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17/07/2023 | FRANCE | N°23PA00052

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 17 juillet 2023, 23PA00052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du 10 mars 2016 par laquelle le procureur de la République près la cour d'appel de Paris a fixé la consolidation de son état à la date du 27 octobre 2015 en lui reconnaissant un taux d'incapacité partielle de 5 %, a décidé la clôture de son dossier d'accident du travail à la date du 8 février 2016 et l'a déclarée apte à reprendre son activité professionnelle à cette même date, ainsi que de la décision du 11 av

ril 2016 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1613362 du 14 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision du 10 mars 2016 par laquelle le procureur de la République près la cour d'appel de Paris a fixé la consolidation de son état à la date du 27 octobre 2015 en lui reconnaissant un taux d'incapacité partielle de 5 %, a décidé la clôture de son dossier d'accident du travail à la date du 8 février 2016 et l'a déclarée apte à reprendre son activité professionnelle à cette même date, ainsi que de la décision du 11 avril 2016 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1613362 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 10 mars 2016 ainsi que la décision du 11 avril 2016 portant rejet du recours gracieux de Mme B..., et a enjoint à la garde des sceaux, ministre de la justice de réexaminer la situation de Mme B....

Mme B... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à obtenir l'exécution complète du jugement n° 1613362.

Par un jugement n° 2014662 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistré le 4 janvier 2023, Mme B..., représentée par Me Angot, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2014662 du 30 juin 2022 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au réexamen de son dossier, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;

- l'administration n'a pas procédé à la complète exécution du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 2017.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les conclusions indemnitaires présentées par Mme B... sont nouvelles en appel et donc irrecevables ;

- aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.

Par un courrier du 20 juin 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires présentées par Mme B..., du fait de l'absence d'une demande indemnitaire préalable.

Par un mémoire enregistré le 21 juin 2023, Mme B... a répondu à ce moyen d'ordre public.

Par une décision du 27 octobre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, à hauteur de 25 %.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Aggiouri,

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., adjointe technique affectée au Parquet du tribunal de grande instance de Paris, a été victime d'un accident de service le 28 octobre 2014. Par un jugement du 14 décembre 2017, devenu définitif, le tribunal administratif de Paris a annulé, d'une part, la décision du 10 mars 2016, par laquelle le procureur de la République près la cour d'appel de Paris a fixé la consolidation de son état à la date du 27 octobre 2015 en lui reconnaissant un taux d'incapacité partielle de 5 %, l'a jugée apte à reprendre ses fonctions à temps complet le 8 février 2016 et a clôturé son dossier d'accident de service à cette dernière date, ainsi que la décision du 11 avril 2016 portant rejet de son recours gracieux et, d'autre part, a enjoint au garde des Sceaux, ministre de la justice de réexaminer sa situation. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'assurer l'exécution complète de ce jugement. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur l'exécution du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 2017 :

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".

3. Le tribunal administratif de Paris a relevé, dans son jugement en date du 14 décembre 2017, que la décision du procureur de la République près la cour d'appel de Paris en date du 10 mars 2016 était entachée d'une erreur d'appréciation, dès lors que Mme B... n'était pas apte à reprendre son activité professionnelle à temps complet. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de ce jugement, le comité médical supérieur a émis, le 6 juin 2018, un avis défavorable à l'octroi d'un congé de longue maladie à compter du 8 février 2016. Puis, le 11 juin 2018, le comité médical ministériel a émis un avis favorable à la mise en disponibilité d'office de Mme B... pour une durée de six mois à compter du 8 août 2018. Enfin, le 10 septembre 2018, la commission de réforme ministérielle a estimé que la rechute n'était pas en lien avec l'accident de service du 28 octobre 2014 et que Mme B... était apte à reprendre ses fonctions à temps partiel thérapeutique à 50 % pour une durée de trois mois. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction qu'une décision aurait été prise fixant la date de consolidation de l'état de santé de Mme B..., son taux d'incapacité partielle, et la date à laquelle elle était apte à reprendre ses fonctions, y compris à titre rétroactif, et tenant compte du motif d'annulation de la décision du 10 mars 2016, tiré de l'erreur d'appréciation dont était entachée cette décision. Ainsi, Mme B... est fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 14 décembre 2017 n'a pas fait l'objet d'une complète exécution. Dans ces conditions, et en l'absence de toute difficulté d'exécution établie ou même invoquée par le garde des sceaux, ministre de la justice, il y a lieu de prononcer à l'égard du garde des sceaux, ministre de la justice, à défaut pour lui de justifier de cette exécution dans un délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, jusqu'à la date à laquelle le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1613362 du 14 décembre 2017 aura reçu exécution.

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Si Mme B... demande la condamnation de l'Etat au versement d'une somme de 5 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis, elle n'a pas introduit de demande indemnitaire préalable. Par ailleurs, les conclusions indemnitaires ainsi présentées sont nouvelles en appel. Par suite, ces conclusions doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de Mme B..., Me Angot, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Angot renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2014662 du 30 juin 2022 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'égard du garde des sceaux, ministre de la justice, s'il ne justifie pas, dans les trois mois à compter de la notification du présent arrêt, avoir exécuté dans les conditions fixées au point 3 du présent arrêt, le jugement n° 1613362 du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de Paris. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, jusqu'à la date à laquelle le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1613362 du 14 décembre 2017 aura reçu exécution.

Article 3 : Le garde des sceaux, ministre de la justice communiquera à la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera au conseil de Mme B..., Me Angot, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vrignon-Villalba, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Aggiouri, premier conseiller,

- M. Perroy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2023.

Le rapporteur,

K. AGGIOURI

La présidente,

C. VRIGNON-VILLALBALa greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23PA00052 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA00052
Date de la décision : 17/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : ADP AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-17;23pa00052 ?
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