical relatif à l'état de santé de M. C... a été établi le 29 novembre 2021 par le Docteur D... B..., sur la base d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement, et a été transmis, le 30 novembre de la même année, au collège des médecins de l'OFII, composé des Docteurs Westphal, Ruggieri et Ortega, tous régulièrement désignés par une décision du directeur général de l'OFII du 1er octobre 2021 publiée sur le site Internet de l'office et au bulletin officiel du ministère de l'intérieur. Il ressort en outre de ces pièces que le Docteur B... ne faisait pas partie du collège. L'avis du 10 décembre 2021 comporte par ailleurs les signatures des trois médecins composant le collège, dont aucune circonstance particulière ne permet de remettre en cause l'authenticité. Enfin, la circonstance que les réponses des médecins composant le collège, aux questions prévues à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, visé ci-dessus, n'aient pas fait l'objet d'échanges, oraux ou écrits, entre eux, est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis. Le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis doit, par suite, être écarté.

5. En troisième lieu, pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. C..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a estimé que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays, à destination duquel il peut voyager sans risque. Il ressort en effet des certificats médicaux produits en première instance et du rapport médical du médecin rapporteur de l'OFII produit en appel, que M. C... souffre d'une pathologie urologique chronique avec hématurie et bilharziose nécessitant un traitement médicamenteux à base de praziquantel, ainsi qu'un suivi en urologie et infectiologie, réalisé au sein du service d'urologie et des maladies infectieuses de l'Hôpital Tenon à Paris, où il a été opéré, le 7 juin 2019, pour une résection des lésions de l'urètre, et, le 1er octobre 2020 et le 15 juillet 2021, pour deux résections trans-urétrales de la vessie. S'il allègue que son suivi médico-chirurgical ne serait pas disponible dans son pays, et produit en ce sens un certificat médical établi par son médecin généraliste le 17 janvier 2023, rédigé en termes peu circonstanciés, ainsi qu'un rapport de l'Organisation des Nations Unies du 21 mai 2020 et un article du 30 novembre 2020 issu du site Internet " Maliweb " intitulé " Système sanitaire malien et crises : De la nécessité de repenser notre système ", ces documents généraux qui font état des dysfonctionnements du système de santé au Mali et de la pénurie de médecins dans le pays, ne sont pas relatifs au traitement de sa pathologie. En se référant à la nomenclature des médicaments autorisés au Mali, il n'établit pas que le praziquantel n'y serait pas disponible, alors qu'il ressort des pièces produites par l'OFII qu'il figure sur la liste des médicaments remboursables fixée par la Caisse nationale d'assurance maladie de ce pays. Il ne saurait par ailleurs en tout état de cause faire état de l'absence d'un urologue dans la seule région de Kayes dont il est originaire. Ainsi, les éléments dont il se prévaut ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII, puis par le préfet de la Seine-Saint-Denis, sur la disponibilité effective au Mali d'un traitement approprié à son état de santé. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une violation de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En quatrième lieu, et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Si M. C... se prévaut de son séjour en France depuis 2018, de la présence en France de deux de ses frères et de son oncle, ainsi que des emplois qu'il a occupés en contrat à durée déterminée et indéterminée en qualité d'agent de service au sein de cinq sociétés entre avril 2021 et janvier 2023, l'arrêté litigieux ne saurait, eu égard au caractère récent de sa présence en France et alors qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches au Mali, être regardé comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations citées ci-dessus de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle en prenant l'arrêté contesté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut par suite qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Bonifacj, présidente de chambre,

M. Niollet, président-assesseur,

M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 octobre 2023.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01924


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01924
Date de la décision : 17/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : CAOUDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-17;23pa01924 ?
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