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28/09/2023 | FRANCE | N°21PA05821

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 septembre 2023, 21PA05821


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, ainsi que de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1926414 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme B...

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 novembre 2021 et 11 avril 2023, Mme B...,

assistée de Me Elbaz, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1926414 en dat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, ainsi que de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1926414 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme B...

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 novembre 2021 et 11 avril 2023, Mme B..., assistée de Me Elbaz, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1926414 en date du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, ainsi que de contributions sociales à l'impôt sur le revenu, et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière faute pour l'administration de lui avoir notifié les fondements du redressement finalement retenu ;

- la proposition de rectification adressée en 2016 était accompagnée de CD-Rom sans que l'administration ait demandé l'accord préalable de Mme B... ;

- la procédure d'imposition de la société était irrégulière ;

- l'imposition de l'année 2016 était prescrite en 2017 ;

- elle n'était pas maitre de l'affaire ;

- compte tenu des difficultés financières de la société, il n'y a pas eu de distribution de bénéfice.

Par un mémoire, enregistré le 13 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Simon ;

- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public ;

- et les observations de Me Elbaz, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Doli, qui a pour objet la restauration asiatique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, qui a eu pour effet un rehaussement de ses bénéfices. Mme B..., sa gérante et associée à 50 % a, par voie de conséquence, à son tour fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2013 et 2014. Il en est résulté, au titre de ces mêmes années, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités. Mme B... demande à la Cour d'une part, l'annulation du jugement du 15 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de ces impositions supplémentaires, et d'autre part, le prononcé de cette décharge.

Sur la régularité du jugement :

2. Dans le cadre de l'effet dévolutif, le juge d'appel, qui est saisi du litige, se prononce non sur les motifs du jugement de première instance mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé des impositions en litige. Par suite, Mme B... ne peut utilement soutenir que les premiers juges ont entaché leur décision d'erreur de droit pour demander l'annulation du jugement entrepris.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article L. 48 du même livre : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, d'une vérification de comptabilité ou d'un examen de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai. ".

4. Les rehaussements d'impositions mise à la charge de Mme B... sont fondés sur l'article 111 du code général des impôts. En cours de procédure et à l'issue de l'entretien avec le supérieur hiérarchique, la société a obtenu l'abandon du redressement la concernant, en raison des éclaircissements apportés de nature à remettre en cause la reconstitution de chiffre d'affaires initialement retenue. Mais, selon le compte rendu de cet entretien, les représentants de la société ont reconnu une dissimulation de recettes par la société à hauteur de 53 016 euros et 69 661 euros. L'administration a alors répondu aux observations de Mme B... pour lui indiquer qu'en conséquence de l'abandon de l'évaluation des résultats de la société issu de la reconstitution du chiffre d'affaires, le redressement initial était abandonné mais que les recettes dissimulées de la société devaient être regardées comme des revenus distribués. Elle a ainsi notifié un supplément d'imposition ramené à 48 502 euros en droits sur le fondement de l'article 111 du code général des impôts. L'administration, qui a tenu compte des observations du contribuable pour réduire au cours de la procédure contradictoire, les rehaussements proposés, pouvaient l'entreprendre en réponse aux observations du contribuable, sans qu'il soit nécessaire de notifier une nouvelle proposition de rectification.

5. En deuxième lieu, la proposition de rectification adressée le 30 juin 2016, qui détaillait des impositions mises à sa charge à la suite de l'évaluation du chiffre d'affaires et des résultats de la SARL Doli, était accompagnée de la copie intégrale de la proposition de rectification adressée à la société et des copies de CD-Rom joints à celle-ci. La notification des informations contenues dans le CD-Rom n'étant pas obligatoire au stade de l'imposition de la gérante, la circonstance que l'administration n'ait pas demandé l'accord de Mme B... est sans influence sur la régularité de l'imposition alors, au demeurant, que Mme B... a contesté son redressement personnel par le seul renvoi aux observations formulées par la société à la proposition de rectification concernant celle-ci.

6. En troisième lieu, la réponse aux observations du contribuable adressée le 27 septembre 2017 à Mme B... mentionnait l'abandon du redressement de la société établi sur la base de la reconstitution de chiffre d'affaires mais elle mentionnait également la reconnaissance par la société de recettes dissimulées et le maintien partiel des rectifications proposées. Mme B... ne peut ainsi sérieusement soutenir que l'abandon des redressements serait constitutif d'une prise de position formelle de l'administration.

7. Enfin, si Mme B... soutient que la procédure d'imposition de la SARL Doli serait irrégulière, cette irrégularité, à la supposer établie, est sans influence sur la régularité de l'imposition de Mme B....

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

8. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. ". Et aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun. ".

9. L'administration a adressé le 30 juin 2016 une proposition de rectification à Mme B... concernant son imposition à l'impôt sur le revenu au titre des années 2013 et 2014, dans le délai de reprise. Cette notification a interrompu le délai de reprise qui n'était pas achevé lorsque l'administration a répondu aux observations du contribuable le 27 septembre 2017 ni lors de l'émission des avis d'impositions ultérieures. Le moyen tenant à la prescription des impositions doit ainsi être écarté.

10. Lors des opérations de contrôle de la comptabilité de la société Doli, l'administration a constaté qu'un volume important de recettes n'avait pas été enregistré, que des recettes n'étaient pas comptabilisées certains mois, que le stock était noté négatif certaines périodes et enfin que le montant de certains achats était minoré sans justification. Ces anomalies autorisaient l'administration à rejeter la comptabilité de la société sur la période vérifiée.

11. Pour reconstituer la comptabilité de la SARL Doli, l'administration s'est, dans un premier temps, appuyée sur la méthode des boissons, ainsi que sur les canards laqués vendus, ventilés par pièce, demi-pièce, parts vendus en restaurant. Compte tenu des observations produites par la société, l'administration a abandonné cette reconstitution mais s'est appuyée sur les omissions de chiffre d'affaires mises en valeur lors du contrôle et reconnues par la société. Cette méthode de reconstitution n'est ni excessivement sommaire ni intrinsèquement viciée.

12. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration est réputée apporter la preuve que des distributions occultes ont été appréhendées par la personne qui est, dans la société dont des revenus ont été regardés comme distribués, le maître de l'affaire.

13. Pour imposer Mme B... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers le montant des recettes de la société Doli dissimulées, l'administration, qui a regardé cette dernière, gérante de droit depuis sa création et détenant 50 % des parts sociales, comme maître de l'affaire, a retenu qu'elle disposait seule de la signature sur les comptes bancaires de la société, et qu'elle disposait effectivement des pouvoirs les plus étendus pour représenter la société et agir en son nom. L'intéressée s'est en outre présentée lors de la vérification de comptabilité de la SARL Doli comme son unique représentante légale et a assisté à l'ensemble des rendez-vous relatifs aux conditions d'exploitation de celle-ci. Ainsi, même si Mme B... n'est pas l'unique associée de l'entreprise, l'administration était fondée à la regarder comme maître de l'affaire. Si la requérante fait valoir qu'elle ne parlerait pas la langue française ni ne l'écrirait, cette circonstance est sans incidence sur cette maîtrise. S'il est vrai que la société était confrontée à des difficultés financières et qu'elle a été placée en liquidation judiciaire, au demeurant après les appréhensions de bénéfices, cette circonstance n'est en tout état de cause pas de nature, en l'absence de précisions, à remettre en question la présomption de distribution.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratives doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France (division juridique).

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Soyez, président,

- M. Simon, premier conseiller,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 septembre 2023.

Le rapporteur,

C. SIMONLe président,

J.-E. SOYEZLa greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05821


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05821
Date de la décision : 28/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-09-28;21pa05821 ?
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